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Tableau naturel des rapports qui existent
entre Dieu, l'Homme et l'Univers.

L.C. de St Martin

par Louis-Claude de Saint-Martin

IX 

Ne nous abusons point ; le spectacle merveilleux de l'action non interrompue des Etres corporels, « celui même de la supériorité que l'homme devrait avoir sur eux par l'usage et l'application qu'il peut faire de leur loi » n'est sans doute qu'une représentation très faible et très inférieure de cette harmonie divine qui lie les trois facultés premières à tous les Etres intelligents. 

Dans cette classe divine, tout est saint, tout est vrai, tout agit de concert et tend à un seul but. Le Chef divin au centre de ses pures émanations, répandant, jusque dans leur sein, les douceurs de son existence et de ses Vertus, les unit à lui par tous les droits de l'amour et de la félicité. 

Là, les Sujets ne peuvent jamais s'élever au-dessus de leur Souverain, et si quelques-uns d'entre eux furent assez malheureux pour se révolter contre ses lois, ils ne purent jamais porter leurs attaques jusqu'à lui, puisqu'à l'instant qu'ils conçurent cette horrible pensée, ils perdirent de vue sa présence. D'ailleurs, quels que soient les crimes, la clémence du Maître n'abandonne point les coupables ; il tempère sa justice, plutôt qu'il ne l'excite ; il cherche à gagner les criminels, plutôt qu'à les subjuguer ; il enveloppe, pour ainsi dire, sa puissance de son amour, pour leur épargner la terreur de son nom et pour leur montrer qu'il est plus jaloux de régner sur eux par l'amour que par la puissance. 

Il n'en est pas ainsi dans la classe temporelle ; le Sujet et le Maître y sont presque toujours confondus. Tous ces Etres corporels : tous ces agents de la Nature, destinés au service de l'homme, lui font continuellement la guerre : et quand il est abandonné à lui-même, loin de le regarder comme le Roi de l'Univers, on le prendrait plutôt pour un proscrit, ou pour le vil esclave de ceux qu'il devait commander et même lorsqu'il use de ses droits et que son empire paraît le mieux réglé, il ne nous offre que des figures de ce véritable empire dont nous venons de tracer un faible tableau : la puissance et l'étendue de ses facultés ne sont ni constantes, ni inaltérables : et s'il annonce en effet une représentation des trois facultés divines, on ne peut dire qu'elle n'en est qu'une esquisse presque méconnaissable. 

Non seulement sa pensée n'est pas à lui, non seulement sa volonté n'est pas constamment pure, mais son action même est incertaine, et n'a ni l'assurance, ni l'autorité du Maître et du Souverain, en sorte qu'on ne peut presque y reconnaître aucun des traits vivants de la troisième Vertu divine que cette action devrait représenter. 

Cependant, c'est par notre ressemblance avec cette troisième faculté que nous devons commencer à corriger les difformités qui nous défigurent ; car la loi par laquelle le premier Principe nous laisse ici-bas apercevoir son image, étant liée à un ordre temporel et successif, nous devons travailler à manifester leurs droits et la vie de l'action divine, avant de prétendre à manifester les deux facultés qui la précèdent, puisque dans toute progression ascendante, il faut passer par l'inférieur avant d'aller au supérieur. 

Toutefois, ces mots de supérieur et d'inférieur ne doivent être employés que pour se prêter aux bornes qui resserrent aujourd'hui notre intelligence. Dans Dieu rien n'est supérieur, rien n'est inférieur : tout est un dans l'indivisible, tout est semblable, tout est égal dans l'unité. 

Mais les suites des écarts de l'homme n'ont pas seulement fait subdiviser les Vertus temporelles des êtres de la création, elles ont même engagé la Divinité à ne plus montrer que successivement les Vertus de sa propre essence à cet Etre coupable, et c'est là une nouvelle preuve de l'amour qu'elle a pour lui, puisque l'homme n'ayant plus la force nécessaire pour contempler l'unité divine sans péril, elle se partage, pour ainsi dire, en sa faveur, afin qu'il ait toujours quelques , moyens de la reconnaître, et qu'elle ne l'éblouisse pas, comme il arriverait, si elle se présentait à lui dans tout son éclat. 

Or dans cette espèce de subdivision qui n'est relative qu'à l'homme seul, la troisième faculté divine, ou l'action, est celle dont nous devons d'abord nous approcher, puisque son nombre la place après les deux autres et par conséquent plus près de nous. 

Si l'on trouve trop de difficultés à concevoir ces mots : action, volonté, pensée, que je présente comme distinctes les unes des autres tandis que ces trois facultés sont unes dans leur essence, il suffira pour avoir la parfaite intelligence de cet écrit, de s'en tenir à cette idée générale, que par son crime l'homme ayant perdu de vue l'unité des puissances divines, ne peut plus les contempler que séparément ; que ces puissances, en se communiquant à lui, ne peuvent se montrer que sous une multitude innombrable de faits, de signes, d'emblèmes ; sous une complication d'Agents et de moyens, qui fasse sentir à l'homme la privation où il est de cette unité et des délices dont elle est la source et le foyer. 

