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11 Première annotation. Par ce mot, Exercices spirituels, on entend toute manière d'examiner sa conscience, de méditer, de contempler, de prier vocalement et mentalement, et les autres opérations spirituelles dont nous parlerons dans la suite. En effet, comme se promener, marcher, courir, sont des exercices corporels: de même les différents modes de préparer et de disposer l'âme à se défaire de toutes ses affections déréglées, et après s'en être défait, à chercher et à trouver la volonté de Dieu dans le règlement de sa vie, en vue de son salut, s'appellent exercices spirituels.
2 Deuxième annotation. Que celui qui explique à un autre le mode à tenir et l'ordre à suivre dans la méditation ou dans la contemplation, lui raconte fidèlement l'histoire qui doit faire le sujet de cette contemplation ou de cette méditation, se contentant d'en parcourir les points avec une exposition sommaire. Parce que, si la personne qui fait la contemplation, s'attachant au fond de la vérité historique, parvient, en raisonnant et en réfléchissant par elle-même, à découvrir quelque chose qui lui fasse un peu plus connaître ou goûter son sujet, soit par le raisonnement propre, soit par la lumière divine qui éclaire son entendement, elle y trouvera plus de goût et plus de fruit spirituel, que si celui qui donne les exercices lui eût développé fort au long tout ce que renfermait le sujet de sa méditation. Car ce n'est pas l'abondance de la science qui rassasie l'âme et la satisfait: c'est le sentiment et le goût intérieur des vérités qu'elle médite.
3 Troisième annotation. Comme dans tous les exercices spirituels suivants nous faisons usage des actes de l'entendement en employant le raisonnement, et de ceux de la volonté en excitant en nous des affections, il est à remarquer que, dans les actes de la volonté, lorsque nous parlons vocalement ou mentalement à Dieu, notre Seigneur, ou à ses Saints, il faut de notre part un plus grand respect que quand nous faisons usage de l'entendement par la réflexion.
4 Quatrième annotation. Les exercices suivants se divisent en quatre parties: la première est la considération et la contemplation des péchés; la seconde, la vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ jusqu'au dimanche des Rameaux inclusivement: la troisième, la Passion du Sauveur; la quatrième, sa Résurrection et son Ascension, avec les trois manières de prier. Supposé que l'on y emploie quatre semaines, pour correspondre à cette division, il ne faut pas croire que chaque semaine doive nécessairement se composer de sept ou de huit jours. Car il arrive que, dans la première semaine, les uns sont plus lents que les autres à trouver ce qu'ils cherchent, c'est-à-dire la contrition, la douleur, des larmes pour leurs péchés; que d'autres sont plus actifs et plus diligents; que d'autres sont plus agités et plus éprouvés par les mouvements des divers esprits: d'où il résulte qu'il faut quelquefois abréger, et d'autres fois prolonger cette semaine; j'en dis autant des suivantes, cherchant toujours à retirer le fruit propre de chacune d'elles. Mais ordinairement on terminera les exercices en trente jours environ.
5 Cinquième annotation. Celui qui reçoit les exercices gagnera beaucoup à y entrer avec un grand courage et une grande libéralité envers son Créateur et Seigneur, lui offrant toute sa volonté et toute sa liberté, afin que sa divine Majesté dispose de sa personne et de tout ce qu'il a, selon sa très sainte volonté.
6 Sixième annotation. Quand celui qui donne les exercices s'aperçoit qu'il ne survient dans l'âme de celui qui les reçoit aucun mouvement spirituel, soit de consolation, soit de désolation; qu'il ne ressent aucune touche des divers esprits; il doit l'interroger avec soin sur les exercices, lui demandant s'il les fait aux temps marqués, et comment il s'en acquitte. Il s'assurera de la même manière s'il observe exactement les additions, entrant dans des détails sur chacun de ces points. Il est parlé plus loin de la consolation et de la désolation et aussi des additions.
7 Septième annotation. Si celui qui donne les exercices voit que celui qui les reçoit est désolé et tenté, qu'il ne se montre à son égard ni dur ni âpre, mais doux et suave; lui donnant du courage et des forces pour la suite, découvrant les ruses de l'ennemi de la nature humaine, et l'aidant à se préparer et à se disposer à la consolation future.
8 Huitième annotation. Si celui qui donne les exercices reconnaît dans celui qui les reçoit le besoin d'être instruit sur les désolations et les ruses de l'ennemi, ainsi que sur les consolations, il pourra lui expliquer, autant qu'il le jugera nécessaire, les règles de la première et de la seconde semaine, qui ont pour but de faire connaître les divers esprits.
9 Neuvième annotation. Si celui qui s'exerce n'est pas2 versé dans les choses spirituelles, et est tenté pendant les exercices de la première semaine d'une manière grossière et évidente, rencontrant, par exemple, dans la crainte du travail, dans la fausse honte et l'honneur selon le monde, etc., des obstacles qui l'empêchent d'aller en avant dans le service de Dieu, notre Seigneur; que celui qui donne les exercices ne lui explique pas les règles du discernement des esprits de la seconde semaine: car, autant celles de la première semaine lui seront utiles, autant celles de la seconde lui seront nuisibles, parce que la matière qu'elles traitent est trop subtile et trop relevée pour qu'il puisse la3 comprendre.
10 Dixième annotation. Quand celui qui donne les exercices remarque que celui qui les reçoit est combattu et tenté sous l'apparence du bien, c'est alors le moment de lui expliquer les règles de la seconde semaine, dont nous avons déjà parlé; parce que, ordinairement, l'ennemi de la nature humaine tente plus sous apparence de bien quand on s'exerce dans la vie illuminative, qui correspond aux exercices de la seconde semaine, que lorsqu'on est encore dans la vie purgative, qui correspond aux exercices de la première semaine.
11 Onzième annotation. Il est avantageux à celui qui fait les exercices de ne rien savoir dans la première semaine de ce qu'il doit faire dans la seconde, et de travailler dans l'une à obtenir la fin qu'il se propose, comme s'il ne devait rien trouver de bon dans l'autre.
12 Douzième annotation. Comme celui qui reçoit les exercices doit employer une heure à chacun des cinq exercices ou contemplations qui se font chaque jour, celui qui les donne aura grand soin de l'avertir de faire toujours en sorte que son esprit trouve le repos dans la pensée qu'il a consacré une heure entière à chaque exercice, et plutôt plus que moins; car l'ennemi a coutume de mettre en usage toute son industrie pour nous faire abréger le temps que nous devons donner à la contemplation, à la méditation ou à l'oraison.
13 Treizième annotation. Il faut encore remarquer que si, dans le temps de la consolation, c'est chose facile et légère de donner à la contemplation une heure pleine, dans le temps de la désolation, au contraire, il est très difficile4 de l'achever. Pour cette raison, celui qui s'exerce doit toujours, afin d'agir contre la désolation et de vaincre les tentations, persévérer un peu au-delà de l'heure accomplie. Ainsi s'accoutumera-t-il, non seulement à résister à l'ennemi, mais encore à le terrasser.
14 Quatorzième annotation. Si celui qui donne les exercices voit que celui qui les reçoit est dans la consolation et dans une grande ferveur, il doit l'avertir de ne faire aucune promesse, aucun voeu indiscret et précipité; et plus il reconnaîtra qu'il est d'un caractère léger, plus il doit réitérer cet avertissement. Car, bien que l'on puisse avec raison porter quelqu'un à entrer dans un ordre religieux où il a intention de faire les voeux de pauvreté, de chasteté et d'obéissance, et bien qu'une bonne action faite en vertu d'un voeu soit plus méritoire que celle que l'on fait sans voeu, on doit cependant considérer avec attention la condition et les qualités personnelles du sujet, ainsi que la facilité ou la difficulté qu'il pourra trouver à accomplir ce qu'il voudrait promettre.
15 Quinzième annotation. Celui qui donne les exercices ne doit pas porter celui qui les reçoit à embrasser ou à promettre d'embrasser la pauvreté volontaire plutôt que l'état contraire, ni à choisir un état de vie plutôt qu'un autre. Car, quoique nous puissions licitement et méritoirement, hors du temps des exercices, porter toutes les personnes qui paraissent avoir les dispositions nécessaires à choisir la continence, la virginité, l'état religieux et toute autre pratique de perfection évangélique; néanmoins, dans le temps même des exercices, tandis que l'âme cherche la volonté divine, il est plus convenable et beaucoup mieux que le Créateur et Seigneur se communique lui-même à cette âme qui est toute à lui, l'attirant à son amour et à sa louange, et la disposant à suivre la voie dans laquelle elle pourra mieux le servir dans la suite: de sorte que celui qui donne les exercices ne doit ni pencher, ni incliner d'un côté ou de l'autre; mais, se tenant en équilibre comme la balance, laisser agir immédiatement le Créateur avec la créature, et la créature avec son Créateur et Seigneur.
16 Seizième annotation. A cette fin, c'est-à-dire pour que le Créateur et Seigneur opère plus efficacement en sa créature, il est important, si cette âme, peut-être, se sent affectionnée et portée à un objet d'une manière désordonnée, qu'elle emploie toutes ses forces pour tâcher de parvenir à ce qui est l'opposé de son affection désordonnée. Que, si par exemple, elle se sent portée à chercher et à posséder un emploi ou un bénéfice, non pour l'honneur et la gloire de Dieu, notre Seigneur, ni pour le salut spirituel des âmes, mais pour ses propres avantages et pour ses intérêts temporels, elle doit se porter à ce qui est contraire et le demander à Dieu, notre Seigneur. Qu'elle fasse de vives instances dans ses prières et dans ses autres exercices spirituels, protestant qu'elle ne veut ni cet emploi ou ce bénéfice, ni aucune autre chose, à moins que Dieu, réglant ses désirs, ne change sa première affection; en sorte que la raison de désirer ou de posséder une chose ou une autre soit uniquement le service, l'honneur et la gloire de sa divine Majesté.
17 Dix-septième annotation. Il est très utile que celui qui donne les exercices, sans chercher à connaître les pensées et les péchés de celui qui les reçoit, soit fidèlement instruit des pensées et des mouvements divers que les différents esprits excitent en lui; afin que, selon son avancement plus ou moins grand, il puisse lui donner quelques exercices spirituels convenables et conformes à la nécessité de son âme agitée.
18 Dix-huitième annotation. Il faut adapter les exercices spirituels à la disposition des personnes qui veulent les faire, c'est-à-dire à leur âge, à leur science, à leur talent, et ne pas donner à celui qui est ignorant ou d'une complexion faible, des choses qu'il ne puisse pas supporter aisément, et dont il est incapable de profiter. On doit également consulter l'intention du retraitant, et, selon le désir qu'il aura de s'avancer dans le service de Dieu, lui donner ce qui est le plus convenable pour l'aider à obtenir le but qu'il se propose. Par conséquent, s'il ne veut que s'instruire de ses devoirs et parvenir à un certain degré de repos intérieur, on peut lui donner l'examen particulier, et ensuite l'examen général. Il consacrera en même temps une demi-heure le matin à la première manière de prier, sur les commandements et sur les péchés capitaux, etc. On lui recommandera aussi de se confesser tous les huit jours, et, s'il le peut, de recevoir le sacrement de l'Eucharistie tous les quinze jours, et mieux encore tous les huit jours, s'il en a la dévotion. Cette méthode convient surtout aux personnes simples et sans études. On leur expliquera tous les commandements de Dieu et de l'Église, les péchés capitaux, ce qui regarde les cinq sens corporels et les oeuvres de miséricorde. De même, si celui qui donne les exercices reconnaît que celui qui les reçoit a peu de fond ou de capacité naturelle, et qu'on ne peut pas espérer de lui beaucoup de fruits, il est plus convenable de lui donner quelques-uns de ces exercices faciles, jusqu'à ce qu'il fasse la confession de ses péchés. On lui donnera ensuite quelques méthodes d'examen de conscience, et quelques règles à suivre pour se confesser plus souvent qu'il n'avait coutume de le faire, afin de conserver les fruits qu'il aura recueillis; mais on laissera de côté les matières de l'élection et tous les exercices qui sont hors de la première semaine; surtout quand on peut obtenir un plus grand fruit auprès d'autres personnes, et que le temps manque pour toutes.
19 Dix-neuvième annotation. S'il s'agit d'un homme retenu par un emploi public ou par des affaires auxquelles il ne peut se soustraire; d'un homme qui ait de l'instruction, de l'intelligence, et qui puisse prendre une heure et demie chaque jour pour faire les exercices, on lui expliquera d'abord pourquoi l'homme est créé; on pourra de même lui assigner une demi-heure pour s'occuper de l'examen particulier, puis de l'examen général, de la manière de se confesser et de recevoir le sacrement de l'Eucharistie. Il fera, durant trois jours, tous les matins, pendant l'espace d'une heure, la méditation du premier, du second et du troisième péché; et trois autres jours, à la même heure, la méditation sur les péchés personnels; et trois autres jours encore, à la même heure, la méditation des peines dues aux péchés. On lui donnera pour chacune de ces méditations les dix additions de la première semaine, et l'on conservera, pour la contemplation des mystères de Notre-Seigneur Jésus-Christ, la méthode qui est expliquée plus bas et au long dans le livre même des exercices.
20 Vingtième annotation. Mais, si quelqu'un est plus libre d'affaires, et désire retirer des exercices spirituels tout le fruit qu'il peut en recueillir, qu'on les lui donne tout entiers, gardant exactement l'ordre dans lequel ils sont ici développés. Et ordinairement il en retirera d'autant plus de profit qu'il sera plus séparé de ses amis, de ses proches et de toute sollicitude terrestre, quittant, par exemple, son habitation ordinaire et choisissant une autre maison ou une autre chambre pour y habiter le plus à l'écart qu'il pourra, de manière qu'il soit en son pouvoir d'aller tous les jours à la messe et aux5 vêpres sans crainte d'être dérangé par personne. Cette solitude lui procurera trois avantages spirituels, entre beaucoup d'autres. Premièrement, la séparation de ses amis, de ses proches, ainsi que de beaucoup d'affaires moins réglées, afin de mieux servir et louer Dieu, notre Seigneur, est d'un grand mérite devant la Majesté divine. Secondement, se trouvant ainsi seul avec lui-même, n'ayant plus l'esprit partagé entre plusieurs objets, mais réunissant toute sa sollicitude en un seul, qui est de servir son Créateur et d'être utile à son âme, il fait usage de ses puissances naturelles plus librement pour chercher avec diligence ce qu'il désire avec tant d'ardeur. Troisièmement, plus notre âme se trouve seule et séparée des créatures, plus elle se rend apte à s'approcher de son Créateur et Seigneur et à s'unir à lui; et plus elle s'approche effectivement de lui, plus elle se dispose à recevoir les grâces et les dons de sa divine et souveraine bonté.
22 Afin que celui qui donne les exercices et celui qui les reçoit se prêtent un mutuel secours, et retirent un plus grand profit spirituel, il faut présupposer que tout homme vraiment chrétien doit être plus disposé à justifier une proposition obscure du prochain qu'à la condamner. S'il ne peut la justifier, qu'il sache de lui comment il la comprend; et s'il la comprend mal, qu'il le corrige avec amour; et si cela ne suffit pas, qu'il cherche tous les moyens convenables pour le mettre dans la voie de la vérité et du salut.
23 L'homme est créé pour louer, honorer et servir Dieu, notre Seigneur, et, par ce moyen, sauver son âme. Et les autres choses qui sont sur la terre sont créées à cause de l'homme et pour l'aider dans la poursuite de la fin que Dieu lui a marquée en le créant. D'où il suit qu'il doit en faire usage autant qu'elles le conduisent vers sa fin, et qu'il doit s'en dégager autant qu'elles l'en détournent. Pour cela, il est nécessaire de nous rendre indifférents à l'égard de tous les objets créés, en tout ce qui est laissé au choix de notre libre arbitre et ne lui est pas défendu; en sorte que, de notre côté, nous ne voulions pas plus la santé que la maladie, les richesses que la pauvreté, l'honneur que le mépris, une longue vie qu'une vie courte, et ainsi de tout le reste; désirant et choisissant uniquement ce qui nous conduit plus sûrement à la fin pour laquelle nous sommes créés.
24 Le premier temps est le matin. Aussitôt qu'on se lève, on doit se proposer de se tenir soigneusement en garde contre le péché ou défaut particulier dont on veut se corriger et se défaire.
25 Le second temps est après le dîner. On commencera par demander à Dieu, notre Seigneur, ce que l'on désire, c'est-à-dire la grâce de se souvenir combien de fois on est tombé dans ce péché ou défaut particulier, et celle de s'en corriger à l'avenir; puis on fera le premier examen, en se demandant à soi-même un compte exact de ce point spécial, sur lequel on a résolu de se corriger et de se réformer. On parcourra donc chacune des heures de la matinée, que l'on peut aussi diviser en certains espaces de temps, selon l'ordre des actions, en commençant depuis le moment du lever jusqu'à celui de l'examen présent; puis on marquera sur la première ligne de la lettre J 8 autant de points que l'on est tombé de fois dans ce péché ou défaut particulier. Enfin, on prendra de nouveau la résolution de s'amender du premier au second examen.
26 Le troisième temps est après le souper. On fera le second examen, aussi d'heure en heure, en commençant depuis le premier, puis on marquera sur la seconde ligne de la même lettre J autant de points qu'on est tombé de fois dans le péché ou défaut particulier dont on travaille à se corriger.
27 Première addition. 9 Elle consiste, chaque fois que l'on tombe dans le péché ou défaut de l'examen particulier, à porter la main sur la poitrine en s'excitant intérieurement à la douleur: ce que l'on peut faire, même en présence de plusieurs, sans être remarqué.
28 Deuxième addition. Comme la première ligne de la lettre J indique le premier examen, et la seconde le second, on observera le soir, en comparant la première et la seconde ligne, s'il y a amendement du premier au second examen.
29 Troisième addition. Comparer le second jour avec le premier, c'est-à-dire les deux examens du jour présent avec les deux du jour précédent et voir si d'un jour à l'autre on s'est corrigé.
30 Quatrième addition. Comparer également une semaine avec l'autre et voir si, dans la semaine qui vient de s'écouler, le progrès a été plus notable que dans la semaine précédente.
31 Il faut remarquer que les premières lignes J, qui sont les plus longues, marquent le dimanche; les secondes, qui sont plus courtes, le lundi; les troisièmes, le mardi; et ainsi de suite.
