Réflexion de Lamennais - Livre 4, chapitre 18

L'impie veut savoir, et c'est là sa perte. Il demande le salut à la science, il le demande à l'orgueil, il se le demande à lui-même: et du fond de son intelligence ténébreuse, de sa nature impuissante et dégradée, sort une réponse de mort. Chrétiens, ne l'oubliez jamais, le juste vit de la foi. Vivez donc de la foi, en vivant de l'adorable Eucharistie, qui en est la plus forte comme la plus douce épreuve.

Celui qui est la voie, la vérité , la vie, Jésus-Christ, Fils de Dieu, a parlé; il a dit: Ceci est mon corps, ceci est mon sang. Le croyez-vous ainsi ? Oui, je le crois ainsi, Seigneur. Le ciel et la terre passeront, mais vos paroles ne passeront point. Je crois et je confesse que ce qui était du pain est vraiment votre corps, que ce qui était du vin est vraiment votre sang. Mon esprit se soumet et impose silence aux sens révoltés.

Dieu a tant aimé l'homme, qu'il a donné pour lui son Fils unique; et pour compléter, pour perpétuer à jamais ce grand don, le Fils se donne aussi à l'homme, tous les jours, à la Table sainte, réellement et substantiellement. Encore un coup, je crois, Seigneur, je crois à l'amour que Dieu a eu pour nous, à l'amour du Père, à l'amour du Fils; et cet amour infini explique tout, éclaircit tout, satisfait à tout. Qu'importe que nous comprenions ? Ne savons-nous pas que vos voies sont impénétrables, et que celui qui scrute la majesté sera opprimé par la gloire ? Notre bonheur est de croire sans comprendre; notre bonheur est de nous plonger dans l'abîme incompréhensible de votre amour.

Que la raison superbe et contentieuse se taise donc; qu'elle cesse d'opposer insolemment sa faiblesse à votre toute-puissance. A ses doutes, à ses demandes curieuses, nous n'avons qu'une réponse: Dieu a tant aimé ! Et cette réponse suffit et nulle autre ne suffit sans elle. Elle pénètre, comme une vive lumière, au fond du cœur en état de l'entendre, du cœur qui croit à l'amour, qui sait et qui sent ce que c'est que d'aimer. Vous vous étonnez qu'un Dieu se cache sous les apparences d'un pain terrestre et corruptible, que le Sauveur des hommes se soit fait leur aliment; vous hésitez, votre foi chancelle: c'est que vous n'aimez pas ! Et vous, âmes croyantes, âmes fidèles, allez à l'autel avec joie, fermeté, confiance; allez à Jésus, allez au banquet mystérieux de l'amour.

Et où irions-nous Seigneur ? Quoi ! A la chair et au sang, à la raison, à la philosophie ? Aux sages du monde ? Aux murmurateurs, aux incrédules, à ceux qui sont encore tous les jours à nous demander: Comment nous peut-il donner sa chair à manger ? Comment est-il dans le ciel, si en même temps on le mange sur la terre ? Non, Seigneur, nous ne voulons point aller à eux, ni suivre ceux qui vous quittent. Nous suivrons saint Pierre, et nous dirons: Maître, où irions-nous ? Vous avez les paroles de la vie éternelle.