Si dans l'espèce humaine, considérée relativement à l'ordre physique, nous voyons des hommes remarquables par la beauté et la proportion de leur corps, par leur force, leur agilité, et les différents avantages de la forme et des organes, nous devons penser qu'il en est de même dans l'ordre de leurs facultés intellectuelles, et que si le plus grand nombre est en effet réduit aux notions les plus communes et les moins élevées, il a dû en exister dans tous les temps qui ont  été distingués parmi leurs semblables, et qui se sont plus approchés qu'eux de la lumière ; différences qui s'observent encore tous les jours par rapport à ce qu'on appelle vulgairement : Sciences. 

Quoique tous les hommes de la terre soient destinés à manifester, même ici-bas, quelques rayons des facultés divines, on peut donc croire que quelques-uns d'entre eux sont appelés à cette œuvre avec une détermination plus positive que les autres hommes, et qu'ils ont à opérer des faits plus vastes et plus considérables. 

Les uns, chargés seulement de leur propre régénération, n'ont, pour ainsi dire, qu'à contempler le tableau des secours que la Sagesse suprême leur présente, et à tâcher de s'en appliquer les fruits. Les autres, destinés à répandre ces secours, doivent avoir des forces plus grandes et des dons plus étendus. 

Pour fixer notre pensée sur cet objet, nous regarderons tous les hommes de la terre comme des Elus, mais divisés en deux classes, celle des Elus particuliers et celle des Elus généraux. 
Nous ajouterons que difficilement les Elus généraux peuvent descendre au rang des Elus particuliers ; mais qu'il est donné à tous ceux-ci de s'élever au rang des premiers, par leur courage et par les efforts soutenus de leur volonté : parce qu'il est plus difficile à un 
homme consommé dans la Science, d'oublier ce qu'il sait, qu'à un homme ignorant d'acquérir des connaissances. 

Ceci nous force d'examiner un instant le système de la prétendue fatalité attachée à la destinée de l'homme. 

Les difficultés qui se sont élevées sur cette matière viennent de ce qu'on attribue aux Elus particuliers, ce qui n'a été dit que des Elus généraux. 

Il est clair que ceux-ci, vu l'immensité de leurs avantages, peuvent se regarder comme prédestinés selon la notion vulgaire. Mais de ce qu'il y aurait dans l'espèce humaine, quelques êtres privilégiés et destinés à de plus grandes œuvres, faudrait-il en conclure que tous les hommes doivent l'être, puisqu'il est clair que la plupart demeurant dépositaires de leur libre arbitre, demeurent aussi dépositaires de leurs actions, et par conséquent du résultat qui doit les suivre ? On aurait tort, en un mot, d'assimiler tous les Elus, et de conclure du petit nombre à l'universalité des hommes. 

On ne s'en tiendra pas là sans doute, et l'on demandera pourquoi tel homme a été choisi de préférence parmi tous les autres, et placé au rang des Elus privilégiés ou généraux. 

Pour atteindre au nœud de cette difficulté, il faudrait s'élever jusqu'aux lois simples, mais universelles de la Sagesse divine, qui ayant marqué son empreinte sur tous ses ouvrages, l'a gravée sur l'espèce humaine comme sur ses autres productions. Ajoutons que la Nature humaine étant le tableau figuratif universel de la Divinité, ainsi que de ses Vertus et Puissances, doit voir répéter tous ces types par les différents individus de sa propre espèce. 

Voilà pourquoi il doit y avoir des hommes chargés de manifester les choses divines : d'autres, les choses intellectuelles ; d'autres, les choses physiques et naturelles ; sans parler d'une autre sorte de manifestation, dont la nécessité est également absolue parmi les hommes, mais qu'il ne serait pas prudent de révéler à la multitude. 

La loi qui dirige ces sortes d'élections est semblable à la loi qui constitue la Divinité même : elle a pour base la propriété sacrée des facultés du premier principe et l'ordre numérique agissant sur tous les Etres qui doivent les représenter. Propriété coéternelle avec l'essence suprême, et dont il ne peut y avoir d'autre raison que celle de son existence, puisque cette raison et son existence sont une même chose. Et c'est par cette seule connaissance que nous pourrions comprendre ce que nous avons nommé liberté dans ce grand Etre. 

Ainsi l'on ne pourrait savoir pourquoi certains hommes ont tels ou tels types à manifester par préférences à d'autres hommes, sans connaître auparavant la loi numérique à laquelle la Sagesse suprême a assujetti leur origine : ou plutôt il faudrait savoir pourquoi les facultés divines sont elles-mêmes diverses, quoique intimement unies et à jamais inséparables ; pourquoi enfin la pensée n'est pas la volonté, la volonté n'est pas l'action, l'action n'est ni la pensée, ni la volonté. 

