CHAPITRE CINQUIEME

SECTION IV:

Saint Bernard de Clairvaux (1190-1174);

Ses fréquentes visions du Christ, de la Sainte Vierge et des Anges

 

          Nous ne saurions ici omettre de mentionner les nombreux colloques et les fréquentes visions du Christ, de la Sainte Vierge et des Anges dont fut gratifié saint Bernard de Clairvaux.

          Ces multiples visions angéliques de saint Bernard ont été illustrées par plusieurs artistes médiévaux: Nous avons de Fra Filippo Lippi (1406-1469) deux tableaux remarquables ayant pour sujet les visions angéliques de saint Bernard; une de ces toiles se trouve à la National Gallery, à Londres, elle nous montre le saint en prière dans sa cellule; la Vierge est accompagnée de trois anges. A l'église de la Badia, à Florence, on voit un tableau de Fra Lippi ayant encore pour sujet les apparitions angéliques dont fut gratifié saint Bernard, mais cette fois la Vierge est entourée d'une multitude d'anges; quant au saint il est représenté en méditation dans un val solitaire.

         Le Pérugien (1446-1523 ou 1524), maître de Raphaël, dans le volet de droite d'un Crucifiement décorant l'église de Santa Maria Maddalena, à Florence, a représenté saint Bernard prosterné devant la Vierge qui s'avance pleine de majesté. A Munich, on peut voir une autre toile du Pérugien, représentant saint Bernard en lecture et méditation dans son monastère; il est gratifié de la présence de la Sainte Vierge accompagnée de quelques représentants de la milice angélique dont elle est la reine.

         À la Galerie ancienne et moderne de Florence, on trouve un tableau peint par le Dominicain Fra Bartolomeo (1469-1517) où l'on voit la sainte Vierge apparaissant à saint Bernard; elle porte l'enfant Jésus sur les bras, elle a comme escorte une multitude de l'armée céleste; le saint est dans le ravissement le plus complet.

         À la même Galerie, on peut voir par un anonyme du XIVe siècle une autre apparition de la Sainte Vierge à saint Bernard; deux Archanges accompagnent la Mère de Dieu.

         De nombreuses gravures illustrent le même thème; nous en reproduisons une d'une facture très naïve datant du XVIe siècle (fig. 20). 

 

Fig. 20. Apparition de la Vierge, avec l'Enfant Jésus, à saint Bernard (gravure du XVIe siècle).

 

SECTION V:

Sainte Jeanne d'Arc (1412-1431), béatifiée en 1909, canonisée en 1920.

Ses Voix et Visions angéliques

 

         Il est de fait notoire que tout le comportement de Jeanne d'Arc a été conditionné par ses visions angéliques et surtout par les Voix des Anges, messagers de Dieu qui lui dictaient sa conduite et ses réponses lors de son inique procès de Rouen; prisonnière des Anglais, Jeanne fut jugée en cette ville par un tribunal ecclésiastique tout à la dévotion du roi d'Angleterre. On possède les procès-verbaux des différents interrogatoires de la Pucelle; ils sont riches en enseignements sur la nature et sur la fréquence de ces monitions angéliques. Loin d'être troublée par tous ces ecclésiastiques érudits et prévenus contre elle, Jeanne répondit toujours avec pertinence à toutes les questions et grâce à l'assistance des messagers célestes, elle déjoua toutes les embûches qui lui étaient tendues.

         Le président Pierre Cauchon dira à l'accusée: «Me Jean Beau-père, professeur insigne de théologie va vous interroger.» Le président pensait intimider la jeune fille par l'énoncé des titres du questionnant; il n'en fut rien et tous les interrogateurs successifs furent étonnés du sang-froid de la Pucelle et de l'à-propos des réponses qui dépassaient de beaucoup les connaissances et la mentalité d'une fille de son âge.

         Me J. Beaupère demande: « Quand avez-vous entendu vos voix pour la première fois?» Jeanne de répondre: «J'avais treize ans quand j'eus une voix de Dieu pour m'aider à me bien conduire. La première fois j'eus grand'peur; il était environ midi; c'était l'été, dans le jardin de mon père. J'étais à jeun... J'entendis cette voix à droite, du côté de l'église. Rarement je l'entends sans qu'elle soit accompagnée de clarté. Cette clarté est du même côté que la Voix. Ordinairement il y a grande clarté. Lors de ma venue en France, j'entendis souvent cette voix.»