________________________________________ J.________________________________________ ___________________________________ j.___________________________________ ______________________________ j.______________________________ _________________________ j._________________________ ____________________ j.____________________ _______________ j._______________ __________ j.__________
32 Je suppose qu'il y a en moi trois sortes de pensées: les unes, proprement miennes, naissent de ma volonté et de ma liberté; les autres viennent du dehors, et ont pour principe le bon ou le mauvais esprit.
33 On peut mériter en deux manières lorsqu'une mauvaise pensée vient du dehors. Premièrement, si, lorsque la pensée de commettre un péché mortel se présente, je lui résiste aussitôt, et qu'ainsi j'en triomphe.
34 Secondement, si, d'abord repoussée, cette mauvaise pensée revient une ou plusieurs fois et que je lui résiste toujours, jusqu'à ce que je la chasse entièrement. Cette seconde manière est d'un plus grand mérite que la première.
35 On pèche véniellement, quand la pensée de pécher mortellement s'offrant à l'esprit, on lui prête l'oreille en s'y arrêtant quelques instants, ou lorsqu'on en reçoit quelque délectation sensuelle, ou lorsqu'on apporte quelque négligence à rejeter cette pensée.
36 On pèche mortellement en deux manières: la première, lorsque l'on consent à la mauvaise pensée, avec l'intention de commettre ensuite le péché dont la pensée se présente, ou avec le désir de le commettre, si on le pouvait;
37 La seconde, quand on commet extérieurement ce péché. Or, le péché d'action est plus grave que le péché de pensée pour trois raisons: premièrement, à cause de la durée qui est plus longue; secondement à cause de l'affection désordonnée qui est plus forte; troisièmement à cause du dommage qui est plus grand pour les deux personnes.
38 On ne doit jurer ni par le Créateur ni par la créature qu'avec vérité, respect et nécessité. Il n'y a pas nécessité d'affirmer avec serment toute vérité, mais celle-là seulement dont il doit résulter un avantage de quelque importance pour l'âme, pour le corps ou pour les biens temporels. On jure avec respect quand, en prononçant le nom de Dieu, Créateur et Seigneur de toutes choses, on se rappelle l'honneur et le respect qui lui sont dus.
39 Encore que dans le jurement fait en vain le péché soit plus grave quand on jure par le Créateur que quand on jure par la créature, il faut cependant remarquer qu'il est plus difficile de jurer avec les conditions requises, c'est-à-dire avec vérité, nécessité et respect, par la créature que par le Créateur, pour les raisons suivantes:
Premièrement. Lorsque nous voulons jurer par quelque créature, la pensée de nommer la créature ne nous rend pas aussi attentifs ni aussi circonspects pour dire la vérité, ou pour l'affirmer avec nécessité, que la pensée de nommer le Seigneur et Créateur de toutes choses.
Secondement. Il n'est pas aussi facile de rendre au Créateur un témoignage de vénération et de respect en jurant par la créature, qu'en jurant par le Créateur et Seigneur lui-même et en prononçant son saint Nom. En effet, la pensée de nommer Dieu, notre Seigneur, inspire par elle-même plus de vénération et de respect que la pensée de nommer un objet créé. Il suit de là qu'il est plus permis aux hommes parfaits qu'à ceux qui sont imparfaits de jurer par la créature, parce que les premiers, éclairés par la lumière qu'ils reçoivent dans la contemplation assidue des choses divines, peuvent plus facilement que les seconds méditer et contempler que Dieu, notre Seigneur, est dans toutes les créatures par son essence, par sa présence et par sa puissance; et ainsi, en jurant par la créature, ils sont plus aptes et plus disposés à rendre un témoignage de vénération et de respect à leur Créateur et Seigneur.
Troisièmement. En jurant fréquemment par les objets créés, les imparfaits sont plus exposés à l'idolâtrie que les parfaits.
40 Il ne faut dire aucune parole oiseuse. J'entends par parole oiseuse celle qui n'est utile ni à nous-mêmes ni au prochain, ou qui n'est pas dirigée à cette fin. Toutes les fois donc qu'il doit résulter, ou que nous avons intention qu'il résulte de nos discours un avantage pour notre âme ou pour celle du prochain, pour notre corps ou pour nos biens temporels, ce n'est pas une parole oiseuse, quand même nous parlerions de choses étrangères à notre profession: comme si, étant religieux, nous parlions de guerre ou de commerce. Mais, en général, toute parole dite avec une intention louable est méritoire et toute parole proférée avec une intention coupable, ou seulement sans motif raisonnable, est un péché.
41 Gardez-vous de la détraction et des murmures. Manifester un péché mortel qui n'est pas encore public, c'est un péché mortel; si le péché que vous révélez est véniel, vous commettez un péché véniel; et si vous parlez des défauts d'autrui, vous découvrez votre propre défaut. Mais, supposé que vous ayez une intention droite, vous pouvez parler en deux circonstances des péchés ou des fautes de votre prochain: premièrement, quand le péché est connu publiquement, par exemple lorsqu'il s'agit d'une personne de mauvaise vie, ou d'une sentence portée par un tribunal, ou d'une erreur publique qui empoisonne les âmes de ceux parmi lesquels elle se propage; secondement, quand le péché est secret et que vous le révélez à une personne dans l'intention qu'elle aide celui qui l'a commis à sortir de son mauvais état, pourvu toutefois que vous ayez des raisons suffisantes de penser qu'elle pourra lui être utile.
42 On doit s'examiner sur les commandements de Dieu et de l'Église et sur les ordres de ses supérieurs. Tout ce qui se fait contre quelqu'une de ces trois parties de nos obligations, selon son importance plus ou moins grande, est un péché plus ou moins grave. J'entends par ordres des supérieurs tout ce qui est revêtu de leur autorité, comme sont les diplômes accordés par les souverains pontifes, dans l'intention d'obtenir de Dieu le triomphe de l'Église sur les infidèles et la concorde entre les princes chrétiens, et autres concessions d'indulgences attachées à l'accomplissement de certaines oeuvres, et surtout à la confession de ses péchés et à la sainte communion. Car ce n'est pas un péché léger d'être cause que les autres méprisent, ou de mépriser soi-même ces règlements et ces recommandations si saintes de nos premiers pasteurs.
43 Le premier point est de rendre grâces à Dieu, notre Seigneur, des bienfaits que nous avons reçus. Le deuxième, de demander la grâce de connaître nos péchés et de les bannir de notre coeur. Le troisième, de demander à notre âme un compte exact de notre conduite depuis l'heure du lever jusqu'au moment de l'examen, en parcourant successivement les heures de la journée, ou certains espaces de temps déterminés par l'ordre de nos actions. On s'examinera premièrement sur les pensées, puis sur les paroles, puis sur les actions selon l'ordre indiqué dans l'examen particulier. Le quatrième, de demander pardon de nos fautes à Dieu, notre Seigneur. Le cinquième, de former la résolution de nous corriger avec le secours de sa grâce. Terminer par le Notre Père11.
Premièrement. Il est certain que celui qui se confesse tous les ans avec les dispositions requises n'est pas tenu à faire une confession générale dans le temps des exercices; cependant, en la faisant, il retirera un plus grand profit et un plus grand mérite spirituels, à cause de la douleur actuelle plus vive de tous les péchés et de tous les dérèglements de sa vie.
Secondement. Durant le temps des exercices, on acquiert de ses péchés et de leur malice une connaissance plus intime que dans tout autre temps où l'on s'adonnait moins sérieusement aux choses intérieures. Or, en obtenant alors cette connaissance plus claire et une douleur plus grande, l'âme retirera plus de profit spirituel et de mérite qu'elle n'eût pu le faire auparavant.
Troisièmement. Le retraitant, ayant apporté au tribunal de la pénitence des dispositions plus parfaites, recevra par conséquent avec plus de fruit le très saint sacrement de l'autel, qui l'aidera non seulement à ne pas retomber dans le péché, mais encore à conserver et à augmenter la grâce qu'il a reçue. Le temps le plus convenable pour faire la confession générale est immédiatement après les exercices de la première semaine.
46 L'oraison préparatoire consiste à demander à Dieu, notre Seigneur, que toutes mes intentions, toutes mes actions et toutes mes opérations soient dirigées uniquement au service et à la louange de sa divine Majesté.
47 Le premier prélude est la composition de lieu. Il faut remarquer ici que si le sujet de la contemplation ou de la méditation est une chose visible, comme dans la contemplation des mystères de Notre-Seigneur Jésus-Christ, ce prélude consistera à me représenter, à l'aide de l'imagination, le lieu matériel où se trouve l'objet que je veux contempler; par exemple le temple, la montagne où est Jésus-Christ ou Notre-Dame, selon le mystère que je choisis pour ma contemplation. Si le sujet de la méditation est une chose invisible, comme sont ici les péchés, la composition de lieu sera de voir des yeux de l'imagination et de considérer mon âme emprisonnée dans ce corps mortel, et moi-même, c'est-à-dire mon corps et mon âme, dans cette vallée de larmes, comme exilé parmi les animaux privés de raison.
48 Le second prélude consiste à demander à Dieu notre Seigneur ce que je veux et ce que je désire. Cette demande doit être conforme au sujet de la méditation. Dans la contemplation de la Résurrection, par exemple, je demanderai la grâce de participer à la joie ineffable de Jésus-Christ glorieux; dans celle de la Passion, je demanderai la douleur, les larmes, les souffrances, avec Jésus-Christ dans les tourments. Dans la méditation présente, je dois demander la honte et la confusion de moi-même, en considérant combien est grand le nombre de ceux qui sont en enfer pour un seul péché mortel et combien de fois j'ai mérité d'être damné éternellement pour mes péchés sans nombre.
49 Avant chaque contemplation ou méditation, on doit faire exactement l'oraison préparatoire, qui est toujours la même, et les deux préludes qui varient de fois à autre selon le sujet.
50 Le premier point sera d'exercer la mémoire, en me rappelant le premier péché qui fut celui des Anges; puis l'entendement, en réfléchissant sur le même péché; puis enfin la volonté, en m'efforçant de me rappeler et de comprendre vivement cette première rébellion et ses suites, afin de me causer plus de honte et de confusion, en mettant mes péchés innombrables en comparaison avec le péché unique des Anges. Pour un seul péché ils ont été précipités en enfer; combien de fois l'ai-je mérité moi-même pour tous ceux que j'ai commis? Cet exercice de la mémoire sur le péché des Anges consiste donc à se remettre dans la pensée comment ils furent créés dans l'état d'innocence; comment ils refusèrent de se servir de leur liberté pour rendre à leur Créateur et Seigneur l'hommage et l'obéissance qui lui étaient dus; comment, l'orgueil venant à s'emparer de leur esprit, ils passèrent de l'état de grâce à un état de malice, et furent précipités du ciel en enfer. Ensuite, l'entendement s'appliquera à réfléchir plus en détail sur le même sujet; et, surtout, la volonté devra exciter en elle des affections en conséquence.
51 Le second point sera d'exercer, comme dans le premier, les trois puissances de l'âme sur le second péché, qui fut celui d'Adam et d'Eve, me rappelant à la mémoire comment, pour ce péché, ils firent une si longue pénitence, et quelle corruption il causa dans tout le genre humain: tant de millions d'hommes se précipitant depuis ce moment dans les enfers! Cet exercice de la mémoire sur le péché de nos premiers parents consiste donc à se rappeler comment Adam ayant été créé dans la terre de Damas et placé dans le paradis terrestre, et Eve formée d'une de ses côtes, Dieu leur défendit de manger du fruit de l'arbre de la science; comment, en ayant mangé et s'étant ainsi rendus coupables, ils furent couverts de tuniques de peau et chassés du paradis terrestre; comment enfin, privés de la justice originelle qu'ils avaient perdue, ils passèrent toute leur vie dans de pénibles travaux et dans un continuel repentir. On réfléchira ensuite par le moyen de l'entendement, et l'on s'efforcera d'exercer la volonté, comme il a été dit dans le premier point.
52 Le troisième point sera de méditer de la même manière sur le troisième péché, le péché particulier d'un homme quelconque tombé en enfer pour ce seul péché mortel, considérant que des âmes sans nombre sont maintenant damnées pour des péchés moins multipliés que les miens. Il faudra donc d'abord appliquer la mémoire à ce troisième péché particulier et se représenter la gravité et la malice du péché commis par l'homme contre son Créateur et Seigneur; puis se convaincre, par le moyen de l'entendement, qu'ayant péché et s'étant révolté contre la Bonté infinie, cet homme a justement été condamné pour toujours. Enfin on terminera par les actes de la volonté, comme il a été dit plus haut.
53 Colloque. Me représentant Notre-Seigneur Jésus-Christ en Croix devant moi, je lui demanderai dans un colloque comment, étant le Créateur de toutes choses, il en est venu jusqu'à se faire homme; comment, possédant la vie éternelle, il a daigné accepter une mort temporelle et la subir réellement pour mes péchés. Puis, me considérant moi-même, je me demanderai ce que j'ai fait pour Jésus-Christ, ce que je fais pour Jésus-Christ, ce que je dois faire pour Jésus-Christ. Et, le voyant ainsi attaché à la Croix, je ferai les réflexions qui se présenteront à moi.
54 Le colloque est, à proprement parler, l'entretien d'un ami avec son ami, ou d'un esclave avec son seigneur. Tantôt il lui demande quelque grâce, tantôt il s'accuse d'une mauvaise action; il lui communique ses propres affaires, il lui demande conseil. Réciter en finissant: Notre Père, etc.
55 L'oraison préparatoire sera la même. Le premier prélude sera la même composition de lieu. Le second prélude consiste à demander ce que l'on veut obtenir. Dans cette méditation, je demanderai une douleur intense et profonde et des larmes pour pleurer mes péchés.
56 Le premier point est comme une revue générale. Je tâcherai donc de me souvenir de tous les péchés de ma vie, la repassant tout entière d'année en année, ou d'époque en époque. Pour cela, il me sera très utile de me rappeler trois choses: premièrement, les lieux que j'ai habités; secondement, les relations que j'ai eues avec d'autres personnes; troisièmement, les emplois que j'ai exercés.
57 Dans le second point, je pèserai mes péchés: c'est-à-dire que je considérerai la laideur et la malice intrinsèque de chaque péché mortel, supposé même qu'il ne soit pas défendu.
58 Dans le troisième, je considérerai qui je suis, en m'efforçant par diverses comparaisons de paraître de plus en plus petit à mes yeux. Premièrement, que suis-je en comparaison de tous les hommes? Deuxièmement, que sont tous les hommes en comparaison de tous les Anges et de tous les Saints du paradis? Troisièmement, que sont toutes les créatures en comparaison de Dieu? Donc moi seul, enfin, que puis-je être? Quatrièmement, je considérerai toute la corruption et toute l'infection de mon corps. Cinquièmement, je me regarderai comme un ulcère et un abcès d'où sont sortis tant de péchés, tant de crimes et tant de souillures honteuses.
59 Dans le quatrième point, je m'appliquerai à connaître Dieu que j'ai offensé. Je m'aiderai de la considération de ses attributs, que je comparerai aux défauts contraires qui sont en moi: sa sagesse à mon ignorance, sa toute-puissance à ma faiblesse, sa justice à mon iniquité, sa bonté à ma malice.
60 Le cinquième point sera le cri d'étonnement d'une âme profondément émue. Je parcourrai toutes les créatures, leur demandant comment elles m'ont laissé la vie, comment elles ont concouru à me la conserver. Je demanderai aux Anges, qui sont le glaive de la justice divine, comment ils m'ont souffert et gardé, comment ils ont même prié pour moi; aux Saints, comment ils ont aussi intercédé et prié pour moi. Je m'étonnerai que les cieux, le soleil, la lune, les étoiles et les éléments, les fruits de la terre, les oiseaux, les poissons et les animaux, que toutes les créatures aient continué à me servir et ne se soient pas élevées contre moi; que la terre ne se soit pas entrouverte pour m'engloutir, creusant de nouveaux enfers où je devais brûler éternellement.
61 Je terminerai par un colloque, dans lequel j'exalterai la miséricorde de mon Dieu; je lui rendrai grâces de m'avoir conservé la vie jusqu'à ce moment, et je prendrai la résolution de me corriger avec le secours de sa grâce. Notre Père, etc.
62 Après l'oraison préparatoire et les deux préludes, je répéterai le premier exercice et le deuxième, faisant une attention spéciale aux endroits qui m'auront fait éprouver plus de consolation ou de désolation, et que j'aurai médités avec plus de goût spirituel, m'y arrêtant quelque temps. Je ferai ensuite les trois colloques de la manière suivante:
63 Le premier à Notre-Dame, pour qu'elle m'obtienne de son Fils et Seigneur trois grâces: la première, de connaître d'une connaissance intime mes péchés et d'en concevoir de l'horreur; la deuxième, de sentir le désordre de mes actions, afin que, le détestant, je me corrige et je règle ma conduite; la troisième, de connaître le monde, afin que l'ayant en horreur, je m'éloigne de tout ce qui est vain et périssable. Terminer ce premier colloque par le Je vous salue Marie12.
Le second au Fils, lui demandant les mêmes grâces et le priant de me les obtenir de son Père céleste. Terminer par la prière: Âme du Christ13.
Le troisième à Dieu le Père, lui demandant toujours les mêmes grâces et le suppliant de me les accorder lui-même, lui qui est le Seigneur éternel de toutes choses. Je réciterai le Notre Père.
64 Je dis un résumé, dans lequel l'entendement, sans s'égarer, réfléchit attentivement, en se rappelant les vérités qu'il a contemplées dans les exercices précédents. On terminera en faisant les trois mêmes colloques.
65 L'oraison préparatoire, comme à l'ordinaire. Le premier prélude est la composition de lieu, qui consiste, dans cette méditation, à voir des yeux de l'imagination la longueur, la largeur et la profondeur de l'enfer. Le second est la demande de la grâce que l'on veut obtenir. Ici je demanderai le sentiment intérieur des peines que souffrent les damnés, afin que, si mes fautes me faisaient jamais oublier l'amour du Seigneur éternel, du moins la crainte des peines m'aidât à ne pas tomber dans le péché.
66 Dans le premier point, je verrai des yeux de l'imagination ces feux immenses, et les âmes des réprouvés comme enfermées dans des corps de feu.
67 Dans le deuxième, j'entendrai, à l'aide de l'imagination, les gémissements, les cris, les clameurs, les blasphèmes contre Jésus-Christ Notre-Seigneur et contre tous les Saints.
68 Dans le troisième, je me figurerai que je respire la fumée, le soufre, l'odeur d'une sentine et de matières en putréfaction.
