LES PROPHÉTIES MESSIANIQUES
I Il y a dans les Évangiles des paroles « qui sont dures à entendre » (Jean, VII, 61) ; il y en a aussi qui soulèvent des difficultés et provoquent la controverse, telles sont celles, en particulier, où les Évangélistes déclarent, à de si nombreuses reprises, que « tout cela arriva afin que s'accomplit ce que le Seigneur avait annoncé par les prophètes » (Math., I, 22). Comme si le récit qui nous est donné de la vie de Jésus avait été délibérément arrangé de façon à montrer précisément que par ses actes, sa mort et sa résurrection, le Maître a réalisé les prophéties et que c'est de lui qu'ont parlé les Écritures. « Jésus ayant appris que Jean avait été livré se retira dans la Galilée ; il quitta Nazareth et vint demeurer à Capharnaüm, située près de la mer, dans le territoire de Zabulon et de Naphtali, afin que s'accomplît ce qui avait été annoncé par le prophète Isaïe » (Math., IV, 12-14). ...« Une grande foule le suivit, il guérit tous les maladies et il leur recommanda sévèrement de ne pas le faire connaître, afin que s'accomplît ce qui avait été annoncé par le prophète Isaïe » (Math., XII, 16-17)... « Lorsqu'ils approchèrent de Jérusalem et qu'ils furent arrivés à Bethphagé, vers la montagne des Oliviers, Jésus envoya deux disciples en leur disant : allez au village qui est devant vous, vous trouverez aussitôt une ânesse attachée et un ânon avec elle ; détachez-les et amenez-les moi. Si quelqu'un vous dit quelque chose, vous répondrez : le Seigneur en a besoin. Et à l'instant il les laissera aller. Or ceci arriva, afin que s'accomplît ce qui avait été annoncé par le prophète. » (Math., XXI, 1-4)... « Malgré tant de miracles qu'il avait faits en leur présence, ils ne croyaient pas en lui, afin que s'accomplît la parole qu'a prononcé le prophète Isaïe » (Jean, XII, 37-38)... Mais il y a plus : n'est-ce pas Jésus lui-même qui prétend réaliser dans ses actes ce que l'Écriture avait annoncé de lui : « cela,est arrivé, dira-t-il, en faisant allusion à ceux qui l'ont haï, afin que s'accomplît la parole qui est dans leur loi » (Jean, XV, 25). Reprenons quelques-unes des paroles du Maître : « Si vous croyiez Moïse, vous me croiriez aussi, parce qu'il a écrit de moi » (Jean, V, 46)... « Voici, nous montons à Jérusalem et tout ce qui a été écrit par les prophètes au sujet du Fils de l'homme s'accomplira » (Luc, XVIII, 31)... « Ce n'est pas de vous tous que je parle, je connais ceux que j'ai choisis. Mais il faut que l'Écriture s'accomplisse; Dès à présent, je vous le dis avant que la chose arrive, afin que, lorsqu'elle arrivera, vous croyiez à ce que je suis » (Jean, XIII, 18, 19)... « Père, j'ai gardé ceux que tu m'as donnés et aucun d'eux ne s'est perdu, sinon le fils de la perdition, afin que, l'Écriture fût accomplie » (Jean, XVII, 12)... « Remets ton épée en place, car tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée. Crois-tu que je ne pourrais pas invoquer mon Père, qui me donnerait aussitôt, plus de douze légions d'anges ? Comment donc s'accompliraient les Écritures d'après lesquelles il faut que tout ceci arrive ? (Math., XXVI, 53, 54)., Dira-t-on qu'il s'agit ici simplement de « clairvoyance » au sens même où Jésus a montré à plusieurs reprises qu'il en possédait le don ? (1). N'a-t-il pas vu Nathanaël, « quand il était sous le figuier, » ? (Jean, 11, 48). Au moment de préparer la Pâque, comme les disciples lui demandaient : « où veux-tu que nous la préparions ? », il répondit : « lorsque vous entrerez dans la ville, vous rencontrerez un homme portant :une cruche d'eau ; suivez-le dans la maison où il entrera et dites au Maître de la maison : le Maître te fait dire : où se trouve la salle dans laquelle je dois manger la Pâque avec mes disciples ? Et il vous montrera une grande chambre haute, toute meublée : préparez-y ce qu'il faut. Ils s'en allèrent et trouvèrent les choses comme Jésus leur avait dit. » (Jean, XXII, 8-13). Sans doute il savait « ce qu'il y a dans l'homme » (Jean, II, 25) D'autre part, il est important de remarquer que ceux qui ont vécu dans l'intimité de Jésus n'ont pas reconnu qu'il était celui qu'avaient annoncé les prophètes : « Ses disciples, nous dit saint Jean, ne comprirent pas d'abord ces choses et c'est seulement lorsque Jésus eût été glorifié qu'ils se souvinrent qu'elles étaient écrites de lui et qu'elles s'étaient réalisées en lui » (Jean, XII, 16). Ils demeurent incrédules à la nouvelle de la résurrection, «car ils n'avaient pas encore compris l'Écriture d'après laquelle il fallait que Jésus ressuscitât des morts » (Jean, XX, 9). Aussi, lorsqu'il chemine avec deux d'entre eux sur la route d'Emmaüs, Jésus les reprend vivement : « Ô gens