(Psyché N°391 de 1929)
" Soyez sur vos gardes, je vous ai tout annoncé d'avance "
La certitude d'un retour du Christ, à une date indéterminée, n'émane pas des décisions d'un Concile, mais des paroles mêmes de Jésus. Le Credo les confirme en ces termes : Il reviendra juger les vivants et les morts. Pour ceux donc, qui puisent leur lumière spirituelle dans les Evangiles, l'Avènement futur du Verbe ne saurait être mis en doute. Mais, en nous annonçant son retour public, le Sauveur nous averti qu'il s'élèvera d'abord de faux prophètes et de faux christs.
A notre époque, diverses sectes chrétiennes, d'après des calculs tirés des deux Testaments, annoncent l'imminence de ce retour, en spécifiant même la date. Des plus, certains cercles plus ou moins ésotériques, prédisent depuis des années la venue d'un grand initié, porteur d'un nouveau Message, d'un nouveau Credo, ouvrant ainsi un nouveau cycle de civilisation. Ce Messie est assimilé tantôt à Buddha, tantôt à Jésus, tantôt aux deux, et d'ingénieux rapprochements de textes essaient de légitimer cette identification.
Sans rechercher le but poursuivi par ces différents groupements, ni si tel ou tel sont des précurseurs et en quel nom ils parlent, nous nous en tiendrons à l'essentiel.
Admettant une future manifestation du Christ, nous rechercherons seulement ses signes annonciateurs et, éventuellement, la conduite la plus sage à tenir en de telles circonstances.
La race blanche est fortement tentée, depuis peu d'écouter " Les appels de l'Orient ". L'Asie est d'actualité et sa pénétration dans différents domaines de notre activité est un fait patent. Or, les doctrines orientales sur le sujet qui nous occupe, sont aussi précises que différentes des nôtres et, comme les préclamations d'un nouveau Messie s'appuient avant tout sur elles, nous essaierons d'exposer, clairement et brièvement, en quoi leurs conceptions diffèrent des conceptions chrétiennes.
Tout d'abord, ceux qui prétendent assigner une date à un tel événement ont peut-être médité la Bible, mais ils ont négligé de lire simplement l'Evangile qui est formel : " nul ne sait le jour ni l'heure " Marc13-32.-Tout calcul est donc superflu. Nous savons seulement que ces temps seront précédés de convulsions sociales, de famines, d'anarchie intellectuelle, de perturbations météorologiques, de persécutions, et de la venue de plusieurs faux prophètes. Remarquons toutefois que tout jugement collectif est accompagné de tout ou partie desdits signes. A l'avènement de Jésus, tous se seront manifestés avec une intensité en rapport avec la gravité de l'heure. Nous n'en sommes pas là. Un autre problème est celui du mode de manifestation de notre Maître. Obombera-t-il un adepte choisi, ou viendra-t-il comme jadis, en personne ? L'Evangile nous certifie qu'il viendra, Lui-même, dans la plénitude de sa Gloire, et la logique veut que Celui qui peut tout n'ait pas besoin d'interprète. En prit-il jadis ?
Certaines théories nous affirment que Jésus n'était qu'un adepte : " Un homme doué sur terre d'un principe divin "... " analogue à celui des autres hommes, mais plus évolué "; ... " tous les hommes étant fondamentalement et nécessairement divins ".
- Le Messie futur " posséderait le divin en lui " " chacun le possédant également, mais à l'état latent ". Nous citons en conservant scrupuleusement le sens, mais il nous a semblé plus impersonnel de mettre les verbes au conditionnel.
Il saute aux yeux que, en dehors de l'orgueil (peu évangélique, soit dit en passant) que peuvent exalter de telles doctrines, elles tendent à prouver que le Christ, fruit de l'évolution humaine, n'est qu'un stade, accessible à chacun, ou une fonction cosmique analogue ou inférieure à celle que les Indoux attribuent à leur Boddhi-sattwa. En ce cas, on pourrait se demander pourquoi la Divinité " s'est polarisée en force et matière " se fractionnant jusqu'au règne minéral, pour que ses divines fractions se résorbent ensuite dans l'unité primitive, au prix de quelles souffrances ? Notre faiblesse mentale d'occidental ne nous permet pas de découvrir une utilité évidente à ce jeu de puzzle éternel !
Tout autre est le point de vue de l'Evangile. Le premier chapitre de Jean est clair. Pour celui-ci, Jésus est un involué, non évolué, il est le Verbe, l'Unique Seigneur, la Divinité faite chair, infiniment distant du plus haut des adeptes quant à sa personne Divine. Pour sa nature humaine (qui a fait couler des flots d'eucre et parfois, hélas, de sang) notons que Jésus ne se nomme pas " Fils de l'homme " mais bien " Fils d'Adam " (Math. Texte hébreu), c'est-à-dire de l'humanité dans ce qu'elle a de plus universel. Ainsi si le sommet évolutif de l'homme régénéré a pour archétype et modèle à jamais inimitable la nature humaine du Christ, sa nature Divine, ce par quoi il est Dieu total et unique, nous échappe absolument. Car, si Saint Paul, homme régénéré par la Grâce, a dit : " C'est Christ qui vit en moi ", il n'a pas dit : " Je suis un Christ ". N'est-ce pas par sa Divinité que Jésus nous offre un phénomène sans second et sans comparaison avec les autres instructeurs religieux ?
" Vous serez comme des Dieux ", tel est le conseil insidieux du serpent. Méfions-nous donc, chrétiens, des faux bergers et des embûches de l'orgueil. Ceux qui viendront " en leur nom ", qui tenteront de nous séduire en vous persuadant que vous êtes des génies méconnus et des Dieux qui s'ignorent, ceux-là, malgré leur science et leur apparente pureté, ne peuvent être que des loups ravisseurs.
Nous terminerons ces pages malhabiles par les paroles de notre Maître, car c'est à elles, verbes du Verbe, qu'aboutit finalement toute parole sincère :
" Si l'on vous dit : le Christ est ici, il est là ! ne le croyez pas. Si donc l'on vous dit : il est dans le désert ! n'y allez pas ; il est dans la chambre ! ne le croyez pas ; car, comme l'éclair part de l'orient et se montre jusqu'en occident, ainsi sera l'Avènement du Fils de l'Homme. " Veillez donc et priez en tous temps, afin que vous ayez la force d'échapper à toutes ces choses et de paraître debout devant le Fils de l'Homme ! ".