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CHAPITRE PREMIER
COUTUME TERRIBLE DU PÉAGE CORPOREL
LOUIS XVI L'ABOLIT (1784)
I. Les opprobres d'Israël durant dix-huit siècles. - L'Opprobre particulier du péage corporel. III. Louis XVI le fait cesser.
I
Le Juste avait été, par nous, abreuvé d'outrages. Nous avions mis un manteau de dérision sur ses épaules, une couronne d'épines sur sa tète, un roseau à sa main. Coups, crachats, insultes , conspuations, hontes de toutes sortes lui avaient été prodigués; rien de ce qui est opprobre ne lui avait été épargné par nous. Et, comme dernier trait, lorsqu'il s'était agi dc l'acheter à prix d'argent pour le faire mourir, nous l'avions estimé un être vil : trente deniers !
Ces opprobres se sont retrouvés depuis, comme châtiment et peine du talion, dans la vie du peuple juif. Rien de ce qui est avanies et tristesses ne lui a pareillement manqué. Qui oserait le méconnaître ? Peuple malheureux, que toutefois on ne sait comment plaindre ! a écrit saint Jérôme. Réflexion qui semble douce à côté de l'arrêt prononcé par notre grand législateur lui-même, par Moïse : Vous serez comme la fable et la visée de tous les peuples où le Seigneur vous aura conduits (1) . Pour être devenu la fable et la risée de l'univers, alors qu'on avait été le peuple de Dieu, il faut assurément avoir commis un grand crime !
Dressons, l'histoire en mains, le catalogue de quelques-unes de ces humiliantes afflictions qui nous ont rendus la fable et la risée des autres peuples. Ce sera mieux de mettre en relief, par un contraste qui n'a pas encore été établi, les bienfaits de Louis XVI à notre égard, et sa mission dc miséricorde.
Nous énumérons sans développer. Par exemple :
a) La vente des Juifs comme bétail en foire, après la ruine de Jérusalem. Nous avions vendu le Juste pour 30 deniers à la foire de Térébinthe, on donna 30 juifs pour 1 denier (2).
b) La défense, pendant plusieurs siècles, de venir pleurer sur les ruines de Jérusalem. On repoussait les pauvres juifs visiteurs, avec dureté et mépris. Plus tard on leur accorda cette faveur un seul jour dans l'année. Mais il fallait alors payer nos larmes, et acheter bien cher le droit de regarder et de pleurer du haut d'une colline (3).
c) L'exclusion des juifs des rangs dc la société, et cela partout. Nous étions moins que des lépreux.... Mais Lui aussi, ne l'avions-nous pas regardé comme un lépreux (4)?
d) Le soufflet qu'à Toulouse, à Béziers et ailleurs, un député de la communauté juive était obligé de venir recevoir publiquement....., le jour du Vendredi Saint (5).
e) La rouelle ou l'étoile jaune. C'était un morceau d'étoffe jaune sur nos poitrines, ou encore une corne de cette même couleur à nos chapeaux, afin que, de loin, chacun pût nous apercevoir et dire : C'est un juif (6).
f) Les quarliers à part ou juiveries, ruelles étroites, insuffisantes) souvent infectes, où nos familles étaient parquées à l'écart et entassées.
g) L'obligation, dans certaines villes, de payer en quelque sorte l'air qu'ils y respiraient, comme à Augsbourg où ils payaient un florin par heure, et à Brême un ducat par jour (7).
h) La défense de paraître en public certains jours de l'année. Il fallait nous cacher presque toujours, depuis le matin des Rameaux jusqu'au jour de Pâques (8), nous semblions rayés de la liste des vivants ..... Mais Lui aussi, ne l'avions-nous pas rayé ? N'avions-nous pas, chez Caïphe, caché son divin visage, pour mieux le frapper, devine qui t'a frappé (9)?
i) Les insultes au Juif errant, les coups, les avanies de toutes sortes. « En Orient, on vit un Abdallah faire marquer les juifs d'un fer chaud ; un Montakaval leur interdire d'autres montures que des ânes ou des mulets ; un calife, El-Achem Allah, leur faire porter au cou la figure d'un veau, à cause de celui que leurs pères avaient adoré dans le désert. Actuellement en Perse, on les insulte impunément ; en Afrique, on leur crache au nez dans les rues, les enfants les poursuivent à coups de pierres. À Fez, un jour est indiqué pour recevoir leurs impôts sur une place publique à mesure que chacun paye, il reçoit un coup de pied ou un coup de bâton, et se retire en faisant une profonde révérence au bruit des huées de la populace. En Turquie, surtout au faubourg de Galata, beaucoup sont porte-faix, mais il leur est défendu de mettre un sac de foin sous leurs fardeaux comme font les Turcs. Un de ces malheureux avait ramené à Constantinople Mahomet IV, égaré à la chasse, il demanda pour récompense la liberté d'avoir un sac, et il l'obtint (10). » - « Le grand duc Constantin, en passant ses revues journalières sur la place de Saxe, à Varsovie, lorsqu'il apercevait un Israélite, lui faisait ramasser le fumier des chevaux et le lui faisait emporter dans son bonnet à poils. Il en riait à gorge déployée. Il ne se trouvait pas un seul homme pour protester contre ce misérable et méprisable abus (11).
j) La défiance, la croyance à une malice perpétuelle de notre part, même dans les causes qui nous regardaient. « Au Puy, les différends qui s'élevaient entre deux juifs étaient soumis à des enfants de chœur, afin que l'extrême innocence des juges mît en défaut l'extrême malice des plaideurs (12). »
k) Les supplices infâmes. On suppliciait un juif entre deux chiens. « En Allemagne, en Suisse, on les pendait par les pieds à côté d'un chien, par dérision. parce qu'il est le symbole de la fidélité (13). »
l) La permission donnée à tout officier public d'user d'épithètes flétrissantes envers les juifs, dans les plaidoyers, dans les actes judiciaires (14) .... Mais Lui, lorsqu'il était devant les tribunaux de Jérusalem, ne l'avions-nous pas accablé de désignations odieuses, le poursuivant et le vilipendant jusque sur la Croix (15) ?
