MÉDITATIONS POUR CHAQUE SEMAINE

XIII. Le Christ 
XIV. La Liberté et la Fatalité
XV. Les Mobiles de nos Actes
XVI. La Paix du Coeur
XVII. La Mission de Jésus
XVIII. La Compassion
XIX. La Vengeance
XX. La Fébrilité
XXI. Les Tentations du Christ
XXII. La Cupidité

 


XIII. LE CHRIST

« Vous trouverez un petit enfant emmailloté et couché dans une crèche. » 
(Luc II, 12)

Après que l'intelligence a épuisé toutes les explications de ce mystère, elle se déclare impuissante devant cette définition de l'Infini, cette localisation de l'Universel, cette particularisation du Parfait. Aussi vaste, aussi complexe qu'elle imagine le Relatif, un abîme infranchissable le sépare de l'Absolu. Et, depuis que les hommes pensent, ils ont toujours senti l'Unité primordiale insaisissable à moins d'un anéantissement définitif du Moi. 
Comprendre l'incarnation du Verbe me sera toujours impossible tant que je serai une créature dans la Création. Mais recevoir au Saint-des-Saints de mon être la splendeur de ce Verbe humanisé : je puis devenir l'objet de ce miracle. Ce Verbe naît du Père, dès avant le toujours; Il naquit un jour à Bethléhem; et Il peut naître encore, d'une naissance qu'Il espère innombrable, dans l'âme de tous ceux qui Le suivent, sur cette terre et sur toutes les terres où vivent des humains. 
Croire que Jésus est le Fils unique de Dieu venu en chair est un don fait à quiconque prend conscience de son propre et total néant. Mais chacun ne devient capable de recevoir cette lumière qu'à une certaine étape du voyage de l'Existence. 
Sentir Dieu naître en soi est un autre don, recevable dès que, suffisamment appauvris, dénudés, purifiés, les choses et les forces temporelles ont, en nous, fait place nette pour les éternelles. 
Sentir Dieu vivre en soi, participer à Son omniscience, à Son omnipotence, être libre parce qu'on a usé toutes les chaînes à force de s'en être chargé, et offrir au Père l'hommage suprême de cette liberté enfin conquise, agir comme Jésus, Fils de l'Homme, nous dévoile qu'Il agissait, vivant dans le Père et le Père vivant en Lui : cette forme dernière de notre être, la seule réelle, est encore un don. 
Et, pour obtenir ces trois privilèges, une seule et même chose est à accomplir : l'imitation du Christ Notre Seigneur.

OBSERVANCE : Ne rien convoiter, même pas des faveurs spirituelles.
 
 


 


XIV. LA LIBERTÉ ET LA FATALITÉ

« Si le Fils vous affranchit, vous serez véritablement libres. » 
(Jean VIII, 36)

Pourquoi ? Parce que Jésus, Fils du Père, Dieu Lui-même, égal à l'Esprit, maître de l'Esprit, est le seul libre. 
La Fatalité est la loi de la matière et l'énigme de la science; la Liberté est l'être de l'Esprit et l'énigme de la religion. Ces deux forces coexistent en moi, semences de toutes les autres, et s'y balancent alternativement. Que j'obéisse au Moi, et le Destin, par l'atavisme, par les habitudes, par les influences du milieu, finira par me réduire en esclavage complet, en me faisant croire que je suis libre. Que je résiste au Moi et, en paraissant me rendre esclave, je me libérerai. 
La Liberté m'est promise; mais il faut que j'en apprenne l'usage. Quelle puissance terrible, en effet, que de ne point trouver d'obstacle à mes désirs ! L'individualisme, c'est l'émiettement, c'est la lutte, c'est la décomposition, c'est la seule mort réelle. L'esclavage consenti me sera donc la route de la Liberté. 
Je n'ai qu'à regarder autour de moi pour m'apercevoir qu'on s'enchaîne en obéissant aux passions. Un regard attentif me montre que je m'enchaînerai bien davantage encore si c'est pour l'orgueil de me voir au-dessus de la foule que je lutte contre mes passions. Il faut que j'engage ce combat par obéissance à Dieu, pour le service de Dieu, pour me rendre utile aux autres, par l'Amour, en somme, et par l'Humilité. 
Alors seulement j'échappe aux filets du Destin, aux plus grossiers comme aux plus imperceptibles. Alors seulement mes puissances se développent dans des directions autres que celles où les causes antérieures les poussaient, dans des directions vraiment neuves; et mes rêves les plus beaux seront un jour dépassés.