69 Dans le quatrième, je m'imaginerai goûter intérieurement des choses amères, comme les larmes, la tristesse, le ver de la conscience.
70 Dans le cinquième, je toucherai ces flammes vengeresses, m'efforçant de comprendre vivement comment elles environnent et brûlent les âmes des réprouvés.
71 Faisant un colloque avec Jésus-Christ Notre-Seigneur, je me rappellerai combien d'âmes sont en enfer: les unes parce qu'elles n'ont pas cru à la venue du Sauveur, les autres parce qu'en y croyant elles n'ont pas agi selon ses commandements; partageant ces âmes en trois classes: la première, celles qui se sont perdues avant sa venue; la deuxième, pendant sa vie; la troisième, après sa vie en ce monde. Je lui rendrai grâces de ne m'avoir laissé tomber par la mort dans aucune de ces classes; me rappelant, au contraire, comment j'ai toujours été jusqu'ici l'objet de sa grande compassion et de sa grande miséricorde; et je terminerai en récitant le Notre Père.
72 Le premier exercice se fera au milieu de la nuit; le deuxième, le matin, aussitôt après le lever; le troisième, avant ou après la Messe, mais toujours avant le dîner; le quatrième, à l'heure des vêpres; le cinquième, une heure avant le souper. Ce règlement, tel ou à peu près tel que nous venons de l'indiquer, est le même pour les quatre semaines, autant que l'âge, la disposition et les forces de la personne qui fait les exercices lui permettront d'en faire cinq, ou l'obligeront d'en diminuer le nombre.
73 Première addition. Après m'être couché, et avant de m'endormir, je penserai à l'heure à laquelle je dois me lever, et pour quelle fin, et je résumerai pendant l'espace d'un Je vous salue Marie14 l'exercice que je dois faire.
74 Deuxième addition. Lorsque je me réveillerai, j'éloignerai de mon esprit toute autre pensée, pour m'occuper de suite du sujet que je dois méditer dans le premier exercice, qui se fait au milieu de la nuit, m'excitant à la confusion de mes péchés, si grands et si nombreux; je me proposerai quelques comparaisons, par exemple celle d'un gentilhomme qui se trouverait devant son roi et devant toute sa cour, honteux et confus d'avoir grandement offensé celui dont il a d'abord reçu de nombreux bienfaits et des faveurs signalées. De même, dans le second exercice, je me regarderai comme un grand pécheur, enchaîné, et sur le point de comparaître devant le Juge suprême et éternel, m'aidant de la comparaison d'un criminel digne de mort, que l'on conduit chargé de fers devant son juge temporel: et, dans ces pensées ou d'autres semblables, selon la matière de l'exercice, je prendrai mes vêtements.
75 Troisième addition. Avant de commencer, je me tiendrai debout le temps de réciter le Notre Père, à un ou deux pas de l'endroit où je dois méditer, l'esprit élevé vers le ciel, et considérant comment Dieu, notre Seigneur, me regarde; puis je me prosternerai en m'humiliant devant lui.
76 Quatrième addition. Je commencerai ma contemplation, tantôt à genoux, tantôt prosterné, tantôt étendu sur la terre, le visage vers le ciel, tantôt assis, tantôt debout; cherchant toujours à trouver ce que je désire. Et en cela j'observerai deux choses: premièrement, si je trouve ce que je désire à genoux ou prosterné, je ne chercherai pas une autre position; secondement, si j'éprouve dans un point de la méditation les sentiments que je voulais exciter en moi, je m'y arrêterai et m'y reposerai sans me mettre en peine de passer outre, jusqu'à ce que mon âme soit pleinement satisfaite.
77 Cinquième addition. L'exercice terminé, assis ou en me promenant, j'examinerai pendant un quart d'heure quel en a été le succès: s'il n'a pas été heureux, j'en rechercherai attentivement la cause et, l'ayant découverte, je m'exciterai au repentir, afin de me corriger dans la suite; s'il a été heureux, j'en rendrai grâces à Dieu, notre Seigneur, et me conduirai une autre fois de la même manière.
78 Sixième addition. Je ne m'arrêterai volontairement à aucune pensée capable de me causer du contentement ou de la joie, comme serait le souvenir du ciel ou de la résurrection: car toute considération de cette nature m'empêcherait de ressentir de la peine et de la douleur, et de verser des larmes sur mes péchés. Je tâcherai, au contraire, de conserver toujours le désir d'éprouver de la douleur et du repentir, me rappelant plutôt à la mémoire la mort et le jugement.
79 Septième addition. Pour la même raison, je me priverai entièrement de jour, fermant les fenêtres et les portes de l'appartement que j'occupe, tout le temps où je m'y trouverai, excepté lorsque je devrai réciter l'Office divin, lire et prendre mon repas.
80 Huitième addition. Je m'abstiendrai de rire et de proférer aucune parole qui puisse porter à rire.
81 Neuvième addition. Je veillerai sur mes yeux et ne les lèverai sur personne, excepté lorsqu'il me faudra parler à quelqu'un, en l'abordant ou en le quittant.
82 Dixième addition. La dixième addition regarde la pénitence, qui se divise en intérieure et extérieure. La pénitence intérieure consiste dans la douleur de ses péchés, accompagnée d'un ferme propos de ne plus retomber dans ces mêmes péchés ni dans aucun autre. La pénitence extérieure est un fruit de la première et consiste à se punir de ses fautes passées; ce qui peut surtout se pratiquer en trois manières:
83 Premièrement, à l'égard de la nourriture. Sur quoi il faut remarquer que le retranchement du superflu n'est pas pénitence, mais tempérance. Il n'y a pénitence que lorsqu'on retranche quelque chose de ce que l'on pourrait prendre convenablement; et dans ce sens, plus nous parvenons à retrancher, plus la pénitence est grande et louable, pourvu qu'elle n'aille pas jusqu'à ruiner les forces et qu'elle n'altère pas notablement la santé.
84 Deuxièmement, à l'égard du sommeil. Pour la manière de le prendre, remarquez encore que ce n'est pas pénitence de retrancher ce qui ne servirait qu'à flatter notre délicatesse et notre sensualité. Il n'y a pénitence que dans la privation d'une partie des objets dont nous pourrions convenablement user; et, dans ce sens, plus on parviendra à retrancher, mieux on fera, pourvu qu'on n'altère pas considérablement sa santé et qu'il ne s'ensuive pas une infirmité notable. Quant au temps à donner au sommeil, il ne faut ordinairement rien retrancher de ce qui est convenable, à moins qu'il ne s'agisse de corriger l'habitude vicieuse de dormir trop et d'arriver à une juste mesure.
85 Troisièmement, à l'égard du corps. Elle consiste à lui faire souffrir une douleur sensible en portant des cilices, des cordes, des chaînes de fer sur la chair; en prenant des disciplines, ou en se faisant des plaies et en pratiquant d'autres genres d'austérités.
86 Ce qui paraît le plus convenable et le moins dangereux en ce point, c'est que la douleur ne soit sensible que dans la chair, et qu'elle ne pénètre pas jusqu'aux os: de sorte que la pénitence cause de la douleur et non quelque infirmité. Aussi semble-t-il à propos de faire usage de disciplines faites de petites cordes qui causent extérieurement de la douleur, plutôt que d'employer un instrument qui puisse causer une infirmité notable.
87 Première remarque. Les pénitences extérieures se pratiquent principalement pour trois fins: la première, pour la satisfaction des péchés que l'on a commis; la seconde, pour se vaincre soi-même, c'est-à-dire pour obliger la sensualité à obéir à la raison, et la partie inférieure de l'âme à se soumettre, autant qu'il est possible, à la partie supérieure; la troisième, pour obtenir de Dieu quelque grâce particulière que l'on désire, par exemple, celle de ressentir intérieurement une vive douleur de ses péchés, de les pleurer amèrement, ou de verser des larmes sur les douleurs et les souffrances que Notre-Seigneur Jésus-Christ endura dans sa Passion, ou enfin la solution de quelque doute.
88 Deuxième remarque. La première et la deuxième addition ne regardent que les exercices de la nuit et de l'aurore, et non ceux qui se font en d'autres temps. La quatrième addition ne s'observera jamais dans l'église ou en présence d'autres personnes, mais uniquement quand on est seul dans sa chambre ou ailleurs.
89 Troisième remarque. Quand celui qui fait les exercices n'obtient pas ce qu'il désire, comme des larmes, des consolations, etc., il est souvent avantageux qu'il fasse quelque changement dans la nourriture, dans le coucher, ou dans le sommeil, et dans les autres manières de faire pénitence; qu'il modifie sa conduite, pratiquant des mortifications deux ou trois jours de suite, et les suspendant les deux ou trois jours suivants. Car quelques-uns ont besoin de faire plus de pénitences, et d'autres moins; et aussi parce que souvent nous omettons les pratiques extérieures de pénitence par amour des sens, et par un jugement erroné qui nous fait croire faussement que nous ne pourrons les supporter sans causer à notre santé un tort considérable. Quelquefois, au contraire, nous faisons trop, ne consultant pas assez nos forces; et, comme Dieu, notre Seigneur, connaît infiniment mieux notre nature que nous ne la connaissons nous-mêmes, il daigne souvent, tandis que nous alternons de la sorte, nous faire connaître clairement ce qui nous est convenable.
90 Quatrième remarque. On se proposera, dans l'examen particulier, de corriger les défauts et les négligences commises, soit dans les exercices, soit dans l'observation des additions. La matière de cet examen sera la même dans la seconde, la troisième et la quatrième semaine.
91 L'oraison préparatoire est la même qu'à l'ordinaire. Le premier prélude est la composition de lieu. Il consistera ici à voir, des yeux de l'imagination, les synagogues, les bourgs et les villages que parcourait Notre-Seigneur Jésus-Christ en annonçant son Évangile. Le second prélude consiste à demander la grâce que je veux obtenir. Ce sera ici de demander à Notre-Seigneur la grâce de n'être pas sourd à son appel, mais prompt et diligent à accomplir sa très sainte volonté.
92 Premier point. Je me représenterai un roi que la main de Dieu a choisi, et à qui tous les princes et tous les peuples chrétiens rendent respect et obéissance.
93 Second point. Je m'imaginerai entendre ce même roi parlant à tous ses sujets, et leur disant: Ma volonté est de conquérir tout le pays des infidèles. Que celui qui voudra me suivre se contente de la même nourriture, de la même boisson, des mêmes vêtements que moi. Qu'il travaille durant le jour, qu'il veille pendant la nuit, comme moi, afin de partager un jour avec moi, selon la mesure de ses travaux, les fruits de la victoire16.
94 Troisième point. Je considérerai ce que devraient répondre de fidèles sujets à un roi si généreux et si bon, et combien celui qui n'accepterait pas de telles offres serait digne du mépris de tout le monde, et mériterait de passer pour le plus lâche des hommes.
95 La seconde partie de cet exercice consiste à appliquer à Jésus-Christ, notre Seigneur, les trois points de la parabole précédente. Et quant au premier point, si l'appel d'un roi de la terre à ses sujets fait impression sur nos coeurs, combien plus vivement ne devons-nous pas être touchés de voir Jésus-Christ, notre Seigneur, Roi éternel, et devant lui le monde entier, et chaque homme en particulier, qu'il appelle en disant: Ma volonté est de conquérir le monde entier, de soumettre tous mes ennemis, et d'entrer ainsi dans la gloire de mon Père. Que celui qui veut venir avec moi travaille avec moi; qu'il me suive dans les fatigues, afin de me suivre aussi dans la gloire.
96 Je considérerai, dans le second point, que tout homme qui fait usage de son jugement et de sa raison ne peut pas balancer à s'offrir généreusement à tous les sacrifices et à tous les travaux.
97 Je considérerai, dans le troisième point, que tous ceux qui voudront s'attacher plus étroitement à Jésus-Christ, et se signaler au service de leur Roi éternel et Seigneur universel, ne se contenteront pas de s'offrir à partager ses travaux; mais, agissant contre leur propre sensualité, contre l'amour de la chair et du monde, ils lui feront encore des offres d'une plus haute importance et d'un plus grand prix, en disant:
98 Roi éternel et souverain Seigneur de toutes choses, je viens vous présenter mon offrande: aidé du secours de votre grâce, en présence de votre infinie bonté, sous les yeux de votre glorieuse Mère et de tous les Saints et Saintes de la cour céleste, je proteste que je désire, que je veux, et que c'est de ma part une détermination arrêtée, pourvu que tels soient votre plus grand service et votre plus grande gloire, vous imiter en supportant les injures, les opprobres, la pauvreté d'esprit et de coeur, et même la pauvreté réelle, si votre très sainte Majesté veut me choisir et m'admettre à cet état de vie.
99 On fera cet exercice deux fois dans la journée: le matin, en se levant, et une heure avant le dîner ou le souper.
100 Pendant la seconde semaine et les suivantes, il sera très utile de lire de temps en temps quelques passages de l'Imitation de Jésus-Christ, des Évangiles et de la vie des Saints.
102 Le premier prélude consiste à se rappeler l'histoire du mystère que l'on doit contempler. Ici, je me rappellerai comment les trois Personnes divines, contemplant la surface de la terre couverte d'hommes, et voyant que tous se précipitent en enfer, décrètent, dans leur éternité, que la seconde Personne de l'auguste Trinité se fasse homme pour sauver le genre humain; et comment ce mystère s'accomplit, lorsque dans la plénitude des temps l'Archange Gabriel fut envoyé à Marie 17.
103 Le second prélude est la composition de lieu. Ici, je me représenterai l'immense étendue de la terre, peuplée de tant de nations diverses; puis je considérerai en particulier la maison et la chambre de Notre-Dame dans la ville de Nazareth, en Galilée.
104 Le troisième prélude est la demande de ce que l'on veut obtenir. Dans la contemplation présente, je demanderai la connaissance intime du Seigneur qui s'est fait homme pour moi, afin de l'aimer avec plus d'ardeur et de le suivre avec plus de fidélité.
105 Il faut remarquer que l'oraison préparatoire doit se faire cette semaine et les suivantes telle qu'elle se trouve au commencement du premier exercice de la première semaine, sans y rien changer. On fera de même les trois préludes, mais en les modifiant selon le sujet que l'on médite.
106 Dans le premier point, je verrai successivement les personnes. Premièrement, les hommes qui sont sur la terre, si divers de costumes et de visages: les uns blancs, les autres noirs; les uns en paix, les autres en guerre; les uns pleurant, les autres riant; les uns sains, les autres malades; les uns naissant et les autres mourant. Secondement, je verrai et je considérerai les trois Personnes de la sainte Trinité, assises sur le trône royal de la divine Majesté; comme elles regardent tout cet univers et les nations plongées dans un aveuglement profond, et comme elles voient les hommes mourir et descendre en enfer. Troisièmement, je verrai Notre-Dame et l'Ange qui la salue; puis je réfléchirai, afin de tirer de l'utilité de cette considération.
107 Dans le second point, j'écouterai les paroles: premièrement, des hommes qui sont sur la terre, comment ils parlent les uns avec les autres, comment ils jurent et blasphèment, etc.; secondement, des Personnes divines, disant: Opérons la rédemption du genre humain, etc.
; troisièmement, de l'Ange et de Notre-Dame: et je réfléchirai sur ces discours pour en tirer du profit.
108 Dans le troisième point, je considérerai les actions: premièrement, des hommes qui sont sur la terre; ils s'attaquent, ils s'entre-tuent, ils tombent dans les enfers, etc.; secondement, des trois Personnes divines, qui opèrent la très sainte Incarnation, etc.; troisièmement, de l'Ange et de Notre-Dame: l'Ange s'acquitte de l'ambassade céleste, Marie s'humilie et rend grâces à la divine Majesté. Ensuite je réfléchirai pour tirer quelque utilité de chacune de ces circonstances.
109 Enfin, je ferai le colloque, en pensant à ce que je dois dire aux trois Personnes divines, au Verbe éternel incarné, à la Mère du Verbe et Notre-Dame; et, selon le sentiment que j'éprouverai en moi-même, je demanderai tout ce qui peut m'aider à suivre de plus près et à imiter plus fidèlement Notre-Seigneur, comme s'il venait de s'incarner pour moi. Je terminerai en récitant le Notre Père.
110 L'oraison préparatoire ordinaire.
111 Le premier prélude est l'histoire du mystère. On se rappellera, dans la contemplation présente, comment Notre-Dame, dans le neuvième mois de sa grossesse, partit de Nazareth, assise, comme on peut pieusement le méditer, sur une ânesse, accompagnée de Joseph et d'une servante qui mènent un boeuf. Ils vont à Bethléem payer le tribut imposé par César à tous les habitants de cette province.
112 Le second prélude est la composition de lieu. Dans cette contemplation, je verrai des yeux de l'imagination le chemin de Nazareth à Bethléem, considérant sa longueur, sa largeur. Est-il uni? Traverse-t-il des vallées? Est-il sur des collines? Je considérerai de même la grotte où naît le Sauveur. Est-elle grande ou petite? Est-elle haute ou basse? Comment est-elle préparée?
113 Le troisième prélude est entièrement le même que dans la contemplation précédente.
114 Dans le premier point, je verrai les personnes: Notre-Dame, Joseph, la servante, et l'Enfant Jésus lorsqu'il sera né. Je me tiendrai en leur présence comme un petit mendiant et un petit esclave indigne de paraître devant eux. Je les considérerai, je les contemplerai, je les servirai dans leurs besoins avec tout l'empressement et tout le respect dont je suis capable, comme si je me trouvais présent. Ensuite je réfléchirai en moi-même pour tirer de là quelque profit.
115 Dans le second point, j'observerai, je remarquerai et je contemplerai ce qu'ils disent; puis je réfléchirai en moi-même pour tirer quelque profit.
116 Dans le troisième point, je regarderai et je considérerai ce qu'ils font, comme ils ont voyagé, comme ils souffrent, afin que le Seigneur de toutes choses naisse dans une extrême pauvreté, et qu'après tant de travaux, après avoir enduré la faim, la soif, la chaleur, le froid, les injures et les affronts, il meure sur la Croix; et tout cela pour moi. Et je réfléchirai pour tirer quelque profit spirituel.
117 Je terminerai par un colloque, comme dans la contemplation précédente, et je réciterai le Notre Père.
118 Après l'oraison préparatoire et les trois préludes, on fera la répétition du premier et du second exercice, insistant toujours sur quelques passages principaux, dans la méditation desquels on aura reçu plus de lumières, senti plus de consolation ou de désolation intérieure; et on terminera de même par un colloque suivi du Notre Père.