m) L'expulsion, tous les soirs, de certaines villes, au son de la trompe : « Ils devaient, quand la trompe sonnait, se disposer à partir, et avoir quitté la ville à l'heure de la fermeture des portes (16). »
n) La défense de se baigner dans les rivières où se baignaient les chrétiens. « En Provence et en Bourgogne, ils étaient exclus des bains publics, sauf le vendredi, jour où l'on ouvrait ces établissements aux danseuses et aux prostituées (17). »
o) L' interdiction de certaines promenades, places, jardins publics. Il n'y a pas cinquante ans que, dans une cité d'Allemagne, on lisait encore à l'entrée de la promenade publique cette inscription :
Défense aux juifs et aux cochons d'entrer ici (18).
p) Mais ce qui nous a semblé particulièrement amer et douloureux, c'étaient les empêchements mis au baptême par la saisie des biens du juif qui se faisait baptiser. « En effet, le juif qui devenait chrétien cessait d'être soumis aux taxes qui pesaient sur ceux de sa nation ; il diminuait donc, d'autant, le fief dc son seigneur or un tel acte était défendu, et le suzerain croyait compenser cette diminution de fief par la saisie de tous les biens du juif. Il lui rendait ensuite telle portion qu'il estimait convenable (19). » Est-ce bien vrai (20) ?
Tels furent nos opprobres. On peut dire qu'il y eut pour les juifs des institutions de mépris, un mépris publiquement organisé.
Nous étions enveloppés de ce mépris, des pieds à la tête. Mais en Lui aussi, des pieds à la tête, quand il fut L'HOMME DE DOULEURS, il n'y avait pas eu un seul endroit que nous eussions laissé sans plaies (21)!
Comme la Providence en courroux avait dispersé Israél dans tous les pays, ces opprobres se sont retrouvés sous une forme ou sous une autre dans tous les pays. Ils out duré chaque jour de l'année durant 1800 ans. O Moïse, vous n'aviez rien exagéré, en annonçant que nous serions la fable et la visée de tous les peuples !
David également, dans ses Visions sur le Christ, avait entrevu que nous Lui donnerions du vinaigre à boire, il avait annoncé, tout de suite après, que notre dos serait contraint de se courber (22). Sa prophétie, comme celle dc Moïse, s'est réalisée à la lettre. Notre dos s'est littéralement courbé sous le mépris qui a pesé sur nous.
O Dieu des justices et des miséricordes, si en acceptant ces opprobres, nous pouvons vous faire oublier ceux dont nous avions abreuvé votre Fils, notre Messie, eh bien, nous inclinons la tête et nous vous disons maintenant : Pitié !
II
Parmi ces outrages et ces institutions de mépris, nul peut-être ne fut plus sensible aux juifs que le péage corporel qui les assimilait aux animaux.
Le péage était un droit qu'on percevait sur chaque juif, à l'entrée des villes. Le passeport dont ils étaient porteurs contenait ces seuls mots : un tel.., juif. Et le juif alors payait pour son entrée, de la même manière qu'il payait pour sa monture (23).
Il y avait toutes sortes de péages. Chose étrange, nous étions errants, aucun royaume, aucune ville ne voulait de nous comme citoyens; et cependant nous ne pouvions même pas errer, aller d'un endroit à un autre, sans payer le moindre de nos mouvements et l'air que nous respirions.
Il y avait donc toutes sortes de péages. Péages pour passer d'une ville à une autre ville, d'une province dans une autre province. Droit d'entrée, droit de sortie. Dans certaines contrées et en certaines circonstances, le péage était très élevé, parce que nous étions riches. Dans d'autres, il était bas et humiliant, parce que nous étions juifs. Nous avons sous les yeux, en traçant ces lignes, deux documents relatifs aux douanes de l'époque ; nous transcrivons :
PÉAGES DE LA TERRE DE MALEMORT
PÉAGE
Sur les radeaux qui descendent sur la Durance
À raison de cinq sols par rame.
PULVÉRAGE
Sur chaque boeuf et cochon, et sur chaque juif, un sol
Sur chaque trentenier de même bétail, six sols par trentenier.
Sur cette feuille des péages de la terre de Malemort, nous sommes donc nommés... après le bœuf et le cochon, et même tarif (24).
SECOND DOCUMENT
« J'avais, dit Denisart dans sa collection de jurisprudence, regardé comme une erreur populaire l'opinion où l'on est en France que les juifs sont assujettis à un droit de péage comme les animaux; mais je viens de retrouver la pancarte des droits qui se payent à Châteauneuf-sur-Loire, imprimée en 1576, en vertu d'un arrêt de la cour du 15 mars 1558, qui porte:
item, un juif doit . 12 deniers
La juive grosse . 9 deniers
Une simple juive 6 deniers
Item, un juif mort 5 sols
Une juive morte 30 deniers (25)
Pour consommer le mépris, on nommait quelquefois ce péage corporel des juifs : l'impôt du pied fourchu (26).
III
C'est Louis XVI, bénie soit sa mémoire ! qui a fait cesser cet opprobre. Au mois de janvier 1784, ce bon prince donna un édit dans lequel étaient contenues ces belles paroles :
« Les juifs sont assujettis ÀUNE TAXE CORPORELLE QUI LES ASSIMILE AUX ANIMAUX; et comme il répugne AUX SENTIMENTS QUE NOUS ÉTENDONS SUR TOUS NOS SUJETS, de laisser subsister à l'égard d'aucun d'eux une imposition qui semble avilir l'humanité, NOUS AVONS CRU DEVOIR L'ABOLIR. » etc...
