CORRESPONDANCE DU GOÛT ET DE LA LANGUE,
ET AUSSI DE LA FACE AVEC LE TRES-GRAND HOMME
4791. La langue donne une entrée vers les poumons, et aussi vers l'estomac, ainsi elle représente une sorte de vestibule pour les spirituels et pour les célestes - pour les spirituels, parce qu'elle sert aux poumons et par suite au langage ; pour les célestes, parce qu'elle sert à l'estomac qui fournit des aliments au sang et au cur ; que les poumons correspondent aux spirituels, et le cur aux célestes, on le voit, n° 3635,3883 à 3896 ; c'est pourquoi la Langue, en général, correspond à l'affection du vrai, ou à ceux qui, dans le Très-Grand Homme, sont dans l'affection du vrai, et ensuite dans l'affection du bien d'après le vrai : ceux donc qui aiment la Parole du Seigneur, et qui par suite désirent les connaissances du vrai et du bien, appartiennent à cette province ; mais avec cette différence que les uns appartiennent à la langue même, d'autres au larynx et à la trachée, d'autres au gosier, d'autres aux gencives, et d'autres aux lèvres ; car il n'existe pas chez l'homme la plus petite partie avec laquelle il n'y ait correspondance. Que ceux qui sont dans l'affection du vrai appartiennent à cette province comprise dans un sens large, c'est ce qu'il m'a été donné de connaître plusieurs fois par expérience, et cela par un influx manifeste, tantôt dans la langue, tantôt dans les lèvres, quand il m'était aussi donné de converser avec eux ; et ai même observé que les uns correspondent aux intérieurs de la langue des lèvres, et les autres aux extérieurs ; quant à ceux qui reçoivent seulement avec affection les vrais extérieurs, et non les vrais intérieurs, sans cependant rejeter ceux-ci, J'ai senti leur opération, non dans les intérieurs de la langue, mais dans les extérieurs.
4792. Comme l'aliment et la nutrition correspondent à l'aliment et la nutrition spirituels, il s'ensuit que le Goût correspond à la perception et à l'affection de l'aliment spirituel : l'aliment spirituel est la science, l'intelligence et la sagesse ; en effet, les esprits et les anges vivent de science, d'intelligence et de sagesse, et S'en nourrissent aussi, et ils les désirent et les recherchent ardemment comme les hommes qui ont faim, désirent et recherchent des aliments ; de là l'appétit correspond à ce désir. Et, ce qui est étonnant, ils croissent aussi par cet aliment, car les enfants, qui décèdent dans le monde, n'apparaissent pas autrement qu'enfants dans l'autre vie, et ils sont enfants aussi quant à l'entendement ; mais a mesure qu'ils croissent en intelligence et en sagesse, as apparaissent, non comme enfants, mais comme ayant avancé en âge, et enfin comme adultes ; j'ai conversé avec quelques-uns qui étaient morts enfants, lesquels ont été vus par moi comme jeunes gens, parce qu'alors ils étaient intelligents. Par là on voit clairement ce que c'est que l'aliment et la nutrition spirituels.
