L'Obéissance

(MÉDITATION)

" Si je me considère, je sens, de toute part, mes limites ".   N'étant pas cause de mon être, je le dois nécessairement à un Principe qui me dépasse; je ne suis donc qu'une créature comme les autres, à qui du libre arbitre a été octroyé.

Or, si le même degré de libre arbitre était brusquement donné aux êtres soi-disant inanimés qui m'entourent, à cette plume dont je me sers pour écrire ces lignes, à la pluie qui arrose ma terre desséchée, à la source qui m'abreuve, au froment qui me nourrit, etc., que penserais-je de ces créatures, s'il leur plaisait de ne plus remplir le rôle qui leur est à chacune dévolu ?   Leur refus d'obéir me semblerait révoltant, car il produirait du désordre et occasionnerait des souffrances à moi-même et au milieu ambiant.   Ce n'est pas à elles, en effet, de juger si leur fonction est bien adéquate à leur nature et à leurs aspirations et s'il ne vaudrait pas mieux pour elles en remplir une autre, mais à Celui qui les a créées.

Or je commets la même injustice, le même défi au bon sens, quand je m'insurge contre les circonstances qui m'environnent, au lieu de m'y soumettre de bon gré; contre la profession que je suis tenu d'exercer, au lieu de m'y appliquer avec toute ma bonne volonté; contre les événements de toute sorte, au lieu de leur faire bon accueil...  Avec cette notable différence toutefois, qu'en raison de mon libre arbitre plus développé et de mes facultés plus étendues, mes désobéissances produisent, dans le milieu où j'évolue, un bien plus grand trouble.

Mon devoir absolu, celui que dicte l'équité la plus évidente, est donc de me soumettre entièrement au Principe créateur de qui je tiens mes facultés et mon existence même; je dois les utiliser selon Sa volonté et en vue du but pour lequel Il me les a données.

Ainsi, plus je serai humble et obéissant, plus je me rapprocherai de la justice et mieux j`aurai réalisé l'objet de ma destinée.   Et quand je songe que le but de celle-ci, c'est mon propre bonheur éternel, en aidant à celui des autres, je me rends mieux compte de la sottise de mes révoltes qui m'éloignent de ce bonheur et occasionnent de la souffrance à mes frères.

Emile Catzeflis