119 Dans cette répétition et dans les suivantes, on gardera la même méthode que dans celles de la première semaine, changeant la matière et conservant la forme.
121 Après l'oraison préparatoire et les trois préludes, il sera utile d'exercer les cinq sens de l'imagination sur les mystères de la première et de la seconde contemplation, de la manière suivante:
122 Dans le premier point, je verrai des yeux de l'imagination les personnes, méditant et contemplant, dans le détail, les circonstances dans lesquelles elles se trouvent, et tâchant de tirer de cette vue quelque profit.
123 Dans le second point, j'entendrai, à l'aide de l'imagination, ce qu'elles disent ou peuvent dire, réfléchissant en moi-même pour en tirer quelque profit.
124 Dans le troisième, je m'imaginerai sentir, respirer et goûter la suavité et la douceur infinies de la Divinité, de l'âme, de ses vertus et de tout le reste, selon la personne que je contemple, réfléchissant en moi-même et m'efforçant d'en retirer de l'utilité.
125 Dans le quatrième, j'exercerai le sens du toucher, embrassant, par exemple, et baisant les endroits où marchent, où reposent les personnes que je contemple, tâchant toujours de le faire avec profit.
126 Je terminerai par un colloque, comme dans la première et la seconde contemplation, et par le Notre Père.
127 Première remarque. On aura soin, cette semaine et les suivantes, de ne lire aucun mystère que l'on ne doive contempler dans la journée ou à l'heure même, de peur que la considération de l'un ne nuise à celle de l'autre.
128 Deuxième remarque. Le premier exercice, qui est la contemplation de l'Incarnation, se fera au milieu de la nuit; le second, au commencement du jour; le troisième, à l'heure de la messe; le quatrième, à l'heure des vêpres; et le cinquième, avant le souper. Chacun de ces exercices durera une heure. Tel est l'ordre que l'on suivra désormais.
129 Troisième remarque. On fera attention que, si la personne qui fait les exercices est d'un âge avancé ou d'une santé faible, ou, bien que robuste, si elle se trouve en quelque manière affaiblie par les exercices de la première semaine, il sera mieux, cette seconde semaine, qu'elle s'abstienne, au moins quelquefois, de se lever au milieu de la nuit. Elle fera alors une contemplation le matin, une autre à l'heure de la messe et une troisième avant le dîner; puis une répétition de ces trois exercices à l'heure des vêpres et l'application des sens avant le souper.
130 Quatrième remarque. Dans cette seconde semaine, on modifiera de la manière suivante la deuxième, la septième et la dixième des additions de la première semaine.
Deuxième addition. Aussitôt que je serai réveillé, je me mettrai devant les yeux la contemplation que je dois faire, excitant en moi un vif désir de connaître davantage le Verbe incarné, pour le suivre de plus près et le servir avec plus de fidélité.
Sixième addition. Je rappellerai fréquemment à ma mémoire la vie et les mystères de Jésus-Christ, Notre-Seigneur, depuis son Incarnation jusqu'au mystère que je contemple actuellement.
Septième addition. Je choisirai la lumière ou les ténèbres; je profiterai de la sérénité ou de l'obscurité du ciel, autant que j'espérerai en retirer de l'utilité pour trouver ce que je désire.
Dixième addition. Celui qui fait les exercices doit s'efforcer de se conformer à la nature des mystères qu'il contemple; car quelques-uns demandent des sentiments et des oeuvres de pénitence, et d'autres ne les exigent pas. Enfin, on observera les dix additions avec beaucoup de soin.
131 Cinquième remarque. Dans les exercices autres que celui du milieu de la nuit et du matin, on fera l'équivalent de la deuxième addition de la manière qui suit: quelques instants avant l'heure de l'exercice que je suis sur le point de faire, je me représenterai où je vais et devant qui je dois paraître; puis, je repasserai brièvement le sujet que je dois méditer ou contempler, et, après avoir fait la troisième addition, je commencerai mon exercice.
132 La première contemplation du second jour sera la présentation au Temple; la seconde, la fuite en Égypte comme en un lieu d'exil. On fera sur ces deux contemplations deux répétitions et l'application des sens, de la même manière que le jour précédent.
133 Quoique celui qui fait les exercices ne manque ni de force corporelle ni de dispositions spirituelles, il lui sera quelquefois utile, pour trouver plus efficacement ce qu'il désire, de diminuer le nombre des exercices depuis ce second jour jusqu'au quatrième inclusivement. Il pourra donc ne faire qu'une contemplation le matin et une autre à l'heure de la messe. Il les répétera à l'heure des vêpres, et appliquera les sens avant le souper.
134 Dans la première contemplation, on considérera comment l'Enfant Jésus était soumis à ses parents dans la maison de Nazareth; et dans la seconde, comment ils le retrouvèrent dans le Temple. On fera également deux répétitions et l'application des sens.
135 Nous venons de considérer l'exemple de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans deux états de vie: dans le premier, qui est celui de l'observation des commandements, lorsqu'il était sous l'obéissance de ses parents; dans le second, qui est celui de la perfection évangélique, lorsqu'il resta dans le Temple, abandonnant son père adoptif et sa Mère selon la nature pour vaquer uniquement au service de son Père éternel. Nous commencerons donc ici, tout en contemplant sa vie, à rechercher devant Dieu, et à lui demander avec instance la grâce de nous faire connaître en quel état ou genre de vie sa divine Majesté veut se servir de nous. Pour introduction à cet examen, nous découvrirons dans l'exercice suivant, d'un côté, l'intention de Jésus-Christ, notre Seigneur, et, de l'autre, celle de l'ennemi de la nature humaine, et nous apprendrons ce que nous devons faire pour nous mettre en état de parvenir à la perfection, dans quelque état ou genre de vie que Dieu, notre Seigneur, nous aura donné de choisir.
136 L'oraison préparatoire est toujours la même.
137 Le premier prélude consiste à se rappeler le fait historique de la méditation. Ici c'est, d'un côté, Jésus-Christ qui appelle tous les hommes et veut les réunir sous son étendard; de l'autre, c'est Lucifer qui les appelle sous le sien.
138 Le second prélude est la composition de lieu. Ici, on se représentera une vaste plaine près de Jérusalem, au milieu de laquelle se trouve Notre-Seigneur Jésus-Christ, chef souverain de tous les hommes vertueux, et une autre plaine près de Babylone, où est Lucifer, le chef des ennemis.
139 Le troisième prélude consiste à demander ce que je veux obtenir. Dans cet exercice ce sera, premièrement, la connaissance des ruses du chef des méchants et le secours dont j'ai besoin pour m'en défendre; secondement, la connaissance de la véritable vie, qui nous est montrée par le chef souverain et légitime, et la grâce nécessaire pour l'imiter.
140 Dans le premier point, je me représenterai le chef du parti ennemi dans cette vaste campagne de Babylone, assis dans une chaire élevée, toute de feu et de fumée, sous des traits horribles et d'un aspect épouvantable.
141 Dans le second point, je considérerai comment il appelle autour de lui des démons innombrables; comme il les répand, les uns dans une ville, les autres dans une autre, et ainsi dans tout l'univers, n'oubliant aucune province, aucune condition, aucun lieu, aucune personne en particulier.
142 Dans le troisième point, j'écouterai le discours qu'il leur adresse, comme il leur ordonne avec menaces de jeter des filets et des chaînes. Ils doivent tenter les hommes, en leur inspirant d'abord le désir des richesses, comme il fait le plus souvent lui-même, afin de les conduire plus facilement à l'amour du vain honneur du monde, et de là à un orgueil sans bornes. De sorte que le premier degré de la tentation, ce sont les richesses; le second, les honneurs; le troisième, l'orgueil; et de ces trois degrés il porte les hommes à tous les autres vices.
143 A l'opposé, on se représentera également le chef souverain et véritable, qui est Jésus-Christ, notre Seigneur.
144 Dans le premier point, je considérerai comment Jésus-Christ, se tient en un lieu humble, dans une vaste plaine des environs de Jérusalem, beau et plein de grâce.
145 Dans le second point, je considérerai comment le Seigneur du monde entier choisit un si grand nombre de personnes, les Apôtres, les disciples et tant d'autres, et comment il les envoie dans tout l'univers répandre sa doctrine sacrée parmi les hommes de tous les âges et de toutes les conditions.
146 Dans le troisième, j'écouterai le discours que Jésus-Christ, notre Seigneur, adresse à tous ses serviteurs et à tous ses amis qu'il envoie à cette expédition. Il leur recommande d'aider tous les hommes, en les attirant premièrement à une entière pauvreté spirituelle, et non moins à la pauvreté réelle, si la divine Majesté l'a pour agréable et veut les appeler à cet état; secondement, au désir des opprobres et des mépris, parce que de ces deux choses naît l'humilité. De sorte qu'il y a, comme au troisième point précédent, trois degrés; le premier, la pauvreté opposée aux richesses; le second, les opprobres et les mépris opposés à l'honneur du monde: le troisième, l'humilité opposée à l'orgueil; et de ces trois degrés ils porteront les hommes à toutes les autres vertus.
147 Dans un premier colloque, je demanderai à Notre-Dame qu'elle m'obtienne de son Fils et Seigneur la grâce d'être reçu sous son étendard: premièrement, par la parfaite pauvreté spirituelle, et même, si la divine Majesté l'a pour agréable, et veut me choisir et m'admettre à cet état, par la pauvreté réelle; secondement, en souffrant les opprobres et les injures, afin de l'imiter en cela plus parfaitement, pourvu que je puisse les souffrir sans péché de la part du prochain, et sans déplaisir de sa divine Majesté. Je terminerai ce colloque par le Je vous salue Marie. Dans le second colloque, je m'adresserai à Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour qu'il m'obtienne de Dieu le Père la même grâce, et je réciterai la prière Âme du Christ. Dans le troisième colloque, je demanderai la même grâce à Dieu le Père, le suppliant de me l'accorder lui-même, et je réciterai le Notre Père.
148 Cet exercice se fera une première fois au milieu de la nuit, et une seconde fois le matin. On en fera deux répétitions: l'une à l'heure de la messe, et l'autre à l'heure de vêpres, toujours en finissant par les trois colloques à Notre-Dame, au Fils et au Père. L'exercice suivant, appelé des trois classes d'hommes19, se fera avant le souper.
149 Le même jour on fera la méditation des trois classes d'hommes pour se déterminer à suivre la plus parfaite.
L'oraison préparatoire ordinaire.
150 Le premier prélude est l'histoire qui doit servir de base à la méditation. Nous supposons ici trois classes d'hommes composées chacune de deux personnes. Toutes les trois ont acquis dix mille ducats, sans se proposer purement et uniquement le motif de l'amour de Dieu. Et elles veulent se sauver et trouver Dieu, notre Seigneur, dans la paix, en se déchargeant d'un poids qui les arrête, et en surmontant l'obstacle qu'elles rencontrent à leur dessein dans l'affection au bien qu'elles ont acquis.
151 Le second prélude est la composition de lieu. Ici, je me considérerai moi-même en présence de Dieu, notre Seigneur, et de tous les Saints, dans la disposition de désirer et de connaître ce qui sera le plus agréable à sa divine volonté.
152 Le troisième prélude est la demande de ce que l'on veut obtenir. Ici, je demanderai la grâce de choisir ce qui sera en effet le plus glorieux à la divine Majesté, et le plus avantageux au salut de mon âme.
153 Le premier homme20 voudrait se défaire de l'affection qu'il éprouve pour le bien qu'il possède, afin de trouver Dieu, notre Seigneur, dans la paix, et de pouvoir opérer son salut; mais il n'emploie de fait aucun moyen avant l'heure de la mort.
154 Le deuxième21 homme veut détruire cette affection; mais il le veut à la condition de conserver le bien acquis: il voudrait amener Dieu à son désir, et il ne peut se déterminer à quitter ce qu'il possède pour aller à Dieu, quand même ce parti serait le meilleur pour lui.
155 Le troisième homme veut aussi se dégager de cette affection, et il le veut de telle sorte, qu'elle n'est pas plus portée à conserver la somme acquise qu'à ne pas la conserver. Il ne consultera, pour la retenir ou pour s'en défaire, que le mouvement intérieur de la grâce, et ce qui lui paraîtra le meilleur pour le service et la louange de la divine majesté. En attendant, il veut se conduire comme ayant tout abandonné de coeur, et s'efforce de ne désirer ni ce qu'il possède ni aucun autre bien sur la terre que dans la seule considération du service de la majesté divine; en sorte que le désir de pouvoir mieux servir Dieu, notre Seigneur, sera son unique règle pour se déterminer à retenir le bien qu'il a acquis ou à s'en dépouiller.
156 On terminera cet exercice par les trois colloques de la contemplation des deux étendards.
157 Il faut remarquer que, quand nous éprouvons de la répugnance ou une affection contraire à la pauvreté actuelle, quand nous ne sommes pas dans une véritable indifférence entre la pauvreté et les richesses, il est très utile, pour détruire cette affection déréglée, de demander dans les colloques, malgré les mouvements de la nature, que le Seigneur daigne nous appeler à ce genre de pauvreté, en lui protestant que nous le voulons, que nous le lui demandons, que nous l'en supplions, pourvu que ce soit pour la gloire et le service de sa divine Bonté.
159 Cette contemplation se fera une première fois au milieu de la nuit, et une seconde fois le matin. On en fera deux répétitions, l'une à l'heure de la messe, l'autre à l'heure des vêpres; enfin l'application des sens avant le souper. Avant chacun des cinq exercices, on fera toujours l'oraison préparatoire ordinaire et les trois préludes, selon ce qui est expliqué dans la contemplation de l'Incarnation et de la Naissance du Sauveur, et on les terminera par les trois colloques des trois classes, en observant fidèlement la remarque qui suit cet exercice.
160 L'examen particulier, après le dîner et après le souper, se fera sur les fautes et les négligences que l'on aura commises dans les exercices du jour et dans la pratique des additions; et de même les jours suivants.
162 Première remarque. On peut, dans cette seconde semaine, selon le temps que l'on veut y employer et le profit spirituel que l'on en retire, multiplier ou diminuer le nombre des contemplations. Dans le premier cas, on ajoutera les mystères de la visitation22 de Notre-Dame à sainte Élisabeth, de l'adoration des bergers, de la circoncision23 de l'Enfant Jésus, de l'adoration des Mages, et ainsi des autres; dans le second, on en retranchera plusieurs, même de ceux qui sont ici indiqués, puisqu'en les réunissant on ne s'est proposé que de présenter une introduction à la méditation des mystères du Sauveur, afin que l'on puisse les contempler ensuite d'une manière plus complète.
163 Deuxième remarque. La matière de l'élection commencera à se traiter à la contemplation du départ de Notre-Seigneur de Nazareth pour le Jourdain, c'est-à-dire le cinquième jour inclusivement: ce qui doit se faire selon la méthode indiquée plus bas.
164 Troisième remarque. Avant d'entrer dans la matière de l'élection, il sera très utile, pour s'affectionner à la véritable doctrine de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de considérer attentivement les trois modes ou degrés d'humilité suivants, de s'en occuper souvent pendant le jour, en faisant les trois colloques, comme il est recommandé plus bas.
165 Le premier degré d'humilité est nécessaire pour le salut éternel. Il consiste à m'abaisser et à m'humilier autant qu'il me sera possible et qu'il est nécessaire pour obéir en tout à la loi de Dieu, notre Seigneur: de sorte que, quand on m'offrirait le domaine de l'univers, quand on me menacerait de m'ôter la vie, je ne mette pas même en délibération la possibilité de transgresser un commandement de Dieu ou des hommes, qui m'oblige sous peine de péché mortel.
166 Le second degré d'humilité est plus parfait que le premier. Il consiste à me trouver dans une entière indifférence de volonté et d'affection entre les richesses et la pauvreté, les honneurs et les mépris, le désir d'une longue vie ou d'une vie courte, pourvu qu'il en revienne à Dieu une gloire égale et un égal avantage au salut de mon âme. De plus, quand il s'agirait de gagner le monde entier, ou de sauver ma propre vie, je ne balancerais pas à rejeter toute pensée de commettre à cette fin un seul péché véniel.
167 Le troisième degré d'humilité est très parfait. Il comprend les deux premiers, et veut de plus, supposé que la louange et la gloire de la Majesté divine soient égales, que, pour imiter plus parfaitement Jésus-Christ, notre Seigneur, et me rendre de fait plus semblable à lui, je préfère, j'embrasse la pauvreté avec Jésus-Christ pauvre, plutôt que les richesses; les opprobres avec Jésus-Christ rassasié d'opprobres, plutôt que les honneurs; le désir d'être regardé comme un homme inutile et insensé, par amour pour Jésus-Christ, qui le premier a été regardé comme tel, plutôt que de passer pour un homme sage et prudent aux yeux du monde.
168 Il sera donc très utile, pour celui qui désire obtenir ce troisième degré d'humilité, de faire les trois colloques de la méditation des trois classes, demandant à Notre-Seigneur qu'il veuille l'appeler à cette vertu dans un degré plus élevé et plus précieux que les deux premiers, afin de l'imiter et de le servir plus parfaitement, pourvu que le service et la louange de sa divine Majesté s'y trouvent également, ou davantage.
169 La première condition requise pour faire une bonne élection est, de notre part, que l'oeil de notre intention soit simple. Je ne dois considérer qu'une seule chose, la fin pour laquelle je suis créé. Or cette fin est la gloire de Dieu, notre Seigneur, et le salut de mon âme; donc, quelle que soit la chose que je me décide à choisir, ce doit être pour qu'elle m'aide à obtenir cette fin: me gardant de subordonner et d'attirer la fin au moyen, mais dirigeant le moyen vers la fin. Un grand nombre de personnes commencent souvent par se déterminer à embrasser l'état conjugal, par exemple, qui n'est qu'un moyen, puis à servir dans cet état Dieu, notre Seigneur, ce qui est notre fin. D'autres commencent également par prendre la résolution d'accepter des bénéfices ecclésiastiques, et elles pensent ensuite aux moyens de servir Dieu en possédant ces bénéfices. Aucune de ces personnes ne va droit à Dieu; mais toutes veulent que Dieu vienne droit à leurs affections déréglées; et, par conséquent, elles font de la fin le moyen, et du moyen la fin. Elles mettent en dernier lieu ce qu'elles devraient avoir premièrement en vue. Car nous devons en premier lieu nous proposer de servir Dieu, ce qui est notre fin; et, en second lieu, d'accepter un bénéfice ou de choisir l'état de mariage, si cela nous paraît plus convenable, ce qui est le moyen pour arriver à notre fin. Aucun motif ne doit donc me déterminer à choisir ou à rejeter tout ce qui est proprement moyen, que le service et la louange de Dieu, notre Seigneur, et le salut éternel de mon âme.