Un long cri de reconnaissance accueillit parmi les israélites l'apparition de cet édit. Depuis la chute de Jérusalem et la foire de Térébinthe où les juifs avaient été vendus comme du bétail, c'était la première fois qu'un souffle de réhabilitation et d'honneur passait sur les os si longtemps humiliés du vieux peuple... et ces os tressaillirent (27).
Il y eut même dans cette abolition du péage corporel une circonstance délicate qui a été conservée soigneusement dans le livre d'un israélite. « Il a été réservé à Louis le Bienfaisant, raconte l'historien, d'abolir le péage corporel : bienfait auquel les juifs sont d'autant plus sensibles qu'il date de la saison rigoureuse de l'année 1784, où la bonté de Sa Majesté était assez occupée au soulagement de ses pauvres sujets chrétiens (28).
Dans cet hiver rigoureux de 1784, ii se passa donc aux portes des villes un double spectacle fort touchant. Les chrétiens indigents versaient des larmes de bonheur en voyant entrer des convois de vivres qui leur étaient envoyés par le roi, par leur père. Et les pauvres juifs versaient, eux aussi, des larmes de reconnaissance en passant par ces mêmes portes sans être contraints de baisser la tête et de payer comme des animaux. « Le roi nous conserve la vie, » s'écriaient les chrétiens ; et les israélites disaient : « À nous, il nous a rendu l'honneur !»
*****
NOTE
Voici le texte complet de l'édit de Louis XVI
ÉDIT DU ROI (29)
PORTANT EXEMPTION DES DROITS DE PÉAGE CORPOREL SUR LES JUIFS
Du mois de janvier 1784
Louis, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre :
À tous présens et à venir; salut. Par la vérification des droits de péage que nous faisons continuer avec soin, dans la vue
d'affranchir, aussitôt que les circonstances le permettront, le commerce des entraves qu'ils y apportent, Nous avons reconnu
que suivant plusieurs tarifs et pancartes desdits droits, notamment en Alsace, et à l'entrée de la ville de Strasbourg, les juifs sont assujettis à une taxe corporelle qui les assimile aux animaux et comme il répugne aux sentimens que Nous étendons sur tous nos sujets, de laisser subsister, à l'égard d'aucun d'eux, une imposition qui semble avilir l'humanité, Nous avons cru devoir l'abolir. À ces causes, et autres à ce Nous mouvant, de l'avis de notre Conseil, et de notre certaine Science, pleine Puissance et Autorité Royale, Nous avons, par notre présent édit perpétuel et irrévocable, dit, statué et ordonné; disons, statuons et ordonnons, voulons et nous plaît : Qu'à l'avenir les juifs soient exempts, comme Nous les exemptons, dans toute
l'étendue de notre royaume et pays soumis à notre obéissance, des Droits de péage corporels, Travers, Coutumes, et de tous les autres droits de cette nature, pour tour personne seulement, soit que les dits Droits dépendent du Domaine de notre couronne, soit qu'ils appartiennent à des villes et communautés, à des seigneurs ecclésiastiques ou laïques, et autres personnes sans exception, à quelque titre que ce soit. Défendons à tous Receveurs, commis ou préposés à la perception desdits droits de péage, d'en exiger aucun sur la personne des juifs on juives, à peine de désobéissance, et cc nonobstant tous traités, règlemens, tarifs ou pancartes contraires, auxquels Nous avons dérogé et dérogeons par le présent Édit ; nous réservant de statuer, ainsi qu'il appartiendra, sur les indemnités qu'il y aurait lieu d'accorder. SI DONNONS EN MANDEMENT à nos amés et féaux les gens tenant notre cour de Parlement à Nancy :
Que notre présent Édit ils aient à faire lire, registrer, et publier, et le contenu on icelui garder, observer et exécuter selon sa forme et teneur car tel est notre plaisir, et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous y avons fait mettre notre Scel.
Donné à Versailles au mois de Janvier, l'an de grâce mil sept cent quatre-vingt-quatre, et de notre règne le dixième.
Signé : LOUIS.
Et plus has
Pour le Roi, signé: LE MARÉCHAL DE SÉGUR.
Visa: HUE DE MIROMÉNIL.
Vu au Conseil: DE CALONNE.
Et scellé du grand sceau de cire verte, en lacs de soie rouge et verte.
***
CHAPITRE II
ÉTRANGE ÉPISODE DES FAUSSES QUITTANCES EN ALSACE
JUIFS USURIERS, MAIS CHRÉTIENS FAUSSAIRES
(1779-1783)
CET ÉPISODE, POINT DE DÉPART DUN NOUVEL ORDRE DE CHOSES
QUI VA COMMENCER POUR LES JUIFS
I. État lamentable de l'Alsace dévorée par l'usure des juifs. - II. L'épisode honteux des fausses quittances. Nombre considérable de paysans faussaires. La lumière faite sur cette incroyable histoire. Noble décision du gouvernement de Louis XVI. - III. Cet épisode, point de départ d'un nouvel ordre de choses qui va commencer pour les juifs. - IV. Appréciations. Torts des chrétiens faussaires, circonstances atténuantes. - V. Torts des juifs usuriers; ce qu'il faut aussi leur pardonner.
I
Avant de mettre en lumière un deuxième bienfait de Louis XVI, nous devons, bien à regret, rappeler un mal : l'Alsace dévorée par l'usure des juifs. Nous montrerons ensuite comment le doux et pacifique génie de Louis XVI s'efforça de tirer, de ce mal, un double bienfait : l'un concernant ses sujets chrétiens ; l'autre concernant ces pauvres juifs que son cœur aspirait à confondre avec ses enfants.
