METHODE POUR LE TRAVAIL CEREBRAL
En raison de ce que nous avons précisé le mois dernier, notre réglementation du travail intellectuel sera quadruple et s'appliquera:
1 au corps physique et à notre vie matérielle;
2 au foyer animique et à notre vie sentimentale;
3 au foyer intellectuel et à notre vie cérébrale;
4 au foyer volitif et à notre vie morale.
La sphère de l'inconscient étant en dehors de notre contrôle, nous ne pouvons espérer agir sur elle que par influences de la sphère consciente. Quant à notre âme éternelle, puisqu'elle est libre, notre volonté, qui n'en est que le reflet, peut seulement se conformer à ses inspirations et ne pas se refuser à ses influences. L'Évangile explique ces mystères tout au long.
Je me bornerai à indiquer avec concision quelques-uns des préceptes les plus genéraux pour chacun des quatre centres indiqués ci-dessus. Les deux axiomes suivants caractériseront ces recherches:
Le Savoir, c'est le rapport de chaque phénomène avec le Verbe.
Les Vérités, ce sont les perceptions de l'intelligence découvrant le Vérité dans les créatures.
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Pour l'organisme physique et la partie matérielle des études:
S'apprendre à regarder, à voir, à entendre, à écouter. Contrôler la parole, le geste, la gourmandise, le confort. Ne pas chercher dans les circonstances extérieures de prétextes à la paresse; la nécessité de gagner son pain, les mauvaises conditions d'étude ne sont pas des obstacles, mais des aides, car pour créer il n'est pas besoin de beaucoup de temps: deux heures de vrai travail par jour suffisent. Mener un train de vie simple; se ménager des heures solitaires. Cela ne veut pas dire que nous devions fuir les amitiés, négliger les collaborations, les relations utiles; rien ne doit nous être indifférent, nous devons nous intéresser même à une réalisation matérielle. Mais veillons à ne pas nous occuper des autres dans le sens de la curiosité; évitons la familiarité.
Pour l'arrangement de notre vie matérielle, la grande recette est de ne pas perdre de temps. Ne jamais laisser perdre une minute sous prétexte que l'on n'a pas le temps de commencer quelque chose; on peut toujours employer les moments inoccupés à se reprendre, à revoir, à organiser. Se préparer le soir au travail du lendemain. Supprimer le plus possible les distractions seulement mondaines. Se reposer la nuit. Décongestionner la mémoire par un emploi judicieux du bloc-notes. L'association de plusieurs étudiants présente des avantages; il est souvent possible d'adapter à l'existence dans nos cités modernes les principes de la vie cénobitique. Consulter son tempérament pour fixer l'horaire du travail, la méthode, le régime alimentaire. Les travaux modernes sur l'attention donnent de précieux conseils sur l'attitude et le rythme respiratoire à trouver pendant la lecture, l'écriture, la méditation.
N'écrire que les résultats de nos lectures ou de nos méditations. Écrire pour être utile, écrire surtout pour ne pas laisser perdre ce que Dieu nous a permis de voir. Sérier les tâches. Ne pas en mener plusieurs de front, mais accomplir chacune d'elles comme si elle était seule, quel que soit le temps que nous pouvons lui consacrer. Les notes et fiches doivent s'établir non pas après la lecture, mais après l'étude; elles doivent être sobres, judicieuses, complètes; leur classement reste personnel. Pour écrire il y a deux systèmes: ou bien après avoir construit un plan a priori dans les cases duquel on insère ses notes ou bien après avoir accumulé des notes que l'on a coordonnées après les avoir rédigées. En tous cas, se hâter lentement; laisser reposer le travail quand il est fini, le reprendre, le revoir comme on examinerait l'ouvrage d'un étranger.