170 Première règle. Il est nécessaire que toutes les choses dont nous voulons faire élection soient indifférentes ou bonnes en elles-mêmes, et admises dans l'Église catholique, notre sainte Mère. Elles ne peuvent donc jamais être mauvaises, ni contraires à ce que l'Église reçoit.
171 Seconde règle. Il est des choses qui rendent l'élection invariable, comme sont le sacerdoce, le mariage, etc.; il en est d'autres qui la laissent variable, comme sont les bénéfices ecclésiastiques et les biens temporels, que l'on peut accepter et abandonner à volonté.
172 Troisième règle. Lorsqu'on a fait une élection qui est, de sa nature, invariable, par exemple, lorsqu'on s'est engagé dans le mariage ou dans les ordres sacrés, il n'y a plus à y revenir, puisque le lien est essentiellement indissoluble. Si donc on n'a pas fait cette élection avec maturité et sans affection déréglée, comme on le devait, il faut tâcher de s'en repentir, et de mener une vie régulière dans l'état que l'on a choisi, bien que cette élection ne soit pas, ce semble, une vocation divine, puisqu'elle s'est faite avec une intention oblique et avec affection déréglée. Beaucoup de personnes se trompent en prenant une élection semblable pour une vocation divine: car la vocation divine est toujours pure et sans souillure, sans mélange des inclinations de la chair et des sens, ni d'aucune autre affection désordonnée.
173 Quatrième règle. Si l'on a fait d'une manière sage et convenable, sans prendre conseil de la chair ni du monde, une élection qui est en elle-même variable, il n'y a pas de raison pour faire de nouveau l'élection. Il suffira de se perfectionner dans l'état que l'on a choisi, autant qu'on le pourra.
174 Remarque. Mais si cette élection variable n'a pas été faite avec une intention droite et une affection réglée, il sera utile de la faire de nouveau, si on a le désir de produire des fruits de salut abondants et très agréables à la Majesté divine.
175 Le premier temps est lorsque Dieu, notre Seigneur, meut et attire tellement la volonté, que, sans douter ni pouvoir douter, l'âme pieuse suit ce qui lui est montré; comme le firent saint Paul et saint Matthieu, en suivant Jésus-Christ, notre Seigneur.
176 Le second, lorsque l'âme reçoit beaucoup de lumière et de connaissance au moyen des consolations et des désolations intérieures qu'elle éprouve, et par l'expérience du discernement des esprits.
177 Le troisième est tranquille. L'homme, considérant d'abord pourquoi il est créé, c'est-à-dire pour louer Dieu, notre Seigneur, et sauver son âme, et touché du désir d'obtenir cette fin, choisit comme moyen un état ou genre de vie parmi ceux que l'Église autorise, pour mieux travailler au service de son Seigneur et au salut de son âme. J'appelle temps tranquille celui où l'âme n'est pas agitée de divers esprits, et fait usage de ses puissances naturelles, librement et tranquillement.
178 Si l'élection ne se fait pas dans le premier ou dans le second temps, voici deux manières de la faire dans le troisième.
179 Second point. Dans le second point, je dois me mettre devant les yeux la fin pour laquelle je suis créé, savoir: louer Dieu, notre Seigneur, et sauver mon âme. Je dois en outre me trouver dans une entière indifférence, et sans aucune affection désordonnée; de sorte que je ne sois pas plus porté ni affectionné à choisir l'objet proposé qu'à le laisser; ni plus à le laisser qu'à le choisir, gardant l'équilibre de la balance, et prêt à suivre le parti qui me semblera le plus propre à procurer la gloire de Dieu et le salut de mon âme.
180 Troisième point. Dans le troisième point, je demanderai à Dieu, notre Seigneur, qu'il daigne toucher ma volonté, et mettre lui-même dans mon âme ce que je dois faire relativement au choix qui m'occupe, à sa plus grande louange et à sa plus grande gloire, réfléchissant de mon côté avec attention et fidélité, au moyen de l'entendement, afin de faire un choix conforme à sa très sainte volonté et à son bon plaisir.
181 Quatrième point. Dans le quatrième point, je considérerai avec attention, d'un côté, l'utilité et les avantages qui doivent résulter pour moi de l'acceptation de cet emploi ou de ce bénéfice, sous le rapport unique de la louange de Dieu, notre Seigneur, et du salut de mon âme; et, de l'autre, je considérerai les inconvénients et les dangers. Ensuite j'examinerai, avec la même diligence, d'abord l'utilité et les avantages, puis les inconvénients et les dangers du refus.
182 Cinquième point. Dans le cinquième point, après avoir ainsi examiné la question sous ses divers points de vue, je considérerai de quel côté la raison incline davantage; et, ne suivant que sa lumière, sans consulter aucunement les sens, je fixerai mon choix sur la matière que je viens de discuter.
183 Sixième point. L'élection ainsi terminée, je m'empresserai de me mettre en prière en la présence de Dieu, notre Seigneur, et de lui offrir le choix que je viens de faire, afin que sa divine Majesté daigne le recevoir et le confirmer, s'il est conforme à son plus grand service et à sa plus grande gloire.
184 Première règle. L'amour qui me porte et me détermine à choisir tel objet doit venir d'en haut, et descendre de l'amour de Dieu même. Je dois donc, avant d'arrêter mon élection, sentir intérieurement que l'affection plus ou moins grande que j'éprouve pour cet objet est uniquement en considération de mon Créateur et Seigneur.
185 Seconde règle. Je me représenterai un homme que je n'ai jamais vu ni connu; et, lui désirant toute la perfection dont il est capable, j'examinerai ce que je lui dirais de faire et de choisir pour la plus grande gloire de Dieu, notre Seigneur, et pour la plus grande perfection de son âme; puis, me donnant à moi-même les mêmes conseils, je ferai ce que je lui dirais de faire.
186 Troisième règle. Je considérerai, comme si j'étais à l'article de la mort, de quelle manière et avec quel soin je voudrais m'être conduit dans l'élection présente; et, me réglant sur ce que je voudrais avoir fait alors, je le ferai fidèlement maintenant.
187 Quatrième règle. Je considérerai avec attention quelles seront mes pensées au jour du jugement; je me demanderai comment je voudrais avoir délibéré dans l'élection actuelle; et la règle que je voudrais alors avoir suivie est celle que je suivrai à cette heure, afin de me trouver en ce jour dans un entier contentement et dans une grande joie.
188 Remarque. Après avoir exactement observé ces quatre règles, et pourvu ainsi au repos et au salut éternel de mon âme, je ferai mon élection et mon oblation à Dieu, notre Seigneur, comme il a été dit dans le sixième point du premier mode d'élection.
189 Quant aux personnes constituées en dignité dans l'Église ou engagées dans le mariage, il faut, abstraction faite de la grandeur ou de la médiocrité de leur fortune, tenir avec elles la conduite suivante. Lorsque le retraitant n'a pas la facilité, et surtout une volonté ferme de faire l'élection sur certains points qui tombent sous l'élection variable, il est très utile, pour y suppléer, de lui suggérer quelques avis, de lui tracer quelques règles, qui l'aideront à réformer sa conduite personnelle, et sa manière d'être dans l'état de vie qu'il a embrassé. Ainsi, après s'être rappelé qu'il a été créé pour la gloire et la louange de Dieu, notre Seigneur, et pour le salut de son âme, il fera en sorte de rapporter toute sa conduite et son état de vie à cette double fin. Pour arriver à ce but, il réfléchira attentivement, à l'aide des exercices précédents, et d'après les modes d'élection que nous avons exposés, quelle doit être sa maison et le nombre de ses domestiques; comment il doit les conduire et les gouverner; comment il est de son devoir de les instruire par ses discours et par ses exemples; de même, quelle partie de ses revenus il peut employer aux besoins de sa famille et de sa maison, et quelle autre il doit distribuer aux pauvres et consacrer aux bonnes oeuvres. Et il ne doit en tout et pour tout cela ni vouloir, ni chercher autre chose que la plus grande louange et la plus grande gloire de Dieu, notre Seigneur: car il faut que chacun sache qu'il avancera dans les choses spirituelles à proportion qu'il se dépouillera de son amour-propre, de sa volonté propre, et de son propre intérêt.
190 La première contemplation se fera au milieu de la nuit, sur le voyage de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de Béthanie à Jérusalem, jusqu'à la dernière Cène inclusivement. Elle comprend l'oraison préparatoire, trois préludes six points et un colloque.
L'oraison préparatoire est la même que les semaines précédentes.
191 Le premier prélude consiste à se rappeler l'histoire du mystère. Dans la contemplation présente, on se rappellera comment Jésus-Christ, notre Seigneur, envoya de Béthanie à Jérusalem deux de ses disciples pour préparer la Cène; comment il y alla lui-même ensuite avec les autres disciples; comment, après la manducation de l'agneau pascal, à la fin du repas dont elle fut suivie, il leur lava les pieds, leur donna son très saint corps et son précieux sang; comment, enfin, il leur adressa le discours de la Cène, lorsque Judas fut sorti pour aller vendre son Seigneur.
192 Le second est la composition de lieu. Ici, il consistera à considérer le chemin de Béthanie à Jérusalem. Est-il large ou étroit? uni ou raboteux? De même, le lieu de la Cène. Est-il vaste ou resserré? disposé de telle ou de toute autre manière?
193 Le troisième est la demande de ce que l'on veut obtenir. Dans cette contemplation, je demanderai la tristesse, la douleur et la confusion, puisque c'est pour mes péchés que le Seigneur va à sa Passion.
194 Dans le premier point, je verrai les personnes de la Cène; puis, réfléchissant en moi-même, je m'efforcerai d'en retirer quelque profit. Dans le second, j'entendrai ce qu'elles disent, et je tâcherai d'en retirer quelque utilité pour mon âme. Dans le troisième, je regarderai ce qu'elles font, afin d'en retirer quelque fruit.
195 Dans le quatrième, je considérerai, selon le passage de la Passion que je contemple, ce que Jésus-Christ, notre Seigneur, souffre ou désire souffrir en son humanité. Ici, je commencerai à réunir toutes les forces de mon âme pour m'exciter à la douleur, à la tristesse et aux larmes; ce que je ferai avec la même application dans les points suivants.
196 Dans le cinquième, je considérerai comment la Divinité reste cachée durant toute la Passion du Sauveur. Elle pourrait détruire ses ennemis, et elle ne le fait pas; et elle abandonne aux plus cruels tourments la très sainte Humanité qui lui est unie.
197 Dans le sixième, je considérerai que le Sauveur endure toutes ses souffrances pour mes péchés; et je me demanderai ce que je dois faire et souffrir pour lui.
198 Je terminerai par un colloque à Jésus-Christ, notre Seigneur, et par le Notre Père.
199 Il faut remarquer, comme nous l'avons déjà dit en partie, que dans les colloques nous devons, soit pour le raisonnement, soit pour les demandes, consulter le sujet de la méditation et nos dispositions présentes. J'éprouve, par exemple, des tentations ou des consolations; je désire obtenir telle ou telle vertu; j'ai dessein d'embrasser tel parti ou tel autre; je veux m'exciter à la tristesse ou à la joie, selon le mystère que je contemple; dans ces suppositions et dans toutes les autres, mes demandes doivent toujours se rapporter à certains points particuliers que je désire plus vivement obtenir. On peut se contenter d'un seul colloque, que l'on adressera à Jésus-Christ, notre Seigneur, ou en faire trois, si le sujet de la méditation ou la dévotion y porte: l'un à la très Sainte Vierge, l'autre à son divin Fils, le troisième à Dieu le Père, comme il est dit dans la seconde semaine à la fin de la méditation des deux étendards, en observant ce qui est marqué dans la note qui suit l'exercice des trois classes.
200 L'oraison préparatoire ordinaire.
201 Le premier prélude est un précis de l'histoire. Ici, je me rappellerai comment Jésus-Christ, notre Seigneur, descendit avec ses onze disciples de la montagne de Sion, où il venait de célébrer la Cène, dans la vallée de Josaphat. Il en laisse huit dans un endroit de la vallée, et les trois autres dans une partie du jardin; et, se mettant en prière, il répand une sueur comme des gouttes de sang. Il fait par trois fois une prière à son Père; il réveille ses trois disciples; ses ennemis tombent à sa voix; Judas lui donne le baiser de paix; saint Pierre abat une oreille à Malchus; Jésus la lui remet en place; il est pris comme un malfaiteur; on le conduit, en descendant la vallée, et ensuite en remontant la côte, à la maison d'Anne.
202 Le second est de voir le lieu de la contemplation. Ici, je considérerai le chemin de la montagne de Sion à la vallée de Josaphat; de même le jardin: sa longueur, sa largeur, sa disposition, comme l'imagination me le représentera.
203 Le troisième est de demander ce que je veux obtenir. Ce qu'il est convenable de demander dans la Passion, c'est la douleur avec Jésus-Christ dans la douleur; le brisement de l'âme avec Jésus-Christ brisé dans son âme et dans son corps; des larmes, et le sentiment intérieur de tant de maux que Jésus-Christ a soufferts pour moi.
204 Première remarque. Après l'oraison préparatoire et les trois préludes, on suivra, dans cette seconde contemplation, le même ordre pour les points et le colloque que dans la première. A l'heure de la messe et des vêpres, on fera deux répétitions de l'une et de l'autre, et l'application des sens avant le souper; commençant par l'oraison préparatoire et les préludes, selon le sujet de la contemplation, suivant ce qui a été recommandé et expliqué dans la seconde semaine.
205 Deuxième remarque. Autant que l'âge, les forces et les dispositions de la personne qui fait les exercices le permettront, elle fera chaque jour les cinq exercices, au moins.
206 Troisième remarque. Dans cette troisième semaine, on modifiera de la manière suivante la deuxième et la sixième additions:
Deuxième addition. Aussitôt que je serai réveillé, je me représenterai où je vais, et pourquoi; je résumerai brièvement le sujet de ma contemplation; et, selon le mystère que je vais contempler, je m'efforcerai, en me levant et en m'habillant, de m'exciter intérieurement à la douleur et à la tristesse, à la vue des douleurs sans nombre et des souffrances incompréhensibles de Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Sixième addition. Je ne chercherai pas à m'entretenir de pensées consolantes, quoique bonnes et saintes, comme seraient celles de la Résurrection et du Ciel; mais je m'exciterai plutôt à la douleur, à la tristesse, à l'affliction de l'âme; rappelant souvent à ma mémoire les travaux, les fatigues et les douleurs que Notre-Seigneur Jésus-Christ endura depuis le moment de sa naissance jusqu'au mystère de la Passion que je médite maintenant.
207 Quatrième remarque. L'examen particulier se fera sur les exercices et les additions présentes, comme la semaine précédente.
208 La contemplation du milieu de la nuit se fera sur ce qui s'est passé depuis la sortie du jardin jusqu'à la maison d'Anne inclusivement; et celle du matin, depuis la maison d'Anne jusqu'à la maison de Caïphe inclusivement; et ensuite les deux répétitions et l'application des sens, comme il a été dit.
209 Remarque. Supposé que l'on veuille accorder plus de temps aux contemplations sur la Passion, on prendra pour chaque exercice un plus petit nombre de mystères: par exemple, pour la première contemplation, la Cène seulement; pour la seconde, le lavement des pieds; pour la troisième, l'institution du sacrement de l'Eucharistie; pour la quatrième, le discours du Sauveur après la Cène; et ainsi des autres contemplations, jusqu'à la fin de la Passion. Lorsqu'on l'aura terminée, on pourra prendre un jour entier pour repasser la première partie; et un second jour pour la seconde; et enfin un troisième pour toute la Passion. Au contraire, si l'on veut abréger, on peut prendre pour exercice du milieu de la nuit la Cène tout entière; pour celui du matin, le jardin; à l'heure de la messe, la maison d'Anne; à l'heure des vêpres, la maison de Caïphe; avant le souper, la maison de Pilate; omettant les répétitions et les applications des sens; faisant chaque jour cinq exercices distincts, et prenant pour chaque exercice un nouveau mystère de Notre-Seigneur Jésus-Christ. La Passion ainsi méditée, on peut la repasser tout entière dans un seul jour en un ou plusieurs exercices, comme on jugera pouvoir en retirer plus de fruit.
210 Première règle. C'est moins dans l'usage du pain que dans celui des autres mets, que nous devons pratiquer la tempérance. A l'égard d'une nourriture aussi commune, il y a moins à craindre du côté de la tentation et du dérèglement de l'appétit.
211 Deuxième règle. La tempérance doit se pratiquer dans le boire plutôt que dans l'usage du pain. Par conséquent, il faudra considérer avec attention ce qui est utile touchant la boisson, pour le prendre, et ce qui est nuisible pour le retrancher.
212 Troisième règle. A l'égard des autres aliments, on doit garder la tempérance la plus exacte et la plus absolue; parce que l'appétit est plus prompt à se dérégler en ce point, comme la tentation, de son côté, nous porte davantage à rechercher ce qui peut flatter l'appétit. Or il y a deux manières de pratiquer la tempérance, et d'éviter le dérèglement dans la nourriture. La première consiste à se contenter habituellement de mets communs et grossiers; la seconde, à les prendre en petite quantité, s'ils sont délicats.
213 Quatrième règle. Pourvu que l'on ne s'expose pas au danger de tomber dans quelque infirmité, plus on retranchera de ce qu'on pourrait convenablement prendre, plus on parviendra promptement à connaître le juste24 milieu que l'on doit garder dans la nourriture25 et la boisson26, pour deux raisons: la première, parce que cette générosité de notre part nous dispose à recevoir souvent plus de lumières intérieures, de consolations célestes, d'inspirations divines, qui nous montrent clairement ce qui nous convient; la seconde, parce que, supposé que cette abstinence volontaire ne nous laisse pas assez de force de corps et d'esprit pour vaquer aux exercices spirituels, nous pourrons facilement juger la juste mesure d'aliments que notre tempérament exige.
214 Cinquième règle. Pendant que nous prenons notre nourriture, considérons, comme si nous le voyions de nos yeux, Notre-Seigneur Jésus-Christ prenant lui-même sa nourriture avec ses Apôtres. Voyons comment il mange, comment il boit, comment il regarde, comment il parle; et efforçons-nous de l'imiter. Que cette considération soit la principale occupation de notre entendement, de sorte que l'attention à la réfection corporelle ne soit que secondaire. Ainsi nous sera-t-il facile de mettre plus d'ordre et de modération dans la manière de nous conduire et de nous gouverner pendant nos repas.
