L'HOMME RÉGÉNÉRÉ
Traduction de L'Esprit et la Prière, de William Law
Voici l'état de l'homme régénéré; l'étincelle sainte de la nature divine détermine en l'homme un désir naturel, ardent et presque infini de la lumière éternelle d'où il est sorti. Cette étincelle tend vers Dieu parce qu'elle vient de Dieu.
D'autre part, Dieu considéré en dehors de l'âme humaine est un courant d'amour infini et immua-ble. Il désire notre âme, pour l'unir à Lui et lui faire partager Ses richesses et Ses magnificences. Cet amour de Dieu pour nous est si grand qu'Il a donné Son Fils unique pour prendre la nature humaine déchue, afin que par cette union mysté-rieuse du divin et de l'humain tous les ennemis de l'âme humaine soient vaincus et que chacun de nous reçoive la force d'être recréé conformément à la ressemblance de Dieu. L'Écriture sainte est l'histoire de cet amour.
Intérieurement, nous possédons la graine de la vie divine, graine vivante et désirant sans cesse germer et fructifier; extérieurement nous avons Jésus-Christ, soleil et justice rayonnant sur cette graine, pour l'évertuer et la vivifier, agissant sur elle comme fait le soleil physique sur les plantes de cette terre.
Un grain de blé renferme la lumière et l'air de ce monde. C'est le secret de sa vie, sa force de croissance. Par là il possède une tendance constante à s'unir à l'océan de lumière et d'air d'où il provient. D'autre part, cet océan possède la même tendance à se réunir à cette parcelle de lui-même cachée dans la graine. Par ce désir réciproque d'unification, la vie végétale prend naissance et développe ses propriétés et ses puissances.
Mais remarquons que ce double désir n'aura point de fruit si l'enveloppe et la partie grossière de la graine ne se putrifient dans la terre. Sans cela, la vie qui y est incluse ne peut venir au jour.
Le lecteur fera sans peine l'application de cet exemple. Je ferai remarquer seulement la véritable raison et la nécessité absolue de cette mort à nous-mêmes et au monde. Cette abnégation n'est pas un joug assujetti par la volonté de Dieu, ni une punition, ni une invention de cervelles monacales. Ce sont des choses aussi nécessaires à notre but que la mort de la graine est nécessaire à la croissance du germe.
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A quelque Église qu'un homme appartienne, quelque érudition qu'il possède, si sa religion et sa manière de vivre ne sont pas du Ciel, ses travaux ne sont pas meilleurs que ses plaisirs, son amour ne vaut pas plus que sa haine, son goût pour telle forme religieuse n'est qu'une dispute extérieure. Il peut se rendre esclave de ses passions, s'illuminer, s'inspirer, vivre par son amour-propre, son orgueil, qu'il soit chrétien, juif ou païen.
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Si tu es bien affermi dans cette adoration intérieure, tu apprendras à aimer Dieu et à vivre en Lui malgré le temps et l'espace. Car, quand Dieu possède ton coeur, quand tu as abdiqué la volonté, les passions, les désirs du vieil homme, quand tu t'es rendu entièrement à l'obéissance de la lumière et de l'Esprit, chaque chose que tu feras sera une louange; ta vie sera d'une ressemblance parfaite avec la volonté de Dieu sur la terre comme l'est celle des Anges dans le Ciel.
William LAW, L'Esprit de la Prière
(traduction de SÉDIR)
Bibliothèque Chacornac, 1901