LETTRE XC
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rte de l'église 38 - CH-1897 Le Bouveret (VS)

LETTRE XC. (Année 408.)

 

Nous avons raconté , dans l'Histoire de saint Augustin (chap. XXIII) , une émeute païenne à Calame, aujourd'hui Ghelma, contre les chrétiens de cette ville, à la suite de la célébration illégale d'une fête que nous croyons être la fête de Flore, le ter juin 408. Les excès commis faisaient redouter de rigoureux châtiments. Un vieillard païen de Calame adressa à saint Augustin la lettre suivante pour implorer sa miséricordieuse intervention; cette lettre, qui est un hommage au pontife d'Hippone, montre aussi quelle idée les païens avaient d'un évêque.

 

NECTARIUS A L'ILLUSTRE SEIGNEUR ET TRÈS-AIMABLE FRÈRE AUGUSTIN, ÉVÊQUE.

 

Vous savez toute la grandeur de l'amour de la patrie, je ne vous en dirai rien ; c'est le seul amour qui, à bon droit, l'emporte sur l'amour des parents. Si les gens de bien ne se devaient pas à la patrie sans mesure et sans fin, je m'excuserais avec raison de ne plus lui rendre de services. Mais, comme l'attachement à la cité ne fait que s'accroître de jour en jour, plus on approche du terme de la vie, plus on souhaite laisser sa patrie tranquille et florissante. Aussi, je me réjouis d'avoir à tenir ce langage à un homme qui possède toutes les connaissances. il y a à Calame bien des choses que j'ai raison d'aimer, soit parce que j'y suis né, soit parce que je crois avoir rendu à cette ville de grands services. Mais, éminent et très-aimable seigneur, elle est tombée par un grave égarement de son peuple; et si nous sommes jugés d'après la rigueur de la loi, cet égarement doit être frappé du châtiment le plus sévère. Mais il est du devoir de l'évêque de ne chercher que le salut des (134) hommes, de n'intervenir dans leurs affaires que pour rendre leur situation meilleure, et de demander au Dieu tout-puissant le pardon de leurs fautes. C'est pourquoi je demande et je supplie, autant qu'il est en mon pouvoir, que si la chose est défendable, l'innocent soit défendu, et ne subisse pas des châtiments immérités. Accordez-nous ce qu'une nature comme la vôtre prévoit bien que nous demandons. Une contribution pour les dommages sera aisée à imposer; seulement qu'on nous épargne les supplices. Vivez de plus en plus agréable à Dieu, illustre seigneur et très-aimable frère.

 

 

 

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