Vous êtes actuellement sur le site : livres-mystiques.com © de Roland Soyer le 23/12/2008

VISAGE DU DRUIDISME

Chapitre IV


 

IRSHU : ORIGINE ET DEVELOPPEMENT DU SECOND SCHISME

 

Rama avait organisé le monde indo-iranien selon ses principes. S'étant retiré ensuite au Tibet, il y acheva son existence sans jamais plus paraître en public. De cette façon, seul, son entourage sacerdotal immédiat eut connaissance de sa mort qui, selon ses instructions, fut tenue secrète — précaution nécessaire pour que son œuvre lui survive. Lorsqu'il devint, après des siècles, une figure légendaire, on en fit le héros d'un cycle épique et initia­tique. Et je dois dire ici que les deux héros des sixième et sep­tième Avatars de Vishnu, Paraçu-Rama et Rama-Chandra, sont un dédoublement mythique de sa personnalité et non deux per­sonnages historiquement distincts.

Longtemps après lui, la liaison se maintint entre les Celtes expatriés en Asie (les « Aryas ») et ceux demeurés en Celtide. Eloignés de leur patrie ancestrale, les premiers n'en étaient pas « coupés » : bien souvent, au cours de ces siècles, tantôt des clans, tantôt des émissaires religieux ou politiques firent la navette entre l'est et l'ouest ; les uns introduisant parfois chez les autres des objets matériels en même temps que les termes dont ils les dési­gnaient, car, insensiblement, leur langage et leur mode d'existence se transformaient.

 

 

Vers le cinquième millénaire, le retrait définitif des glaciers est un fait accompli. Ils laissent derrière eux de vastes étendues lacustres ou marécageuses, peu praticables mais qui, s'asséchant lentement, allaient bientôt ouvrir aux migrations asiates le che­min de l'Occident.

Déjà se dessine une première dialectisation du monde celtique : Proto-indo-iraniens et proto-scytho-slaves vont former le groupe linguistique assibilant, dit de Satem, en face du groupe dit de Kentum (gaul. Canton), ainsi désignés d'après leur « schibbo-leth », la prononciation du nom de nombre « cent ».

Ce dernier groupe est lui-même fortement différencié : les Proto-Germains, particularistes et nomades, errent entre la Russie d'Europe et la Finlande , proches des Scandinaves ; ceux qui conserveront le nom de « Celtes » ou prendront celui de « Gau­lois », tiennent l'ouest de l'Europe et le Haut-Danube. Dans le sud et le sud-ouest, les Noirs, en régression, perdent presque partout du terrain et partout du prestige, s'assimilant ici, se subordonnant là, décampant ailleurs, remplacés ou continués dans les parages circum-méditerranéens et sur le sol du Proche-Orient par des Celtes ou par les populations mixtes, nées de leurs métissages avec les Atlanto-Egéens et avec les Blancs.

Le monde égéen, lui, est par contre en pleine ascension ; sa caste supérieure est à dominante rouge, même chez les Phéni­ciens, déjà fortement sémitisés. Ses comptoirs et ses colonies débordent sur la Petite-Asie et sur l'Afrique du Nord où, là encore, les Noirs reculent et régressent. Les Proto-Libyens, dont j'ai déjà touché quelques mots, viennent de secouer leur joug, au seuil de ce cinquième millénaire, et, parallèlement aux Rouges, subjuguent à leur tour l'Afrique septentrionale et empiètent sur la vallée du Nil, ou du moins sur le Delta.

Pendant ce temps, parmi les Celtes d'Europe, les disputes vont leur train, déterminant de nouveaux exodes de mécontents.

Du point de vue du druidisme, il est facile de se représenter les trois partis qui se formaient : deux intransigeants, celui des « druidesses » usurpatrices et celui des druides authentiques, fidèles à la tradition revivifiée et réadaptée par Rama, et un troisième, qui ne manque jamais dans les temps troublés, à quelque époque qu'on se place, louvoyant entre les deux extrêmes. C'était celui des « conciliateurs » chèvres-choux, qui cherchaient une issue dans des compromis doctrinaux et édifiaient un « drui­disme » éclectique, toléré par les druidesses dont il faisait le jeu, mais sans autorité effective sur elles, bien entendu !

Vers le milieu du cinquième millénaire peut se placer le Diluvium du Proche-Orient, dont il est inutile de détailler les causes, d'ordre avant tout climatérique. De l'ouest de la Perse à l'Egypte, en passant par la Mésopotamie , l'inondation rasa tout sur son passage. Elle dura peu. Le flot à peine écoulé, ce fut une ruée sur les régions désertiques : les Sumériens se réinstallèrent en force en Babylonie, flanqués et, peu à peu, infiltrés d'Akkadiens sémitiques qui devaient finir par les supplanter. Les Egéens, eux, encadrant des Sémites, lancent à l'instigation des Atlantes de l'Atlas repliés parmi eux et continuateurs de la tradition Rouge, l'expédition de Nar-Mer sur le delta (— 4200 environ).

