Emile BESSON octobre 64.


LA RELIGION PURE ET SANS TACHE

La religion Pure et sans tache devant Dieu, la voici.. visiter les orphelins et les veuves dans leur détresse, et se préserver des souillures du monde. (Epître de saint Jacques 1, 27).
 

La religion pure et sans tache. C'est donc qu'il y a une religion qui n'est ni pure ni sans tache. Dans les premières lignes de son épître l'apôtre condamne la religion qui est uniquement conceptions philosophiques ou actes extérieurs. « Ne vous abusez pas », dit-il à ses lecteurs, ce qui signifie : «Arrachez vos illusions ». La religion ne consiste ni en des théories ni en des attitudes.

La religion pure et sans tache consiste à visiter les orphelins et les veuves. Notons bien le mot : visiter Non pas compatir de loin, non pas plaindre les malheureux et déplorer qu'on ne soit pas riche pour pouvoir les aider; non pas non plus donner de l'argent à un organisme ou à des particuliers chargés de le répartir ; mais payer de sa personne, payer de son temps, monter les étages, s'asseoir non pas au bord d'une chaise pour se lever ensuite rapidement après avoir posé quelques questions stéréotypées, en laissant tomber une aumÔne destinée à remplacer les paroles de consolation que l'on n'a pas dites ; mais écouter avec le coeur la plainte de la pauvreté on du désespoir et s'efforcer de la soulager.

Cependant l'apôtre, tout en invitant ses lecteurs à visiter les malheureux, indique qu'il faut aller spécialement vers les orphelins et les veuves dans leur détresse. Ce sont en effet ceux auxquels la pauvreté est la plus pénible. Jamais la mort n'est plus terrible que lorsqu'elle prend le chef de famille, laissant aux survivants le cruel souci du pain du lendemain.

Au reste les privilégiés de la fortune ne sont pas à l'abri des souffrances morales ; ils sont parfois plus seuls que les autres et c'est avec très juste raison que l'on a pu parler des " pauvres riches "  En effet, les douleurs les plus intenses ne se trouvent pas toujours dans les mansardes; elles ne sont pas toujours celles qui s'aperçoivent le plus.

On entend parfois dire, en parlant des pauvres Ils ne sont pas toujours intéressants !

Intéressants ! Le sommes nous donc nous mêmes autant que cela ? Et cependant Dieu nous aime et Il nous aime tous d'un amour infini. Intéressants ! L'étaient-ils donc, les péagers et les gens de mauvaise vie qui parcouraient les chemins de la Galilée à la suite du Christ ? Tout être a toujours quelque chose d'intéressant, c'est sa souffrance, une souffrance qui bien souvent n'a jamais trouvé un coeur pour la consoler.

Nous avons prononcé le terme d'aumône. En face de la misère, l'aumône est un devoir et aucune' bonne parole ne peut la remplacer. Le mot aumône signifie compassion. L'aumône peut être une offrande d'argent, elle peut être une parole de compréhension, d'affection; le geste est vain s'il n'est un don d'amour.

Un de nos anciens amis, l'un des fondateurs de nos « Amitiés Spirituelles " a réalisé cet idéal de façon telle que ceux qui l'ont connu ne l'oublieront jamais. Je l'entends encore parler de l'influence lumineuse et réparatrice d'un simple sourire. Quand il pénétrait dans un intérieur, c'était comme si un soleil entrait. Il était à son aise et il mettait à l'aise. Il savait écouter indéfiniment les plaintes qui si souvent font la solitude autour de ceux qui les expriment; jamais il n'a paru importuné par ces histoires constamment répétées. Il disait : Il suffit de si peu de chose pour consoler et rendre le courage. Et eux disaient : Lorsqu'il vient nous voir, il nous libère.
La religion ainsi entendue s'oppose à la dévotion sans amour, au culte sans charité. C'est elle qui peut préserver des souillures du inonde. L'Ecclésiaste disait : « Mieux vaut aller à une maison de deuil qu'aller à une maison de festin ». Quand on a communié avec Dieu dans le sacrement de la souffrance humaine, on ne peut plus se laisser prendre aux joies éphémères du siècle, on entend constamment au plus profond de soi-même l'écho des confidences reçues, des douleurs entrevues, peines de l'âme et du corps. On se souvient que le Christ est venu pour consoler ceux qui souffrent, pour guérir les malades, pour faire revivre les morts. En visitant les affligés, c'est le Christ que l'on rencontre, le Christ qui est présent dans toute souffrance. Puissions-nous L'entendre un jour nous dire: « J'ai eu faim et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire ; j'étais étranger, nu, malade et vous m'avez assisté ".