         Me J. B. : «Que vous semblait-il de la Voix que vous entendiez?»

         Jeanne: «Elle me semblait une noble voix; je crois qu'elle m'était envoyée par Dieu. Lorsque je l'entendis pour la troisième fois, je reconnus que c'était la Voix d'un Ange. Cette Voix m'a toujours bien gardée et je l'ai toujours bien comprise... Cette voix disait: «Viens en France!» Elle me disait que je ferais lever le siège d'Orléans.»

         Me J. B.: «Entendez-vous souvent cette Voix?»

         Jeanne: «Il n'y a pas de jour que je n'entende cette Voix, et j'en ai même bien besoin».

         Me J. B.: «Lui avez-vous parfois désobéi?»

         Jeanne faisant allusion à sa capture par les Bourguignons répondra:

         «La voix m'avait dit de rester à Saint-Denis, en France; je le voulais; mais, contre ma volonté, les seigneurs m'ont emmenée. Si je n'avais été blessée, je ne serais pas partie.»

         Lors de son procès, la Voix avait dit à Jeanne de répondre hardiment et que Dieu l'aiderait; aussi ne craignit-elle pas de s'adresser à l'évêque Cauchon et de le mettre en garde: «Vous dites que vous êtes mon juge; prenez garde à ce que vous faites; car, en vérité, je suis une envoyée de Dieu et vous vous mettez en grand danger».

         À plus d'une occasion, Jeanne a refusé de répondre, car la Voix le lui défendait, notamment lorsqu'il s'agissait de révélations qu'elle avait reçues et qui ne concernaient que le roi.

         Me J. Beaupère pose une question à Jeanne qu'il savait en droit canonique ne pas pouvoir poser, mais il la pose cependant: «Êtes-vous en état de grâce?» Un des juges présents, Jean Lefebre, religieux augustin proteste et relève l'irrégularité de cette question; il se fait violemment remettre à l'ordre par l'évêque Cauchon; cependant, Jeanne, s'étant recueillie, donne cette magnifique réponse: «Si je n'y suis, Dieu veuille m'y mettre, et si j'y suis, Dieu veuille m'y garder. Je serais la plus malheureuse du monde, si je savais que je ne suis point en la grâce de Dieu. Si j'étais en état de péché je crois que la Voix ne viendrait pas à moi. Je voudrais que chacun entendît cette Voix aussi bien que moi.»

         Forte de la continuelle assistance de ses Voix, Jeanne ne craignit pas d'affirmer qu'elle les entendit à plusieurs reprises durant le procès et même dans la salle d'audience et qu'on lui conseillait toujours de répondre hardiment; or, Jeanne de préciser encore:

         «J'ai aussi le réconfort de saint Michel... C'est saint Michel qui est venu le premier... Et voici, ce fut saint Michel; je le vis devant mes yeux; il n'était pas seul, mais entouré d'anges du ciel... Je les ai vus des yeux de mon corps aussi bien que je vous vois.»

         Jeanne a toujours affirmé que la présence de l'Archange répandait en elle «une joie merveilleuse». Et elle avait coutume de dire: «Quand je le voyais je sentais avec certitude que je n'étais pas en état de péché mortel».

         Durant tout le cours du procès, Jeanne n'a cessé de répéter:

         «Je n'ai rien fait que par l'ordre de Dieu et des anges. Tout ce que j'ai fait je l'ai fait par le commandement de Notre-Seigneur... Dans tout ce que j'ai fait, je n'ai rien fait au monde que par l'ordre de Dieu.»

         Voici une précision donnée par Jeanne au sujet de la lumière qui accompagne toujours la venue des envoyés célestes: «Quand la voix parle, dit-elle, il y a beaucoup de lumières de tous côtés. Quand cette lumière apparaît dans cette salle, elle se détourne de vous qui m'interrogez.»

         En plus de l'assistance constante des anges, Jeanne bénéficie encore des bons offices de sainte Catherine et sainte Marguerite qui lui apparaissent et lui parlent; elles la protègent et l'avertissent; ainsi, lors de l'attaque de Jargeau, elle savait qu'elle serait blessée par une flèche ennemie; en cette occasion, «elle eut, dit-elle, grand réconfort de sainte Catherine et je fus guérie en moins de quinze jours. Je n'avais cessé pour cela de chevaucher et de besogner.»

