1877

Le colonel

 

 

Don Bosco, étant à Rome, traversait un jour le Corso, accompagné de son secrétaire, lorsqu'un Colonel en tenue l'aborde :

— Monsieur l'abbé, n'êtes-vous pas, Don Bosco ?

— Pourquoi cette question ?

— Je vous demande si vous n'êtes pas Don Bosco ?

— Mais encore faudrait-il savoir...

— Enfin, monsieur l'abbé, êtes-vous, oui ou non, Don Bosco ?

— Je suis, en effet, celui que vous demandez.

Don Bosco avait des raisons pour n'être pas entièrement rassuré sur les motifs d'une telle investigation, faite d'ailleurs d'un ton assez brusque.

Mais à peine a-t-il dit son nom, que le Colonel, en pleine rue, se jette à ses pieds, lui prend les mains qu'il embrasse :

— Oh ! Mon bon Père !

— Colonel, qu'avez-vous ? Que faites-vous ?

— Mais, mon bon Père, vous ne reconnaissez donc pas le petit orphelin que vous avez recueilli à..., lorsque, à la mort de ses parents, il se trouvait au milieu de la rue, seul, sans ressources, ne sachant que devenir. Pendant six années, vous lui avez donné asile, vous lui avez servi de père et de mère, et vous ne voulez pas qu'il vous dise sa reconnaissance !

—.Tiens, c'est toi, petit gamin ! fait Don Bosco en souriant, et lui, donnant une tape sur la joue. Il paraît que tu n'as pas mal fait ton chemin dans le monde ?

— Oui, en sortant du Patronage, je me suis engagé. Grâce à l'instruction que vous m'aviez fait donner, je suis devenu assez vite officier, et me voilà Colonel.

Il ne voulut pas quitter Don Bosco sans avoir obtenu la promesse formelle qu'il viendrait dîner chez lui le lendemain.

 

Il lui présenta alors sa femme et trois beaux enfants. C'était un heureux ménage, et Don Bosco rendit grâces à Notre-Dame Auxiliatrice de la protection visible qu'elle avait accordée à l'un de ses orphelins.