L'Alsace renfermait le groupe de juifs appelé à cette époque en France le groupe des juifs allemands.
Il y avait en France, sous Louis XVI. trois groupes de juifs bien distincts.
Les juifs espagnols et portugais. Expulsés d'Espagne en 1492, et de Portugal en 1496, ils s'étaient réfugiés en France. Ils habitaient Bordeaux et Bayonne.
Les juifs avignonnais : venus également d'Espagne, ils habitaient le comtat-Venaissin.
Les juifs allemands. Chassés des États de l'empire germanique au quinzième siècle, ils s'étaient répandus et fixés dans l'Alsace et la Lorraine.
Nous n'avons à nous occuper dans ce chapitre que du groupe des juifs allemands.
La population juive de l'Alsace, à l'époque du règne de Louis XVI. était de 19624 individus.
La population chrétienne était de 500000 habitants. Les juifs représentaient donc à peine un vingt-cinquième de la population.
Eh bien, cette belle contrée de l'Alsace gémissait et dépérissait sous leurs usures. Comme il nous serait très pénible de raconter, de nous même, les torts de nos ancêtres, nous en emprunterons le récit à des auteurs de l'époque qui nous ont paru sincères.
Voici d'abord le cri de détresse de l'Alsace : « Que de maux nous essuyons de la part des anciens habitants de la Palestine ! Eh ! plût à Dieu qu'ils y soient encore ! Nous n'aurions pas tant de misères (30) ... »
Voici ensuite le portrait du juif alsacien, tracé par une plume presque contemporaine de ces tristes épisodes :
« On reproche en général au juif alsacien d'être processif, cauteleux, fertile en expedients, opiniâtre dans ses projets perseverant à vaincre les obstacles pour assouvir sa cupidité, et peu scrupuleux sur le choix des moyens. Dans son obséquieuse subtilité, dans son extérieur avili, son regard louche a quelque chose du Grec opprimé par le Croissant sur les ruines d'Athènes. Lorsqu'il vous aborde, il fait un détour, s'incline profondement et s'exprime à voix basse; on est toujours tenté de lui dire : Parlez haut, et marchez droit. Son langage est une espèce d'argot, mi jargon tudesque mêlé d'hébreu corrompu, inconnu à ceux qui l'entourent, et très propre à perpétuer l'ignorance ou à masquer la fourberie (31).
Puis, voici le résumé des usures des juifs en Alsace : « Les billets des seuls paysans de la province d'Alsace, signés par eux aux juifs leurs créanciers, ayant été enregistrés il y a quelques années par arrêt du Conseil souverain de Colmar, présentent dans leur totalité des sommes, dont l'immensité réunie fait gémir. On prétend que le tiers des possessions territoriales de cette belle province leur est hypothéquée. Cependant elles sont partagées entre 500000 habitants très actifs, très bons cultivateurs, tandis que l'Alsace renferme tout au plus 18 à 20,000 juifs. Il est donc évident, par le rapport de ces deux nombres, que les juifs, semblables aux frêlons, pompent en grande partie le miel de cette belle ruche peuplée de si laborieuses abeilles (32).
Voici enfin l'état de découragement et de détrese dans lequel était tombée l'Alsace : « ... Habitants infortunés du Sundgaw (33) , répondez, si vous en avez encore la force; cet effrayant tableau eut (le tableau de familles complètement ruinées par l'usure) n'est-il pas celui de l'état auquel plusieurs juifs vous ont réduits ? Votre contrée, jadis fertile et qui enrichissait vos pères, produit à peine un pain grossier à une foule de leurs neveux; et des créanciers aussi impitoyables que fripons vous disputent encore le prix de vos sueurs. Avec quoi les cultiveriez-vous désormais, ces champs dont vous n'avez plus qu'une jouissance précaire? Vos bestiaux, vos instruments d'agriculture ont été vendus pout assouvir de
vipères, pour acquitter seulement une partie des rentes usuraires accumulées sur vos têtes. Ne pouvant plus solliciter la fécondité de la terre, vous êtes réduits à maudire celle de vos épouses qui ont donné le jour à des malheureux. On ne vous a laissé que des bras desséchés par la douleur et la faim; et s'il vous reste encore des haillons pour attester votre misère et les baigner de vos larmes, n'est que l'usurier juif a dédaigner de vous les arracher.
Ces cris de compassion ne sont pas suspects, exagérés. Ils ont été poussés par celui-là même qui devait quelques années plus tard, travailler avec le plus d'ardeur à procurer l'affranchissement des juifs (34).
Tel était donc l'état de l'Alsace en 1778. Une foule de chrétiens, débiteurs des juifs, étaient totalement réduits à la mendicité.
II
Tout-à-coup, l'Alsace est inondée de quittances écrites en langue hébraïque. Tout-à-coup, nombre de chrétiens se trouvent subitement libérés de leurs dettes ils en montrent les quittances en hébreu, qu'ils ont entre les mains. - Il importe que le lecteur sache que jusqu'à la fin du siècle dernier les juifs, n'étant considérés nulle part comme citoyens, passaient la plupart de leurs actes dans la langue de leur nation, en hébreu. - D'une part donc, un grand nombre de paysans se réjouissent bruyamment d'être quittes envers les juifs, et produisent les quittances. D'autre part, toute la population juive crie au faussaire! Elle dénonce des milliers de chrétiens.
Que s'était-il donc passé ?
Toutes ces quittances étaient fausses !