sans intelligence et d'un coeur lent à croire tout ce qu'ont annoncé les prophètes ! » (Jean, XXIV, 25). Et lorsqu'il se retrouve au milieu des Apôtres, c'est pour leur rappeler son enseignement : « voilà ce que je vous déclarais lorsque j'étais encore avec vous et quand je vous disais qu'il fallait que fût accompli tout ce qui est écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, dans les prophètes et dans les Psaumes » (Jean, XXIV, 44) Si donc ce fut bien l'enseignement même de Jésus que les Évangélistes ont reproduit dans leurs récits de la vie du Maître, de sorte qu'il serait faux d'y chercher une intention purement apologétique, il reste que Jésus aurait eu lui-même conscience d'être venu sur la terre pour accomplir les Écritures. Et la question qui se pose est de savoir si ce n'est pas lui qui, dès lors, aurait volontairement orienté sa vie, dirigé ses actes de façon à les ordonner aux prophètes et de se faire passer ainsi pour celui qu'avaient annoncé les Prophètes, pour le Messie qu'attendait Israël. Mais, outre qu'une pareille attitude de fourberie et de déloyauté est en contradiction avec tous les traits que nous connaissons de son caractère, il faudrait admettre, s'il eût agi ainsi, qu'il n'eût été qu'un homme. Or nous savons par le témoignage de ses contemporains que Jésus n'avait pas étudié l'Écriture : « Comment cet homme connaît-il les Écritures, lui qui n'a pas étudié ? » (Jean, VII, 15) qui, dès lors, pourrait soutenir qu'il ait voulu y ordonner sa vie, si en vérité il ne fut qu'un homme ? Aurait-il donc été plus qu'un homme ? Mais, s'il en est ainsi, le problème revêt un tout autre aspect et sans doute sa véritable signification. D'autre part, ce ne sont pas, seulement les disciples qui ne comprirent pas le sens prophétique de toute sa vie, mais encore tout le peuple d'Israël, et notamment les chefs des prêtres et les Pharisiens qui, eux pourtant, avaient scruté les Écritures : « Informe-toi, disent-ils à Nicodème, et tu verras qu'il ne sort pas de prophète de la Galilée » (Jean, VII, 52). « Nous savons d'où est celui-ci, or quand le Christ.viendra, personne ne saura d'où il est » (Jean, VII, 27). « Nous avons appris par la loi que le Christ doit demeurer éternellement : comment peut-il dire qu'il faut que le Fils de l'homme soit élevé » ? (Jean, XII, 34). « N'est-il pas le charpentier, le Fils de Marie, le frère de jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses soeurs ne sont-elles pas ici parmi nous ? » (Marc, VII, 3). Et, finalement la suprême question : « Si tu es le Christ, déclare-le nous » (Luc, XXII, 67). Le caractère messianique de la mission de Jésus n'était donc pas si évident que l'on ne pût s'y tromper, c'est-à-dire que, si Jésus a voulu se faire passer faussement pour le Messie, il y a médiocrement réussi. Aussi bien, n'est-ce point sur la concordance des prophéties à son égard qu'il établit sa messianité. D'ailleurs a-t-il cherché à la démontrer par une exégèse de l'Écriture ? Est-ce que bien plutôt il ne lui suffit pas de l'affirmer simplement, avec l'accent de quelqu'un qui sait qui il est et d'où il vient ? ». Je suis le Messie, moi qui te parle », dit-il à la Samaritaine (Jean, IV, 26). Et, lorsque, à la question qu'il pose aux apôtres : « Vous, qui dites-vous que je suis ? » Pierre a répondu : « tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant », Jésus réplique : « tu es heureux, Simon, fils de Jona, car ce n'est pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux » (Math., XVI, 16-17). Concluons avec certitude que ce n'est point par l'effet de circonstances fortuites que Jésus a accompli les prophéties, mais bien parce qu'en vérité il était le Messie annoncé par toute l'Écriture. II Il faudrait maintenant étudier d'ans le détail l'accord des prophéties avec les actes et l'enseignement de Jésus, avec sa vie, sa mort et sa résurrection. Une, pareille étude exigerait tout un livre. Bornons-nous :
A. - PROPHÉTIES DU PENTATEUQUE
B. - PROPHÉTIES DES PSAUMES
C. - PROPHÉTIES DES PROPHÈTES
C'est pourquoi je lui donnerai sa part parmi les grands. Il partagera le butin avec les puissants, parce qu'il s'est livré lui-même à la mort, qu'il a été mis au nombre des malfaiteurs, qu'il a porté les péchés de beaucoup d'hommes et qu'il intercédé pour les pécheurs. » (Isaïe, 53, l-l2). * « A celui qui nous aime, qui nous a lavés de nos péchés par son sang et qui nous a fait rois et prêtres pour Dieu son Père, à lui soient la gloire et la puissance aux siècles des siècles.. Ainsi soit-il.. » (Apoc., I, 6). GABRIEL. HUAN ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- (1) cf. : Jean, I, 47-51 ; II, 25 ; IV, 16-18 ; V, 6 ; VI. 61-65 ; XI, 14 ; XVI, 19. |