LETTRE XX
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rte de l'église 38 - CH-1897 Le Bouveret (VS)

LETTRE XX. (390.)

 

Antonin était un fervent catholique dont toute la famille n'était pas restée fidèle à l'unité; il parait que sa femme s'était laissée aller aux erreurs du donatisme. Saint Augustin, dans cette lettre, souhaite que toute la famille d'Antonin se réunisse dans la même foi; au sujet des louanges qu'Antonin lui avait données, saint Augustin exprime de belles idées sur l'estime affectueuse qu'on témoigne à ceux qu'on croit gens de bien.

 

AUGUSTIN A ANTONIN.

 

1. Deux d'entre nous vous devaient des réponses; et voilà que l'un de nous va vous payer avec usure, car c'est lui-même que vous allez voir; ce que vous entendrez de sa bouche sera comme entendu de la Mienne, et je ne vous aurais point écrit si cet ami ne me l'avait

 

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ordonné : lui partant, cette lettre était inutile. Je m'entretiens avec vous plus abondamment peut-être que si j'étais en votre présence, quand vous lisez ma lettre et quand vous entendez Celui dans le coeur de qui vous savez bien que j'habite. J'ai reçu et médité avec grande joie celle de votre Sainteté; j'y ai trouvé un esprit chrétien sans le fard de nos temps mauvais et un coeur qui m'est attaché.

2. Je rends grâces à Dieu et à Notre-Seigneur de votre espérance, de votre foi et de votre charité qui vous portent à avoir si bonne opinion de moi que vous me croyez un fidèle serviteur de Dieu; je me réjouis que vous aimiez dans la pureté de votre coeur la piété que vous me supposez : je vous dois plus de félicitations que de remercîments ; car il vous est profitable d'aimer le bien, ce bien qu'on aime lorsqu'on aime quelqu'un que l'on croit bon, à tort ou à raison. Il faut seulement prendre garde de juger, non pas d'un homme, mais de ce qui constitue le bien même de l'homme, autrement que la vérité ne le demande. Pour vous, frère très-cher, qui rie vous trompez pas en croyant que c'est un grand bien de servir Dieu de bon,coeur et chastement, quand vous aimez un homme par la seule raison qu'il vous semble avoir part à ce bien, le fruit de cette affection vous reste, lors même que celui qui en est l'objet ne serait pas ce que vous pensez. Voilà pourquoi c'est vous qu'il faut féliciter de ce goût pour le vrai bien; et quant à celui que vous aimez, il n'a droit aux hommages que s'il est tel que vous l'aimez. Il appartient à Dieu seul de voir comme je suis et en quoi j'ai avancé ; il ne peut se tromper ni sur ce qui fait le bien de l'homme ni sur l'homme même. Pour obtenir l'heureuse récompense promise, c'est assez que vous m'aimiez de tout votre coeur, uniquement parce que vous me croyez tel que doit être un serviteur de Dieu. Je vous rends d'abondantes actions de grâces de ce que vos louanges, comme si j'étais tel, sont une admirable exhortation pour que je le devienne; je vous en rendrai plus encore si vous n'oubliez pas de prier pour moi comme vous me recommandez de prier pour vous. La prière pour un frère est plus agréable à Dieu quand il s'y mêle un sacrifice de charité.

3. Je salue beaucoup votre petit enfant, et je souhaite qu'il grandisse dans les commandements salutaires du Seigneur. Je désire aussi et je demande pour votre maison une seule foi et une vraie piété, qui ne peuvent être que la foi et la piété catholiques. Et si vous croyez nécessaire le concours de mes soins pour une telle œuvre, ne craignez pas de vous servir de moi : notre Maître commun et la charité elle-même vous en donnent le droit. Ce que je recommanderai beaucoup à votre sagesse, c'est d'inspirer ou d'entretenir au coeur de votre femme la vraie crainte de Dieu par la lecture des livres divins et par de graves entretiens. Il n'est personne qui, inquiet sur son âme, résolu à chercher sans entêtement la volonté de Dieu, ne reconnaisse avec un bon guide la différence qu'il y a entre tout schisme, quel qu'il puisse être, et l'Eglise catholique.

 

 

 

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