C'est là, à coup sûr, un épisode sans précédent dans les annales du commerce et des transactions. On avait bien vu des princes, des seigneurs confisquer les biens des juifs; des foules se débarrasser, par la force, des créanciers et des créances; mais on n'avait jamais vu toute une province chrétienne recourir è des faux. Il est étonnant, dit un auteur (le l'époque, que presque tous les libellés et journaux se soient tus sur cet événement, Non, cela ne saurait surprendre. Comme à cette époque, la presse avait encore une surveillance chrétienne, le gouvernement de Louis XVI demanda et obtint facilement le silence. Il eut raison. La fierté commandait d'étouffer une affaire où l'on voyait malheureusement des chrétiens opposer des faux aux usures des juifs, c'est à dire, selon une juste remarque, opposer friponnerie à friponnerie.
Cette affaire envisagée dans toute son étendue, observe un autre auteur contemporain, offre un mystère d'iniquité, une œuvre de ténèbres qu'il n'est ni possible ni prudent de trop approfondir (35).
Un siècle s'est écoulé depuis. La raison de prudence n'a plus rien qui intéresse notre époque. Nous avons donc cherché à lever le voile, et voici ce qu'il ous a été possible de découvrir :
D'abord, le fait très vrai des fausses quittances :
Archives nationales (papiers de la maison du Roi), K. 1142, n° 49. « Il y a quelques années qu'une quantité considérable de paysans d'Alsace, étant poursuivis par des juifs pour le payement de sommes qu'ils avaient empruntées de ces derniers, prétendirent les leur avoir remboursées, et même en produisirent quittance. Toutes ces quittances se trouvèrent fausses. Procéder criminellement contre les faussaires était une chose que leur nombre prodigieux rendait absolument impossible... » Voilà pour la véracité du fait.
Quant au point de départ de cette singulière affaire, nous sommes arrivés également à le connaître. C'est un bailli de différcntcs justices seigneuriales de la Haute-Alsace qui avait ourdi et dirigé le complet. Esprit souple, adroit, utile et souvent nécessaire à quelques grands seigneurs, il avait su captiver leur bienveillance et se faire écouter d'eux. Son influence sur les populations était également très grande. Il détestait les juifs. Il avait appris leur langue, il savait l'hébreu. Nouvel Aman, il rêva, non la destruction de leurs vies, mais celle de leurs créances. Tel est le portrait de ce bailli, d'après des chroniques publiées en Prusse à cette époque (36).
L'Alsace fut donc un jour inondée de fausses quittances. On peut aisément se figurer l'ahurissement et le tapage des juifs. Quand les Égyptiens perdirent leurs premiers-nés à la dixième plaie d'Égypte, ils ne poussèrent pas des cris plus désolés que n'en poussèrent ces fils de Jacob en Alsace, lorsqu'ils crurent leurs créances perdues à tout jamais. Aux clameurs qu'ils firent entendre, on aurait pu croire que la fabrication des fausses quittances allait immédiatement s'arrêter. Pas le moins du monde. Elle n'en continua que de plus belle. Un écrit parut même pour justifier cette façon de se libércr. Le livre disait « que les juifs l'avaient méritée par leurs péchés (37).
Ce qu'il y eut, malheureusement, de plus déplorable dans cette affaire, ce fut le rôle qu'on y fit jouer à la religion. Des personnages connus, autorisés, parcoururent l'Alsace, chargés de cordons d'ordres, de croix et d'objets de piété, s'annonçant comme envoyés auprès des paysans pour protéger la fabrication (les fausses quittances, et opérer l'expulsion totale des juifs. Hélas! les bons paysans débiteurs n'avaient nulle peine à croire èàla mission de ces envoyés (38).
Les noms de ces personnages, nous n'avons pu parvenir à les connaître, la prudence dont parle le contemporain cité plus haut, les ayant couverts d'un voile. Mais, par contre, nous avons eu la satisfaction de trouver celui du fameux bailli.
Archives nationales, k. 1142, n° 49. « .... Le sieur Hell, bailli de Landser, fut soupçonné d'en être l'auteur. Si ses protecteurs, qui sont en très grand nombre et dont plusieurs sont justement estimés, le dépeignaient comme un juge aussi intègre qu'éclairé, d'autres le donnaient au contraire pour un fourbe adroit et dangereux, et l'accusaient des prévarications les plus criminelles. »
« En vertu d'ordres expédiés, le 18 février 1780, il fut arrêté et conduit à la citadelle de Strasbourg, en même temps que ses papiers saisis . Il fut remis à M. le Prince de Montbarey, alors secrétaire d'État de la province, une foule de pièces et de renseignements concernant le sieur Hell. »
«Les principales sont des billets et des lettres en caractères hébraïques. On prétend qu'elles sont du sieur Hell à qui cette langue n'est pas moins familière qu'aux juifs. »
« Ces différentes pièces chargent le sieur Hell de délits très graves. »
La désignation du coupable ne saurait être plus claire. Mais quelle fut la conclusion de toute cette singulière affaire, qui troubla profondément l'Alsace de 1779 à 1783 ? Noble et prudente, comme on devait l'attendre de Louis XVI.