OBSERVANCE : Accepter l'effort que les circonstances m'offrent, surtout s'il me déplaît particulièrement.
 
 


 


XV. LES MOBILES DE NOS ACTES

« Que Ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. » 
(Matthieu VI, 10)

Le dernier mot de toutes les psychologies, le moteur premier de mes actes, de mes émotions ou de mes pensées, c'est le désir. Et, en effet, mon intelligence et mon énergie ne se mettent en branle que sur une impulsion venue, en dernière analyse, de mon centre affectif. La sensation, l'émotion, l'idée ne sont que des phénomènes secondaires. Par suite, ce sera mon mobile secret qui donnera sa qualité à mon acte. Ainsi, la même quantité de force que l'oisif dilapide à faucher des herbes avec sa canne, le thérapeute l'emploie à cueillir des plantes curatives. La qualité de la dépense d'énergie diffère par son motif. 
Je devrai donc scruter mes mobiles, écarter tous ceux qui ne sont pas de la plus haute morale, choisir, entre les buts, celui qui me paraîtra le plus net d'égoïsme. Alors, mais seulement alors, mon oeuvre sera saine, harmonieuse et vivante. Mon être ne contient que la moitié de la réponse à l'énigme de la vie; le monde contient l'autre moitié; tous deux s'interpénètrent; l'homme est un petit univers; l'univers est un homme immense. 
Tout acte est un holocauste offert à une idole : à la fortune, à la gloire, à l'amour, à la science; le vrai Dieu n'a que de rares fidèles; combien de chrétiens ne sont, en définitive, que des idolâtres ! 
D'autre part, la concentration d'une force la décuple, la centuple. Or, les devoirs quotidiens m'obligent à me disperser sur bien des objets; mais ce sont mes forces naturelles, mes facultés extérieures que j'applique au dehors. Je puis donc, en mon centre le plus intime, garder ma concentration, mon unité; je le puis surtout si j'élis Dieu comme principe de tous mes mobiles et but de tous mes travaux. 
Dès lors, un par l'Amour spirituel qui est le père de mes vouloirs, multiple dans mes facultés, je vivrai, à l'image de l'Absolu, dans une béatitude toujours plus haute, en proportion de ma ferveur.

OBSERVANCE : Vivre pour servir Dieu.
 
 


 


XVI. LA PAIX DU COEUR

« Je vous laisse la paix. je vous donne Ma paix. » 
(Jean XIV, 27)

Pour posséder une force, pour qu'elle devienne partie constitutive de ma personnalité, il faut que je l'attire du haut des profondeurs spirituelles où elle se tient à l'état parfait. Et la seule évocation toute-puissante, c'est l'Acte. Je dois donc agir conformément à l'Idéal que je me propose d'atteindre. Si c'est la paix que je veux, il faut que je cesse la bataille en moi et autour de moi; pour posséder la concorde, il faut que les discordes s'évanouissent; pour jouir de l'harmonie, il faut que j'oeuvre harmonieusement. 
Tout ceci tient en un seul mot : le pardon. Pardon aux ennemis extérieurs, pardon aux ennemis intérieurs. Aux premiers, en leur offrant ce qu'ils réclament; aux seconds, par une parfaite conformité à la Loi. Pardonner au mal ne signifie pas : obéir au mal; il faut subir le mal quand c'est moi seul qui en souffre, mais l'empêcher quand c'est aux autres qu'il s'attaque. 
La Fontaine a montré à mon enfance le chêne gigantesque brisé par cette même tempête à laquelle résiste le roseau. Plus je me ferai petit, moins je gênerai de convoitises, et plus j'aurai la paix. Mais cela, c'est une humilité de crainte, et une paix d'égoïsme. Il faut que je me rapetisse par sincérité, parce que je me vois tel que je suis, méprisable et indigne; par amour, pour laisser à mes frères tout ce superflu qui dépasse mon strict nécessaire, dans tous les ordres de besoins. 
Quoi qu'il m'advienne de ce régime déraisonnable, que puis-je craindre, puisque, à ce faire, j'imite le rapetissement infini de Jésus, et que l'Esprit souffle où il Lui plaît ?