4793. Comme le goût correspond à la perception et à l'affection de savoir, de comprendre et de devenir sage, et que la vie de l'homme est dans cette affection, c'est pour cela qu'il n'est permis à aucun esprit ni à aucun ange d'influer dans le goût de l'homme ; car ce serait influer dans la vie qui lui est propre. Cependant, parmi la tourbe infernale, il y a des esprits vagabonds, plus pernicieux que les autres, qui, ayant contracté dans la vie du corps la cupidité d'entrer dans les affections de l'homme, pour lui nuire, retiennent aussi dans l'autre vie cette cupidité, et s'étudient de toute manière à entrer dans le goût chez l'homme; quand ils y sont entrés, ils possèdent ses intérieurs, à savoir la vie de ses pensées et de ses affections ; car, ainsi qu'il a été dit, a y a correspondance, et le. choses qui correspondent font un. Aujourd'hui, un grand nombre d'hommes s ont possédés par ces esprits ; car aujourd'hui il y a des obsessions intérieures, mais il n'y en a pas d'extérieures comme autrefois ; les obsessions intérieures se font par de tels esprits ; et l'on peut voir quelles sont ces obsessions, si l'on porte son attention sur les., pensées et sur les affections, principalement sur les intentions intérieures que la crainte empêche de manifester, lesquelles chez quelques-uns sont portées à un tel degré de folie que s'ils n'étaient retenus par les liens, externes, qui sont l'honneur, le gain, la réputation, la peur de perdre le vie, et la crainte de la loi, ils se précipiteraient plus que des obsédés dans les meurtres et dans les rapines. Qui sont et quels sont ces esprits qui obsèdent les intérieurs de ces hommes, on le voit, n° 1983. Afin que le connusse comment la chose se passait, il leur fut permis de faire des efforts pour entrer dans le goût chez moi ; ils en firent même de très grands, et alors il me fut dit que s'ils pénétraient jusque dans le goût. as posséderaient aussi les intérieurs, par la raison que le goût dépend de ces intérieurs par la correspondance ; mais cela fut permis seulement afin que j'apprisse comment la chose se passait à l'égard de la correspondance du goût, car ils en furent aussitôt chassés. Ces esprits pernicieux tentent principalement cela afin de rompre tous les liens internes, qui sont les affections du bien et du vrai, du juste et de l'équitable, la crainte de la loi Divine, la honte de nuire à la société et à la patrie ; quand ces, liens internes ont été rompus, alors ils obsèdent l'homme : lorsqu'ils ne peuvent s'introduire ainsi dans les intérieurs par un opinitre effort, ils le tentent par des artifices magiques qui, dans l'autre vie, sont en très grand nombre et absolument inconnus dans le monde ; par ces artifices, ils pervertissent les scientifiques chez l'homme, et appliquent seulement ceux qui sont favorables à de honteuses cupidités : de telles attaques ne peuvent pas être évitées, à moins que l'homme ne soit dans l'affection du bien, et par suite dans la foi envers le Seigneur. Il m'a aussi été montré comment as étaient chassés, à savoir : lorsqu'ils croyaient pénétrer vers les intérieurs de la tête et du cerveau, ils étaient transportés par les voies excrémentielles qui y sont, et de là vers les externes de la peau ; et je vis qu'ils étaient ensuite jetés dans une fosse remplie d'ordures en dissolution ; j'ai été informé que de tels esprits correspondent aux sales petits trous dans la peau la plus extérieure où est la gale, par conséquent à la gale.
4794. L'esprit, ou l'homme après la mort, possède toutes les sensations qu'il avait quand il vivait dans le monde, à savoir la Vue, l'ouïe l'Odorat et le Toucher, et non le Goût, mais à la place du goût quelque chose d'analogue qui a été adjoint à l'odorat. S'il n'a pas le goût, c'est afin qu'il ne puisse pas entrer dans le goût de l'homme, ni par conséquent posséder ses intérieurs ; puis, afin que ce sens ne le détourne pas du désir de savoir et de devenir sage, par conséquent de l'appétit spirituel.
4795. Par là on peut voir aussi pourquoi la Langue a été destinée à une double fonction, à savoir, à la fonction de servir au langage, et à la fonction de servir à la nutrition ; car en tant qu'elle sert à la nutrition, elle correspond à l'affection de savoir, de comprendre et de savourer les vrais, c'est même pour cela que sagesse ou être sage est un dérivé du mot saveur ; et en tant qu'elle sert au langage, elle correspond à l'affection de penser et de produire les vrais.
4796. Lorsque les Anges se rendent visibles, toutes leurs affections intérieures apparaissent clairement d'après la face, et par suite brillent de telle sorte que la face en est la forme externe et l'image représentative ; avoir une autre face que celle de ses affections, cela n'est accordé à personne dans le ciel ; ceux qui se contrefont la face sont rejetés de la société ; de là a est évident que la face correspond à tous les intérieurs en général, tant aux affections qu'aux pensées, ou aux choses qui appartiennent à la volonté et à celles qui appartiennent à l'entendement chez l'homme ; de là aussi, dans la Parole, la face et les faces signifient les affections ; et quand a est dit que le Seigneur lève ses faces sur quelqu'un, cela signifie que d'après la Divine Affection, qui appartient à l'Amour, a a compassion de lui.
