CHAPITRE IX

DE LA MANIÈRE ADMIRABLE D'ÉCRIRE SES LIVRES.


    Mais, ce que nos Pères racontent de sa manière d'écrire ses livres, ne doit certes pas être passé sous silence. On dit, en effet, qu'il avait coutume, lorsqu'il se sentait éclairé des splendeurs de la divine grâce, de se retirer seul dans les solitudes de la forêt ; et là, il rédigeait ce qu'il pouvait puiser à la source de l'esprit divin. C'est, de cette manière, qu'il a composé toutes ses oeuvres. Et, quoique parfois il se fût abstenu d'écrire pendant l'espace de plusieurs semaines, parce qu'il ne voyait pas la grâce lui sourire, revenu cependant à son habitude d'écrire, bien qu'il n'eût aucun souvenir de ce qu'il avait écrit précédemment, la suite s'unissait aussi parfaitement, aussi agréablement, aux précédents chapitres, que s'il avait rédigé le tout en un seul jour avec une grande contention d'esprit. Ce qui est une
preuve évidente qu'il a composé ses écrits, qui sont en vérité pleins de suavité, non de lui-même, mais pénétré de l'esprit divin. Lorsque, accablé par l'âge, il ne put écrire commodément, il prit avec lui un des frères, qui inscrivait sur des tablettes ce que l'Esprit lui suggérait. Si l'on soumet tous ces faits à la rectitude du jugement, et si l'on examine religieusement et pieusement tous les écrits de cet homme, à moins que je ne me trompe, l'on se persuadera qu'il fut admis jusqu'à la contemplation de la divine Essence ; bien que, sur ce sujet, nous n'osions rien définir témérairement, quoique les raisons de vraisemblance ne nous manquent nullement.