Réflexion de Lamennais - Livre 3, chapitre 37
Vous lavez dit, ô mon Jésus: Si quelquun veut venir après moi, quil renonce à soi-même, quil porte sa croix et quil me suive; et encore: Celui qui ne renonce pas à tout ce quil possède ne peut être mon disciple. Il ny a donc point à hésiter; il faut choisir entre le monde et vous; on ne saurait servir deux maîtres et vous ne voulez point de partage.
Se rechercher, cest séloigner de vous. Là où il reste encore quelque attache aux choses de la terre, quelque volonté propre, quelque secrète complaisance dans les dons, soit de la nature, soit de la grâce, vous ne régnez pas pleinement, Seigneur, et votre amour est en souffrance. Hélas ! comment peut-on, après avoir goûté la joie de votre union, refuser de sunir plus intimement à vous ? O faiblesse et folie incompréhensible du cur humain ! Est-il donc, ô mon Dieu, si difficile de reconnaître le néant de tout ce qui nest pas vous, lincertitude de nos projets, la vanité de nos désirs, et de laisser là je ne sais quels biens stériles et misérables, une heure avant que la mort nous en dépouille sans retour ? Quelles seront nos pensées à ce moment où toutes les illusions sévanouissent ? Que nous feront les choses du temps, lorsque le temps finira pour nous ?
Cen est fait, Seigneur, je suis résolu à consommer le sacrifice que vous exigez de ceux qui veulent vous appartenir. Quon ne me parle plus du monde ni de moi-même: j'ai rompu mes derniers liens: je suis mort, je ne vis désormais que de la vie de Jésus-Christ en moi; ce corps est comme le suaire qui m'enveloppe; me voilà étendu dans le tombeau, enseveli avec Jésus-Christ en Dieu. Amen, qu'il soit ainsi !