Réflexion de Lamennais - Livre 4, chapitre 5
Pour comprendre la grandeur du sacerdoce chrétien, il faut considérer les caractères qui le distinguent immuablement, et fortement, comme le sceau divin dont il fut marqué à son origine. Et d'abord il est un; de même qu'il n'y a qu'un Dieu, il n'y a qu'un Médiateur de Dieu et des hommes, Jésus-Christ, apôtre et pontife de notre foi, toujours vivant pour intercéder en notre faveur.
Tout prêtre, dans l'exercice de ses célestes fonctions, représente Jésus-Christ, ou plutôt est Jésus-Christ même qui seul opère véritablement ce qu'annoncent les paroles et les actes de son ministre, seul lie et délie, seul dispense la grâce, seul immole et offre à son Père la victime de propitiation, qui est une aussi: car Jésus entrant par son sang une seule fois dans le saint des saints, a consommé la rédemption éternelle. Aussi un sacrifice, un prêtre, un sacerdoce, qui, dans son immense hiérarchie, n'est que le Pontife invisible des biens futurs, est multiplié visiblement sur tous les points de la terre pour y continuer sa grande mission jusqu'à la fin des siècles.
Et non seulement le sacerdoce est un, il est encore universel: car tous les peuples ont été donnés en héritage à Jésus-Christ, et depuis le lever du soleil jusqu'au couchant, en tous lieux, le sacrifice doit être accompli, et l'offrande pure présentée au Seigneur. Il est éternel, car de toute éternité Dieu a dit au Christ: Tu es mon Fils, je t'ai engendré aujourd'hui; et encore: Tu es prêtre éternellement selon l'ordre de Melchisédech. Il est Saint: car il convenait que nous eussions un tel Pontife, saint, pur, sans tache, séparé des pécheurs et élevé au-dessus des cieux; et les démons mêmes, vaincus par Celui qui possède le sacerdoce éternel, lui ont rendu témoignage: Je sais qui vous êtes, le Saint de Dieu.
Oh ! qu'elle est élevée, qu'elle est sublime, la dignité du prêtre ! Mais aussi qu'elle est redoutable ! Associé à la puissance de Jésus-Christ Pontife, dans l'unité de son sacerdoce, ministre avec lui et en lui du sacrifice de la Croix, renouvelé chaque jour sur l'autel d'une manière non sanglante; distributeur du pain de vie, du corps et du sang du Rédempteur, sur lesquels il lui a été donné pouvoir; revêtu de la mission du Fils de Dieu pour le salut du monde, ses devoirs sont proportionnés à une si haute vocation, et c'est à lui surtout qu'il est dit: Soyez saint, parce que moi, le Seigneur Dieu, je suis saint. Pauvre pécheur, si faible, si languissant, si infirme, comment pourrai-je m'élever, ô Jésus ! à la sainteté que vous exigez de moi ? Je tremble à cette pensée, et je perdrais toute espérance, si votre bonté ne daignait me rassurer, disant: Cela est impossible aux hommes, mais tout est possible à Dieu.