LVIII. APPARITIONS LORS DE LA MORT DE JESUS


Parmi les morts ressuscités, dont on vit bien une centaine à Jérusalem, il n'y avait pas de parents de Jésus. Les tombeaux situés dans la partie nord-ouest de Jérusalem étaient autrefois hors de la ville : ils y furent englobés par suite de l'agrandissement de l'enceinte. J'ai vu, dans d'autres lieux de la Terre Sainte, divers morts apparaître à leurs proches et rendre témoignage de la mission de Jésus. Ainsi, je vis Sadoch un homme très pieux, qui avait donné tout son bien aux pauvres et au Temple, et fondé une communauté d'Esséniens, se montrer à beaucoup de gens dans les environs d'Hébron.

(1) Comme le récit de la Passion ont été trop longtemps interrompu par celui des apparitions qui eurent lieu la mort de Jésus, nous donnons ici ce dernier ou plutôt les fragments que nous avons pu en recueillir d'après les communications de la Soeur, dans un moment où elle était réduite à la dernière faiblesse et toute brisée par la maladie et la participation aux souffrances au Sauveur.

Ce Sadoch avait vécu un siècle avant Jésus ; il avait été un des derniers prophètes antérieurs à l'incarnation, avait désiré ardemment la venue du Messie avec les ancêtres duquel il se trouvait en relation, et avait eu plusieurs révélations à ce sujet. D'après une vision précédente, il me semble que son âme avait été l'une des premières qui se réunirent à leur corps et qui, après l'avoir déposé de nouveau, parcoururent le pays à la suite de Jésus. Je vis d'autres morts apparaître aux disciples cachés du Seigneur et leur donner des avertissements.

La terreur et la désolation se répandirent dans les parties les plus éloignées de la Palestine, et ce ne fut pas seulement à Jérusalem que la terre trembla et que la lumière du jour s'obscurcit. A Thirza, les tours de la prison où avaient été renfermés ces captifs que Jésus délivra, s'écroulèrent ainsi que d'autres bâtiments. Dans le pays de Khaboul, beaucoup d'endroits eurent fort à souffrir. Dans la Galilée, où Jésus avait tant voyagé, je vis tomber beaucoup d'édifices, surtout les maisons des Pharisiens qui avaient le plus ardemment persécuté le Sauveur, et qui tous étaient alors à la fête ; ces maisons tombèrent sur leurs femmes et sur leurs enfants. Il y eut beaucoup de désastres autour du lac de Génésareth. Beaucoup d'édifices s'écroulèrent à Capharnaum. Les habitations des esclaves situées entre Tibériade et le jardin de Zorobabel, le centurion de Capharnaum, furent presque entièrement détruits ; le mur de rochers qui était en avant de ce beau jardin se tendit. Le lac déborda dans la vallée, et vint jusqu'à Capharnaum, qui en était éloigné d'une demi lieue. La maison de Pierre et l'habitation de la sainte Vierge en avant de la ville restèrent debout. Le lac fut dans une grande agitation : ses bords s'écroulèrent en différents endroits, sa forme changea notablement et se rapprocha de celle qu'il a aujourd'hui. Il y eut surtout de grands changements à l'extrémité sud-est, prés de Tarichée, parce qu'il y avait là une longue chaussée de pierres noires construite entre le lac et une espèce de marais, laquelle donnait une direction constante au cours du Jourdain, à sa sortie du lac. Toute cette chaussée fut détruite par le tremblement de terre.