4797. Les changements de l'état des affections apparaissent aussi au vif dans la face des Anges ; quand ils sont dans leur société, ils sont alors dans leur face ; mais quand as viennent dans une autre société, leurs faces sont changées selon les affections du bien et du vrai de cette société ; toutefois, cependant, la face réelle est comme un plan, et dans ces changements elle est connue : j'ai vu les variations successives selon les affections des sociétés avec lesquelles ils communiquaient ; car chaque Ange est dans une province du Très-Grand Homme, et ainsi communique d'une manière générale et étendue avec tous ceux qui sont dans la même province, quoiqu'il soit dans une partie de cette province, à laquelle il correspond d'une manière particulière. J'ai vu qu'ils variaient leurs faces par des changements depuis une limite de l'affection jusqu'à l'autre, mais j'ai observé que néanmoins la même face était en général retenue, de sorte que l'affection dominante brillait toujours avec ses variations ; ainsi étaient montrées les faces de toute l'affection dans son extension. Et, ce qui est plus étonnant, les changements des affections depuis l'enfance Jusqu'à l'âge adulte étaient aussi montrés par des variations de la face ; et il m'était donné de connaître combien dans cet âge adulte elle avait retenu de l'enfance, et que celle-ci était son humain même ; en effet, chez l'enfant, il y a l'innocence dans la forme externe, et l'innocence est l'humain même, car en elle comme dans un plan influent du Seigneur l'amour et la charité ; quand l'homme est régénéré et devient sage, l'innocence de l'enfance, qui était externe, devient interne de là vient que la sagesse réelle n'habite pas dans une autre demeure que dans l'innocence, n° 2305, 2306 3183, 3994 ; et que personne, si ce n'est celui qui a quelque innocence, ne peut entrer dans le ciel, selon les paroles du Seigneur : si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n'entrerez point dans le Royaume des cieux - Matth. XVIII. 3. Marc, X. 15.
4798. D'après les faces aussi les mauvais esprits peuvent être connus, car toutes leurs cupidités ou affections mauvaises ont été inscrites sur leurs faces ; et aussi d'après les faces il peut être connu avec quels enfers ils communiquent ; en effet, il y a un très grand nombre d'enfers, tous distincts selon les genres et les espèces de cupidités du mal . en général, quand ils apparaissent à la lumière du ciel, leurs faces sont presque sans vie, livides comme celles des cadavres, chez quelques-uns noires, et chez d'autres monstrueuses ; car elles sont les formes de la haine, de la cruauté, de la fourberie, de l'hypocrisie ; mais, dans leur lueur entre eux, ils apparaissent autrement d'après la fantaisie.
