Réflexion de Lamennais - Livre 3, chapitre 23
Des prophètes se sont levés en Israël, qui prophétisent à Jérusalem des visions de paix; et il n'y a point de paix, dit le Seigneur Dieu. Et le monde aussi prophétise des visions de paix à ses sectateurs; mais cette paix qu'il met dans les plaisirs, dans le contentement de l'orgueil et de toutes les passions, ne se montre de loin que pour tromper ceux qui la poursuivent, et quand ils se croient près de la saisir, tout à coup elle s'évanouit comme le songe d'un homme qui s'éveille.
La paix véritable n'est, au contraire, que le calme d'une conscience pure: elle consiste à retrancher les désirs, et non pas à les satisfaire. Est-il un lieu caché, un emploi obscur, une place, un rang méprisables aux yeux du monde, elle est là surtout. Plus le cur s'humilie, plus elle est douce et profonde. Qu'est-ce, en effet, qui pourrait troubler celui qui ne souhaite rien et ne s'attribue rien ? Il n'a guère à craindre qu'on lui envie l'abaissement où il se complaît. Mais que de grandeur dans cet abaissement cherché, voulu de toute l'âme ! Les anges le contemplent avec respect, et Dieu le bénit du sein de sa gloire.
Seigneur, venez à mon aide; terrassez en moi l'orgueil, et j'aurai la paix; faites que, pénétré des sentiments qui animaient le roi-prophète, il me soit donné de dire comme lui: J'ai choisi d'être abject dans la maison de mon Dieu, plutôt que d'habiter sous les tentes des pécheurs: Elegi abjectus esse.