         Lors du procès, l'assesseur posa à Jeanne une curieuse question: «Saint Michel était-il nu?» Réponse immédiate : «Pensez-vous que Dieu n'ait pas de quoi le vêtir?» Non content d'avoir été remis si vertement en place, l'Assesseur de questionner: «Saint Michel avait-il des cheveux?» Réponse: «Pourquoi les aurait-il fait couper?» Et Jeanne de réaffirmer sa croyance en l'assistance des anges: il ne se passe pas de jour que j'entende les Voix. L'ange est toujours le même et il ne m'a jamais fait défaut.» À cela, objection de l'inquisiteur: «Puisque vous avez été prise, l'ange vous a fait défaut dans les biens de la fortune?» Jeanne: «Je crois puisque cela a plu à Notre-Seigneur, qu'il valait mieux pour moi que je fusse prise».

         Les enquêteurs ont cherché à savoir de quelle nature était le sentiment de Jeanne envers les envoyés célestes. Leur rendait-elle un culte de dulie ou de latrie? À ce propos on demande à Jeanne: «Faisiez-vous la révérence à saint Michel et aux anges quand ils venaient vers vous et vous parlaient? — Jeanne: Oui, et après leur départ, je baisais la terre où ils avaient reposé, pour leur faire honneur.»

         Autre question captieuse à laquelle Jeanne ne répond pas directement: «Les anges restaient-ils longtemps avec vous? — Bien souvent ils viennent parmi les chrétiens et on ne les voit pas, et moi je les vois souvent parmi les chrétiens.»

         Enfin Jeanne ne se lassera pas d'affirmer: «Mes Voix ne me commandent rien sans le bon plaisir de Notre-Seigneur».

         En face de ce cas extraordinaire de communications constantes avec les anges, il ne manquera pas de se trouver nombre de rationalistes pour dire que ces visions et auditions de Jeanne sont le fruit d'une autosuggestion maladive, voire d'hallucinations caractérisées. Péladan qui a fait une étude spéciale du cas de cette visionnaire, dans son ouvrage; Le Secret de Jeanne d'Arc (1), ne craint pas de poser en principe qu'il y a insolence rare «à juger cette envoyée du ciel de la sorte»; il dira en effet:

        «Personne, que ce soit un théologien ou un libre penseur, n'a le droit d'expliquer ou de vouloir connaître les raisons d'un chef-d'œuvre. Dans l'ordre du fait et de l'action, Jeanne d'Arc est un génie et ses actions sont des chefs-d'œuvre. Or, un chef-d'œuvre étant un mystère dans l'ordre de l'art, il doit être considéré comme tel dans l'ordre du fait.»

        Les discussions qui tendent à déterminer s'il y a eu autosuggestion, si les phénomènes se sont produits d'une sorte ou d'une autre, sont, comment dirais-je? des propos de Homais, de primaires qui veulent s'ingérer dans un domaine sacré où on n'entre qu'à genoux et pour prier.

        Dans la vie de la Pucelle, tout est beau: le dessein, la personne, la mort comme la vie.

        Chez Jeanne d'Arc, la pureté est entière et le sentiment public s'en est bien rendu compte... Un être qui s'élève au rôle de messie d'une race, n'a plus d'autre désignation que ses actes et son inspiration.

        Pour Péladan, une réponse de Jeanne est particulièrement illuminative; on lui avait demandé si c'étaient vraiment des anges qui lui parlaient et à quel signe elle les reconnaissait? Et Jeanne de répondre simplement: «À leur conseil». Aussi Péladan de dire à ce sujet: «Ce mot «à leur conseil» est digne de Bossuet; c'est le mot juste qui n'a pas de synonyme, qui ne peut être remplacé, un mot définitif, un mot médaille».

 

 

SECTION VI:

Saint François d'Assise (1182-1226)

 

        Nous ne saurions clore ce chapitre de l'angéologie du Moyen Age sans dire quelques mots des nombreuses visions angéliques et des fréquents colloques que saint François eut avec le Christ, la Vierge et les Anges.

        Dans Les Considérations sur les Stigmates, ouvrage qui fait suite aux Fioretti, nous lisons au deuxième chapitre: «La grâce de Dieu qui remplissait François n'avait pas seulement pour effet de le ravir en extase, elle lui procurait aussi fréquemment la visite des Anges».

