VI

Le cadeau qui prouve la sainteté

 

Un religieux de Valence, dans la Drôme, le R. P. Dosda, se rappelait fort bien, ayant bonne mémoire, les confidences que lui avait faites, lorsqu'il débutait comme missionnaire, « un digne curé placé à la tête d'une importante paroisse et mort depuis longtemps ».

 

« Étant jeune prêtre, raconta entre autres choses celui-ci, et habitant les environs de Paris, j'avais entendu parler de M. Vianney, mais, je l'avoue, sans croire à son éminente sainteté. Il était, dans ma pensée, un bon curé de campagne qui attirait les braves gens par de pieuses originalités.

Or, j'eus à faire un voyage en Dauphiné. Je m'arrêtai à Lyon et, curieux tout de même de voir cet humble prêtre dont le renom m'agaçait, je fis un détour pour me rendre à son village.

Je m'en souviens, c'était un samedi. J'eus la chance – je devrais dire la grâce – d'assister au catéchisme de onze heures. Et justement, ce jour-là M. Vianney se mit à parler du sacerdoce, de sa grandeur, de son excellence... Ses paroles m'intéressèrent et me frappèrent d'autant plus qu'elles répondaient aux besoins de mon âme. Et je sentis se dissiper mes doutes au sujet de sa haute vertu.

Le lendemain, en assistant aux offices de la paroisse et à une procession, je me disais : « Oui, le Curé d'Ars est un saint ; ses paroles d'hier, si sincères, si justes, si vraiment vécues, le prouvent. Mais j'en voudrais une preuve nouvelle.

 

Je marchais non loin de lui. Je le dévisageais et je continuais de songer : « Si le bon Guré me faisait spontanément un cadeau, sur le simple désir que je forme actuellement au fond de mon cœur, je regarderais cela comme une preuve définitive de sa sainteté. »

Pendant que je formulais ce vœu, tout mental, je vis M. Vianney plonger la main dans sa poche. « Tenez », me dit-i1 à mi-voix. Il me remettait une boite pleine de médailles à l'effigie de sainte Philomène. »

 

Au moment où il contait le fait au R. P. Dosda, le prêtre en question possédait encore quelques-unes de ces médailles. Elles lui rappelaient une des minutes les plus émouvantes de la vie (1).

 

(1) D'après une lettre adressée à Mgr Convert, le 19 juillet 1927