Mais, si à la rigueur ces questions ne sont pas au-dessus de l'intelligence de l'homme, elles sont au moins inutiles et souvent très dangereuses pour lui, surtout quand il ne les poursuit pas par le véritable sentier, qui est l'action. Car si cette action, est le germe essentiel de notre réhabilitation, il faut d'abord que ce germe, pour nous procurer ensuite les connaissances et les lumières qui sont ses véritables fruits. Demeurant donc fidèles à cette action, nous reconnaîtrons que c'est à elle seule à confirmer toutes les vérités exposés jusqu'ici, et à dissiper toutes nos obscurités. 

Rentrons dans notre sujet et découvrons les voies physiques et intellectuelles par lesquelles les Elus généraux ou privilégiés ont été admis à ce titre sublime. 

S'ils n'avaient eu que les secours naturels et humains dont nous avons parcouru ci-devant le tableau ; si même ils n'avaient jamais eu que les secours des autres hommes privilégiés comme eux, ils n'auraient vu là que des types seconds et inférieurs, par lesquels ils n'auraient pas découvert pourquoi l'homme existe. Et ne connaissant point encore les Vertus efficaces du grand Principe, il leur eût été impossible de remonter au rang sublime d'où ils étaient descendus, et Dieu aurait porté sur l'homme un décret qui n'aurait jamais pu s'accomplir. 

Il faut donc, selon l'ordre de l'immutabilité divine, que la Sagesse suprême ait présenté à ces Elus privilégiés des signes actifs, frappants et directs de ces vertus et facultés par lesquelles l'homme doit commencer le cours de sa régénération. 

Enfin, il est indispensable que les Vertus mêmes de la Sagesse divine se soient rapprochées de ces hommes privilégiés ; qu'elles leur aient fait toucher, pour ainsi dire, sa propre substance, afin de leur fournir les moyens de manifester leur action, et de commencer à remplir la tâche pour laquelle ils avaient reçu leur existence temporelle. 

Nous n'aurons aucun doute sur ces vérités, quand nous réfléchirons que les vertus Divines rayonnant dans tous les sens comme le feu solaire, sont dans une continuelle activité qui les fait procéder à la fois dans toutes les progressions de l'Infini : qu'ainsi il faut nécessairement qu'elles rencontrent l'homme dans leur cours, et que plus cet homme est analogue à elles, plus elles tendent à s'unir à lui par les rapports essentiels de leur nature. 

Et c'est là cette réaction, qui, indépendamment de l'universalité de l'action divine, se prouve en particulier sur chacun de nous ; en ce que l'homme n'ayant pas la pensée à lui, il reçoit cependant chaque jour des pensées vives et lumineuses. Car si quelque homme se plaint de n'en pas recevoir de semblables, cette disette n'est pas un vice de sa nature, mais une suite de sa négligence à n'avoir pas saisi les rayons qui lui avaient été offerts dans son premier âge, et qui ne s'étaient présentés à lui que comme des guides, qui devaient le conduire à la jouissance habituelle d'une plus grande lumière. 

Lorsque nous disons que les Puissances de Dieu se communiquent indispensablement aux hommes, nous parlons d'une nécessité appuyée sur les lois fondamentales que Dieu imprime aux Etres et sur l'immutabilité de ses décrets. Ainsi elle ne doit point affaiblir à nos yeux la grandeur de son amour, et encore moins nous faire croire que nous soyons dispensés de concourir à l'œuvre avec lui, comme s'il devait l'opérer seul et sans le concours de notre libre volonté. 

En faisant une classe à part des Elus généraux, qui étant toujours unis avec le grand Principe même, ne nous laissent point de distinction à faire entre son Action divine et leur libre Arbitre, nous dirons qu'il en est de l'amour comme de la justice ; l'un et l'autre ne sont que des appuis qui nous sont présentés pour nous aider à sortir de l'abîme, mais qui nous laissent ordinairement la plus entière liberté pour nous en saisir, ainsi que pour les fuir et les abandonner. 

Quoique les secours que la Sagesse suprême accorde à l'homme soient une suite nécessaire de l'amour qui la constitue, il doit encore lui demander la force même d'en faire usage, il doit employer toutes les Puissances de son Etre, pour que ses secours ne lui soient pas donnés en vain. Car cette Sagesse exigeant toujours de l'homme un travail, met par là une condition à ses grâces, c'est à la volonté de l'homme ensuite à en déterminer l'efficacité ; enfin, semblables à ces traits de lumière colorée, qui se prolongent quand ils trouvent des milieux trop divisés et trop faibles pour pouvoir s'y appuyer et se réfléchir, les rayons suprêmes frappent inutilement sur l'homme et le laissent loin derrière eux, quand il n'a en lui aucune base pour les fixer. 

Si les hommes pouvaient agir, suivant leur véritable loi, sans le secours de Dieu, ou, si Dieu devait agir en eux sans leur concours, les Théologiens et les Philosophes seraient fondés à faire tant de questions sur le libre arbitre, et sur les effets de la grâce divine, qui n'est autre chose que l'amour. Mais comme le bon usage du libre arbitre attire cette grâce ou cet amour, et comme réciproquement cet amour dirige le libre arbitre et le purifie, il est visible qu'on ne doit jamais les séparer ; il est clair que l'amour et la liberté se secondent continuellement l'un et l'autre et que ces deux actions, quoique distinctes, sont toujours liées par des rapports intimes et respectifs. 