215 Sixième règle. D'autres fois, on pourra faire quelques réflexions sur la vie des Saints, s'occuper d'une pieuse pensée, ou d'une affaire spirituelle que l'on a en vue. L'esprit attaché à ces différents objets s'arrêtera moins au plaisir sensuel que peut causer la nourriture par le sens du goût.
216 Septième règle. Mais il faut par-dessus tout se garder que l'esprit ne soit tout entier à l'action matérielle du repas, modérer la précipitation à laquelle nous porterait l'appétit, être maître de soi-même, relativement à la quantité de la nourriture et à la manière de la prendre.
217 Huitième règle. Afin de prévenir tout dérèglement, il est très utile, après le dîner ou après le souper, ou dans tout autre moment dans lequel l'appétit ne se fait pas sentir, de déterminer la quantité que l'on doit prendre au dîner ou au souper suivant. Que cette pratique s'observe tous les jours; et, quelles que soient les attaques de la sensualité et de la tentation, que l'on se garde de passer la quantité prescrite. Je dis plus: si l'on veut vaincre entièrement tout appétit déréglé et toute tentation, et n'avoir rien à craindre des efforts de l'ennemi, que l'on prenne moins, lorsqu'on est tenté de prendre davantage.
218 L'oraison préparatoire ordinaire.
219 Le premier prélude est l'histoire de la contemplation. Ici, je me rappellerai comment, Jésus ayant rendu le dernier soupir sur la Croix, son corps resta séparé de son âme, sans cesser d'être uni à la Divinité; comment son âme bienheureuse, unie aussi à la Divinité, descendit aux enfers, délivra les âmes des Justes et revint au Sépulcre; comment, enfin, le Sauveur, étant ressuscité, apparut en corps et en âme à sa Mère bénie.
220 Le second est la composition de lieu. Dans la contemplation présente, je me représenterai la disposition du saint Sépulcre, et la maison où se trouve Notre-Dame; considérant en particulier les appartements qui la composent et spécialement la chambre et l'oratoire de la Mère du Sauveur.
221 Le troisième est la demande de ce que l'on veut obtenir. Dans cet exercice, je demanderai la grâce de ressentir une vive allégresse et une joie intense de la gloire et de la joie immense de Jésus-Christ, notre Seigneur.
222 Le premier, le second et le troisième point seront les mêmes que dans la contemplation de la Cène.
223 Dans le quatrième, je considérerai comment la Divinité, qui semblait se cacher dans la Passion, paraît et se manifeste dans la Résurrection par des effets de puissance et de sainteté qui n'appartiennent qu'à elle.
224 Dans le cinquième, je considérerai comment Notre-Seigneur Jésus-Christ exerce auprès des siens l'office de consolateur, le comparant à un ami qui console ses amis.
225 Je terminerai par un ou plusieurs colloques conformes au sujet de la contemplation, et je réciterai le Notre Père.
226 Première remarque. Dans les contemplations suivantes, on parcourra tous les mystères glorieux depuis la Résurrection jusqu'à l'Ascension inclusivement, dans l'ordre marqué à la série des mystères, en gardant la même méthode que dans la semaine de la Passion. Cette première contemplation servira de modèle pour les autres; les préludes seront en rapport avec le sujet de la contemplation; les cinq points seront toujours les mêmes, ainsi que les additions, telles qu'elles se trouvent dans la quatrième remarque. Quant aux répétitions, aux applications des sens, à la manière d'abréger ou de prolonger le temps que l'on veut consacrer à la contemplation des mystères de cette semaine, on peut faire tout ce qui a été dit dans la semaine de la Passion.
227 Deuxième remarque. Communément parlant, c'est dans cette quatrième semaine, plutôt que dans les trois précédentes, que l'on peut se contenter de faire quatre exercices au lieu de cinq; le premier, immédiatement après le lever; le second, à l'heure de la messe ou avant le dîner, au lieu de la première répétition; le troisième à l'heure des vêpres, au lieu de la seconde répétition; le quatrième, qui sera une application des sens sur les trois exercices du jour, avant le souper. On remarquera toujours les endroits les plus importants, qui auront excité en nous de plus vives émotions intérieures, qui nous auront fait éprouver plus de goût spirituel, et l'on s'y arrêtera davantage.
228 Troisième remarque. Quoique dans toutes les contemplations, on ait déterminé le nombre des points, par exemple: trois, cinq, etc., celui qui fait les exercices n'en a pas moins la liberté de les augmenter ou de les diminuer, selon qu'il le trouvera plus avantageux. Pour cela, il lui sera très utile, avant de commencer une contemplation, de prévoir et de fixer en nombre certain les points qui doivent la partager.
229 Quatrième remarque. Dans cette semaine, on modifiera de la manière suivante la deuxième, la sixième, la septième et la dernière des dix additions.
Deuxième addition. Aussitôt que je me réveillerai, je me mettrai devant les yeux le sujet de la contemplation que je vais faire, avec le désir de me réjouir et de me pénétrer de la joie immense et de la vive allégresse que ressent Notre-Seigneur Jésus-Christ ressuscité.
Sixième addition. Je rappellerai à ma mémoire des pensées capables de faire naître dans mon coeur le contentement, la joie et l'allégresse spirituelle, comme serait la gloire du Ciel.
Septième addition. Je profiterai de la clarté du jour ou des agréments de la saison, comme de la fraîcheur en été, et en hiver de la chaleur du soleil ou de celle du feu, autant que par ce moyen mon âme pourra s'aider à se réjouir en son Créateur et en son Rédempteur.
Dixième addition. Au lieu de m'adonner à la pénitence, je viserai à garder la tempérance et à tenir le milieu en toutes choses, à moins qu'il ne se rencontre des jeûnes de précepte, des abstinences commandées par l'Église; car ceux-ci doivent toujours s'observer, lorsqu'il n'y a pas d'empêchement légitime.
230 Commençons par reconnaître deux vérités: la première, que l'on doit faire consister l'amour dans les oeuvres bien plus que dans les paroles.
231 La seconde, que l'amour réside dans la communication mutuelle des biens. D'un côté, la personne qui aime donne et communique à celle qui est aimée ce qu'elle a, ou de ce qu'elle a, ou ce qu'elle peut donner et communiquer; de l'autre, la personne qui est aimée agit de même à l'égard de celle qui l'aime. Si l'une a de la science, elle la communique à celle qui n'en a pas; j'en dis autant des honneurs et des richesses, et réciproquement.
L'oraison préparatoire ordinaire.
232 Le premier prélude est la composition de lieu. Dans la contemplation présente, je me considérerai en la présence de Dieu, notre Seigneur, sous les yeux des Anges et des Saints qui intercèdent pour moi.
233 Le second est la demande de la grâce que l'on veut obtenir. Ici, je demanderai la connaissance intime de tant de bienfaits que j'ai reçus de Dieu, afin que dans un vif sentiment de gratitude, je me consacre sans réserve au service et à l'amour de sa divine Majesté.
234 Dans le premier point, je rappellerai à ma mémoire les bienfaits que j'ai reçus: ceux qui me sont communs avec tous les hommes, la Création, la Rédemption, et ceux qui me sont particuliers, considérant très affectueusement tout ce que Dieu, notre Seigneur, a fait pour moi, tout ce qu'il m'a donné de ce qu'il a, et combien il désire se donner lui-même à moi, autant qu'il le peut, selon la disposition de sa divine Providence. Puis, faisant un retour sur moi-même, je me demanderai ce que la raison et la justice m'obligent de mon côté à offrir et à donner à sa divine Majesté, c'est-à-dire toutes les choses qui sont à moi et moi-même avec elles; et, comme une personne qui veut faire agréer un don, je dirai du fond de l'âme: Prenez, Seigneur, et recevez toute ma liberté, ma mémoire, mon entendement et toute ma volonté; tout ce que j'ai et tout ce que je possède. Vous me l'avez donné, Seigneur, je vous le rends; tout est à vous, disposez-en selon votre bon plaisir. Donnez-moi votre amour; donnez-moi votre grâce: elle me suffit.
235 Dans le second point, je considérerai Dieu présent dans toutes les créatures. Il est dans les éléments, leur donnant l'être; dans les plantes, leur donnant la végétation; dans les animaux, leur donnant le sentiment; dans les hommes, leur donnant l'intelligence; il est en moi-même de ces différentes manières, me donnant tout à la fois l'être, la vie, le sentiment et l'intelligence. Il a fait plus: il a fait de moi son temple; et, dans cette vue, il m'a créé à la ressemblance et à l'image de sa divine Majesté. Ici encore je ferai un retour sur moi-même, comme il a été dit dans le premier point, ou de toute autre manière qui me paraîtrait plus convenable: ce qui doit s'observer dans les points suivants.
236 Dans le troisième point, je considérerai Dieu agissant et travaillant pour moi dans tous les objets créés, puisqu'il est effectivement dans les lieux, dans les éléments, dans les plantes, dans les fruits, dans les animaux, etc., comme un agent, leur donnant et leur conservant l'être, la végétation, le sentiment, etc. Puis je ferai, comme dans les points précédents, un retour sur moi-même.
237 Dans le quatrième point, je contemplerai que tous les biens et tous les dons descendent d'en haut: ma puissance limitée dérive de la puissance souveraine et infinie qui est au-dessus de moi; de même la justice, la bonté, la compassion, la miséricorde, etc.; comme les rayons émanent du soleil, comme les eaux découlent de leur source, etc. Ensuite, je réfléchirai sur moi-même, comme il a été dit, et je terminerai par un colloque suivi du Notre Père.
238 La première manière de prier consiste à réfléchir sur les dix commandements de Dieu, les sept péchés capitaux, les trois puissances de l'âme et les cinq sens corporels. Aussi, est-ce plutôt un exercice spirituel très utile à l'âme et qui la dispose à offrir à Dieu une prière qui lui soit agréable, qu'une méthode ou manière de faire oraison proprement dite.
239 En premier lieu, on fera l'équivalent de la seconde addition de la seconde semaine. Cet exercice préliminaire consiste à se reposer un peu l'esprit avant de commencer à prier, ce que je ferai assis ou en me promenant, comme il me semblera plus avantageux, considérant attentivement où je vais et à quelle fin. Cette addition doit se faire au commencement de toutes les manières de prier.
240 Dans une prière préparatoire, je demanderai à Dieu, notre Seigneur, la grâce de connaître en quoi j'ai manqué aux dix commandements. Je lui demanderai aussi la grâce et le secours nécessaires pour me corriger à l'avenir et l'intelligence parfaite de ses préceptes, afin de les garder plus fidèlement, à la plus grande gloire et à la plus grande louange de sa divine Majesté.
241 Puis, venant au premier commandement, je considérerai et j'examinerai comment je l'ai observé et en quoi je l'ai transgressé. Cet examen durera ordinairement le temps de dire trois fois le Notre Père30 et trois fois le Je vous salue Marie. Si dans cet espace de temps je découvre des fautes, j'en demanderai pardon à Dieu et je réciterai le Notre Père. Je ferai la même chose pour chacun des dix commandements.
242 Remarque. Lorsqu'on s'examine sur un commandement que l'on ne transgresse pas ordinairement, il n'est pas nécessaire de s'y arrêter aussi longtemps. Mais, en général, on donnera plus ou moins de temps à la considération d'un précepte et à la recherche des fautes commises contre ce précepte, suivant que l'on se trouvera plus ou moins sujet à y manquer. Cette remarque s'applique également aux péchés capitaux.
243 Après avoir achevé l'examen sur tous les commandements, et m'être accusé moi-même devant Dieu, je lui demanderai la grâce et le secours qui me sont nécessaires pour me corriger à l'avenir, et je terminerai par un colloque à Dieu, notre Seigneur, conformément à l'exercice que je viens de faire.
244 Après l'addition, on fera l'oraison préparatoire comme dans l'exercice précédent. L'unique différence est qu'il s'agit ici de péchés que l'on doit éviter, et que là il s'agissait de commandements que l'on doit observer. On suivra, du reste, l'ordre que nous avons tracé; on observera pour le temps la règle que nous avons donnée, et on terminera par un colloque.
245 Pour obtenir une connaissance plus claire des fautes que nous aurons commises, nous considérerons les vertus opposées aux sept péchés capitaux, et, afin que notre résolution de les éviter soit plus efficace, nous nous efforcerons, par de saints exercices, d'acquérir et de posséder les sept vertus contraires à ces vices.
246 On suivra le même ordre et on gardera la même règle que pour les commandements, sans omettre l'addition, l'oraison préparatoire et le colloque.
247 Pour les cinq sens corporels, la méthode est toujours la même; la matière seule est changée.
248 Remarque. Celui qui, dans l'usage de ses sens, veut imiter Jésus-Christ, notre Seigneur, se recommandera dans l'oraison préparatoire à sa divine Majesté; et, après s'être examiné sur chacun des sens, il récitera le Je vous salue Marie ou le Notre Père. Et celui qui, dans l'usage de ses sens, désire imiter Notre-Dame, la priera, dans l'oraison préparatoire, de lui obtenir cette grâce de son Fils et Seigneur; et, après l'examen de chaque sens, il récitera le Je vous salue Marie.
249 La seconde manière de prier consiste à peser attentivement la signification de chaque parole d'une prière.
250 L'addition de la première manière de prier doit se faire également dans la seconde.
251 L'oraison préparatoire sera relative à la personne à laquelle s'adresse la prière que l'on va méditer.
252 Après l'addition et l'oraison préparatoire, à genoux ou assis, selon la disposition du corps et l'attrait de l'âme, les yeux fermés ou fixés en un même endroit, sans les laisser errer de côté et d'autre, on dira la première parole du Notre Père, et on s'arrêtera sur cette parole autant de temps que l'on trouvera de significations, de comparaisons, de goût et de consolation intérieure dans la considération du titre de Père. On fera de même sur chaque parole du Notre Père, ou de toute autre prière que l'on voudra méditer selon cette manière de prier.
253 Première règle. On emploiera une heure à méditer ainsi tout le Notre Père, et après l'avoir terminée, on récitera vocalement ou mentalement, de la manière ordinaire, c'est-à-dire sans pause, le Je vous salue Marie, le Credo31, la prière Âme du Christ et le Salve Regina.
254 Deuxième règle. S'il arrive qu'une ou deux paroles fournissent, même pendant l'heure entière, une matière suffisante à la réflexion, et que l'on trouve à les méditer, du goût et de la consolation spirituelle, on ne se mettra pas en peine de passer outre; mais, l'heure écoulée, on récitera de la manière ordinaire le reste du Notre Père.
255 Troisième règle. Supposé que l'on se soit arrêté une heure entière sur une ou deux paroles du Notre Père, le jour suivant, quand on voudra reprendre la même prière, on dira de la manière ordinaire la parole, ou les paroles que l'on a déjà méditées; puis on commencera à réfléchir sur celle qui suit immédiatement, comme il a été dit dans la seconde règle.
256 Première remarque. Après avoir terminé en un ou plusieurs jours le Notre Père, on méditera, selon la même méthode, le Je vous salue Marie, et ensuite les autres prières, en sorte que l'on continue pendant quelque temps cet exercice sans interruption.
257 Seconde remarque. A la fin de l'oraison, on s'adressera à la personne que l'on a priée, et on lui demandera en peu de paroles les vertus ou les grâces dont on éprouve un plus pressant besoin.
258 La troisième manière de prier est comme en mesure. L'addition sera la même que dans la première et la seconde manière de prier.L'oraison préparatoire, comme dans la seconde manière de prier. Cette troisième manière consiste donc à prier de coeur et à dire de bouche, à chaque respiration ou soupir, une parole du Notre Père ou d'une autre prière, de manière à ne prononcer qu'une seule parole entre une respiration et l'autre. Et l'espace de temps qui s'écoule d'une respiration à l'autre doit s'employer à considérer spécialement la signification de cette parole, ou l'excellence de la personne à laquelle la prière s'adresse, ou notre propre indignité, ou la différence entre tant de grandeur d'un côté, et de l'autre tant de bassesse. On prononcera de la même manière toutes les paroles du Notre Père; puis on récitera les autres prières, c'est-à-dire le Je vous salue Marie, l'Âme du Christ, le Credo et le Salve Regina, selon la manière ordinaire de prier.
259 Première règle. Le jour suivant, ou à une autre heure du même jour, où l'on désirerait prier de cette manière, on récitera le Je vous salue Marie en mesure, et les autres prières selon la manière ordinaire de prier, et ainsi des autres que nous avons indiquées.
260 Seconde règle. Celui qui voudrait prier plus longtemps selon cette troisième manière peut réciter de suite plusieurs des prières marquées ou même toutes; mais toujours en ne proférant qu'une parole d'une respiration à l'autre, comme il a été expliqué.
261 Remarque. Dans les mystères suivants, les paroles qui sont entre guillemets32 sont de l'Évangile même, et non pas les autres. Chaque mystère sera ordinairement divisé en trois points, afin que l'on puisse les méditer et les contempler avec une plus grande facilité.
L'Ange étant entré où était Marie, lui dit: Je vous salue, pleine de grâce; vous concevrez dans votre sein et vous enfanterez un fils.34
Et voilà qu'Élisabeth, votre parente, a conçu elle-même un fils dans sa vieillesse.
Voici la servante du Seigneur; qu'il me soit fait selon votre parole.
Et dès qu'Élisabeth s'entendit saluer par Marie, l'enfant tressaillit dans son sein; et Élisabeth fut remplie du Saint-Esprit, et elle s'écria à haute voix: Vous êtes bénie entre les femmes, et le fruit de vos entrailles est béni.
Mon âme glorifie le Seigneur.
Marie demeura environ trois mois avec Élisabeth; puis elle s'en retourna dans sa maison.
Joseph partit de Galilée pour Bethléem, afin de marquer sa soumission à César, avec Marie son épouse, qui était enceinte.
Elle enfanta son fils premier-né, elle l'enveloppa de langes, et le coucha dans une crèche.
Aussitôt une troupe nombreuse de la milice céleste se mit à louer Dieu en disant: Gloire à Dieu au plus haut des cieux.
Je vous annonce une grande joie: aujourd'hui il vous est né un Sauveur.
Ils allèrent en toute hâte, et trouvèrent Marie et Joseph, et l'Enfant couché dans une crèche.