Il y eut beaucoup de désastres à l'est du lac, au lieu où les pourceaux des habitants de Gergesa s'étaient précipités, et aussi à Gergesa, à Gerasa et dans tout le district de Chorazin. La montagne où avait eu lieu la seconde multiplication des pains fut ébranlée, et la pierre où le prodige avait été opéré se tendit en deux. Dans la Décapole, des villes entières s'6croulèrent ; en Asie, plusieurs lieux souffrirent beaucoup, entre autres Nicée, mais surtout beaucoup d'endroits à l'est et au nord-est de Paneas. Dans la Galilée supérieure, bien des Pharisiens trouvèrent leurs maisons en ruines à leur retour de la fête. Plusieurs d'entre eux en reçurent la nouvelle à Jérusalem : c'est pour cela que les ennemis de Jésus furent si peu entreprenants contre la communauté chrétienne à la Pentecôte.

Une partie du temple de Garizim s'écroula. Il y avait là une idole au-dessus d'une fontaine, dans un petit temple dont le toit tomba dans la fontaine avec l'idole. La moitié de la synagogue de Nazareth, d'où l'on avait chassé Jésus, s'écroula, ainsi que la partie de la montagne d'où l'on avait voulu le précipiter. Beaucoup de montagnes, de vallées et de villes, furent dévastées. Il y eut plusieurs perturbations dans le lit du Jourdain par suite de toutes ces secousses, et son cours changea en beaucoup d'endroits. A Machérunte et dans les autres villes d'Hérode, tout resta tranquille : ce pays était hors de la sphère de la pénitence et de la menace, semblable à ces hommes qui ne tombèrent pas au jardin des Oliviers, et qui, par conséquent, ne se relevèrent pas.

En divers endroits où se tenaient beaucoup de mauvais esprits, je vis ceux-ci disparaître en grandes troupes au milieu des édifices et des montagnes qui s'écroulaient. Les secousses de la terre me rappelèrent les convulsions des possédés, quand l'ennemi sent qu'il doit s'éloigner. A Gergesa, une partie de la montagne d'où les démons s'étaient jetés dans un marais avec les pourceaux, roula dans ce marais ; et je vis alors une multitude de mauvais esprits se précipiter dans l'abîme, semblable à un nuage sombre.

C'est à Nicée, si je ne me trompe, que je vis un événement singulier dont je ne me souviens qu'imparfaitement. Il y avait là un port couvert de vaisseaux, et, prés de ce port, une maison avec une tour élevée, où je vis un paien qui était chargé de surveiller ces vaisseaux. Il devait monter souvent à cette tour et regarder ce qui se passait en mer. Ayant entendu un grand bruit au-dessus des vaisseaux du port, il monta en hâte pour voir ce qui arrivait, et il vit planer sur le port des figures sombres qui lui crièrent d'une voix plaintive : “ Si tu veux conserver les vaisseaux, fais-les sortir d'ici, car nous devons rentrer dans l'abîme : le grand Pan est mort. ” Voilà ce que je me rappelle le plus distinctement des paroles que j'entendis prononcer : mais on lui dit encore plusieurs choses, on lui recommanda de faire connaître ce qu'il venait d'apprendre, lors d'un voyage de mer qu'il devait faire prochainement, et de bien recevoir les messagers qui viendraient annoncer la doctrine de celui qui venait de mourir. Les mauvais esprits étaient ainsi forcés par la puissance de Dieu d'avertir cet honnête homme et de le charger d'annoncer leur défaite. Il fit mettre les navires en sûreté, et alors un orage terrible éclata : les démons se précipitèrent en hurlant dans la mer, et la moitié de la ville s'écroula. Sa maison resta debout. Bientôt après il fit un grand voyage, et annonça la mort du grand Pan, si c'est là le nom dont on avait appelé le Sauveur. Il vint plus tard à Home, où l'on s'émerveilla beaucoup de ce qu'il raconta. J'ai su, touchant cet homme, beaucoup d'autres choses que j'ai oubliées : j'ai vu, par exemple, comment l'histoire d'un de ses voyages s était mêlée dans des récits postérieurs, à celle de l'apparition que j'ai mentionnée et avait acquis une grande notoriété, mais je ne sais plus bien comment tout cela se liait ensemble. Son nom était, je crois, quelque chose comme Thamus ou Thramus.