En effet :
a) Son gouvernement si honnête, tout en déplorant les usures des juifs, désavoua cette manière de se libérer vis-à-vis d'eux (39).
b) Le hardi bailli lut arrêté par ordre du Roi et enfermé à la citadelle de Strasbourg. Élargi peu après grâce à ses puissants protecteurs, il fut néanmoins exilé à Valence (40).
c) Les peines les plus sévères furent prononcées contre ceux qui continueraient à fabriquer ou à produire de fausses quittances. Malheureusement, les paysans y avaient pris goût. « Plusieurs, convaincus de faux avec récidive, furent punis suivant la rigueur des lois (41). » Cet exemple n'ayant pas suffi à arrêter le cours d'un pareil désordre, il y eut, dit-on, des condamnations capitales. Un seul auteur, toutefois, parle de ce recours au dernier supplice (42).
d) Pour sauvegarder la dignité chrétienne, il fut permis aux paysans de retirer, dans le délai de deux mois, les fausses quittances par eux produites, sans encourir les pleines de faux dont le roi voulait bien leur faire grâce. Lettres patentes du roi, 27 mai 1780, art. 4 : « Voulons que tous débiteurs chrétiens de la classe du peuple qui ont opposé aux juifs, leurs créanciers, des fausses quittances, soient dûment avertis par des publications ordinaires et même aux prônes des églises, d'avoir à retirer dans deux mois pour tout délai, lesdites quittances et à s'en désister ; sinon et à faute de ce faire dans ledit délai, et celui passé, Voulons qu'ils soient poursuivis et jugés comme faussaires, suivant la igueur des ordonnances (43). »
e,) Enfin, cc qu'il y eut de plus profitable pour les enfants de Jacob, ce fut l'ordonnance du roi chargeant son Conseil souverain d'Alsace de débrouiller et d'accorder tous les intérêts. Des commissions furent également nommées pour examiner les créances des juifs, avec faculté d'accorder tous les délais qui leur sembleraient convenables.
Malgré toutes ces sages précautions, le Conseil souverain d'Alsace eut toutes les peines du monde à se débrouiller de ce chaos (44).
III
Tel fut cet étrange épisode que tous les auteurs qui s'occupent des juifs ont signalé comme très important, très mystérieux, mais sans qu'aucun l'ait approfondi. Selon nous, il fut le point de départ d'un nouvel ordre de choses pour les juifs de France. Ils supplièrent Louis XVI, dans un mémoire précieux qu'un seul historien, Halévy, nous a conservé, d'avoir pitié de leur position si fausse. « La justice bienfaisante d'un Roi chéri, disaient-ils dans ce mémoire, excite notre confiance (45). »
D'autre part, l'état lamentable de l'Alsace désorganisée, pour ne pas dire dévorée par eux, préoccupait Louis XVI. Son gouvernement réfléchit, interrogea, délibéra. De ces réflexions et délibérations devaient sortir les fameuses Lettres patentes de 1784. Ces lettres patentes créeront pour les juifs une sorte d'intermédiaire entre leur état passé et leur complète émancipation. Nous allons les faire connaître. Mais il importe auparavant d'apprécier l'événement que nous venons de raconter.
IV
Il nous semble que des deux côtés, auprès des paysans chrétiens d'Alsace comme auprès des juifs, il y eut faute et excuse, torts et circonstances atténuantes.
Pour ce qui regarde les paysans chrétiens, leur tort a consisté à essayer de se faire justice eux-mêmes, alors qu'ils avaient Louis XVI. On devait porter ses plaintes au pied du Trône. Certes , un tiers des possessions territoriales de l'Alsace hypothéqué, les bestiaux et les instruments d'agriculture vendus aux enchères, tant de bras desséchés par la douleur et la faim, tant de familles réduites à la mendicité et affolées, tout cela parlait assez éloquemment en faveur des paysans de l'Alsace pressurés et ruinés par les Juifs! Louis XVI fût accouru au secours de ses enfants. Nous avons raconté comment le bon roi s'était empressé d'accourir avec des vivres, lorsqu'en 1784 leur existence avait été mise en danger par la disette : il n'eût pas manqué de se présenter avec des trésors et avec la loi, en apprenant qu'elle était de nouveau mise en danger par les usures des juifs. Ou a donc eu tort de se faire justice soi même; tort surtout, d'avoir employé la fraude et le faux.
De juifs usuriers et de chrétiens faussaires, lesquels sont les plus coupables ? La réponse , hélas! est facile. - Certes, les juifs faisaient mal en employant l'usure; ce n'était pas à des chrétiens à faire plus mal en recourant à des faux. Aussi un auteur du temps, examinant cette affaire, a-t-il conclu par cette exclamation : « Les juifs, nous les plaignons; plaignons les chrétiens en les condamnant (46). »
Il faut toutefois reconnaître qu'il y a eu pour les pauvres endettés une circonstance atténuante : le désespoir. » On frémit d'indignation, dit un contemporain, à l'aspect des maux causés par les juifs en cette province. « On conçoit donc que, trompés, sucés, épuisés par les juifs usuriers, les pauvres paysans aient pu céder à une suggestion comme celle-ci l'homme trompé est autorisé à tromper le trompeur, c'est-à-dire, comme nous disions, à opposer friponnerie à friponnerie. On publia en effet, pour se disculper, des mémoires qui disaient « Qu'une société d'hommes dont plusieurs millions sont ruinés par les extorsions de l'usure, est en droit d'annuler l'effet des engagements injustes qui font couler tant de pleurs (47). »
Tout cela prouve combien la présence d'une autorité respectable et respectée est nécessaire dans une nation. Encore une fois on avait Louis XVI. Que n'a-t-on eu recours à son père?
Quant à ceux qui, protecteurs du perfide bailli, se sont tenus dans l'ombre, tandis qu'ils encourageaient le peuple à se faire faussaire, honte et mépris sur eux! ....
V
Nous avons jugé les paysans chrétiens faussaires. Jugeons maintenant les juifs usuriers.