Les bergers s'en retournèrent glorifiant et louant le Seigneur.
On lui donne le nom de Jésus, nom que l'Ange avait révélé avant que l'Enfant fût conçu dans le sein de sa Mère.
Nous avons vu son étoile en Orient, et nous sommes venus l'adorer.
Et, se prosternant, ils l'adorèrent, et lui offrirent pour présents de l'or, de l'encens et de la myrrhe.
Et, ayant été avertis en songe de ne pas aller retrouver Hérode, ils retournèrent en leur pays par un autre chemin.
deux tourterelles ou deux jeunes colombes.
le prit entre ses bras, en disant: C'est maintenant, Seigneur, que vous laisserez aller en paix votre serviteur.
Anne étant survenue, elle louait le Seigneur et parlait de cet Enfant à tous ceux qui attendaient la rédemption d'Israël.
Levez-vous, prenez l'Enfant et sa Mère, et fuyez en Égypte.
Et, se levant pendant la nuit, il se retira en Égypte.
Il y demeura jusqu'à la mort d'Hérode.
Levez-vous, prenez l'Enfant et sa Mère, et allez dans la terre d'Israël.
Et, se levant, il retourna dans la terre d'Israël.
Et il leur était soumis.
Il croissait en sagesse, en âge et en grâce.
N'est-ce pas là ce charpentier?
Mon Fils, pourquoi en avez-vous usé ainsi avec nous?il répondit:
Ne saviez-vous pas qu'il faut que je m'emploie aux choses qui regardent mon Père?
Faites ceci maintenant; car c'est ainsi qu'il faut que nous accomplissions toute justice.
Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes complaisances.
Le tentateur, s'approchant, lui dit: Si vous êtes le Fils de Dieu, commandez que ces pierres se changent en pains. Jetez-vous en bas. Je vous donnerai toutes ces choses, si, vous prosternant, vous m'adorez.
Les Anges s'approchèrent et ils le servaient.
Ils n'ont pas de vin.Et elle fait aux serviteurs ce commandement:
Faites tout ce qu'il vous dira.
Et il manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui.
Ôtez cela d'ici; et ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic.
Bienheureux, leur dit-il, sont les pauvres d'esprit; ceux qui sont doux; ceux qui sont miséricordieux; ceux qui pleurent; ceux qui ont faim et soif de la justice; ceux qui ont le coeur pur; ceux qui sont pacifiques, et ceux qui souffrent persécution.
Que votre lumière brille devant les hommes, afin qu'ils voient vos bonnes oeuvres, et glorifient votre Père qui est dans le Ciel.
Et moi je vous le dis, aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent.
Hommes de peu de foi, pourquoi craignez-vous?
Quel est celui-ci à qui les vents et la mer obéissent?
C'est moi, ne craignez point.Saint Pierre, par son ordre, s'élance vers lui et marche sur les eaux; mais, sa foi venant à chanceler, il commença à enfoncer. Jésus-Christ, notre Seigneur, le délivre de ce danger et le reprend de son peu de foi; ensuite il entra dans la barque, et le vent cessa.
Voici que je vous envoie comme des brebis au milieu des loups; soyez donc prudents comme les serpents et simples comme les colombes.
Ne possédez ni or ni argent; vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement.Il leur donne aussi la matière de leurs prédications:
Allez, prêchez en disant que le royaume de Dieu est proche.
Et se tenant derrière Jésus, à ses pieds, elle commença à les arroser de ses larmes, et elle les essuyait avec ses cheveux, et elle baisait ses pieds, et elle les oignait de parfums.
Beaucoup de péchés lui sont remis, parce qu'elle a beaucoup aimé. Et il dit à cette femme: Votre foi vous a sauvée; allez en paix.
Tous en mangèrent et furent rassasiés; et on emporta douze paniers pleins des morceaux qui étaient restés.
il se transfigura en leur présence; et son visage devint resplendissant comme le soleil; et ses vêtements, blancs comme la neige.
C'est là mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis toutes mes complaisances: écoutez-le.Ses disciples ayant entendu cette voix, tombèrent de crainte sur leur visage; et Jésus-Christ, notre Seigneur, les toucha et leur dit:
Levez-vous, et ne craignez point. Ne dites à personne ce que vous venez de voir, jusqu'à ce que le Fils de l'homme soit ressuscité d'entre les morts.
Je suis la résurrection et la vie; celui qui croit en moi, quand même il serait mort, vivra... Croyez-vous cela?
Lazare, venez dehors.
Pourquoi la perte de ce parfum?Jésus excuse Madeleine de nouveau en disant:
Pourquoi faites-vous de la peine à cette femme? C'est une bonne action qu'elle vient de faire à mon égard.
Détachez-les, leur dit-il, et amenez-les moi; et si quelqu'un vous dit quelque chose, dites-lui que le Seigneur en a besoin, et aussitôt il vous les laissera emmener.
Hosanna au Fils de David: béni soit celui qui vient au nom du Seigneur: Hosanna au plus haut des cieux.
Il était chaque jour enseignant dans le Temple.
Je vous dis, en vérité, que l'un de vous doit me trahir.
Seigneur, vous me lavez les pieds!Il ignorait que le Sauveur leur donnait en cela un exemple d'humilité; c'est pourquoi Jésus leur dit:
Je vous ai donné l'exemple, afin que vous fassiez aux autres ce que je vous ai fait à vous-mêmes.
Prenez et mangez.La Cène étant terminée, Judas sort pour vendre Jésus-Christ, notre Seigneur.
Demeurez ici, tandis que je vais là pour prier.
Mon Père, s'il est possible, que ce calice passe loin de moi; qu'il en soit cependant, non comme je le veux, mais comme vous le voulez. Et, étant réduit comme à l'agonie, il priait plus longuement.
Mon âme est triste jusqu'à la mort.Et il sua du sang en si grande abondance, que saint Luc dit:
Il eut une sueur comme de gouttes de sang qui coulait jusqu'à terre.Ce qui suppose que ses vêtements en étaient tout imbibés.
Vous êtes venus à moi comme à un voleur avec des épées et des bâtons pour me prendre. J'étais tous les jours au milieu de vous, enseignant dans le Temple, et vous ne m'avez pas arrêté.Et à ces mots:
Qui cherchez-vous?ses ennemis tombent renversés.
Remettez votre épée dans le fourreau. Et il guérit la blessure du serviteur.
Est-ce ainsi que vous répondez au grand Prêtre?
sortit et pleura amèrement.
Christ, prophétise-nous; qui est celui qui t'a frappé?Et ils répétaient contre lui mille autres blasphèmes.
Nous l'avons trouvé pervertissant notre nation et défendant de payer le tribut à César.
Je ne trouve en lui aucun sujet de condamnation.
Ils s'écrièrent tous ensemble: Ne délivrez pas celui-ci, mais Barabbas.
Je vous salue, roi des Juifs; et ils lui donnaient des gifles.
Jésus sortit donc, portant une couronne d'épines et un manteau de pourpre, et Pilate leur dit: Voilà l'homme.Et aussitôt que les pontifes le virent, ils s'écrièrent:
Crucifiez-le! crucifiez-le!
Nous n'avons pas d'autre roi que César.
Jésus de Nazareth, roi des Juifs.
J'ai soif; et les soldats lui donnèrent du fiel et du vinaigre; il dit qu'il était abandonné; il dit:
Tout est consommé; il dit:
Mon Père, je remets mon âme entre vos mains.
Ah! toi qui détruis le Temple de Dieu, descends de la Croix.Ses vêtements furent partagés, son côté fut percé d'une lance, et il en coula de l'eau et du sang.
Êtes-vous encore sans intelligence?
Qui nous ôtera la pierre de l'entrée du tombeau?
Vous cherchez Jésus de Nazareth; il est ressuscité, il n'est plus ici.
Je vous salue.Et elles s'approchent de lui, se jettent à ses pieds et l'adorent.
Ne craignez point. Allez, dites à mes frères qu'ils se rendent en Galilée; c'est là qu'ils me verront.
Le Seigneur est vraiment ressuscité, et il est apparu à Simon.
Ô hommes de peu de sens, et dont le coeur est lent à croire tout ce qu'ont annoncé les prophètes! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît de la sorte, et qu'il entrât ainsi dans sa gloire?
La paix soit avec vous.
Recevez le Saint-Esprit, les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez.
Si je ne vois pas, je ne croirai pas.
Portez ici votre doigt, et voyez, et ne soyez pas incrédule, mais fidèle.
Mon Seigneur et mon Dieu!Jésus-Christ lui dit:
Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru.
ils ne pouvaient plus le tirer, tant il y avait de poissons.
C'est le Seigneur.Et Pierre se jette à la mer et vient vers Jésus.
Paissez mes brebis.
Tout pouvoir m'a été donné dans le ciel et sur la terre.
Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit.
Ensuite il a été vu de plus de cinq cents frères assemblés.
Ensuite il s'est fait voir à Jacques.
Enfin, après tous les autres, il s'est fait voir à moi qui ne suis qu'un avorton.Il apparut aussi en âme aux saints Pères des Limbes, et après les en avoir retirés, et avoir réuni son âme à son corps, il apparut souvent aux disciples et il conversait avec eux.
ils le virent s'élever dans les airs; et une nuée l'environna et le déroba à leurs yeux.
Hommes de Galilée, pourquoi demeurez-vous ici, regardant le ciel? Ce Jésus, qui, du milieu de vous, s'est élevé dans le ciel, viendra un jour de la même manière que vous l'y avez vu monter.
314 Première règle. A l'égard des personnes qui vont de péché mortel en péché mortel, la conduite ordinaire de l'ennemi est de leur proposer des plaisirs apparents, leur occupant l'imagination de jouissances et de voluptés sensuelles, afin de les retenir et de les plonger plus avant dans leurs vices et dans leurs péchés. Le bon esprit, au contraire, agit en elles d'une manière opposée: il aiguillonne et mord leur conscience, en leur faisant sentir les reproches de la raison.
315 Deuxième règle. Dans les personnes qui travaillent courageusement à se purifier de leurs péchés, et vont de bien en mieux dans le service de Dieu, notre Seigneur, le bon et le mauvais esprit opèrent en sens inverse de la règle précédente. Car c'est le propre du mauvais esprit de leur causer de la tristesse et des tourments de conscience, d'élever devant elles des obstacles, de les troubler par des raisonnements faux, afin d'arrêter leur progrès dans le chemin de la vertu; au contraire, c'est le propre du bon esprit de leur donner du courage et des forces, de les consoler, de leur faire répandre des larmes, de leur envoyer de bonnes inspirations, et de les établir dans le calme, leur facilitant la voie et levant devant elles tous les obstacles, afin qu'elles avancent de plus en plus dans le bien.
316 Troisième règle. De la consolation spirituelle. J'appelle consolation un mouvement intérieur qui est excité dans l'âme, par lequel elle commence à s'enflammer dans l'amour de son Créateur et Seigneur, et en vient à ne savoir plus aimer aucun objet créé sur la terre pour lui-même, mais uniquement dans le Créateur de toutes choses. La consolation fait encore répandre des larmes, qui portent à l'amour de son Seigneur l'âme touchée du regret de ses péchés, ou de la Passion de Jésus-Christ, notre Seigneur, ou de toute autre considération qui se rapporte directement à son service et à sa louange. Enfin, j'appelle consolation toute augmentation d'espérance, de foi et de charité, et toute joie intérieure qui appelle et attire l'âme aux choses célestes et au soin de son salut, la tranquillisant et la pacifiant dans son Créateur et Seigneur.
317 Quatrième règle. De la désolation spirituelle. J'appelle désolation le contraire de ce qui a été dit dans la troisième règle: les ténèbres et le trouble de l'âme, l'inclination aux choses basses et terrestres, les diverses agitations et tentations qui la portent à la défiance, et la laissent sans espérance et sans amour, triste, tiède, paresseuse, et comme séparée de son Créateur et Seigneur. Car comme la consolation est opposée à la désolation, les pensées que produit l'une sont nécessairement contraires à celles qui naissent de l'autre.
318 Cinquième règle. Il importe, au temps de la désolation, de ne faire aucun changement, mais de demeurer ferme et constant dans ses résolutions, et dans la détermination où l'on était avant la désolation, ou au temps même de la consolation. Car, comme c'est ordinairement le bon esprit qui nous guide et nous conseille dans la consolation, ainsi, dans la désolation, est-ce le mauvais esprit, sous l'inspiration duquel nous ne pouvons prendre un chemin qui nous conduise à une bonne fin.
319 Sixième règle. Quoique nous ne devions jamais changer nos résolutions au temps de la désolation, il est cependant très utile de nous changer courageusement nous-mêmes, je veux dire notre manière d'agir, et de la diriger tout entière contre les attaques de la désolation. Ainsi, il convient de donner plus de temps à la prière, de méditer avec plus d'attention, d'examiner plus sérieusement notre conscience, et de nous adonner davantage aux exercices convenables de pénitence.
320 Septième règle. Que celui qui est dans la désolation considère comment le Seigneur, pour l'éprouver, le laisse à ses puissances naturelles, afin qu'il résiste, comme de lui-même, aux diverses agitations et tentations de l'ennemi; car il le peut avec le secours divin qui lui reste toujours, quoiqu'il ne le sente pas, parce que le Seigneur lui a soustrait cette ferveur sensible, cet amour ardent, cette grâce puissante, ne lui laissant que la grâce ordinaire, mais suffisante pour le salut éternel.
321 Huitième règle. Que celui qui est dans la désolation travaille à se conserver dans la patience, vertu directement opposée aux attaques qui lui surviennent; et qu'il espère qu'il sera bientôt consolé, pourvu qu'il emploie comme nous l'avons dit dans la sixième règle, les moyens nécessaires pour vaincre la désolation.
322 Neuvième règle. La désolation a trois causes principales. Premièrement, elle peut être un châtiment. Notre tiédeur, notre paresse, notre négligence dans nos exercices de piété, éloignent de nous la consolation spirituelle. Secondement, elle est une épreuve. Dieu veut éprouver ce que nous pouvons, et jusqu'à quel point nous sommes capables de nous avancer dans son service et de travailler à sa gloire, privés de ces consolations abondantes et de ces faveurs spéciales. Troisièmement, elle est une leçon. Dieu veut nous donner la connaissance certaine, l'intelligence pratique et le sentiment intime qu'il ne dépend pas de nous de faire naître ou de conserver dans nos coeurs une dévotion tendre, un amour intense accompagné de larmes, ni aucune sorte de consolation spirituelle; mais que tout est un don et une grâce de sa divine bonté; il veut nous apprendre à ne pas placer trop haut notre demeure, en permettant à notre esprit de s'élever et de se laisser aller à quelque mouvement d'orgueil ou de vaine gloire, nous attribuant à nous-mêmes les sentiments de la dévotion et les autres effets de la consolation spirituelle.
323 Dixième règle. Que celui qui est dans la consolation pense comment il se comportera au temps de la désolation, et qu'il fasse dès lors provision de courage pour le moment de l'épreuve.
324 Onzième règle. Qu'il s'efforce aussi de s'humilier et de s'abaisser autant qu'il lui est possible, pensant de combien peu de chose il est capable au temps de la désolation, lorsqu'il est privé de la grâce sensible ou de la consolation. Au contraire, celui qui est dans la désolation se rappellera qu'il peut beaucoup avec la grâce, qu'elle lui suffit pour résister à tous ses ennemis, pourvu qu'il s'appuie sur le secours de son Créateur et Seigneur.
325 Douzième règle. Notre ennemi ressemble à une femme: il en a la faiblesse et l'opiniâtreté. C'est le propre d'une femme, lorsqu'elle se dispute avec un homme, de perdre courage et de prendre la fuite aussitôt que celui-ci lui montre un visage ferme; l'homme, au contraire, commence-t-il à craindre et à reculer, la colère, la vengeance et la férocité de cette femme s'accroissent et n'ont plus de mesure. De même, c'est le propre de l'ennemi de faiblir, de perdre courage et de prendre la fuite avec ses tentations, quand la personne qui s'exerce aux choses spirituelles montre beaucoup de fermeté contre le tentateur, et fait diamétralement le contraire de ce qui lui est suggéré. Au contraire, si la personne qui est tentée commence à craindre et à supporter l'attaque avec moins de courage, il n'est pas de bête féroce sur la terre dont la cruauté égale la malice infernale avec laquelle cet ennemi de la nature humaine s'attache à poursuivre ses perfides desseins.
326 Treizième règle. Sa conduite est encore celle d'un séducteur: il demande le secret et ne redoute rien tant que d'être découvert. Un séducteur qui sollicite la fille d'un père honnête, ou la femme d'un homme d'honneur, veut que ses discours et ses insinuations restent secrets. Il craint vivement, au contraire, que la fille ne découvre à son père, ou la femme à son mari, ses paroles trompeuses et son intention perverse; il comprend facilement qu'il ne pourrait alors réussir dans ses coupables desseins. De même, quand l'ennemi de la nature humaine veut tromper une âme juste par ses ruses et ses artifices, il désire, il veut qu'elle l'écoute et qu'elle garde le secret. Mais si cette âme découvre tout à un confesseur éclairé, ou à une autre personne spirituelle qui connaisse les tromperies et les ruses de l'ennemi, il en reçoit un grand déplaisir; car il sait que toute sa malice demeurera impuissante, du moment où ses tentatives seront découvertes et mises au grand jour.
327 Quatorzième règle. Enfin, il imite un capitaine qui veut emporter une place où il espère faire un riche butin. Il asseoit son camp, il considère les forces et la disposition de cette place, et il l'attaque du côté le plus faible. Il en est ainsi de l'ennemi de la nature humaine. Il rôde sans cesse autour de nous; il examine de toutes parts chacune de nos vertus théologales, cardinales et morales, et, lorsqu'il a découvert en nous l'endroit le plus faible et le moins pourvu des armes du salut, c'est par là qu'il nous attaque et qu'il tâche de remporter sur nous une pleine victoire.
329 Première règle. C'est le propre de Dieu et de ses Anges, lorsqu'ils agissent dans une âme, d'en bannir le trouble et la tristesse que l'ennemi s'efforce d'y introduire et d'y répandre la véritable allégresse et la vraie joie spirituelle. Au contraire, c'est le propre de l'ennemi de combattre cette joie et cette consolation intérieure par des raisons apparentes, des subtilités et de continuelles illusions.
