Trouvé dans un recueil de poèmes édité en 1950,
intitulé : "Les Fleurs du Bien"


2 poèmes inédits d'André Savoret


Paroles dans la pénombre


Toi qu'ont déçu les promesses humaines,

Toi qu'a blessé le faux éclat du jour,

Toi qui t'en vas, fuyant en vain ta peine,

Toi qu'ont trompé d'affreux serments d'amour,


Viens avec moi, dans la nuit taciturne,

Trouver l'oubli d'éphéméres tourments.

Viens et tais-toi, le miracle nocturne

Exige un coeur apte au recuelllement.


Vois s'effacer les couleurs et les formes,

Vois s'estomper en toi les souvenirs :

Tout se dilue et flue en l'ombre énorme,

Asile sûr où tu peux te blottir.


Ami, la nuit réclame une âme neuve :

Tu viens de naître - et tout est innocent...

Voici l'Eden, entre deux temps d'épreuves,

Voici le gîte, ouvert à tout passant !


Viens ! La ténébre abolit ma présence,

Un air plus vif emporte tes rancoeurs :

Entends l'étoile à la voix de silence

Chanter, là-haut, pour bercer ta douleur !


Laisse dormir tes spectres et tes rêves,

- Les rêves fous de ce mort que tu fus -

Voici l'éveil : le sommeil a fait trêve,

- Ce lourd sommeil d'hier, aux cauchemars confus...


La nuit t'accorde une âme neuve et pure ;

Te voilà né, le vieil Adam n'est plus :

Pour affronter les aurores futures,

A la coupe des cieux, bois ta part d'Absolu !




A l'une d'elles


Tu fus en des temps périmés

L'insatiable salamandre

Qui dansait, sans se consumer,

Dans un feu qui n'est plus que cendres.


Tu fus l'étrange ballerine

Mimant, au matin de son jour,

La geste secrète d'Amour,

Non de Psyché, sa soeur divine.


Et tu pensais, belle Imprudente,

Que ce jeu-là pourrait durer,

Qu'il neige, qu'il pleuve ou qu'il vente

Jusqu'au fatal Dies Iræ !...

.. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. ..

Mais tu survis à ta ruine

Et le destin que tu crus fuir,

Sur ton corps, roué de désirs,

Venge Psyché, ta soeur divine !