        «Un jour qu'il pensait à sa mort et à ce qu'il adviendrait ensuite de son Ordre, François dit à Dieu: «Seigneur, qu'en sera-t-il, quand j'aurai disparu, de cette pauvre petite famille que tu m'as bien voulu confier, à moi, misérable pécheur? Qui sera là pour la soutenir et la corriger? Qui priera pour elle?»

          Un ange alors lui apparut: «Je viens t'assurer, de la part de Dieu, dit-il, que ton Ordre durera jusqu'au jour du jugement; ceux qui l'aimeront, si grands pécheurs soient-ils, obtiendront miséricorde; mais les méchants qui tenteront de lui nuire ne vivront pas longtemps.»

        Après avoir complété son message par d'autres précisions, l'Ange disparut.

        Saint François, à côté du privilège de fréquentes interventions angéliques, fut en butte aux persécutions et aux sévices du diable et de ses suppôts.

        Dans la première Considération, nous pouvons lire à ce sujet:

        «François s'agenouilla pour prier. Ce fut alors qu'une foule de démons des plus féroces l'assaillit avec fracas. Les uns le saisirent à la tête, les autres aux pieds; les uns le tiraient à hue, les autres à dia; tous lui hurlaient aux oreilles des reproches et des menaces, s'ingéniant de mille façons à le troubler dans sa prière. Mais leurs efforts furent vains, car Dieu l'assistait.»

          Dans la deuxième Considération, nous lisons: «II ne faut pas croire que les persécutions du démon privassent François des consolations célestes. Dieu, nous l'avons vu, lui envoyait souvent ses anges». Et quelques lignes plus avant nous pouvons encore lire:

        Exténué par son jeûne et ses luttes contre le démon, éprouvant d'autre part le besoin de quelque réconfort spirituel, saint François se mit à méditer le bonheur céleste dont jouissent les élus et supplia Dieu de lui en donner un avant-goût.

          Un jour qu'il renouvelait cette prière, voici qu'un ange, rayonnant de clarté, lui apparut, avec une viole dans la main gauche et dans l'autre un archet. Le saint en demeura d'abord tout interdit. Puis l'ange, une fois seulement, fit glisser, de haut en bas, son archet sur les cordes. Il en sortit une mélodie si belle qu'inondé de joie le saint pensa défaillir. «Si l'ange avait ramené son archet de bas en haut et frôlé les cordes une deuxième fois, avouait-il plus tard, mon âme se fut sûrement séparée de mon corps, tant était insoutenable l'excès d'un tel bonheur.»

        Une troisième Considération nous apprendra encore que François fut divinement averti qu'après avoir imité le Christ dans les circonstances de sa vie terrestre, il l'imiterait encore dans sa mort et dans sa passion.

        Dès lors François goûta plus de douceurs encore dans la prière et reçut de nombreuses visites du ciel. L'une d'elles eut lieu la veille de la Sainte-Croix, pour le préparer expressément à l'impression des sacrés stigmates. Ce jour-là, comme il priait dans sa cellule, un ange lui apparut: «Dieu me charge, dit-il, de t'inviter à accepter humblement et avec courage ce qu'il veut accomplir en toi.» — «Je suis prêt à souffrir patiemment tout ce que Dieu voudra», répondit François. Sa mission accomplie, l'ange disparut.

        Le lendemain du jour où François avait eu ce message de l'ange, le saint était en prière devant sa cellule; il méditait intensément les tourments du Sauveur, et il en vint à être tellement embrasé d'amour et de compassion, qu'il fut entièrement transformé en Jésus, dit l'auteur et il ajoute:

        Puis, tout à coup, un séraphin aux ailes de feu fondit du ciel sur lui. Il portait, comme François l'observa, l'image d'un homme crucifié. Deux de ses ailes s'étendaient sur sa tête, deux autres lui servaient pour le vol, les deux dernières recouvraient le reste du corps...

          Le séraphin lui expliqua le sens de cette vision: Dieu voulait par là, lui faire entendre que ce n'était point par un martyre corporel, mais par un embrasement intérieur et spirituel qu'il achèverait de se transformer à l'image du Crucifié.

          Pendant l'apparition, on eût dit que l'Alverne était en flammes; les montagnes et les vallées voisines étaient illuminées, le soleil semblait descendu sur la terre. Voyant le mont prendre feu et les alentours s'embraser, des bergers, qui passaient la nuit aux environs, furent pris de frayeur, comme ils l'avouèrent ensuite aux Frères.

