Préface
des Essais chimiques
d’Eckartshausen - 1938


Quelques mots sur la présente édition

Les ESSAIS CHIMIQUES furent publiés, pour la première fois en français, aux Éditions de Psyché, en 1938. C’est ce même texte qu’on trouvera ici, suivi du résumé d’un opuscule que D’Eckhartshausen, en fit publier à Munich, en 1798. Les deux textes, ici réunis, se complètent et s’éclairent .mutuellement. Les ESSAIS CHIMIQUES sont en quelque sorte l’adaptation pratique des données théoriques exposées dans le Mémoire qui lui fait suite, quoique chronologiquement antérieur, et dont le titre, un peu long, est : Les plus récentes Découvertes sur la Lumière, la Chaleur et le Feu, à l’intention des Amateurs de Physique et de Chimie.

Sous les dehors .d’une terminologie " chimique " assez translucide, ce dernier opuscule condense ce qui peut être donné de l’Alchimie rosicrucienne. Les énigmatiques Rose - Croix ont fait couler beaucoup d’encre et grincer bien des plumes érudites. Entre ceux qui font remonter la création de leur Fraternité aux premiers temps du monde et ceux qui prononcent, à son propos, le mot mystification, il y a place pour nombre d’opinions plus nuancées, sinon plus convaincantes !
Les seuls réellement qualifiés pour éclairer notre lanterne se taisent, laissent dire et écrire, et sourient silencieusement chaque fois que se fonde, ici ou là, souvent à son de trompe, quelque groupement qui prend leur titre d’autrefois pour enseigne. Je ne prendrai pas sur moi de situer D’Eckhartshausen dans la hiérarchie rosicrucienne ou para - rosicrucienne. Il me suffit, entre autres choses, de le lire pour savoir qu’il y avait rang.

Les pages qui suivent diffèrent de la plupart des écrits hermétiques publiés depuis deux ou trois siècles en ce qu’elles ne sont pas centrées particulièrement sur le travail pratique, au laboratoire, mais font une très large place aux principes qui le commandent et le justifient. Les données spéculatives dominent dans le Mémoire de 1798, la technique opératoire dans les ESSAIS CHIMIQUES. Car, comme le dit l’auteur: " Lorsqu’une substance est réellement présente, il faut qu’elle soit montrée et certifiée par l'expérience. "

Une autre originalité de la " manière " de D’Eckhartshausen, c’est de ne faire que de, rares emprunts au vocabulaire classique des hermétistes. Notre auteur parle une langue simple. Et cette simplicité est une des difficultés majeures de son oeuvre. Davantage encore que les chimistes, alchimistes et souffleurs de son époque, nous sommes compliqués, cérébraux, bourrés d’abstractions. Et nous nous dégageons avec peine de l’emprise de nos formules stéréotypées, techniques ou philosophiques et de nos terminologies familières. Il m’apparaît que D’Eckartshausen écrit moins pour ceux qui savent ou croient savoir que pour les " amateur s" dignes de savoir, quelle que soit leur formation, savante où ignorante selon le monde. Déconcerté, je 1’avoue, à première lecture, j’ai mis pas mal de temps à me rendre compte .de la parfaite maîtrise de l’auteur dans les deux Voies de l’ Oeuvre, toutes deux également légitimes à ses yeux, et à situer sa technique, traditionnelle dans les grandes lignes, originale dans certaines innovations. Et c’est pourquoi je me suis risqué à, quelques brefs commentaires. Les ESSAIS CHIMIQUES offrent à l’Appelé un mince mais solide Fil d’Ariane. Toutefois, à 1ui l’honneur et le péril d’affronter le Minotaure, avec l’aide du Ciel, qui ne manquera pas au chercheur modeste, sincère et prudent. Je ferai de mon mieux pour l’amener au seuil du Labyrinthe. Aller plus loin serait aller trop loin.

André Savoret