OBSERVANCE : Travailler sans recherche de bénéfice personnel.
 
 


 


XVII. LA MISSION DE JÉSUS

« Je suis venu afin que mes brebis aient la vie et l'abondance ; ... afin que quiconque croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres. » 
(Jean X, 10; XII, 46)

Si je ne crois pas que Jésus est le Fils unique du Père, je puis admettre toutes les exégèses humaines : légendes, mythes solaires, symbolismes, initiations de l'Egypte, de l'Inde, de la Chaldée ou du Tibet. 
Mais si une parcelle du sens des choses divines m'a été donnée, à moi indigne -- car on reste toujours indigne de recevoir la plus petite des Lueurs éternelles -- ,je saurai indubitablement que Jésus n'a été instruit par aucun adepte, par aucun dieu. A l'inverse des créatures, qui évoluent du bas vers le haut, Il développa Sa manifestation terrestre en avançant des espaces intérieurs vers les extérieurs. Il involua. Étant la Vérité, la Vie et la Voie, Il n'eut besoin d'aucune étude pour tout savoir, d'aucun entraînement pour tout pouvoir, Il n'eut qu'à être Lui-même. 
Le Christ est une double perfection : Homme parfait, Dieu parfait. Non pas un homme plus avancé que les autres, mais l'Homme. Non pas un dieu plus grand que les Brahma, les Ahoura--Mazda, ou les Jupiter, mais Dieu. Puissances totales de la créature, Puissances totales de Dieu, voilà Sa robe et Son manteau. Dès Sa naissance donc, Il pouvait tout connaître et commander à tout. Seule l'expression de Son savoir ou de Son pouvoir fut soumise aux lois de la croissance physiologique, parce qu'II ne descendit que pour obéir à toutes ces lois, qu'II avait Lui-même. Dès l'origine, édictées. 
Ses paroles, Ses gestes, Ses regards semaient la vie. Le sol que foulaient Ses pieds recevait de leur contact une bénédiction. Et chacune de ces innombrables étincelles de divin, déposées çà et là, dans le noir humus du monde, attend, pour lever et fructifier, le concours de mon bon vouloir. Moi aussi je puis être un jardinier de ces fleurs éternelles. L'Amour est le maître suprême.

OBSERVANCE : Avant tout acte, demander à Jésus qu'Il éclaire cet acte et son objet.
 
 


 


XVIII. LA COMPASSION

« Aie compassion de nous et viens à notre secours. » 
(Marc IX, 22)

Il y a trois espèces de compassion. La première est une sensiblerie maladive, qui nous réduit à devenir les jouets de nos nerfs, les dupes des faux malheureux, les victimes même de nos vices obscurs. La seconde espèce, c'est de se dire, installé dans un bon fauteuil, au coin du feu : « Combien de pauvres diables vont coucher cette nuit dans des mansardes glacées, sous les ponts, et le ventre creux ! Comme je les plains ! » La troisième espèce de compassion, la seule vraie, vivante et féconde, c'est, après avoir été ému de cette pensée, de prendre son chapeau et de descendre, dans les rues, à la recherche de quelque va-nu-pieds, pour lui offrir un repas et une chambre. Et, si l'on n'a pas d'argent, c'est de le ramener chez soi, avec sa crasse et sa vermine, de le servir et de lui donner son lit. 
La compassion, ce serait de perdre mon temps avec bonne humeur, au chevet d'un malade grognon. Ce serait de ne pas me fâcher quand un pauvre, endurci par le malheur, finasse avec moi ou m'injurie. Ce serait de trouver des paroles réconfortantes pour ceux-là mêmes qui semblent mériter leur malchance, ou qui geignent à tort et à travers. 
Je serai indulgent, non point avec l'espoir sournois que les autres seront à leur tour indulgents pour moi, mais parce qu'il est sûr que j'aurais succombé, comme le voisin, si j'avais eu la même tentation et le même tempérament. 
Toute la place que la malveillance et le mépris n'occupent pas en moi, la saine raison, le jugement net, l'indulgence s'y installent. Je trouverai mieux alors les remèdes aux malheurs d'autrui. Plus l'homme s'inquiète de soi, plus il se rapetisse; plus il sort de soi, plus il acquiert une vue large et une puissance involontaire.