4799. Il y avait chez moi des Esprits d'un autre globe, dont je parlerai ailleurs ; leur face différait d'avec les faces des hommes de notre globe ; elle était proéminente, surtout autour des lèvres, et en outre franche ; je m'entretins avec eux sur leur manière de vivre et sur l'état de la conversation entre eux ; ils disaient qu'entre eux, ils parlaient principalement par les variations de la face, et spécialement par des variations autour des lèvres, et qu'ils exprimaient les affections par les parties appartenant à la face autour des yeux, de manière que leurs compagnons pouvaient par là pleinement comprendre et ce qu'ils pensaient et ce qu'ils voulaient ; ils s'efforçaient aussi de me le montrer par un influx dans mes lèvres, par divers plis et diverses sinuosités à l'entour ; mais je ne pus recevoir les variations, parce que mes lèvres n'avaient pas dès l'enfance été initiées à ces mouvements ; mais néanmoins, je pus voir l'aperception de ce qu'ils disaient par la communication de leur pensée : que le langage dans le commun puisse être exprime par les lèvres, cela peut être évident pour moi par la complication des nombreuses séries de fibres musculaires qui sont dans les lèvres ; si elles étaient développées et agissaient ainsi explicitement et librement, elles pourraient y présenter un grand nombre de variations, que ne connaissent point ceux chez qui ces fibres musculaires ont été comprimées. Si tel y était leur langage, c'est parce qu'ils ne peuvent dissimuler, ou penser une chose et en montrer une autre par la face ; en effet, ils vivent entre eux dans une telle sincérité, qu'ils ne cachent rien à leurs compagnons, et de plus on sait sur-le-champ ce qu'ils pensent, ce qu'ils veulent, quels ils sont, et aussi ce qu'ils ont fait ; car chez ceux qui sont dans la sincérité, les actes effectués sont dans la conscience ; de là ils peuvent au premier aspect être distingués par les autres quant à leurs contenances intérieures ou mentals (animi). Ils m'ont montré qu'ils ne contraignent point la face, mais qu'ils l'émettent librement ; il en est autrement chez ceux qui dès leur jeunesse ont été habitués à dissimuler, c'est-à-dire à parler et à agir autrement qu'ils ne pensent et qu'ils ne veulent ; leur face est contractée afin qu'elle soit prête à changer selon que la ruse le suggère ; tout ce que l'homme veut cacher contracte sa face, qui, d'après la contraction, est dilatée quand par ruse il tire quelque chose qui est comme sincère. Tandis que je lisais dans la Parole du Nouveau Testament des passages sur le Seigneur, ces esprits étaient présents, quelques esprits Chrétiens étaient aussi présents, et je perçus que ceux-ci entretenaient au-dedans d'eux-mêmes des scandales contre le Seigneur, et que même ils voulaient tacitement les communiquer ; ces esprits d'un autre globe étaient étonnés qu'ils fussent tels, mais il me fut donné de leur dire que dans le monde, ils avaient été tels, non pas de bouche, mais de cur, et qu'il y a même des hommes qui prônent le Seigneur quoiqu'ils soient tels, et qui alors touchent le vulgaire jusqu'aux gémissements, et parfois jusqu'aux larmes, par le zèle d'une piété feinte, ne communiquant rien de ce qui est dans leur cur : en apprenant cela, ces esprits furent très surpris qu'il pût exister un tel désaccord entre les intérieurs et les extérieurs, ou entre la pensée et le langage, disant que pour eux ils sont absolument dans l'ignorance sur un tel désaccord, et qu'il leur est impossible de prononcer de bouche, et de montrer sur la face, autre chose que ce qui est conforme aux affections du cur, et que s'ils agissaient autrement, ils seraient brisés et périraient.
4800. Il est très peu d'hommes qui puissent croire qu'il y a des sociétés d'esprits et d'anges, auxquelles correspondent les diverses choses qui sont chez l'homme ; et que, plus il y a de sociétés et d'individus dans chaque société, plus la correspondance est convenable et forte, car dans une multitude unanime, il y a la force. Pour que je susse que cela est ainsi, il m'a été montré comment ces sociétés agissent et influent dans la face, comment, dans les muscles du front, et dans ceux des joues, du menton et du gosier ; il était donné à ceux qui appartenaient à cette province d'influer, et alors selon leur influx chacune de ces parties variait ; quelques-uns d'eux conversaient même avec moi ); mais ils ne savaient pas qu'ils avaient été assignés à la province de la face, car les esprits ignorent à quelle province ils ont été assignés, mais les anges le savent.