Cependant il ne faut pas croire que la volonté humaine puisse rendre nuls les décrets des manifestations dé la Puissance suprême, qui devraient se faire par l'organe de l'homme ; parce que si l'homme ne remplit pas le but de son émanation, c'est cette puissance qui se montre elle-même. Ainsi ceux qui doivent en être l'objet ne peuvent jamais manquer de l'avoir présente devant eux, soit pour leur avantage, soit pour leur molestation. Suivons notre sujet. 

Il ne suffisait pas que les Puissances divines en se subdivisant, apportassent jusqu'auprès de l'homme les vertus qui les constituent, il fallait encore que chacune d'elles le fit d'une manière proportionnée ,à la région ténébreuse qu'il habite ; il fallait qu'elles employassent pour ainsi dire les moyens mêmes qu'il avait pris pour y descendre ; qu'elles passassent par les mêmes voies ; qu'elles se couvrissent des mêmes couleurs que lui, et qu'elles suivissent les lois de la même apparence qui l'environne, et cela par les rapports que je ferai apercevoir dans la suite entre le corps de l'homme, l'origine des langues et les caractères de l'écriture. 

Sans cela, sa vue affaiblie n'aurait pu supporter l'éclat de ces Puissances ; ou, n'apercevant en elles aucune analogie avec lui-même, elles lui auraient paru étrangères, ou trop au-dessus de lui, il en aurait pris de l'ombrage, et détournant les yeux, il aurait perdu les seuls et uniques moyens qu'il pût attendre pour se rappeler son premier état. 

C'est ainsi que le feu des astres nous éblouirait ou nous consumerait, s'il pouvait parcourir l'espace qui les sépare de nous, sans traverser les fluides de atmosphère, qui par leur nature humide et dense, modèrent à la fois et son activité et sa splendeur. 

C'est ainsi que ces fluides eux-mêmes, trop subtile ; et trop raréfiés pour notre région, seraient inutiles et mêmes nuisibles à la terre, s'ils pouvaient descendre sur sa surface, sans se condenser encore en rosée, en pluie, en neige, et sans se rassembler en globules sensibles et analogues aux substances qu'ils viennent fertiliser. 

Enfin, c'est ainsi que la pensée de l'homme serait nulle pour ses semblables, s'il n'employait d'abord des formes ou des caractères sensibles pour la communiquer. Or ces moyens, nécessaires à l'homme dans son état actuel, ne sont qu'une image de ce qui se passe en réalité pour lui, dans un ordre plus vaste et plus élevé, puisque tout doit être sensible ici-bas ; vérité qui sera plus développée dans la suite. 

En un mot, c'est une loi constante et invariable que, conformément aux classes dans lesquelles elles pénètrent, toutes les vertus, toutes les actions, toutes les facultés se proportionnent et se modifient aux canaux par lesquels elles passent, et aux objets qu'elles ont pour but d'identifier avec elles-mêmes ; et tel est l'état violent des choses temporelles, que tous les Principes qui y descendent, ne le peuvent sans des canaux sensibles qui les préservent, tandis qu'ils devraient par leur nature se communiquer sans intermède : car étant obligés de se produire eux-mêmes ces enveloppes préservatives, l'action qu'ils emploient à cette œuvre, est toujours aux dépends de leur véritable action. 

Nous apercevons donc déjà la nécessité qu'il ait parmi les hommes des signes visibles, des Agents substantiels et des Etres réels, revêtus comme nous de formes sensibles ; mais en même temps des Etres qui fussent dépositaires de ces Vertus premières que l'homme avait perdues, qu'il cherchait sans cesse autour de lui, dont il ne pouvait voir que des indices faibles et impuissants dans tout ce qui l'environnait et qui, quoique subdivisées devaient être représenté l'homme avec leur caractère primitif. 

Il se pourrait même que parmi ces signes, parmi ci agents, il y en eût qui eussent existé, et qui existassent encore au milieu des hommes sans que ceux qui sont ignorants ou corrompus s'en aperçussent. Leur action, leur marche ne devant se découvrir qu'à ceux qui sont assez purs pour les saisir, elles sont presque toujours nulles pour les autres ; comme tous mes actes intellectuels sont inconnus à la matière de mon corps est formé, parce qu'il n'y a rien en eux qui lui soit étranger : et c'est là ce qui jette tant d'obscurité, de doutes et d'incertitudes sur l'existence de ces signes et de ces Agents. 

Exposons une troisième loi également indispensable ; c'est que si par la destination sublime sur laquelle est fondée l'origine de l'homme, non seulement il était nécessaire que même après son crime, les vertus de la Sagesse parvinssent visiblement jusqu'auprès de lui, et prissent le soin de lui retracer son modèle, il fallait encore que les dépositaires de ces dons l'instruisissent des voies par lesquelles il pouvait se régénérer dans son premier état. Il fallait que ces Agents remplissent leur destination par des actes sensibles, puisqu'ils habitaient auprès d'un Etre sensible et obscurci par sa matière ; il fallait enfin qu'ils missent cet homme à portée de pouvoir exercer et transmettre à son semblable, les dons et les connaissances qu'il avait reçues d'eux autant pour l'instruction et l'avantage des autres hommes que pour la sienne propre ; ce qui nous conduit à reconnaître la nécessité d'un culte sensible et physique sur la Terre, et nous découvre en même temps l'objet pour lequel il y a des Elus qui ont été privilégiés. 