OBSERVANCE : S'interdire la pensée que tel malheureux, tel malade souffre par sa faute.
 
 


 


XIX. LA VENGEANCE

« Quant à vous qui m'écoutez, voici ce que je vous dis : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous font injure. » 
(Luc VI, 27. 28)

Personne ne subit une haine ou une insulte sans l'avoir méritée. Les justices des créatures seules sont boiteuses; la justice du Créateur est infaillible; elle est l'équilibre même de l'Univers, dans le physique, dans le moral et dans le spirituel. Si je n'aperçois pas de motif à cette haine ou à ces insultes, cela veut dire seulement que je suis myope; et je dois pardonner tout de même, car on n'éteint pas un feu en y jetant du bois. 
Salomon énonce, et l'apôtre des Gentils le répète : « Si ton ennemi a faim, donne-lui à manger; s'il a soif, donne-lui à boire; faisant cela, tu entasseras des charbons ardents sur sa tête ». Peut-être les durs rabbins voyaient-ils là un raffinement de vengeance immatérielle; peut-être les Pères de l'Église grecque croyaient-ils qu'il faut être irréprochable de façon que nos ennemis attirent sur eux-mêmes toute la réaction de leur colère. L'auteur de la Vulgate est plus chrétien quand il pense que ces charbons brûlent du seul feu de la honte et du remords. Oui, le douloureux pardon auquel j'oblige mon amour-propre ulcéré est une lumière qui se pose sur le coeur de mon ennemi et qui, plus tard, y fera germer le remords, le repentir et la pénitence. 
Je ne suis offensé que parce que je suis vulnérable. En moi persiste le désir tenace de l'amitié, de l'hommage, du respect, de la possessivité. Je voudrais que les autres me croient supérieur. Si rien ne m'importait plus que d'obéir à Dieu, qui pourrait donc me blesser ? quel démon, quel homme, quel dieu ? Et n'y a-t-il pas qu'une seule amitié fidèle, définitive, toujours augmentante : celle de mon Seigneur le Christ ?

OBSERVANCE : Conserver malgré tout la sérénité du visage, du sentiment et de la pensée.
 
 


 


XX. LA FÉBRILITÉ

« Je vous le dis en vérité, jusqu'à ce que le ciel et la terre aient passé, il ne disparaîtra de la Loi ni un point ni un signe qui n'aient reçu leur plein accomplissement. » 
(Matthieu V, 18)

Une chose mal faite est presque toujours à recommencer; la hâte aboutit à une perte de forces ou de temps. Les hommes exigent que je réussisse; mais le Père ne demande que ma volonté la meilleure et mon effort sincère. Un travail parfaitement consciencieux satisfait à la Loi. 
Ouvrier, artiste, employé ou penseur, je prendrai le temps de conduire ma besogne à fond, avec toute mon adresse, tout mon enthousiasme, toute ma clarté. Si j'épargne le moindre trait de lime, la moindre recherche, l'impitoyable Destin m'obligera quelque jour à recommencer mon labeur. Pour saturer mon oeuvre du maximum d'énergie, ou de beauté, ou de vérité, ne faut-il pas que je lui construise un corps parfait, que je lui insuffle une âme vivante ? Ne faut-il pas de longs jours pleins de fatigues, de longues nuits pleines d'angoisses et d'implorations ? 
L'individu turbulent ne s'agite que pour satisfaire un besoin maladif de nouveauté, ou pour échapper à l'ennui, ou par une convoitise trop ardente. Je calmerai mon effervescence, ne serait-ce que pour voir plus clair; je me calmerai surtout parce que les soubresauts du Moi sont toujours des fauteurs de discorde, à l'intérieur et à l'extérieur. Il est bon, par moments, de se faire faire antichambre, en soi-même. 
« Le temps ne respecte pas ce que l'on fait sans lui ». Les projets qui naissent avec la clarté la plus évidente, s'ils viennent de Dieu, Dieu ne Se formalisera pas que j'en diffère un peu l'exécution pour les mûrir, puisqu'Il m'a donné le sens critique. En somme, est-il juste de me croire assez pur, assez droit pour recevoir, sans les aucunement déformer, les sollicitations providentielles ?