Sur leurs usures, nous disons avant tout : réprobation. Hélas! nous le reconnaissons en baissant la tête, notre peuple apparaît dans l'histoire avec le stigmate éclatant de l'usure. Dégradé physiquement par des institutions de mépris, par le péage, par la rouelle, par le chapeau jaune, il se dégradait encore lui-même moralement par l'usure. Aussi, que de plaintes, que de termes amers et outrageants nous avons rencontrés sur ces usuriers dans les vieux livres! Nous ne les rapporterons pas. Nous ne rapporterons pas davantage les procédés usuraires, c'est-à-dire détestables, par lesquels les paysans de l'Alsace ont été peu à peu réduits à la mendicité, puis au désespoir. Qu'il suffise de dire que l'usure judaïque a été justement comparée au Protée de la Fable. L'usure se métamorphosait et prenait autant de formes qu'il y avait d'espèces de contrats dans la société civile. On ne peut citer rien de plus fort, pour exprimer les ravages qu'elle causa en Alsace du temps de Louis XVI, que ce mot d'un historien : « On vit des villages entiers qui ne renfermaient plus de particuliers solvables. » Sur les anciennes et tristes habitudes de nos ancêtres, il faut donc redire péniblement, mais justement réprobation
Et cependant n'y a-t-il pas, pour eux aussi, une circonstance atténuante?
Pour les chrétiens faussaires, nous avons trouvé comme circonstance atténuante, le désespoir. Qu'alléguerons nous en faveur des juifs usuriers?
Leur rôle de proscrits et de parias.
Durant dix-neuf siècles, ils ont été repoussés de tous les rangs de la société, ne pouvant être ni agriculteurs, ni propriétaires, ni citoyens; persécutés et souvent expulsés des terres où ils avaient espéré vivre et mourir tranquilles; troublés même dans le seul moyen d'existence qui leur fût laissé, le commerce , où leurs gains excitaient de terribles convoitises : n'y a-t-il pas circonstance atténuante à ce que, sous le coup de perplexités pareilles et sans issue, ils aient cherché dans la lapine l'équivalent de leurs calamités? Ayant des raisons de douter qu'on leur rendit un jour l'argent qu'ils prêtaient, ils s'arrangeaient de façon à rentrer promptement dans leurs capitaux à l'aide d'intérêts énormes; et, ne concevant que la loi du talion, ils exerçaient l'usure en conscience. Nous avons trouvé dans un vieux manuscrit un mot qui serait pittoresque, s'il n'était profondément triste : ils repompaient par l'usure l'or qu'ils avaient perdu par la violence.
Certes, il y a à gémir sur tout cela, et des deux côtés. Ce sont des choses que l'on aimerait à supprimer de l'histoire. Mais puisque nous écrivons afin de contribuer â un rapprochement, on ne saurait trouver mauvais que dans ces tristes épisodes, nous ayons cherché à découvrir certains côtés excusables. Les côtés irritants, on ne les a que trop mis en lumière! Aujourd'hui. n'est il pas préférable, pour favoriser l'oubli des torts et le pardon réciproques, de faire apparaìtre les circonstances atténuantes ?
Que nous aimons ce noble cri d'un grand moine : « On se lasse de s'exterminer de part et d'autre sans profit pour Dieu ni pour les hommes; et le jour arrive où le genre humain recueilli, la main sur ses blessures et l'esprit levé vers son Père, n'attend plus que de la charité le triomphe de la vérité (48).»
(1) Deutéronome , XXVIII, 37.
(2) Cette foire se tenait tous les ans dans la plaine de Mambré, où Abraham avait dressé ses tentes et reçu la visite des anges. Quel rapprochement!
(3)Cette défense dura jusqu'au temps de saint Jérôme (420), qui fait de cette cérémonie lugubre la description suivante : « Il leur est défendu d'entrer à Jérusalem, si ce n'est pour pleurer sur les ruines de leur ville malheureuse: encore n'obtiennent-ils cette permission qu'à prix d'argent. Après avoir acheté le sang du sauveur, ils achètent leurs propres larmes ; on rançonne jusqu'à leurs pleurs. Quel triste et funeste spectacle de voir, le jour où Jérusalem fut prise et détruite par les Romains, venir dans un appareil lugubre une multitude d'infortunés, des femme, décrépites, des vieillards chargés d'années et couverts de haillons, attestant le courroux du seigneur et par l'abattement de leur corps et par leurs vêtements déchirés. Peuple malheureux, que toutefois on ne sait comment plaindre! Le Calvaire, où ils ont supplicié le Sauveur, ils le voient resplendissant de gloire; le lieu de sa réssurrection, éclatant de lumière, et l'étendard de sa croix, brillant sur le mont des Oliviers; et ils viennent, les infortunés, pleurer sans espoir sur les ruines de leur Temple. Ils ont encore leurs visages inondés de larmes, les cheveux épars, leurs bras livides étendus vers le ciel, que le soldat vient leur demander une nouvelle taxe pour leur permettre de pleurer un peu plus longtemps. » S. Jérôme.
(4) Nos putavimus eum quasi leprosum. (ISAÏE, LIII, 4.)
(5) DEPPING, les Juifs dans le moyen âge, p. 53-56.
(6) Le règlement porte « que les Juifs feraient coudre sur leurs robes de dessus, devant et derriere, une pièce de feutre ou de drap jaune, d'une circonférence de quatre doigts, couvrant la superficie d'une main. - Cette marque fut nommé Rouelle, et en latin Rotella, par la ressemblance qu'elle avait à une petits roue. » DE LA MARE, Traité de la police, t. 1, liv. II, tit. 3, ch. Il. - HALPHEN, Recueil des lois concernant les Israélites, Introduction, p. XIII, p. XXI.
(7) Pétition des Juifs à l'Assemblée nationale, 1789, p. 85. - Archives Israél., 1848, p. 402.
(8) DEPPING, p.56-57.
(9) S. LUC, XXII, 64.
(10)Toutes ces vexations saut citées par MAILLET, Description de l'Égypte, lettre 12. - BOISSI, Dissertations pour servir à l'histoire des Juifs, t.II, p. 170. - LES PÈRES DE LA MERCI, Relation sur le royaume de Fez et Maroc, en 1867. - BASNAGE, liv. VIII, ch. XXX.