        Le Christ apparut à François et lui dit entre autres: «Veux-tu savoir ce que je t'ai fait? Je t'ai donné les stigmates, qui sont les signes de ma passion, pour que tu sois mon porte-étendard...»

        Si maintenant nous parcourons les Fioretti, nous trouvons de nombreux épisodes où les anges apparaissent et entrent en action. Témoin le chapitre XVII qui a pour titre: «De l'entretien que saint François eut avec le Christ, la Sainte Vierge, saint Jean-Baptiste, saint Jean l'Evangéliste et des Anges en grand nombre.

        La scène fut observée par un enfant «pur comme une colombe et innocent comme un ange», que François avait accepté dans la communauté. Un soir l'enfant suivit François qui s'en allait dans la forêt pour méditer et prier; or, voici ce que l'enfant entendit et vit:

        II était encore assez loin, quand une rumeur de voix nombreuses parvint à ses oreilles. S'approchant pour mieux entendre, il aperçut François au milieu d'une merveilleuse clarté, et conversant avec lui dans cette lumière, le Christ, la Sainte Vierge, saint Jean-Baptiste, saint Jean l'Evangéliste et une foule d'anges du paradis. Ce que voyant et entendant, l'enfant, saisi de frayeur, fut ravi en extase et tomba comme mort sur le sol... Ce fut François qui le retrouva comme il rentrait au monastère, son oraison terminée. Il ordonna au petit Frère de ne souffler mot à personne de ce qu'il avait vu et entendu, tant que lui, François serait en vie.

          Du reste, l'enfant garda fidèlement son secret, et ne le révéla qu'après la mort du bienheureux. Il grandit tout en ne cessant de progresser dans la grâce de Dieu et dans la dévotion à saint François; il devint un homme de mérite et termina saintement sa vie dans l'Ordre.

        Voici encore quelques titres de chapitres des Fioretti où il est question de l'intervention du Christ et des Anges en faveur non seulement de François, mais encore des Frères:

 

        Chapitre IV: Comment l'ange du Seigneur proposa une question au Frère Elie; ce dernier ayant répondu avec superbe, l'Ange s'en alla et il vint aider le Frère Bernard à franchir une rivière grossie par les pluies.

        Chapitre XIV: Comment, pendant que saint François s'entretenait de Dieu avec ses Frères, le Christ apparut au milieu d'eux.

        Chapitre XXIX: Comment le diable est apparu plusieurs fois au Frère Rufin et comment il en fut délivré par saint François et par l'intervention de Notre-Seigneur.

        Chapitre XLIV: Comment la Bienheureuse Vierge Marie apparut, avec saint Jean l'Evangéliste, au Frère Pierre de Monticello.

        Chapitre XLVII: Comment la Sainte Vierge apparut à un Frère mourant et lui apporta trois burettes d'électuaire au parfum des plus suaves.

        Chapitre XLIX : Comment le Christ apparut au Frère Jean de l'Alverne. Ce Frère fit des progrès très rapides dans la dévotion, aussi nous est-il dit:

        La grâce divine fit avancer de jour en jour cet être évangélique dans la vertu, l'élevant par degré aux divers états de la vie surnaturelle. C'est ainsi qu'il participa successivement aux splendeurs des séraphins, aux ardeurs des chérubins, aux joies des anges, et qu'il alla même jusqu'à goûter les ineffables et amoureux embrassements du Christ.

        En voilà assez pour nous convaincre que saint François et ses compagnons furent en rapports constants avec les entités de l'An Delà, notamment avec le Christ, la Sainte Vierge et les Anges.

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        Nous le voyons donc, tous les plus grands esprits, les plus doctes théologiens ont cru à l'existence du monde angélique et ils ont admis leur intervention en faveur des humains; ils leur ont rendu un culte de dulie et non de latrie, réservé à Dieu seul. Il va sans dire que le peuple partageait ces croyances et révérait les anges comme les saints. Nous allons voir maintenant, dans le prochain chapitre, qu'il en fut de même durant la Renaissance.

 

 (1) Pour plus de détails sur le cas de cette mystique divinement inspirée, voir un résumé de l'étude de Péladan sur le cas de la Pucelle, dans notre livre La Pensée et les secrets de Péladan (T. II, p. 212-228. Editions Rosicruciennes, P. Genillard, Lausanne 1952).

 

La maîtrise des passions conduit

à la pureté de pensée et d'action,

à la charité, aux visions et aux colloques angéliques.