OBSERVANCE : Ne quitter aucun travail sans l'avoir complètement fini.
 
 


 


XXI. LES TENTATIONS DU CHRIST

« Il fut quarante jours dans le désert tenté par Satan; et il était avec les bêtes, et les anges le servaient. » 
(Marc I, 13)

L'homme peut mal faire, soit de lui-même, soit poussé par un agent extérieur. Cet agent peut être la séduction naturelle d'une créature, ou bien l'attaque d'un séide des Ténèbres. Ce dernier cas, assez rare, ne se produit que pour des disciples très avancés; et encore, entre les saints, à peine y en eut-il deux ou trois desquels approcha le halo pervers du grand Révolté. Jésus est le seul « homme » avec qui Satan s'entretint à découvert. 
Satan, pour L'attaquer, s'entoura de l'élite infernale. Cela fut ainsi parce que toutes les créatures doivent au moins une fois être mises en présence du Verbe, afin qu'elles puissent apercevoir la Vérité; car personne n'est perdu pour toujours. 
L'homme qui, le premier, accomplit quelque chose de nouveau, y dépense beaucoup de peines; ses imitateurs le copient avec moins d'effort. C'est pour cela que, dans le cours de Sa vie connue comme dans les ténèbres traversées d'éclairs de Sa vie inconnue, le Christ a opéré tous les types d'actes que les êtres humains pourront jamais avoir à accomplir : c'est pour cela qu'II a subi tous les états d'âme possibles : c'est pour cela qu'II a pensé à toutes les sciences, à toutes les inventions, à tous les chefs-d'oeuvre : qu'II a gravi tous les sommets et traversé tout les marécages. Il a été partout. 
N'importe quelle circonstance. même la plus imprévue, contient une grande part d'éléments anciens : de plus, l'adversaire que je rencontre n'est jamais que d'une force à peu près égale à la mienne; enfin, quels que soient l'effort ou la lutte qui se présentent, le Christ a déjà effectué l'un et soutenu l'autre, certainement, puisqu'II n'est venu que pour cela.

OBSERVANCE : Dans mes craintes, dans mes perplexités, dans mes terreurs, j'appellerai avec calme et confiance Celui qui, voilà deux mille ans, a par avance tout subi à mon intention.
 
 


 


XXII. LA CUPIDITÉ

« Combien difficilement entreront dans le Royaume de Dieu ceux qui ont des richesses ! » 
(Marc X, 23)

Jésus a dit : « Il est plus facile à un câble de passer par le trou d'une aiguille qu'à celui qui se fie à sa richesse d'entrer dans le Royaume de Dieu ». On peut être avare et cupide sans être riche; ce n'est pas mon état ou mon travail qui me classera dans la hiérarchie spirituelle, mais l'intention dans laquelle j'aurai accompli celui-ci ou vécu celui-là. 
Toute passion est cupide; le collectionneur, le don Juan, l'érudit adorent des visages différents d'une même idole : la possessivité. Chacun, soit à cause de ses mérites antérieurs, soit comme épreuve propre de la solidité de ses vertus, reçoit du Destin une certaine quantité de bonheurs : de la fortune, des amitiés, des succès, des dons naturels. Mais, comme disent les bonnes gens, qu'on nous offre le petit doigt et nous tirons pour avoir le bras tout entier. Or, tout est mesuré dans la Création. Quiconque accapare du bonheur, ou de l'argent, ou quelque chose que ce soit, en frustre d'autres. L'accapareur et le dépouillé ont beau ne pas se connaître, dans le monde moral tous sont présents à tous; et le gémissement du pauvre trompé empoisonne le bonheur du concussionnaire fastueux. 
L'or maléficie tout ce qu'il touche; la fascination qu'il exerce rend aveugle aux clartés spirituelles. Le riche devrait se considérer absolument comme le simple dépositaire de sa fortune, même s'il l'avait acquise par son propre travail. 
Je ne prendrai donc d'aucune chose que mon strict nécessaire; mais, quand je donnerai, j'imiterai la maternelle Nature qui ajoute toujours à ses présents un peu de superflu. Tout au moins. j'ajouterai à mes partages le superflu d'un sourire et d'une parole affectueuse; et je me ferai des amis avec les trésors de l'injuste Mammon.

OBSERVANCE : Ne pas amasser de trésors improductifs.