1025. Quels sont ces trois sens dans les préceptes du Décalogue, c'est ce qu'on peut voir par les expositions sommaires qui suivent. Le Premier Précepte du Déealogue, Tu n'adoreras point d'autres dieux que Moi, enveloppe dans le sens spirituel-moral, que tu n'adoreras aucune chose ni aucun autre comme Divin : aucune chose, à savoir, la nature en lui attribuant du Divin par elle-même ; aucun autre, à savoir, aucun vicaire du Seigneur, ou aucun saint ; dans le sens spirituel-céleste, il enveloppe que tu ne reconnaîtras qu'un seul Dieu, et non plusieurs selon les qualités, comme ont fait les anciens, et comme font aujourd'hui quelques païens, ou selon les Opérations, comme aujourd'hui les Chrétiens, qui font un Dieu pour la Création, un autre pour la rédemption, et un autre pour l'illustration. Le même précepte, dans le sens divin-céleste enveloppe que le Seigneur seul doit être reconnu et adoré, et le Trine en Lui, savoir, le Divin Même de toute éternité, qui est entendu par le Père, le Divin humain né dans le temps, qui est entendu par le Fils de Dieu, et le Divin procédant de l'un et de l'autre, qui est entendu par l'Esprit Saint : ce sont là, en ordre, les trois sens du Premier précepte : en examinant ce Précepte dans son triple sens, on voit qu'en somme il contient et renferme en lui tout ce qui concerne le Divin quant à l'Essence. Le Second Précepte, tu ne profaneras point le Nom de Dieu, contient et renferme, dans ses trois sens, tout ce qui concerne le Divin quant à la qualité, car le Nom de Dieu signifie la qualité de Dieu ; dans le premier sens cette qualité est la Parole, d'après la Parole la doctrine, d'après la doctrine le culte de la bouche, et de la vie ; dans le second sens, elle est le royaume du Seigneur dans les terres, et le royaume du Seigneur dans les Cieux ; et, dans le troisième sens, elle est le Divin humain du Seigneur, car le Divin Humain est la Qualité du Divin Même ; que dans le sens suprême, le Divin humain du Seigneur soit le Nom de Dieu, on le voit dans l'Apoc. Expl. N° 224. Dans les autres préceptes, il y a pareillement trois sens internes pour les trois Cieux ; mais il en sera parlé ailleurs avec la volonté du Seigneur.
1026. Puisque du Seigneur comme Soleil procède le Divin Vrai uni au Divin Bien, et que par le Divin Vrai a été fait le Ciel et a été fait le Monde, -Jean, 1. 1, 3, 10, il s'ensuit que c'est de là que toutes choses dans le Ciel, et toutes choses dans le monde, se réfèrent au Bien et au Vrai, et à leur conjonction, afin qu'il se fasse quelque chose. Dans ces dix Préceptes sont contenues toutes les choses du Divin Bien et toutes celles du Divin Vrai, et en eux aussi il y a leur conjonction ; mais leur conjonction y est un arcane, car elle est comme la conjonction de l'amour envers le Seigneur et de l'amour à légard du prochain ; le Divin Bien appartient à l'amour envers le Seigneur et le Divin Vrai à l'amour à l'égard du prochain, car lorsque l'homme vit selon le Divin Vrai, c'est-à-dire, aime le prochain, le Seigneur influe avec le Divin Bien et Se conjoint. C'est pour cela qu'il y avait deux Tables sur lesquelles furent inscrits ces préceptes, et qu'elles ont été appelées alliance, ce qui signifie conjonction; et qu'ensuite elles ont été placées dans l'Arche, non l'une contre l'autre, mais l'une sur l'autre, en témoignage de la conjonction entre le Seigneur et l'homme. Sur une Table ont été écrits les préceptes de l'amour envers le Seigneur, et sur l'autre table ont été écrits les préceptes de lamour à l'égard du prochain ; les trois premiers préceptes appartiennent à l'amour envers le Seigneur, les six derniers préceptes, à l'amour à l'égard du prochain, et le quatrième précepte c'est-à-dire, Honore ton Père et ta Mère, est le précepte qui sert de medium ; car là, par Père, il est entendu le Père dans les Cieux ; et par Mère, il est entendu l'Église, qui est le prochain.
