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À un doigt de l'enfer

 

« Le fait suivant, atteste le chanoine Ball, m'a été affirmé le 5 août 1876, par M. l'abbé Kingre, chanoine de Saint-Dié, qui l'avait entendu de la bouche même de M. l'abbé Platz, dont il sera question ci-après. »

 

M. Platz, alors curé de Wildenstein (Haut-Rhin), fut envoyé à Ars, vers 1856, par une de ses paroissiennes, Mme Krinner, pour demander à M. Vianney des renseignements sur le sort éternel de son mari. M. Krinner, riche industriel, s'était suicidé d'un coup de rasoir à la gorge.

Le curé de Wildenstein pénètre, non sans difficulté, dans l'église, fait une prière, ouvre son bréviaire... Soudain, il s'entend appeler.

« Monsieur l'abbé, lui dit quelqu'un, veuillez monter vers le chœur et entrer à la sacristie.

— On me demande, moi ?...

— C'est M. le Curé qui m'envoie. »

 

Stupéfait de ce qu'il lui arrive, M. Platz se dirige vers le chœur. Au même instant, M. le Curé sort du confessionnal, entre à la sacristie sur les pas de ce prêtre qu'il rencontre pour la première fois et lui dit à brûle-pourpoint :

« Vous venez de la part de Mme Krinner, votre paroissienne, pour me demander ce que son mari est devenu dans l'autre monde ? »

L'abbé Platz, suffoqué, fait signe que oui.

« Eh bien, continue le saint, dites-lui que son malheureux époux n'est pas mort instantanément, que le bon Dieu lui a fait la grâce de se repentir sincèrement et d'échapper à l'enfer. Seulement il a un long purgatoire à faire. Qu’elle prie beaucoup et fasse beaucoup prier pour lui. »

 

« Que de vues intuitives et surnaturelles dans ce fait prodigieux ! explique le chanoine Ball. Le vénérable Curé connaît M. Platz qu'il n'a jamais vu, dont personne ne lui a parlé. Il sait dans quel but il est venu à Ars et par qui il y a été envoyé.

Il sait non seulement le nom de M. Krinner qu'il n'a jamais connu, mais encore sa triste fin, et, ce qu'il y a de plus étonnant, avec ce qui s'est passé au moment de sa mort, son sort dans l'autre monde.

Et tout cela exprimé par lui avec la même assurance que si les faits s'étaient passés sous ses yeux (1) »

 

(1) Documents n° 145.