LES LETTRES DE SAINT-JEAN

     Saint Jean n'est pas seulement l'apôtre bien-aimé, et le formidable voyant qui écrivit l'Apocalypse. Il nous reste de lui trois lettres, lumineusement belles, qui nous introduisent, pour ainsi dire, dans sa familiarité et qui sont peut-être pour nous, après les Évangiles, le joyau du Nouveau Testament.

     Dans ces lettres, il se nomme lui-même l'« ancien » et les chrétiens auxquels il écrit, il les appelle le plus souvent avec tendresse « petits enfants ».

     Ces lettres sont marquées au sceau de l'Amour, au sceau de la vérité.

     Parle-t-il de Dieu ? « Dieu, dit-il, est lumière et il n'y a point en Lui de ténèbres »... « Dieu est amour »... « Et quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu ; celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu, car Dieu est amour ».

     Et l'Amour divin, c'est le « Fils unique » que Dieu a envoyé dans le monde « afin que nous vivions par lui ».

     Aussi « celui qui n'aime pas demeure dans la mort. » Le « Fils unique » est notre modèle : « Nous avons connu l'amour en ce qu'il a donné sa vie pour nous ; nous aussi, nous devons donner notre vie pour les frères ».

     Cet amour divin c'est donc le Verbe qui est aussi la Vie : « Dieu nous a donné la Vie éternelle et cette Vie est dans son Fils. Celui qui a le Fils a la Vie ; celui qui n'a pas le Fils de Dieu n'a pas la Vie ».

     À chaque instant, Jean revient sur le Commandement essentiel « que nous nous aimions les uns les autres ».

     Non que cet amour doive être aveugle. Jean ne connaît pas de ces soi-disant « tolérances » qui confondent bien et mal, vrai et faux, dans une même indifférence : « Car plusieurs séducteurs sont entrés dans le monde, qui ne confessent point que Jésus-Christ est venu en chair. Celui qui est tel, c'est le séducteur et l'antéchrist. Quiconque ne demeure pas dans la doctrine du Christ n'a point Dieu ; celui qui demeure dans cette doctrine a le Père et le Fils. Si quelqu'un vient à vous et n'apporte pas cette doctrine, ne le recevez pas dans votre maison, et ne lui dites pas : Salut ! Car celui qui lui dit : Salut ! participe à ses mauvaises œuvres ».

     Et ceux qui contaminent l'Église et dénaturent la vraie doctrine trouvent en lui un adversaire décidé : « j'ai écrit quelques mots à l'Église ; mais Diotrèphe, qui aime à être le premier parmi eux, ne nous reçoit point. C'est pourquoi si j'y vais, je rappellerai les actes qu'il commet, en tenant contre nous de méchants propos. Non content de cela, il ne reçoit pas les frères, et ceux qui voudraient le faire, il les en empêche et les chasse de l'Église ».

     Tout serait à citer et à méditer longuement dans ces quelques pages de haute doctrine et de sereine bonté.

     À quoi bon commenter ! Le meilleur commentaire d'un tel texte, c'est encore ce texte lui-même. Il suffit d'avoir la tête libre et le cœur ouvert !

     Car c'est au cœur que s'adressent les phrases simples et profondes du voyant de Pathmos, de celui dont Jésus disait à Pierre : « Si je veux qu'il demeure jusqu'à ce que je vienne, que t'importe ? »

     Et quelle autobiographie nous dévoilerait mieux l'âme rayonnante de charité et la mission terrestre de cet être sans mesure commune avec nous, que cette simple phrase de sa lettre à Gaïus :

     « Je n'ai pas de plus grande joie que d'apprendre que mes enfants marchent dans la vérité. »

A. S.