(11) Archives Israél., 1862, p. 454.
(12) CANTU, Hist. univ., t. X, p. 250.
(13) DEPPING, p. 276.
(14) Plaintes des Juifs dans leurs cahiers à l'Assemblée nationale, 1789.
(15) MATTH., XXVI, 67.
(16) HALLEZ, Des Juifs en France, p. 105.
(17) CANTU, Hist. univ., t. X, p. 250.
(18) BAIL, Hist. des Juifs, p. 27.
(19) BEUGNOT, les Juifs d'Occident, p. 127-8.
(20) Il a dû en être ainsi, puisqu'une ordonnance de Charles VI, du 4 avril 1392 (édit donné à Basville), porte que les juifs qui se convertiront ne seront pas privés de leurs biens. - À ce sujet, voici ce que dit Montesquieu : « Il s'introduisit une coutume qui confisqua tous les biens des juifs qui embrassaient le christianisme. Cette coutume si bizarre, nous la savons par la loi qui l'abroge (l'édit de Charles VI). On en a donné des raisons bien vaines; on a dit qu'on voulait les éprouver et faire en sorte qu'il ne restât rien de i'esclavage du démon. Mais il est visible que cette confiscation était une espèce de droit d'amortissement, le prince ou pour les seigneurs, des taxes qu'ils levaient sur les juifs, et dont ils étaient frustrés lorsque ceux-ci embrassaient le christianisme. Dans ce temps-là, on regardait les hommes comme des terres. » ESPRIT (les lois, liv. XXI, chap. XX.
(21) A planta pedis usque ad verticem, non est in eo sanitas. ISAÏE, 1, 6.
(22) In siti mea potaverunt use aceto... Dorsum eorum semper incurva. PS., LXVIII, 22, 24.
(23) MERLIN, Répertoire, au mot JUIF.
(24) L'original de ce document existe dans la bibliothèque de M. de Crozet, rue Sénac, 66, à Marseille. Il a bien voulu nous le communiquer.
(25) Document cité par BÉDARRIDE, les Juifs en France, p.553-556.
(26) BAlI, Hist. des Juifs, p. 27. - MALO, Hist. des Juifs, p. 422.
(27) Et exultabunt Ossa humiliata (Ps., L, 10.)
(28) HOURWITZ, Apologie des Juifs, 1789.
(29) Archives nationales, secrétariat de la maison du Roi, O 1, 125(1°48).
(30) Les juifs d'Alsace, lisez et jugez. lntrod., p. 6.
(31) BAIL, p 160-1. - Nous n'avons pas craint de citer ce portrait, parce que dans la suite de cet ouvrage nous ferons voir la transformation morale survenue depuis le bienfait de l'émancipation.
(32) Les Juifs d'Alasace, lacy, p. 122-3.
(33) Le Sundgaw était la partie méridionale du département du Haut-Rhin, c'est-à-dire les arrondissements d'Alkirch et de Belfort.
(34) Le prêtre constitutionnel Grégoire. - Essai sur la régénération des Juifs, p. 79.
(35) GRÉGOIRE, Essai sur la régénération des juifs, p. 80.
(36) Appendice au livre de la Réforme politique des juifs, par DOHM (imprimé à Dessau, 1782, P. 235-240.)
(37) Observations d'un Alsacien, sur les affaires des juifs en Alsace.
(38) DOHM, de la Réforme politique des juifs. p. 105 et p. 240.
(39) Archives nationales, K, 1142, n° 60. Lettres patentes du Roi portant règlement pour l'instruction des affaires d'entre les juifs d'Alsace et leurs débiteurs chrétiens de la classe du peuple.
(40) Archives nationales, K, 1142, n° 49. Il fut puni moins pour le fait des fausses quittances que pour la publication du libellé incendiaire, Obserrations d'un Alsacien sur les affaires des juifs en Alsace, dont il avoua être l'auteur, « Cet ouvrage, publié dans de pareilles circonstances, dit la piece des Archives, aurait été le signal du massacre des juifs, contre lesquels les paysans d'Alsace n'étaient déjà que trop aminés. Mais on empêcha qu'il ne se répandit. » Les puissants protecteurs du bailli obtinrent qui fût poursuivi et jugé pour ce libellé, et non pour le fait des fausses quittances; on se borna alors à le punir par voie d'administration, comme dit le Mémoire.
(41) Archiv. nat., K, 1142, n° 6).
(42) Quelques Idées sur l'usure des juifs, mémoire adressé à la Chambre des pairs par un Sundgawien en 1818, p. 35
(43) Archiv. nat., K, 1142, n° 60.
(44) BÉDARRIDE, les juifs en France, p. 387-88. - Quelques Idées sur l'usure des juifs, etc, p.35.
(45) Mémoire présenté en 1780 par les juifs d'Alsace au Conseil d'État de Louis XVI. « Ce mémoire offre de curieux détails sur la situation de la France à cette époque, en même temps qu'il donne les éclaircissements les plus détaillés et les plus précis sur l'état des juifs d'Alsace pendant les dix-septième et dix-huitième sicles, et sur leurs rapports tant envers le roi qu'envers les seigneurs territoriaux. » Remarque d'HALÉVY dans son Histoire des juifs modernes, où se trouve ce mémoire, p. 271-296.
(46) GRÉGOIRE, Essai sur la régénération des juifs, p. 80. - Hélas lui-même dans la suite devait être bien plus à paindre, en faussant son christianisme, comme prêtre assermenté et opiniâtre.
(47) Les juifs d'Alsace, lisez et jugez, p. 133.
(48) LACORDAIRE.