D'autres Sémites nomades, venus par l'Arabie, les avaient pré­cédés de peu dans la vallée du Nil, tandis que les Libyens pre­naient position sur sa rive gauche. On sait ce qu'il en advint : Les Egéo-Atlantes rejetèrent les Sémites vers l'est et le sud-est ; les Nubiens noirs ou Nilotiques furent refoulés progressivement au-delà de Méroe, et les Libyens, ou Tehenu, surnommés par les Rouges Erz ou Ertz (= « déprédateurs ») — surnom dont ils se firent un titre de gloire — durent se replier vers l'ouest.

C'est ainsi que les derniers porte-flambeaux de la tradition atlante fondèrent, avec Nar-Mer et ses successeurs, un empire théocratique, sagement organisé et hiérarchisé, basé sur des prin­cipes  et  des  sciences   aussi  orthodoxes   dans  leur  ordre  que l'avaient été, dans le leur, ceux du druidisme rénové par Rama. Et, deux siècles à peine après la conquête du Nar-Mer, l'on sculpte le grand Sphinx de Gizeh, Hor M'Akhwti, symbole de l'aspect du Verbe divin saisi par les initiés. Ce que sera Sparte, l'incomprise, la calomniée, face à l'anarchie hellénique, trois millénaires plus tard, l'Egypte l'est, dès cet instant, face aux désordres et aux déprédations des schismatiques libyens et sémites. Nous pouvons maintenant ramener notre attention sur l'Inde. Etendu et formé d'éléments hétérogènes, dont une partie supportait impatiemment la suprématie et la domination, pourtant débonnaire, des Blancs, l'empire ou la confédération fondée par Rama touchait à sa fin. Vers — 3300 (— 3210, selon la chronologie « normalisée » des Hindoux), il allait subir le plus terrible des orages. Un prince, dont le vrai nom ne fut plus jamais prononcé et que nous ne connaissons que par son surnom, Irshu, c'est-à-dire « le Jaloux », convoitait le pouvoir détenu par son frère aîné. Pour supplanter celui-ci, il lui eut fallu l'appui du sacerdoce, chose impensable. La fonction royale, d'ordre temporel, n'était à l'abri des compétitions que par la sanction religieuse, qui la légitimait et qui, seule, rendait inviolable celui qui l'exerçait. Irshu ne l'ignorait pas, mais n'ignorait pas davantage (en tant qu'éventuel héritier du trône, instruit en conséquence par les druides) la mission de Rama et le schisme qui l'avait provoquée.

Usurper le pouvoir sans motif plausible et par la seule force des armes n'était pas à tenter : personne ne l'eût suivi ! Aussi, pour triompher d'un ordre spirituel qui contrecarrait ses ambi­tions, c'est sur ce même plan, spirituel et religieux, qu'il lui fallait se placer [1]. Opposant système à système, il n'hésita pas à reprendre à son compte la vieille et toujours vivace hérésie des druidesses ; la supériorité prétendue de la Mère sur le Père ou, en style sacerdotal et symbolique, du principe Deux sur le prin­cipe Un.

La couleur emblématique du sacerdoce fondé par Rama (et conservée par les druides d'Europe) était le Blanc. Il lui opposa la couleur rouge et pourpre, que les Phéniciens, qui adoptèrent très tôt ses idées, rendirent assez célèbre, comme le dit Fabre d'Olivet, fort bien renseigné sur ce point.

Lors de la première révolte, les druidesses schismatiques avaient conservé la couleur blanche, tout comme les orthodoxes, et pris comme emblème ou signe de ralliement la vache (ou schématiquement ses cornes), le croissant lunaire et la colombe. Le second schisme y ajouta, outre le changement de couleur, le taureau, l'étoile (symbole de Vénus) ainsi que les attributs de la féminité plus ou moins stylisés, dont les Phéniciens allaient faire le « Signe de Tanit », assez connu.

Ayant fait appel aux adversaires ou aux dissidents de l'orthodoxie dans l'ordre spirituel et suscité un contre-sacerdoce afin de donner un sens et, si l'on peut dire, une justification à son geste, Irshu ne pouvait que s'appuyer matériellement sur ses adversaires ethniques ou politiques, et, en tout premier lieu, sur les Suméro-Dravidiens qui, en Inde comme en Babylonie, avaient gardé une dent contre les tenants d'un ordre établi à leur encontre et amené la subordination des uns et l'expatriation des autres. En Inde, par exemple, leurs divinités anciennes, Siva (inconnu des Vêdas), Indra, Ganesa, etc..., étaient étrangères aux personnifications cosmologiques des Blancs, dont les figures de proue étaient alors Brahma (BhLAGSMA-BHLAGMA) « le Lumineux » et Agni (*ONGwNI-) « le principe Igné », soit le double aspect, feu et lumière, du Verbe divin, lui-même manifestation du Principe Un.