Dans sa vraie définition, un culte n'est que la loi par laquelle un Etre, en cherchant à s'approprier les choses dont il a besoin, se rapproche des êtres vers lesquels son analogie le rappelle à chaque instant, et fuit ceux qui lui sont contraires. Ainsi la loi d'un culte est fondée sur une vérité première et évidente, c'est-à-dire, sur la loi qui résulte essentiellement de l'Etre des Etres et de leurs rapports respectifs. 

Dans l'état des choses ici-bas, il n'est aucun être qui soit sans besoin ; puisque tout y étant séparé et divisé, ils sont tous dans le cas de chercher à se réunir, et à rallier leur action dispersée ; ils sont tous mus par l'impulsion de leur analogie naturelle, qui les force à tendre sans cesse les uns vers les autres, selon les lois et le vœu de leur nature. 

De là, si l'on ne peut accorder précisément le nom de culte, aux lois des Etres matériels et non libres ; au moins doit-on reconnaître que tous ces Etres, de quelque classe qu'ils soient : que notre sang, que nos corps placés parmi toutes les productions de cet Univers, ont des actes à opérer et un ordre à suivre pour satisfaire au but de leur existence, soit pour se guérir ou se préserver des différentes maladies auxquelles les influences élémentaires les exposent continuellement. 

Cependant sur quoi est fondée cette loi, si ce n'est sur l'analogie qui se trouve, par exemple, entre nos corps et les aliments ou les remèdes, dont l'action et les Vertus viennent ranimer, renouveler nos forces et nous rendre la santé ? 

Or l'analogie entre notre Etre intellectuel et les autres Vertus de la Divinité, étant reconnue ; éprouvant en outre qu'il existe hors de nous une source de pensées fausses et désordonnées qui nous obsèdent, et font que l'esprit de l'homme est, pour ainsi dire, exposé à autant de maladies que son propre corps, il suit que nos rapports naturels avec les Vertus divines, nous mettent à leur égard dans la même dépendance et le même besoin où sont nos corps relativement aux substances alimentaires ; il suit que pour ces Vertus divines, nous sommes également assujettis à un culte ou à une loi, qui nous procure de leur part les secours que nous en attendons ; il suit enfin qu'ayant à guérir ou à préserver notre Etre des influences intellectuelles qui nous sont nuisibles, comme nos corps des influences corporelles mauvaises, nous devons par une nécessité évidente chercher les secours analogues à ce besoin intellectuel, et les employer activement quand nous les avons trouvés. 

Ce ne peut être que le défaut de ces réflexions, qui ait conduit dans tous les temps les hommes des diverses Religions, à l'indifférence sur ces objets ; et leur ait fait non seulement négliger les substances, les temps et les formes qui doivent entrer dans leur culte, mais la prière même, sous prétexte que le premier Etre n'en a pas besoin et qu'il suffit aux hommes de ne pas faire ce qu'ils appellent du mal, tandis que la prière est pour leur Etre intellectuel ce que la respiration est pour leur corps. 

Peut-être auraient-ils raison, si leur pensée pouvait lire dans la pensée suprême, comme celle-ci lit dans la leur ; parce qu'alors leurs jouissances étant complètes et assurées, ils n'auraient d'autre occupation que de les savourer, et d'en célébrer la douceur, sans aucun combat pour les obtenir ; mais dans l'état actuel de l'homme, il y a entre la pensée suprême et la sienne, une action qui les empêche de se réunir, et il ne peut démolir et détruire cette Barrière que par un moyen analogue à elle, c'est-à-dire par une action. 

Enfin, nous apercevons dans la Nature physique même des preuves que tous les Etres doivent rendre un hommage au Principe de la vie, s'ils veulent en recevoir des secours et des bienfaits. Pour que la terre produise, il faut que des vapeurs s'élèvent hors de son sein ; qu'elles aillent s'unir aux Vertus célestes, et qu'ensuite elles descendent sur sa surface pour l'humecter de cette rosée féconde, sans laquelle elle ne peut rien engendrer. Leçon vivante qui apprend à l'homme qu'il a une loi à suivre, s'il veut connaître les droits et les douceurs de son existence. 
Il n'y pourra jamais parvenir que quand son ardent pour le vrai fera sortir de lui de violents désirs ; quand des vœux et des mouvements, pour ainsi dire créateurs, s'élèveront de toutes les facultés de son Etre, qu'ils monteront jusqu'à la source de la lumière, et qu'après en avoir reçu l'onction salutaire et sacrée, ils lui rapporteront ces influences vivifiantes, qui doivent faire germer en lui les trésors de la Sagesse et de la Vérité. 