1027. Il va maintenant être dit quelque chose sur la manière dont se fait la conjonction par les Préceptes du Décalogue. Le Seigneur Seul conjoint l'homme à Lui, et l'homme ne se conjoint pas au Seigneur; le Seigneur conjoint l'homme à Lui par cela que l'homme sait, comprend, veut et fait ces préceptes ; quand l'homme les fait, il y a conjonction, mais s'il ne les fait pas, il cesse de les vouloir, et en cessant de les vouloir, il cesse même de les comprendre et de les savoir. Qu'est-ce, en effet, que vouloir, quand l'homme ne fait pas, lorsqu'il peut faire? N'est-ce pas là un être de raison ? Il s'ensuit donc que la conjonction s'opère, quand l'homme fait les Préceptes du Décalogue. Mais il a été dit que le Seigneur seul conjoint l'homme à Lui, et que l'homme ne se conjoint pas au Seigneur, et que la conjonction s'opère par faire, de là résulte que le Seigneur fait ces préceptes chez l'homme. Mais chacun peut voir que l'alliance n'est pas formée, et qu'ainsi il n'y a pas conjonction, s'il n'y a pas chez l'homme quelque chose de réciproque, afin que non seulement il consente, mais aussi reçoive ; pour cette fin le Seigneur a mis dans l'homme une Liberté de vouloir et de faire comme par soi-même, et une telle liberté, que l'homme ne sait autre chose, quand il pense le vrai et fait le bien, sinon que c'est intérieurement en lui, et ainsi par lui-même ; c'est là le réciproque de la part de l'homme, pour que la conjonction se fasse ; mais comme cette Liberté est par le Seigneur et vient continuellement du Seigneur, l'homme doit absolument reconnaître que c'est par le Seigneur, et non par lui-même, qu'il pense et comprend le vrai, et qu'il veut et fait le bien, selon ce qui a déjà été dit sur ce sujet, N° 946, 971, 973. Lors donc que l'homme se conjoint au Seigneur comme par lui-même par les six derniers préceptes, le seigneur se conjoint à l'homme par les trois premiers préceptes, qui sont que l'homme reconnaisse Dieu, croie au seigneur et sanctifie son Nom ; la foi en ces choses n'est point chez l'homme, de quelque manière qu'il croit l'avoir, s'il ne fuit pas comme péchés les maux qui ont été désignés dans la seconde Table, c'est-à-dire, dans les six derniers préceptes. Voilà les choses qui appartiennent à l'alliance de la part du Seigneur et de la part de l'homme, et c'est par elles qu'il y a une conjonction réciproque, qui consiste en ce que l'homme est dans le Seigneur et le Seigneur dans l'homme, - Jean, X IV. 20.
1028. Quelques personnes disent que celui qui pèche contre un seul précepte du Décalogue pèche aussi contre tous les autres, quand celui qui en enfreint un les enfreint tous ; mais comment cela est-il d'accord avec la vérité, c'est ce qui va être dit ; celui qui transgresse un précepte, en confirmant en lui-même que le mal défendu par ce précepte n'est pas un péché, et qui en conséquence le commet sans crainte de Dieu, celui-là, parce qu'il rejette la crainte de Dieu, ne craint point non plus de transgresser les autres préceptes, quoiqu'en actualité il ne les transgresse point. Par exemple, celui qui ne considère pas comme péchés les fraudes et les gains illicites, qui en eux mêmes sont des vols, ne considère pas non plus comme des péchés de commettre adultère avec l'épouse d'un autre, de haïr un homme jusqu'à vouloir sa mort, de mentir contre lui, de convoiter sa maison et beaucoup d'autres choses qui lui appartiennent ; en effet, il nie que quelque chose soit un péché, tant que dans un seul précepte il rejette de coeur la crainte de Dieu ; il en résulte qu'il est en communion avec ceux qui transgressent pareillement les autres préceptes : il ressemble à un esprit infernal qui est dans l'enfer des voleurs ; quoique cet esprit ne soit ni adultère, ni meurtrier, ni faux témoin, il est cependant en communion avec ceux qui le sont, et il peut être porté par eux à croire avec persuasion que de telles actions ne sont pas des maux ; il peut aussi être conduit à les commettre, car celui qui est devenu esprit infernal par la transgression d'un seul précepte ne croit plus que ce soit un péché de faire quelque chose contre Dieu, ou de faire quelque chose contre le prochain. Le contraire arrive à ceux qui s'abstiennent du mal défendu par un des préceptes, et qui le fuient comme péché contre Dieu et l'ont ensuite en aversion ; comme ceux-ci craignent Dieu, ils viennent en communion avec les Anges du Ciel, et sont conduits par le Seigneur à s'abstenir des maux défendus dans les autres préceptes et à les fuir, et enfin à les avoir en aversion comme péchés ; et si par hasard ils pèchent contre ces préceptes, toujours est-il qu'ils s'en repentent, et ainsi ils en sont éloignés par degrés.
FIN