Certes, le sacerdoce légitime avait immédiatement compris les suites incalculables de la rébellion d'Irshu sur le plan social, et de son inversion des principes premiers sur le plan spirituel. Flétri et condamné au bannissement, il quitta l'Inde avec ses partisans, horde sans cesse grossie à mesure qu'elle s'éloignait du foyer oriental de l'orthodoxie.

En style sacerdotal, cette histoire est recensée dans le Mahâ-Bhârata. Irshu y est nommé Dur-yodhana « l'Intraitable », tandis que son frère aîné (devenu ici son cousin) s'y appelle Yudhishthira 1' « inébranlable » et y porte le surnom significatif de Dharma-Râja, « le chef légitime ». Quoique la fiction (très remaniée) fasse périr le rebelle à la bataille de Kuru-Kshêtra, il n'y fut que repoussé avec les siens. Ils partirent donc vers l'ouest et trouvèrent asile, recrues, armes et oreilles complaisantes chez ceux de Babylonie et chez les Sémites qui les avoisinaient. Ayant exposé ceci, plus en détail, dans « Druides, Celtes et Gaulois », j'abrège, non sans rappeler que la Bible nomme Irshu Nemrod « Le Rebelle » (M-ROD : « se révolter ») et que la Babylonie y est appelée Erets-Nemrod : « Terre de Nemrod ».

Quand Irshu établit son quartier général à la charnière des trois parties du monde antique, plus de la moitié de l'Europe était déjà ou gagnée ou résignée au premier schisme, dont les futures Iles Britanniques (encore soudées au continent) avaient été et demeuraient le foyer. Le nord de la Gaule et une partie de l'Europe centrale renfermaient les deux plus larges îlots orthodoxes, non sans quelques enclaves adverses. Le nord de l'Inde et le Tibet, demeurés fidèles à l'esprit et à la charte de Rama se voyaient menacés et pratiquement « coupés » de l'Occident druidique.

Irshu avait donc la partie assez belle. Le monde suméro-akkadien et son environnement immédiat s'étant rallié autour de son drapeau rouge, le schisme gagna avec rapidité le cœur de l'Europe, par l'Egéide et la Thrace. Dans le monde oriental, les Mèdes touraniens (qui étaient par rapport aux Iraniens ce qu'étaient les Dravidiens (aux Aryas) s'empressèrent d'y adhérer, si bien que, quelques siècles plus tard, dans cette Inde d'où le fauteur du désordre avait été honteusement chassé, ses continua­teurs et ses émissaires, après avoir semé la zizanie entre la caste sacerdotale et celle des guerriers, réussirent à s'implanter. Minée par les luttes intestines et menacée de l'extérieur, l'Inde dut accep­ter, sinon le schisme tel quel, du moins un statut bâtard, dont on peut suivre le développement et reconnaître les indices à tra­vers les différentes sagas, souvent remaniées, qui ont servi à l'édification du cycle de Krishna. Presque partout, les orthodoxes durent se résoudre à de tels compromis pour ne pas éterniser une lutte inégale, coupée de trompeuses accalmies et où la décision finale leur semblait désespérément lointaine et incertaine. Il fallut « s'arranger » et, par suite, en Inde comme ailleurs, les archives sacerdotales furent à maintes reprises « revues et corrigées ». Mais, en Inde et ailleurs, un petit noyau d'initiés avait essayé de sauver la tradition authentique, sous le voile des « Mystères », et, parallèlement, fondèrent dans ce même but les Fraternités secrètes, afin de transmettre et conserver — pur de tout alliage — le dépôt traditionnel, extérieurement dénaturé. Innovation périlleuse, qui rendit d'inestimables services... tant qu'elle ne fut pas caricaturée par les puissances subversives, toujours aux aguets.

La première en date de ces fraternités fut l’Agarttha, « l'Intangible », dont le cercle le plus central (mieux vaut ne pas trop parler des autres) a eu le mérite de conserver, en grande partie, le testament spirituel du druidisme oriental.

