Réflexion de Lamennais - Livre 3, chapitre 45
Ne vous appuyez pas sur les hommes; car ils vous manqueront tôt ou tard. L'homme est faible, indiscret, inconstant, léger, enclin à tout rapporter à soi. Le moindre caprice l'éloigne, le moindre intérêt suffit pour le transformer en ennemi. Alors, il se montre tel qu'il est. Il vous aimait, mais pour lui-même, pour tirer parti de vous au besoin. Fuyez, fuyez ces faux amis du monde. Celui-ci vous trahit, cet autre vous délaisse. Arrive-t-il des circonstances qui vous forcent à recourir à eux, tous commencent à s'excuser. Le premier dit: J'ai acheté une terre, il faut nécessairement que j'aille la voir; je vous supplie de m'excuser. Un autre dit: J'ai acheté cinq paires de bufs, et je vais les éprouver; je vous supplie de m'excuser. Un autre dit: J'ai épousé une femme, et c'est pourquoi je ne puis aller. Voilà les amitiés humaines.
Vous seul, mon Dieu, vous seul n'abandonnez point ceux qui espèrent en vous: toujours vous êtes près d'eux pour les soutenir et les consoler. Jamais vous ne vous lassez d'entendre leurs gémissements, d'écouter leurs plaintes, de recueillir leurs larmes. Rien n'est au-dessus de votre tendresse: cet homme abject aux yeux des hommes, ce pauvre rebuté de toutes parts, vous l'assistez, mon Dieu, sur le lit de sa douleur, et votre main retourne son lit pour y reposer ses infirmités; puis, quand sa tâche est accomplie, à la fin du jour, vous le recevrez dans l'éternelle paix.