Mais en faisant dériver le culte de l'homme, de ses besoins, et de la nécessité de combattre l'obstacle qui lui sert de barrière, je paraîtrais admettre une multiplicité innombrable de différents cultes : puisqu'en général l'homme étant exposé à des besoins aussi différents, aussi variés dans son Etre intellectuel que dans son Etre corporel, vouloir prescrire une loi uniforme pour ces différentes espèces de besoins, ce serait marcher contre l'ordre et contre la raison. Quelques mots suffiront pour faire disparaître cette difficulté. 

Si l'unité d'un culte est une vérité incontestable, et fondée sur l'unité même de celui qui doit en être l'objet, cette unité n'exclut pas la multiplicité des moyens auxquels la variété infinie de nos besoins nous oblige de recourir ; alors ce culte pourrait recevoir des extensions sans nombre dans les détails, et ne pas cesser pour cela d'être parfaitement simple, et toujours un dans son objet, qui est de rapprocher de nous ce qui manque à notre Etre, et ce qui est nécessaire à son existence. 

Aussi, quels sont les Dieux de l'homme dans son enfance et dans sa jeunesse : Ce sont les objets naturels et physiques ; ce sont ceux qui lui en dévoilent la beauté, ce sont ses père et mère, ce sont ceux qui le guidant et le soutenant dans toits ses pas deviennent pour lui des agents visibles de la Divinité, parce que n'ayant point encore l'intelligence ouverte aux grandes vérités, il ne petit en recevoir les notions que par des signes et des agents corporels et sensibles comme lui. 

Dans l'âge mûr, l'homme sage prenant des idées plus justes sur la Divinité, ne tarde pas à reconnaître que ceux qui ont été ses Dieux dans sa jeunesse, sont ainsi que lui, infirmes et impurs, qu'ils sont aussi dans la dépendance d'un Etre intelligent et invisible, qui se démontre à lui par la pensée, et qui lui fait comprendre qu'il n'a reçu la vie et l'intelligence que pour manifester à son tour les titres de son véritable Auteur. 

Il conçoit alors qu'étant lui-même chargé de son œuvre, c'est à ses propres efforts à la produire, à sa propre intelligence à la diriger ; que l'Etre suprême étant pur et sans tache, il doit avoir des Ministres purs et incorruptibles, sur lesquels la confiance de l'homme puisse reposer sans risque et sans inquiétude. 

Mais quoique, dans ces différents états, nous voyions le culte de l'homme se diversifier, ou plutôt s'étendre et s'élever à proportion qu'il découvre mieux l'étendue et la nature de ses vrais besoins ; ce culte, tant qu'il est conforme à l'ordre naturel, est toujours un, puisqu'il tend continuellement au même but, qui est de pourvoir aux besoins de l'homme selon les divers états où il passe, et de le faire par les moyens les plus vrais et les plus naturels dont il soit susceptible. 

Car les voies de la Sagesse sont si fécondes qu'elle se transforme à chaque instant pour se proportionner à toutes nos situations : et si par la plénitude de ses facultés, elle embrasse tous les Etres, tous les temps, tous les espaces, dans quelque position que nous nous trouvions, elle ne peut jamais laisser épuiser la source de ses dons ; et quelque multipliés qu'ils soient, ils ont toits la même unité pour principe et pour fin. 

D'après cela, quelque supériorité qu'un culte présente, il serait imprudent de proscrire ceux qui, ne l'ayant pas encore atteint, en exerceraient de moins parfaits ; parce que non seulement les lois de la réhabilitation des hommes se combinant avec les lois des choses sensibles, sont assujettis à des temps et à un ordre successif, mais encore parce que nous ignorons s'il ne se trouve pas des lumières cachées et de secrètes vertus sous des apparences peu imposantes. 

Enfin, l'homme n'est point le juge de la prière ; n'en est que le générateur et l'organe : et de même que les émanations des corps terrestres, en s'élevant dans les airs, disparaissent pour nos yeux matériel; et nous laissent dans l'incertitude, tant sur leur cour que sur la place qui les attend dans l'immensité de réservoirs de la nature, de même les prières des hommes, ne séjournant pas sur la terre, deviennent inaccessibles à notre vue, à nos jugements, et nous ne pouvons prononcer ni sur leur valeur, ni sur le cours qu'elles suivent pour s'approcher de la lumière, ni sur le rang que le premier des Principes leur destine autour de son Trône. 

Malgré la supériorité d'un culte sur les autres cultes peut-être la Terre entière participe-t-elle aux droits qui distinguent le culte parfait ; peut-être, chez tous les Peuples, et dans toutes les institutions religieuses, y a-t-il des hommes qui trouvent accès auprès de la, Sagesse et, loin de vouloir diminuer le nombre des vrais Temples de l'Eternel, nous devons croire qu'après les dons universels qu'il a répandus sur notre demeure, il n'est aucun homme sur la terre, qui ne pût s'il le voulait servir de Temple à ce grand Etre. Car en quelque lieu que l'homme aille, quelque isolé qu'il soit, ils sont toujours trois ensemble ; et ce nombre est suffisant pour constituer un Temple. 

