Psyché n°398

Réflexions sur le temps et l’espace

Le Temps et l'Espace (et leur lien le mouvement), sont les éléments primordiaux à.l'aide desquels notre mental classifie les créatures et auxquels sont soumis nécessairement tous les êtres élémentaires.

Le Temps est à l'Espace ce que 1e Verbe est à la Substance, avec cette différence qu'ils sont seulement des masques déguisant la vie et la matière.

Le mot hébraïque qui rend 1'idée de temps est " WhôD ".

Ce terme, formé du signe des choses sensibles (Wh) et de celui de la distinction (D), exprime très bien, dans son acception abstraite, l'essence même du Temps, telle que nous en développons plus loin le concept.

Fabre d'OLIVET, 1’auteur qui, à notre connaissance, a pénétré le plus profondément dans le sanctuaire Essénien, a écrit dans un ouvrage remairquable, La Langue hébraïque restituée :

" Le Temps, dont nous avons la notion intellectuelle, est une mesure de la vie. L'Espace, dont nous avons la perception sensorielle, est une mesure de la matière... Donnez un autre mouvement à la vie, vous changerez le Temps, modifiez le mouvement de la matière, vous changerez l'Espace ".

Si la matière était supprimée, il n'y aurait plus d'Espace. Si l'énergie l'était, il n'y aurait plus de temps. Le mouvement dont se revêt la matière exprime les relations de celle-ci avec l'Energie.

Le Temps n'est pour nous qu'un ordre intervallaire entre deux modes d'existence. Ce qui le rend irréversible, ce n'est pas son essence, comme Mesure, c'est l'être, comme Cyclique dans ses manifestations phènoméniques. En d'autres termes, nous observons la matière et nous l'appelons Espace, nous décomposons ses stades évolutifs sous l'influence de la Vie, et nous les appelons Temps.

Aussi, les causes de ce que nous appelons Temps, sont aux fondements de ce que nous nommons Espace (dans le monde élémentaire), ce que le Verbe est à la Substance, dans le monde intelligible.

Ce n'est pas le Temps, entité métaphysique, qui précipite le déclin des choses ou en amène l'épanouissement, mais ce sont les phases de ce phénoménisme que nous baptisons Temps. L'antithèse du Temps et de l'Espace est celle du " devenir " et du " durer ", pour employer la terminologie expressive de l'auteur de la Mathèse. D'autre part, toute particularisation spartiale est une forme dont le rapport avec le reste de l'espace constitue un lieu ; ce qui peut faire considérer l'espace en général comme étendue matérielle, et en particulier comme lieu. De même, toute particularisation temporelle est une période, dont la relation avec l'ensemble des temps se détermine comme date ou époque, ce qui peut faire envisager le temps, universellement, comme durée, et particulièrement, comme époque. La durée est complémentaire de l'étendue, comme la date l'est du lieu. Leur relation est le rythme ou mouvement.


Un tableau résumera et coordonnera ces correspondances :

Adaptations

Vie
Verbale

Forme Substancielle

Mouvement
Relatif

Création

Verbe

Substance

Lumière

Parole

Voyelle

Consonne

Timbre

Langage

Parole

Ecriture

Geste

Magie occidentale

Incantation

Pantacle

Rite

Magie orientale

Mantram

Schema

Postures

Facultés divines

Eternité

Infini

Ubiquité

Facultés élémentaires

Temps

Espace

Mouvement

Arts

Musique, Poésie

Dessin, Sculpture

Danse, mimique

Questions directes

Qui ?

Quoi ?

Pourquoi ?

Questions réflexes

Quand ?

Où ?

Comment ?

Principes

Liberté

Nécessité

Liberté relative

Le " durer ", est cette tendance de la matière à résister au mouvement, cette énergie centralisante par laquelle la matière subsiste telle entre deux modifications temporelles, et dont l'Espace est la résultante sur nos sens.

Le " devenir ", est cette faculté, découlant de la spontanéïté de la vie, qui la pousse à assumer la matière à des modes de plus en plus analogues à elle-même, à lui communiquer sa liberté. Les modifications des formes matérielles sous cette influence assimilante se traduisent par des mouvements, qui se déroulent selon un rythme d'adaptation que nous nommons Temps. L'évalution biologique en résulte.
" Durer " et " devenir " s'opposent, cherchant à se surmonter mutuellement. Au début, le premier triomphe, et l'espace matériel tend á la minéralité.