330 Deuxième règle. Il appartient à Dieu seul de donner de la consolation à l'âme sans cause précédente, parce qu'il n'appartient qu'au Créateur d'entrer dans l'âme, d'en sortir, et d'y exciter des mouvements intérieurs qui l'attirent tout entière à l'amour de sa divine Majesté. Je dis sans cause, c'est-à-dire sans aucun sentiment précédent ou connaissance préalable d'aucun objet qui ait pu faire naître cette consolation au moyen des actes de l'entendement et de la volonté.
331 Troisième règle. Lorsqu'une cause a précédé la consolation, le bon et le mauvais Ange peuvent également en être l'auteur; mais leur fin est bien différente. Le bon Ange a toujours en vue le profit de l'âme qu'il désire voir croître en grâce et monter de vertu en vertu. Le mauvais Ange, au contraire, veut toujours arrêter ses progrès dans le bien pour l'attirer enfin à ses intentions coupables et perverses.
332 Quatrième règle. C'est le propre de l'Ange mauvais, lorsqu'il se transforme en Ange de lumière, d'entrer d'abord dans les sentiments de l'âme pieuse, et de finir par lui inspirer les siens propres. Ainsi, il commence par suggérer à cette âme des pensées bonnes et saintes, conformes à ses dispositions vertueuses; mais bientôt, peu à peu, il tâche de l'attirer dans ses pièges secrets et de la faire consentir à ses coupables desseins.
333 Cinquième règle. Nous devons examiner avec grand soin la suite et la marche de nos pensées. Si le commencement, le milieu et la fin, tout en elles est bon et tendant purement au bien, c'est une preuve qu'elles viennent du bon Ange; mais si, dans la suite des pensées qui nous sont suggérées, il finit par s'y rencontrer quelque chose de mauvais ou de dissipant, ou de moins bon que ce que nous nous étions proposé de faire, ou si ces pensées affaiblissent notre âme, l'inquiètent, la troublent, en lui ôtant la paix, la tranquillité et le repos dont elle jouissait d'abord, c'est une marque évidente qu'elles procèdent du mauvais esprit, ennemi de notre avancement et de notre salut éternel.
334 Sixième règle. Quand l'ennemi de la nature humaine aura été découvert et reconnu à sa queue de serpent, c'est-à-dire par la fin pernicieuse à laquelle il nous porte, il sera utile à la personne qui aura été tentée de reprendre aussitôt la suite des bonnes pensées qu'il lui a suggérées, d'en examiner le principe, et de voir comment, peu à peu, il a tâché de la faire déchoir de la suavité et de la joie spirituelle dans laquelle elle était, jusqu'à l'amener à sa fin dépravée. L'expérience qu'elle acquerra par cette recherche et cette observation lui fournira les moyens de se mettre en garde dans la suite contre les artifices ordinaires de l'ennemi.
335 Septième règle. Le bon Ange a coutume de toucher doucement, légèrement et suavement l'âme de ceux qui font chaque jour des progrès dans la vertu; c'est, pour ainsi dire, une goutte d'eau qui pénètre une éponge. Le mauvais Ange, au contraire, la touche durement, avec bruit et agitation, comme l'eau qui tombe sur la pierre. Quant à ceux qui vont de mal en pis, les mêmes esprits agissent sur eux d'une manière tout opposée. La cause de cette diversité est dans la disposition même de l'âme, qui est contraire ou semblable à la leur. Si elle est contraire, ils entrent avec bruit et commotion; on sent facilement leur présence. Si elle est semblable, ils entrent paisiblement et en silence, comme dans une maison qui leur appartient et dont la porte leur est ouverte.
336 Huitième règle. Lorsque la consolation spirituelle est sans cause qui l'ait précédée, il est certain qu'elle est à l'abri de toute illusion, puisque, comme nous l'avons dit dans la seconde de ces règles, elle ne peut venir que de Dieu, notre Seigneur. Cependant la personne qui reçoit cette consolation doit apporter beaucoup d'attention et de vigilance à distinguer le temps même de la consolation du temps qui la suit immédiatement. Dans ce second temps, où l'âme est encore toute fervente, et comme pénétrée des restes précieux de la consolation passée, elle forme de son propre raisonnement, par une suite de ses habitudes naturelles et en conséquence de ses conceptions et de ses jugements, sous l'inspiration du bon ou du mauvais esprit, des résolutions et des décisions qu'elle n'a pas reçues immédiatement de Dieu, notre Seigneur, et que, par conséquent, il est nécessaire de bien examiner avant de leur accorder une entière créance et de les mettre à exécution.
338 Première règle. Si je distribue des aumônes à des parents, à des amis ou à des personnes pour lesquelles je me sens de l'affection, je dois observer quatre points dont il a été fait mention dans la matière de l'élection. Le premier est que l'amour qui m'engage à faire l'aumône à ces personnes vienne du Ciel et ait sa source dans l'amour même que j'ai pour Dieu, notre Seigneur. Je dois donc, avant d'agir, sentir intérieurement que l'amour plus ou moins grand que je leur porte est pour Dieu et voir Dieu dans le motif qui me fait les aimer davantage.
339 Le second consiste à me représenter un homme que je n'ai jamais vu ou connu et à qui je désire toute la perfection à laquelle il peut atteindre dans l'exercice de son emploi; puis je ferai moi-même, ni plus ni moins, ce que je voudrais qu'il fît dans la distribution de ses aumônes, prenant pour moi la règle que je lui conseillerais de suivre et que je juge être conforme à la plus grande gloire de Dieu et à la plus grande perfection de son âme.
340 Le troisième, à examiner, comme si je me trouvais à l'article de la mort, comment je voudrais m'être comporté dans l'exercice de mon emploi; et, me réglant sur ce que je désirerais alors avoir fait, le mettre en pratique maintenant.
341 Le quatrième, à considérer ce que je penserai au jour du jugement. Comment voudrais-je alors m'être acquitté de ce ministère? Quelle règle voudrais-je avoir suivie? C'est celle que je dois suivre à cette heure.
342 Deuxième règle. Lors donc que l'on ressent de l'inclination ou de l'affection pour les personnes entre lesquelles on désire répartir les aumônes, il faut d'abord suspendre sa détermination, puis faire sur les quatre points de la règle précédente des réflexions sérieuses, recherchant et examinant la source de l'affection que l'on éprouve, et ne se décider à faire l'aumône qu'après avoir, conformément à cette première règle, ôté entièrement et rejeté de son coeur toute affection déréglée.
343 Troisième règle. Bien que l'on puisse légitimement accepter des bénéfices ecclésiastiques pour en distribuer le fruit, quand on se sent appelé de Dieu, notre Seigneur, à cet état, il est cependant certain que dans la détermination de la quantité qu'il est permis de s'appliquer à soi-même et de celle que l'on doit distribuer aux autres, on peut avec raison craindre d'excéder et de blesser sa conscience. Il sera donc bon de réformer sa conduite en consultant les règles présentes.
344 Quatrième règle. Pour les raisons que nous avons déjà exposées et pour beaucoup d'autres, le meilleur et le plus sûr, lorsqu'il s'agit de dépenses personnelles et domestiques, est toujours de restreindre et de diminuer de plus en plus, jusqu'à se rapprocher autant que possible du Pontife souverain, notre règle et notre modèle, qui est Jésus-Christ, notre Seigneur. C'est conformément à cette règle que le Concile de Carthage, auquel assista saint Augustin détermine et ordonne que l'ameublement de l'évêque soit commun et pauvre. Ceci doit s'appliquer à tous les états; ce qui n'empêche pas d'avoir égard et de se conformer à ce que le rang et la condition réclament. Saint Joachim et sainte Anne, pour citer un exemple de personnes engagées dans le mariage, divisaient leurs biens en trois parts. Ils donnaient la première aux pauvres; ils consacraient la seconde au culte divin et au service du Temple; ils se servaient de la troisième pour leur entretien et celui de leur maison.
346 Première règle. On nomme assez communément scrupule un jugement libre et volontaire par lequel nous prononçons qu'une action est péché lorsqu'elle ne l'est pas; par exemple, lorsqu'il arrive à quelqu'un de juger qu'il a péché en mettant le pied par hasard sur deux brins de paille en forme de croix. Or ceci est plutôt, à proprement parler un jugement erroné qu'un scrupule.
347 Deuxième règle. Mais après avoir marché sur cette croix, ou après avoir fait, dit ou pensé une chose quelconque, il me vient du dehors la pensée que j'ai péché; d'un autre côté, il me semble intérieurement que je n'ai pas péché. J'éprouve en cela du trouble, en tant que je doute et ne doute pas: or c'est là à proprement parler un scrupule et une tentation que l'ennemi fait naître en moi.
348 Troisième règle. Il faut abhorrer la première sorte de scrupule, dont il est question dans la première règle, parce qu'elle n'est qu'erreur. Quant à la seconde, indiquée dans la seconde règle, elle est très utile, durant quelque temps, à l'âme qui s'adonne aux exercices spirituels; car elle sert grandement à la rendre plus nette et plus pure, en la séparant entièrement de toute apparence de péché, selon cette parole de saint Grégoire: C'est le propre des bonnes âmes de reconnaître une faute là où il n'y a pas de faute.
349 Quatrième règle. L'ennemi considère attentivement si une âme est peu scrupuleuse, ou si elle est timorée. Si elle est timorée, il tâche de la rendre délicate à l'extrême pour la jeter plus facilement dans le trouble et l'abattre. Il voit, par exemple, qu'elle ne consent ni au péché mortel, ni au péché véniel, ni à rien de ce qui a l'ombre de péché délibéré; il tâchera, puisqu'il ne peut la faire tomber dans l'apparence même d'une faute, de lui faire juger qu'il y a péché là ou il n'y a pas de péché, comme dans une parole ou une pensée sans importance. Au contraire, si l'âme est peu scrupuleuse, l'ennemi s'efforcera de la rendre moins scrupuleuse encore. Par exemple, si jusqu'ici elle ne faisait aucun cas des péchés véniels, il tâchera qu'elle fasse peu de cas des péchés mortels: et si elle faisait encore quelque cas des péchés mortels, il la portera à y faire beaucoup moins d'attention ou à les mépriser entièrement.
350 Cinquième règle. L'âme qui désire avancer dans la vie spirituelle doit toujours procéder d'une manière contraire à celle de l'ennemi. S'il veut la rendre peu délicate, qu'elle tâche de se rendre délicate et timorée; mais si l'ennemi s'efforce de la rendre timorée à l'excès pour la pousser à bout, qu'elle tâche de se consolider dans un sage milieu pour y demeurer entièrement en repos.
351 Sixième règle. Lorsqu'une âme pieuse désire dire ou faire quelque chose qui ne s'écarte, ni des usages de l'Église, ni des traditions de nos pères, et qu'elle croit propre à procurer la gloire de Dieu, notre Seigneur, s'il lui vient du dehors une pensée ou une tentation de ne pas dire ou faire cette chose, sous prétexte de vaine gloire ou d'autre défaut, qu'elle élève son entendement à son Créateur et Seigneur; et si elle voit que cette parole ou cette action tend au service de Dieu, ou du moins ne lui est pas contraire, qu'elle fasse ce qui est diamétralement opposé à ce que lui suggère la tentation, répondant à l'ennemi avec saint Bernard: Ce n'est pas pour toi que j'ai commencé, ce n'est pas pour toi que je cesserai.
353 Première règle. Renoncer à tout jugement propre et se tenir prêt à obéir promptement à la véritable Épouse de Jésus-Christ, notre Seigneur, c'est-à-dire à la sainte Église hiérarchique, notre Mère.
354 Deuxième règle. Louer la confession sacramentelle, la réception du très saint sacrement de l'Eucharistie au moins une fois dans l'année, beaucoup plus tous les mois, et plus encore chaque semaine, avec les dispositions requises et convenables.
355 Troisième règle. Louer l'usage d'entendre souvent la sainte Messe; louer de même les chants ecclésiastiques, la psalmodie et les prières, même prolongées, dans l'église ou dans tout autre lieu convenable. Approuver la détermination de certaines heures pour la célébration de l'Office divin, pour la récitation des Heures canoniales et de toute autre prière.
356 Quatrième règle. Louer beaucoup les ordres religieux, la virginité et la continence et ne pas louer autant le mariage.
357 Cinquième règle. Louer les voeux de religion, d'obéissance, de pauvreté, de chasteté, et les autres par lesquels on s'oblige à des oeuvres de surérogation et de perfection. Or, il est à remarquer que le voeu ayant essentiellement pour matière les choses qui se rapprochent davantage de la perfection évangélique, on ne doit pas faire voeu de ce qui s'en éloigne, comme d'entrer dans le commerce ou de s'engager dans le mariage.
358 Sixième règle. Louer l'usage de prier les Saints et de vénérer leurs reliques; louer les stations, les pèlerinages, les indulgences, les jubilés, les faveurs spirituelles accordées par les souverains Pontifes dans l'intention d'obtenir de Dieu le triomphe de l'Église sur les infidèles, l'usage de brûler des cierges dans nos temples.
359 Septième règle. Louer les lois de l'Église relativement aux jeûnes et aux abstinences du Carême, des Quatre-Temps, des Vigiles, du vendredi et du samedi; louer aussi les pénitences, non seulement intérieures, mais encore extérieures.
360 Huitième règle. Louer le zèle pour la construction et l'ornement des églises; louer de même l'usage des tableaux et des statues et les vénérer en vue des objets qu'ils représentent.
361 Neuvième règle. Louer enfin tous les préceptes de l'Église, et être toujours prêt à chercher des raisons pour les justifier et les défendre, et jamais pour les condamner ou les blâmer.
362 Dixième règle. Nous devons être plus portés à approuver et à louer les règlements, les recommandations et la conduite de nos supérieurs qu'à les blâmer: car, supposé que quelques-unes de leurs dispositions ne soient pas, ou puissent ne pas être dignes d'éloges, il est toujours vrai, à raison des murmures et du scandale, qu'il y a plus d'inconvénients que d'utilité à les condamner, soit en prêchant en public, soit en parlant devant le bas peuple; ce qui l'irriterait contre ses supérieurs temporels ou spirituels. Cependant, comme il est dangereux de parler mal des supérieurs en leur absence devant le peuple, ainsi peut-il être utile de manifester l'irrégularité de leur conduite aux personnes mêmes qui ont le pouvoir d'y porter remède.
363 Onzième règle. Louer la théologie positive et scolastique; car, comme c'est particulièrement le propre des Docteurs positifs, tels que saint Jérôme, saint Augustin, saint Grégoire et les autres, d'exciter les affections et de porter les hommes à aimer et à servir de tout leur pouvoir Dieu, notre Seigneur; ainsi le but principal des Scolastiques, tels que saint Thomas, saint Bonaventure, le Maître des Sentences et ceux qui les ont suivis, est de définir et d'expliquer, selon le besoin des temps modernes, les choses nécessaires au salut éternel, d'attaquer et de manifester clairement toutes les erreurs et les faux raisonnements des ennemis de l'Église. En effet, plus récents que les premiers, non seulement ils se servent avantageusement de l'intelligence de la sainte Écriture et des écrits des saints Docteurs positifs; mais éclairés et enseignés eux-mêmes par la vertu divine, ils s'aident encore, pour notre instruction, des Conciles, des canons et des constitutions de notre Mère la sainte Église.
364 Douzième règle. Évitons de faire des comparaisons entre les personnes encore vivantes et les Saints qui sont dans le Ciel; car on est grandement exposé à se tromper en ce point. Gardons-nous donc de dire: Cet homme est plus savant que saint Augustin; celui-ci est un autre saint François, s'il ne le surpasse; celui-là est un autre saint Paul en vertu, en sainteté, etc.
365 Treizième règle. Pour ne nous écarter en rien de la vérité, nous devons toujours être disposés à croire que ce qui nous paraît blanc est noir, si l'Église hiérarchique le décide ainsi. Car il faut croire qu'entre Jésus-Christ, notre Seigneur, qui est l'Époux, et l'Église, qui est son Épouse, il n'y a qu'un même Esprit qui nous gouverne et nous dirige pour le salut de nos âmes, et que c'est par le même Esprit et le même Seigneur qui donna les dix commandements qu'est dirigée et gouvernée notre Mère la sainte Église.
366 Quatorzième règle. Quoiqu'il soit très vrai que personne ne puisse se sauver sans être prédestiné et sans avoir la foi et la grâce, il faut s'observer beaucoup dans la manière de parler et de discourir sur ce sujet.
367 Quinzième règle. Nous ne devons parler ni beaucoup ni souvent de la prédestination; mais si on en dit parfois quelque chose, que l'on évite de donner au peuple l'occasion de tomber dans quelque erreur et de lui faire dire ce que l'on entend quelquefois: Si je dois être damné ou sauvé, c'est une affaire déjà décidée; mes actions bonnes ou mauvaises ne feront pas qu'il en arrive autrement. Et, sur ce raisonnement, on tombe dans l'indolence, et on néglige les oeuvres utiles au profit de l'âme et nécessaires au salut.
368 Seizième règle. Il faut également prendre garde qu'à force de parler sans explication et sans distinction de l'excellence et de la vertu de la foi, on ne donne occasion au peuple de devenir négligent et paresseux pour les bonnes oeuvres, soit avant la conversion, lorsque la foi n'est pas encore animée par la charité, soit après.
369 Dix-septième règle. Ne nous arrêtons pas et n'insistons pas tellement sur l'efficacité de la grâce, que nous fassions naître dans les coeurs le poison de l'erreur qui nie la liberté. Il est permis sans doute de parler de la foi et de la grâce, autant qu'il est possible avec le secours divin, pour la plus grande louange de la divine Majesté; mais non de telle manière, surtout en des temps si difficiles, que les oeuvres et le libre arbitre en reçoivent quelque préjudice, ou soient regardés, celui-ci comme un vain mot, et celles-là comme inutiles.
370 Dix-huitième règle. Bien que nous devions surtout désirer que les hommes servent Dieu, notre Seigneur, par le motif du pur amour, nous devons cependant louer beaucoup la crainte de la divine Majesté; car, non seulement la crainte filiale est pieuse et très sainte, mais la crainte servile même, lorsque l'homme ne s'élève pas à quelque chose de meilleur et de plus utile, l'aide beaucoup à sortir du péché mortel; et, lorsqu'il en est sorti, il parvient facilement à la crainte filiale, qui est tout agréable et chère à Dieu, parce qu'elle est inséparablement unie à son amour.
pointmodifié.
la puissemodifié.
très-difficilemodifié.
à vêpresmodifié.
et quotidienajouté.
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Oraison dominicalemodifié.
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Pour obtenir l'amour divinmodifié.
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