Cessons donc de juger les voies de la Sagesse, et de circonscrire des limites à ses Vertus. Croyons que les hommes lui sont également chers ; que si elle en a comblé quelques-uns de ses faveurs les plus précieuses et les plus gratuites, c'est une raison de plus pour eux d'imiter son exemple, en employant envers leurs semblables, la même indulgence : enfin, que cette indulgence, qui n'est autre chose que l'amour divin, est douce, bienfaisante, et qu'elle ne proscrit point, lors même qu'elle laisse les Etres dans la privation. 

Eh ! comment cette Vertu pourrait-elle proscrire ? 
Elle est vivante par elle-même, et elle ne tend qu'à multiplier à l'infini, l'ordre et la vie qui sont en elle. C'est la seule, par laquelle l'homme puisse acquérir une idée véritable et intime de son Etre, tant dans son état actuel que dans son état à venir. C'est la seule qui étende à la fois toutes les facultés de l'homme. 

Enfin, c'est la seule peut-être, par laquelle le premier de tous les Principes puisse se comprendre lui-même, et s'assurer de toute sa grandeur. 

Du point où nous sommes parvenus, le Lecteur peut voir s'étendre le tableau des rapports qui existent entre Dieu, l'homme et l'univers ; puisque le culte vrai, et les Agents préposés pour le répandre, n'ont eu pour but que de rétablir l'harmonie entre ces trois Etres, de montrer à l'homme l'emploi de toutes les substances de la Nature et leurs propriétés ; de lui peindre visiblement celles qui sont en lui-même, et qui combinées avec toutes les autres vertus naturelles, doivent être l'image et l'expression complète du grand Etre dont tout est descendu. 

Nous ne pouvons méconnaître en effet cette chaîne immense, qui lie les êtres de toutes les classes, et qui distribue sur chacun d'eux les Vertus qui leur sont nécessaires. 

Dans l'ordre physique, nous voyons les facultés créatrices du grand Principe produire et vivifier les mobiles de la Nature, et ceux-ci retracer l'activité de leurs modèles jusque dans les dernières subdivisions de l'Univers sensible, céleste et terrestre. 

Dans l'ordre supérieur ou physique, nous voyons  les Vertus pensantes de ce même Principe universel, se reposer sur des Agents intellectuels, d'où elles se transmettent à des hommes privilégiés, et à tous les rejetons de la postérité de l'homme. 

Enfin, l'homme lui-même représente en nature cette double activité ; il est un tableau vivant de ces deux lois fécondes qui servent à substantier tous les êtres. 

De l'intérieur de sa tête, émane sans cesse un fluide puissant et sensitif, qui, descendant successivement dans les différentes régions de son économie animale, communique sa force et son action jusqu'à ses fibres les plus ténues et le plus éloignées de leur source radicale. 

De l'intérieur de ce même organe, l'homme sage et pur sent naître des pensées lumineuses et profondes ; et les exprimant au dehors par ses discours, il peut par leur moyen vivifier les hommes qui l'environnent, et faire parvenir successivement ses propres lumières à tous les points du cercle qu'il habite. 

Il est donc clair que l'homme présente en tout l'empreinte de son Principe, et qu'il en est l'expression dans l'Univers physique et dans l'Univers intellectuel. 

Nous apercevons aussi quel est le but de la Sagesse dans la distribution de ses dons bienfaisants, et quel est l'objet de son action constante et continue. De même que les exhalaisons malsaines de la terre, sont perpétuellement corrigées par les influences physiques supérieures, de même les pensées fausses et criminelles des hommes, et celles des êtres corrompus qui séjournent avec lui, sont contenues et purifiées par les impressions actives de la vie, ou pour ces Agents virtuels que nous devons regarder comme les organes premiers et nécessaires du culte et des moyens sensibles accordés à l'homme pour l'aider à accomplir encore les Décrets suprêmes. 

Il ne faut point cacher ici que ce culte et ces moyens sensibles, transmis à l'homme par des Agents purs, demandent de sa part une attention très vigilante, une fermeté invincible, et un discernement très délié pour ne pas confondre les actions vraies qui doivent animer son culte, avec les actions fausses qui tendent continuellement à le défigurer, et qui sont toujours prêtes à égarer l'homme, soit visiblement, soit invisiblement. Car dans l'intellectuel comme dans le physique, plusieurs exhalaisons malsaines se dérobant à l'action pure qui les combat, s'élèvent souvent au-dessus de la région où elles devraient rester ensevelies ; et c'est là ce qui dans l'une et l'autre classe, engendre les orages et les tempêtes. 

Si l'on demandait, à quels indices ont doit reconnaître la qualité bonne ou mauvaise des actions intellectuelles, je renverrais à une étude particulière de ces différentes impressions, soit de pensée, soit de sentiments, auxquelles nous sommes journellement exposés, et qui par leur variété nous occasionnent tant d'incertitudes. 

