Je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde. (Matthieu XXVIII, 20)
N'y aurait‑il dans l'Evangile que cette unique déclaration du Christ sur Lui‑même que nous croirions à la divinité de Notre Sauveur. Dieu seul en effet peut prononcer une telle parole.
Aucun fondateur de religion n'a jamais osé dire : je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde. Imaginons d'autre part l'homme le plus grand, le plus saint, représentons‑nous un ange du ciel qui aurait pour mission d'apporter l'Evangile sur la terre; quel serait son adieu à ses disciples, sa mission une fois terminée ? Il serait, de toute certitude, une exhortation à tourner vers Dieu, vers Dieu seul, leurs regards, leurs pensées, leurs résolutions. Le Christ, Lui, renvoie Ses disciples à Lui‑même; c’est Lui‑même qu'Il leur propose comme l'objet suprême de leur amour et de leur espérance : je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde. N'avait‑Il pas dit « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas » ?
C'est bien l'expérience qu'ont faite les disciples. Tant que le Christ a été avec eux, ce fut pour eux le bonheur parfait. Toutefois ce bonheur ne les réformait pas , ils le vivaient, mais ils n'ont jamais senti la présence de leur Maître comme du jour où Il les a quittés.
Désormais, e effet, leur solitude est transfigurée ; le Christ réalise pour eux Sa parole : je suis avec vous tous les jours. Et ils sont allés, eux naguère désespérés, à la conquête du monde pour leur Seigneur.
Les croyants du vingtième siècle peuvent refaire l'expérience des croyants du premier siècle. Aux uns comme aux autres le Christ dit Sa parole : « le suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde ».
Présence merveilleuse, présence ineffable, présence permanente aussi ! Quel privilège que d'avoir un ami, un ami fidèle ! Toutefois ici‑bas les plus chers amis nous quittent un jour. La mort n'épargne personne. Mais le Christ est avec nous tous les jours, par delà la vie, par‑delà la mort, par delà toutes les vies, par‑delà toutes les morts. « je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde».
Que craindre et pourquoi avoir peur quand on a auprès de soi le Seigneur des univers, le tout puissant Rédempteur, l'éternel Ami ?
C'est pourquoi, à l'heure des joies comme à l'heure des peines, dans la douleur comme dans l'espérance, dans les aurores et dans les crépuscules, nous pouvons toujours, avec une foi totale avec une confiance entière, redire la parole suprême qu'Il a dite à Celui qui L'avait envoyé . « Père, Je remets mon esprit entre Tes mains».
Il est avec nous, Lui, la force dans l’épreuve la certitude dans le combat, la paix dans la lutte, la lumière dans les ténèbres; Lui, tous les jours, jusqu'à la fin.
Ecoutons la parole de Napoléon. Comparant son règne à celui du Christ, L'Empereur, dans son exil de Sainte‑Hélène, s’exprime ainsi : « J'ai passionné les multitudes qui mouraient pour moi.... mais il y fallait ma présence, l'électricité de mon regard, mon accent, une parole de moi. Alors j'allumais le feu sacré dans les coeurs... Le Christ lui seul est parvenu à élever le coeur des hommes jusqu'à l'invisible, jusqu'au sacrifice du temps et de l'espace. Lui seul demande, à travers dix huit siècles, ce qu'il est le plus difficile d'obtenir, ce qu'un sage demande vainement à quelques amis, un père à ses enfants, une épouse à son époux, un frère à son frère, en un mot, le coeur. C'est là ce qu'il veut pour lui. Il l'exige absolument, et il y réussit tout de suite. Quel miracles A travers le temps et l'espace, l'âme humaine avec toutes ses facultés devient une annexe de l'existence du Christ. Tous ceux qui croient en lui ressentent cet amour admirable, surnaturel, phénomène inexplicable, impossible aux forces de l'homme, feu sacré dont le temps, ce grand destructeur, ne peut ni user la force ni limiter la durée. Moi, Napoléon, c'est ce que j'admire davantage, parce que j'y ai pensé souvent. Et c'est ce qui me prouve absolument la divinité du Christ ».
Il est tous les jours avec nous. Là où deux ou trois coeurs sont réunis en Son Nom, Il est là.
Et, lorsque dans le 'sentiment de notre misère, nous voudrions nous taire et fuir, c'est Lui qui nous relève et qui nous donne ce‑ qu'Il veut que nous donnions à nos frères. Il est partout avec nous, Il est ici. Il est dans les pauvres pages de ce bulletin dont mieux que personne nous sentons les insuffisances ; Il est dans les paroles de consolation, d'espérance que nous essayons de présenter comme un remède à I'immense et poignante souffrance humaine. Alors, en vérité, notre adoration devient quelque chose de très grand, car, derrière l'homme misérable à qui son indigence voudrait fermer la bouche, il y a le Christ, le Christ qui demeure à jamais.
« Voici, dit Il. je suis tous les jours avec vous ».
Le Christ est avec nous tous les jours. Mais comment Le reconnaîtrons nous ? Cette anecdote nous le rappelle .
Saint Jean Chrysostome se promenait un jour avec ses disciples aux environs de sa ville natale, quand ils virent, se dirigeant de leur côté, une pauvre veuve. A. cette époque, les veuves, qui ne pouvaient plus donner d'enfants à César, étaient l'objet d'un certain ‑m'épris. Et, quand par surcroît elles étaient pauvres, elles, ne comptaient plus pour rien. C'est ainsi que l’entendaient les disciples du Chrysostome, car ils se détournèrent. Mais le maître, les reprenant : « Mes fils, leur dit il, inclinez vous, voici Jésus Christ qui passe! »
Le Christ a dit : «Toutes les fois que vous êtes venus en aide à un malheureux, c'est à Moi que vous l'avez fait».
Emile BESSON. Janvier 1970