Mais le Temps l'émiette, comme la mer les falaises, et libére ce qui était enchaîné : " Durer ", espace, matière et nécessité, s'enchaînent comme " devenir ", temps, vie, et liberté.

Ceux qui ont assimilé le Temps à la force centripête ou caïnique, ont mal saisi son rôle. Par lui, tout se matérialise et porte ses fruits, mais c'est par lui que tout, également, se dématérialise et évolue. La relation du temps avec la vie (expansive par essence) est facile à concevoir. Une preuve de notre assertion sur la modification du temps, toujours en rapport avec celle d’un mode de vie, c'est l'état de rêve où, en quelques secondes d'horloge, se déroulent des scènes embrassant une période qui semble durcr plusieurs heures. De même, en changeant le mouvement de la matière on transmute l'espace, comme l'étude des états de cette matière et de son passage à l'état radiant, puis éthérique, etc..., le laisse à penser. Il n'y a d'énergies, de forces, que temporelles (dans le monde élémentaire). Cela se conçoit puisque toutes les énergies viennent du Verbe, dont nous avons noté le rapport avec le Temps.

Si la matière subsiste dans le Temps, c'est qu'elle est soutenue par l'énergie verbale. Tel est un des aspects du rôle du Verbe, envisagé comme conservateur. Mais, par contre, son mode spatial propre, antithétique à l'action du Verbe, suffirait à nous éclairer sur son origine, sa caducité, et l'événement qui lui donna naissance. Ceci fera l'obfet de développements plus étendus, dans une étude spéciale, consacrée à la Chûte des Anges. Nous aurons assez dit, en rappelant que Satan a voulu créer sans le concours du Verbe, et que sa tentative formidable n'a été qu'un formidable échec...

Une iuste appréciation des rapports du Temps et de l'Espace, peut aider à mieux comprendre le mécanisme de la mémoire et celui de la psychométrie.

Dans la t.rinité Temps, Espace, Mouvement, le Temps correspond à l'Energie vivante ou au principe libre et spontané, l'Espace correspond à la matière inerte ou au principe nécessaire et arrêté. Le mouvement est bien leur terme médian, puisque, libre dans son point de départ, il est nécessité dans sa trajectoire, comme le rayon d'une sphère, libre par son centre et nécessité par son impact à la périphérie. La.notion de temps, par exemple, purement intellectuelle, n’existe pas pour nous en tant que durée objective, mais nous nous la retraçons grâce à la série des phénomènes que nous avons classés dans leur ordre de succession. En dehors dcs phénomènes qu'il enchaîne, le temps n'est qu'une commode abstraction mathématique. Le même raisonnement appliqué à l'espace " en soi ", le fait considérer comme une simple abstraction géométrique. A l'aide de ces deux abstractions, nous étudions les phénomènes de relation de la matière et de la vie. (D'un certaín mode de matière et d'un certain mode de vie dont nous avons conscience.)

Ce que nous appelons " la roue du temps ", n'est qu'un certain enchaînement cyclique de phénomènes, séparés par des pauses, dont l'alternance engendre de nombreux rythmes. Au centre de ce circuit existe l'éternel présent, l'énergie aux réalisations immédiates et universelles. Plus l'être se trouve éloigné du centre, plus les phénomènes sont distants, plus le chemin de la roue est long, et, par conséquent, plus le temps et l'espace ont ce caractére de nécessité qui est la loi des mondes dèchus.

De ceci, l'on pourrait inférer maint théorème psycho-physiologique sur la chute adamique, la prescience divine et la liberté humaine, etc...

Ainsi, le degré d'involution d'un monde quelconque, son stade de déchéance, pourraient être déterminés presque mathématiquement, par la façon dont le temps et l'espace s'y comportent, plus ou moins tyranniquement.

De même, cette pensée profonde :

" Le temps se mesure aux battements du coeur " ;

pourrait nous donner bien des notions vives sur l'état individuel de chaque créature, rien que par son attitude intérieure, vis-à-vis du Temps et de l'Espace.

Cette pensée nous ramène invinciblement à la grande puissance qui peut vaincre et à déjà vaincu ces deux forces fatales : le Coeur, c’est-à-dire l'Amour !

Celui dout l'amour embrassera la Création d'un seul battement de coeur, aura réduit à jamais, en ce qui le concerne, la résistance factice de ces deux serviteurs du Destin et saura s'en faire obéir instantanément.

C'est pour celui-là qu'il a été dit : " Possédez vos âmes par la patience ! "... Et nous voici de retour à l'Evangile...