On découvrirait par là que quand l'homme est borné aux impressions sensibles matérielles, ou à l'impression intellectuelle fausse, il ne peut être sûr de rien ; parce que ces deux classes étant soumises à plusieurs actions toutes relatives, sans qu'il y en ait aucune de fixe, exposent les êtres qui en reçoivent les attaques, à ne rien distinguer de positif, à ne porter que des jugements confus, ou à rester dans le doute le plus ténébreux. 

Mais quand l'homme reçoit l'impression intellectuelle bonne, il ne peut tomber dans les mêmes erreurs, parce que l'action de l'Etre intellectuel pur, étant sensible, porte avec elle-même la preuve de sa simplicité, de son unité, par conséquent de sa réalité. On verrait donc que cette réalité, ne se trouvant que dans l'Etre pur et vrai qui en est dépositaire, c'est en lui seul et par lui seul que nous pouvons apprendre à le connaître. 

On verrait aussi que quand de semblables impressions s'opèrent, l'homme est à l'abri de toute incertitude et de toute méprise : car les yeux impurs sont sujets à se tromper, attendu qu'ils ne voient que des résultats mixtes et composés ; mais les yeux purs de l'intelligence ne se trompent jamais, parce qu'ils voient les principes qui sont simples. 

Enfin, l'on saurait que par une de ces faveurs qui ont été accordées à l'homme dans sa pénible carrière pour lui servir de guide, les impressions intellectuelles fausses sont assujetties à des lois semblables à celles de l'ordre physique et matériel ; et qu'ainsi que les corps après avoir montré une apparence gracieuse et régulière, finissent pas devenir hideux et difformes, de même dans la classe intellectuelle, les Tableaux impurs les plus séduisants, ne tardent pas à se décomposer, et à déceler leur illégitimité. C'est tout ce que je puis dire sur ce point. 

Résumons en peu de mots toutes les vérités qui viennent d'être exposées. 

Elles nous apprennent que par une suite de l'amour que la Sagesse a pour l'homme, elle dut, lors même qu'il détourna pour la première fois les yeux de sa. lumière, lui en conserver des rayons proportionnés à la faiblesse de sa vue, et qu'à quelque degré que son, crime l'eût fait descendre, il ne pouvait tomber que, dans les mains de son Dieu. 

Et même n'étant pas gêné, comme nous, par les: idées fausses et les voiles ténébreux que sa malheureuse postérité ne cesse d'ajouter à sa dégradation originelle, quelque criminel qu'il fût, il était encore bien plus près de nous que de ce Dieu qui l'avait formé ; il pouvait mieux apercevoir la source pure dont il venait de se séparer ; il ne languissait pas comme nous dans le néant, et l'insensibilité des maux dont nous sommes dévorés. 
Enfin, autant il est vrai que nous n'avons que des regrets sur l'état de notre première existence, autant le premier homme coupable eut-il à la fois et des règles et des remords. 

A mesure que la postérité de l'homme s'est multipliée et que les temps se sont écoulés, la grandeur et la bonté de la Sagesse suprême ont dû se manifester de plus en plus, en plaçant près de lui des Images vivantes d'elle-même, ou des Agents assez virtuels pour le porter à en recouvrer la ressemblance. 

Ces Agents ont dû l'initier aux actes qu'ils exerçaient eux-mêmes, puisque ces actes n'étaient institués que pour lui ; que pour l'aider à séparer de lui-même ce qui contrarie sa vraie nature, et à se rapprocher de ce qui manque à la perfection et à la vie de son Etre ; que pour lui rendre enfin la vue de ses Vertus qu'il devait contempler dans leur unité lors de son état glorieux, et le mettre à portée de les exprimer ensuite dans leur pureté, et de remplir à la fois par là, sa destination et le Décret que le premier des Principes prononça sur lui, lorsqu'il lui donna l'existence. 

C'est là où nous reconnaîtrons les bases et les voies qui sont présentées à la volonté de l'homme pour accomplir son œuvre. Car de même que ces bases seraient inutiles, si la volonté de l'homme ne les mettait à profit, de même la volonté de l'homme, quoiqu'étant le principal mobile de son œuvre, demeurerait sans efficacité, si elle n'avait des bases sur lesquelles elle pût exercer son action. C'est ce qui a fait dire à quelques Anciens que les Prières sacrées nous avaient été données par les Dieux. Mais il y a un genre de prières destinées à nous faire obtenir ces dons précieux, ce sont les prières de la douleur et celles-ci ne peuvent nous venir du centre supérieur et suprême, attendu qu'on n'y souffre point. « La sagesse infinie a pris soin cependant de prévenir notre faiblesse, et notre négligence à satisfaire le besoin que nous avons de prier, et quelques-uns pensent qu'elle a placé sur la terre un animal qui ne chante à des heures marquées et fréquentes, que pour avertir les hommes de vaquer à cette salutaire occupation. » 

Tel est le tableau des lois et des vérités que nous avons établies solidement, en les appuyant sur les rapports de la nature des êtres. Cherchons à en confirmer l'évidence par l'universalité des signes et des traces visibles qu'elles nous offrent parmi tous les Peuples de la Terre.