4801. J'eus une conversation avec un esprit qui, du temps qu'il vivait dans le monde, avait connu plus que les autres les vrais extérieurs de la foi, mais cependant n'avait pas mené une vie conforme aux préceptes de la foi ; car il s'était aimé lui seul, avait méprisé les autres en les comparant à soi-même, et avait cru qu'il serait dans le ciel parmi les premiers ; mais comme il était tel, il n'avait pu avoir du ciel d'autre opinion que celle qu'il avait d'un royaume du monde: quand dans l'autre vie il découvrit que le ciel était tout autre, et que là les principaux étaient ceux qui ne s'étaient pas préférés aux autres, et surtout ceux qui s'étaient crus non dignes de miséricorde, et ainsi d'après le mérite être les derniers, il fut rempli d'indignation, et il rejeta les choses qui avaient appartenu à sa foi dans la vie du corps: cet esprit s'efforçait continuellement de faire violence à ceux qui étaient de la province de la Langue; il me fut donné de m'apercevoir de ses efforts pendant plusieurs semaines, et aussi de savoir par là qui sont et quels sont ceux qui correspondent à la langue, et qui sont ceux qui leur sont opposés.
4802. Il y a aussi de semblables esprits, qui en quelque sorte admettent la lumière du ciel et reçoivent les vrais de la foi, et néanmoins restent méchants ; de cette manière, ils ont quelque perception du vrai ; ils reçoivent même avec avidité les vrais ; toutefois, ce n'est pas pour y conformer leur vie, mais c'est pour se glorifier de paraître plus intelligents et plus clairvoyants que les autres ; car tel est l'intellectuel de l'homme qu'il peut recevoir les vrais, mais néanmoins les vrais ne sont appropriés qu'autant qu'on y conforme sa vie ; si l'intellectuel de l'homme n'était pas tel, il ne pourrait pas être réformé. Ceux qui ont été tels dans le monde, à savoir ceux qui ont compris les vrais et ont néanmoins vécu la vie du mal, sont aussi tels dans l'autre vie ; mais là ils abusent de leur faculté de comprendre les vrais pour dominer ; car là ils savent que par les vrais il ont communication avec quelques sociétés du ciel, que par conséquent ils peuvent être chez les méchants, et y prévaloir, car dans l'autre vie les vrais ont avec eux-mêmes la puissance mais, comme il y a en eux la vie du mal, ils sont dans l'enfer. J'ai parlé à deux esprits qui avaient été tels dans la vie du corps ; ils s'étonnaient de ce qu'ils étaient dans l'enfer, quoique cependant ils eussent cru avec persuasion les vrais de la foi ; mais il leur fut dit que chez eux la lumière, par laquelle ils comprennent les vrais est une lumière semblable à celle de l'hiver dans le monde, dans laquelle les objets se présentent avec leur beauté et avec leur couleur comme dans la lumière de l'été, mais dans laquelle néanmoins tout est languissant, et rien d'agréable et de riant ne se montre ; et que, comme en comprenant les vrais ils avaient eu pour fin la vanité et par suite eux-mêmes, la sphère de leurs fins, quand elle s'élève jusqu'aux cieux intérieurs vers les anges, par qui seuls les fins sont perçues, ne peut y être supportée, mais qu'elle est rejetée ; de là vient qu'ils étaient dans l'enfer : il fut ajouté que de tels hommes avaient autrefois, de préférence aux autres, été appelés les serpents de l'arbre de la science, parce que, quand ils raisonnent d'après la vie, ils parlent contre les vrais : et que, de plus, ils sont semblables à une femme dont le visage est gracieux, et dont le corps cependant répand un odeur si infecte que partout où elle va, elle est rejetée des sociétés ; dans l'autre vie, quand de tels esprits viennent vers des sociétés angéliques, ils répandent même en actualité une odeur infecte, qu'ils sentent aussi eux-mêmes lorsqu'ils approchent de ces sociétés. On peut voir encore par là ce que c'est que la foi sans la vie de la foi.
4803. Une chose absolument ignorée dans le monde et digne d'être rapportée, c'est que les états des bons esprits et des anges sont changés et perfectionnés continuellement, et que de cette manière ils sont portés dans les intérieurs de la province dans laquelle ils sont, et par conséquent élevés à des fonctions plus nobles ; car dans le ciel, il y a une continuelle purification, et pour ainsi dire une nouvelle création ; mais toutefois, la chose se passe de manière que jamais aucun ange ne peut pendant toute l'éternité parvenir à la perfection absolue ; le Seigneur seul est parfait, en Lui est et de Lui procède toute perfection. Ceux qui correspondent à la Bouche veulent continuellemnent parler, car en parlant ils trouvent le suprême de la volupté ; quand ils se perfectionnent, ils sont amenés à ne dire que ce qui est utile aux compagnons, au commun, au ciel, au Seigneur ; le plaisir de parler ainsi augmente chez eux en proportion que diminue le désir de se considérer eux-mêmes en parlant, et de rechercher la sagesse d'après le propre.