Les preuves abondent de l'adoption du schisme féminin dans toute l'Asie Mineure (Carie, Lydie, Phrygie, où la Troie primitive avait été fondée vers — 3500, à l'époque approximative où les Libyens, adeptes du premier schisme, se ruaient sur la Baetique ). Partout, les auteurs anciens signalent les indices du Matriarcat, chez les Ibères comme chez les anciens Irlandais, dans la Scythie comme chez les Etrusques. En Europe orientale, Thrace et Mésie combinaient les deux schismes. Aux deux extrémités de l'Europe, la Grande Déesse allait donner son nom au Danube inférieur (Ister) et aux cours d'eau Astura d'Espagne et d'Italie. Son hiéroglyphe avait été, — d'abord en Mésopotamie — l'étoile (Vénus). Si bien que son nom d'Istar ou d'Astareth, qui signifiait proprement « la Féconde , la Prolifique », se chargea du sens « astre, étoile », qui finit par éclipser le premier. Le berbère lîhri, comme le basque Izarra, en sont des adaptations phonétiques.

Sous un autre nom : THANA/ZANA : « Dame, Maîtresse », nous la retrouvons dans le titre Thana de l'étrusque, aussi bien que dans l’Athéna des Grecs et dans la Tanit phénicienne. Ce vocable est d'origine atlanto-égéenne (disons : « méditerra­néenne »), de même que le nom le plus ancien des Etrusques : Razenna/Ratzenna « les hommes » (sous-entendu : atlantes). A l'époque historique, Etrusques et Euskariens n'avaient conservé que peu de vocables de leur langue originelle, effacée ou presque, comme leur type racial Rouge, par de successives invasions et immigrations[2].

Autre exemple de l'inversion des principes, que je ne suis pas le premier à signaler, loin de là ! Le travestissement de la Lune en divinité masculine et du Soleil en féminine. Un nom de la Lune , probablement plus ancien que le moderne Argizagi, recueilli au pays basque par Julien Vinson est Goiako : « Celui d'en-haut » ; ta-fouk-t [3] «Soleil », en berbère, est un ancien nom masculin atlante féminisé, comme le sont l'irlandais Grian, l'alle­mand Sonne, le lithuanien Saule, en nette opposition avec le celtique de Gaule où Sonnos (masc.) confirme la persistance d'un centre spirituel orthodoxe sur notre sol. Il serait facile et fasti­dieux d'allonger la liste. Restons-en là.

Et nous voici à l'aube du troisième millénaire. Le bouclier irlando-breton est en partie disloqué, prélude à l'irruption de la Manche. C'est l'époque où les Libyens fondent un port qui a fait couler pas mal d'encre chez les érudits : Tartessos.

Les Atlantes avaient un terme générique : Erts/Erdz, o pillards, déprédateurs », par lequel ils désignaient les Blancs libyens.

Comme je crois l'avoir dit, ceux-ci l'adoptèrent pour s'en faire un titre de gloire, en le modifiant à l'aide de l'article t-.

De là, les ethniques Turdètes/Turzètes, dont ils se parèrent. Tartessos (berb. RZ- « briser ») est reconnaissable dans les légendes de monnaies hyspaniques, sous la forme ILTRDS (ILI-TARDZ-ESH) « Cité (ILI) des Turdes ou Tardzes ». La péninsule était donc ibérotartesse dans le sud et l'ouest, et ibéro-euskarienne dans le nord, ce dernier conglomérat débordant alors largement sur notre Aquitaine.

Une des conséquences ethniques du nouveau schisme, essen­tiellement agressif, fut un remue-ménage, une bousculade de peuplades et de tribus, — conquérantes, déportées ou fugitives. Le drapeau sanglant de l'anarchie et du despotisme (l'une appe­lant l'autre) n'a jamais cessé depuis, sous une forme ou une autre, de flotter sur un monde déboussolé !

Si lointain que soit ce passé (et pour hypothétique qu'il puisse sembler à certains), il commande et explique les « croisades idéologiques », les « Messianismes » de tout poil et les luttes pour l'hégémonie mondiale qui se déroulent et se dérouleront sous nos yeux.

Partagerons-nous le sort des vieilles civilisations que ces convulsions firent crouler ? Nous ressaisirons-nous à temps ? Questions qu'il ne m'appartient pas de résoudre, mais qu'il n'est peut-être pas inopportun de poser !

 


[1] Il est assez suggestif de rapprocher de cette prise de position d'Irshu, la déclaration d'un de ses pairs en fait de chambardement, Trotsky, alors au faîte du pouvoir en U.R.S.S. : « Une seule personne pourrait me comprendre et me combattre efficacement, le Pape, car nous procédons des mêmes principes mais en sens inverse. »

[2] C'est la base radicale de Thana : ZE/ZA — et DE — qui forme le premier élément du nom de DE meter : « la Déesse-Mère » ou  « la Mère souveraine », surnommée DEO ; Zan est un nom égéen/de Zeus. Je signale que les Egéens avaient une sifflante particulière, entendue et transcrite différemment selon les peuples, les alphabets et les époques.

[3] Le dernier avatar du terme atlanto-égéen passé en libyque est le grec Phoibos, base Bhoig-.



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