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Pour le foyer animique, voici quelques règles de vie sentimentale et esthétique:
Tendre vers la maîtrise de soi, vers l'égalité d'humeur, l'affabilité. Acquérir la pureté du coeur, pureté de sentiments et d'intentions. S'efforcer d'être bon avec tout être et toute chose. Etre ouvert à la vie extérieure, arriver à comprendre les manières d'être, les conceptions les plus différentes de celles qui nous sont naturelles. Rechercher la société des chefs-d'oeuvre, dans les lectures comme dans les musées ou les concerts. Cultiver et développer le sens de l'admiration; pour cela lutter contre l'envie et la vanité. Ne pas chercher à se créer des expressions originales; le style doit refléter la vie intérieure, il ne doit naître que de la conviction, de la sincérité, du désir de se faire comprendre, de convaincre et d'entraîner. Ne pas s'isoler intérieurement; c'est de l'orgueil; ne s'isoler qu'avec Dieu; s'unir intérieurement au Christ, l'unique Libérateur, le seul Inspirateur, aux génies humains pour les pénétrer, à son époque pour la comprendre et la servir. Garder le contact avec la vie contemporaine dans toutes ses manifestations. Ne jamais se délasser par l'oisiveté, mais par un changement d'occupation.
Par l'observance de ces disciplines, la volonté, qui est essentiellement désir de la Vérité, c'est-à-dire amour, passe de la sphère intellectuelle à la sphère animique, de la méditation à la contemplation.
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Pour le foyer intellectuel, voici quelques règles d'hygiène mentale:
Avant tout, rechercher l'humilité intellectuelle; se résoudre à ignorer bien des choses, savoir tout écouter, se souvenir qu'il y a du bon en tout et qu'il n'est rien qui soit absolument mauvais.
Il faut étudier; une culture générale est indispensable; il est au moins nécessaire de connaître les maîtres de chaque genre: lettres, philosophie, métaphysique, théologie, etc... Il est bon de suivre les synthèses cycliques.
Il faut savoir lire. La passion de lire est une tare; il faut choisir les livres et dans chaque livre découvrir le plus rapidement la substance. Il y a quatre sortes d'ouvrages: les ouvrages de fond, les ouvrages de détail, les ouvrages d'excitation, les ouvrages de détente; faire entre tous un choix judicieux. Lire les thèses opposées, chercher la conciliation. Assimiler les livres qu'on lit, les penser à nouveau, les refaire.
La mémoire a dans la pédagogie actuelle une place trop importante. L'esprit est suralimenté; d'où paresse intellectuelle et banalité intellectuelle. Toutefois il est nécessaire de cultiver la mémoire. Deux principes pourront y aider: se servir d'images, voir les choses d'une façon aussi concrète que possible, et puis, ne pas quitter un livre avant de pouvoir redire les pensées fondamentales qui en font la trame.
La mise en oeuvre des facultés intellectuelles peut se nommer la méditation. Nous consacrerons notre prochain article à ce point important.
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Pour le foyer volitif, voici enfin quelques règles morales et religieuses:
Le Verbe Jésus seul contient et donne la Vérité. Tendre vers la Vérité de toutes nos énergies; tout sacrifier au culte de la Vérité: plaisirs, joies, honneurs, succès. Prier; toute étude est, en dernière analyse, une étude de l'éternité. Lire l'Évangile, non pas comme un récit, mais comme si nous étions réellement acteurs et témoins du drame qui y est rapporté. Mêler Dieu à tout. Mettre à cette recherche une ardeur inlassable; ne jamais se décourager; il y aura toujours des lacunes; ne pas s'arrêter. Écrire et garder devant les yeux les résolutions, aussi concrètes qu'il se peut, que l'on a prises contre tel défaut. Se souvenir que la sainteté contient le savoir; seul le saint sait tout. En même temps donc que l'on tendra vers la perfection morale et spirituelle, lutter contre l'ambition, contre le dilettantisme. Se spécialiser est indispensable, mais il faut faire des incursions dans les autres domaines de la pensée ou de l'activité humaine. Par dessus tout, demander l'intelligence des vérités religieuses; se souvenir que l'Évangile ne peut être compris que par le coeur.
Sédir