4804. Il y a, dans l'autre vie, un grand nombre de sociétés qui sont appelées sociétés d'amitié ; elles se composent de ceux qui, dans la vie du corps, ont préféré le plaisir de la conversation à tout autre plaisir, et qui ont aimé ceux avec lesquels ils s'entretenaient, sans s'inquiéter s'ils étaient bons ou méchants, pourvu qu'ils fusssent agréables ; ainsi, ils n'avaient été amis ni pour le bien ni pour le vrai. Ceux qui ont été tels dans la vie du corps sont tels aussi dans l'autre vie ; ils se réunissent par le seul plaisir de la conversation : plusieurs de ces sociétés ont été chez Moi, mais à distance ; elles étaient principalement vues un peu vers la droite au-dessus de la tête ; il m'était donné de remarquer leur présence par un engourdissement et un abattement, et par la privation du plaisir dans lequel j'étais, car la présence de ces sociétés produit cet effet ; en effet, partout où elles viennent, elles enlèvent le plaisir aux autres ; et, ce qui est étonnant, elles se l'approprient, car elles détournent les esprits qui sont chez les autres, et les tournent vers elles ; par là elles transportent en elles le plaisir d'autrui ; et comme par là elles sont importunes et nuisibles pour ceux qui sont dans le bien, le Seigneur empêche qu'elles ne viennent près des sociétés célestes : par là, a me fut donné de savoir combien l'amitié porte de préjudice à l'homme quant à la vie spirituelle, s'il considère la personne et non le
bien ; chacun, il est vrai, peut être l'ami d'un autre, mais cependant il doit être encore plus l'ami du bien.
4805. Il y a aussi des sociétés d'amitié intérieure, qui enlèvent et tournent vers elles non pas le plaisir externe d'autrui, mais son plaisir interne ou sa béatitude provenant de l'affection des spirituels ; ceux qui composent ces sociétés sont en avant vers la droite presque sur la terre inférieure, et quelques-uns d'eux sont un peu au-dessus ; je me suis quelquefois entretenu avec ceux qui étaient en bas, et alors ceux qui étaient au-dessus influaient dans le commun ; ces esprits avaient été tels dans la vie du corps, en ce qu'ils avaient aimé de cur ceux qui avaient été au-dedans de leur commune consociation, et s'étaient aussi fiés mutuellement par la fraternité ; s'ils s'étaient crus seuls vivants et dans la lumière, et avaient respectivement regardé comme non vivants et non dans la lumière ceux qui étaient hors de leur société ; et parce qu'ils avaient été tels, ils s'imaginaient aussi que le Ciel du Seigneur n'était composé que du petit nombre des leurs ; mais il me fut donné de leur dire que le Ciel du Seigneur est immense, qu'il se compose de tout peuple et de toute langue, et que là sont tous ceux qui ont rapport à toutes les provinces du corps quant à ses extérieurs et à ses intérieurs ; mais que pour eux, s'ils aspiraient au-delà des choses qui correspondent à leur vie, ils ne pourraient avoir le ciel, surtout s'ils damnaient ceux qui étaient hors de leur société ; et que dans ce cas leur société est une société d'amitié intérieure, qui est telle, ainsi qu'il vient d'être dit, que ceux qui la composent privent les autres de la béatitude de l'affection spirituelle quand ils s'approchent d'eux, car ils les considèrent comme non élus et comme non vivants, pensée dont la communication introduit une tristesse qui, toutefois, selon la loi de l'ordre dans l'autre vie, revient sur eux-mêmes.