V

 

Chez les Carmes Déchaussés

 

Vers 1856, un prêtre du diocèse de Tournay passa par le village d'Ars. Un attrait le poussait à entrer chez les Carmes Déchaussés, mais il y voyait de nombreuses et graves difficultés. De quel esprit émanait cet appel ? Il semble qu'en pareil cas, un directeur simplement prudent eût conseillé au moins d'attendre des circonstances favorables.

 

M. Vianney trancha autrement la question. Il ignorait qu'il y eût des Carmes en Belgique ; à plus forte raison, ne pouvait-il, humainement parlant, connaître leur histoire en ce royaume d'où la Révolution française les avait autrefois chassés. Malgré cela, voici quelle fut sa décision :

« Entrez chez les Carmes, mon ami, et vous les aiderez à restaurer une de leurs provinces ».

Une de leurs provinces ! Mais les Pères Carmes n'en possédaient alors qu'une seule en Belgique, et personne ne songeait à y ressusciter ce que l'impiété révolutionnaire avait détruit soixante années auparavant.

 

Confiant en la parole du saint, le pèlerin d'Ars allait s'enfermer au noviciat de Bruges, où, son temps de probation accompli, il fit profession sous le nom de Berthold-Ignace de Sainte-Anne. Ayant exercé diverses charges dans son Ordre, il en devint définiteur général, et c'est à ce titre qu'en 1885 – trente ans après la prédiction du Curé d'Ars qui se réalisait sans que rien l'eût fait prévoir – le R. P. Berthold travailla à rétablir la province du Brabant. Il est mort en 1890. (1)

 

 

(1) Annales d'Ars, septembre 1901