AVERTISSEMENT.
Dans les lettres qui suivent, saint Chrysostome témoigne son affection aux personnes auxquelles il écrit, et les prie de lui donner de leurs nouvelles. Le coeur de l'ami et du saint s'épanche tout entier dans ses lettres, généralement courtes et conçues dans le style le plus simple et le plus familier. Il en est plusieurs toutefois où saint Chrysostome traite d'affaires importantes. Celles-là nous en donnerons des analyses spéciales.
LETTRE XIX. A MARCIEN ET A MARCELLIN.
LETTRE XXII. AUX PRÊTRES DANTIOCHE, CASTUS, VALÉRIUS, DIOPHANTE ET CYRIAQUE.
LETTRE XXIII. AU PRÊTRE ROMAIN.
LETTRE XXV A L'ÉVÊQUE ELPIDIUS
LETTRE XXVI. A L'ÉVÊQUE MAGNUS.
LETTRE XXVII. A L'ÉVÊQUE DOMINUS.
LETTRE XXVIII. AU PRÊTRE BASILE.
LETTRE XXIX. A CHALCIDIE ET A ASYNCRITIE.
LETTRE XXX. A L'ÉVÉQUE HEORTIUS.
LETTRE XXXVI. A MARON, PRÊTRE ET MOINE.
LETTRE XXXIX. A L'ÉVÊQUE TRANQUILINUS.
LETTRE XXXVIII. AU MÉDECIN HYMNÉTIUS.
Cucuse, 404.
Que vous nous écriviez souvent, que vous nous écriviez rarement, nous aurons toujours de votre charité l'idée que nous en avons eue dès le principe. Nous le savons en effet, soit que vous nous écriviez, soit que vous gardiez le silence, vos sentiments à notre égard ne changent pas. Daigne le Seigneur vous accorder un prompt rétablissement et vous délivrer de votre maladie ! Nous avons été fort inquiet en apprenant que vous étiez malade. Aussi nous vous prions de nous donner de vos nouvelles toutes les fois que vous le pourrez, et de nous dire si vous vous portez mieux. Vous n'ignorez pas combien nous nous affligeons de vous savoir malade, quelle joie nous éprouvons au contraire, de quel plaisir nous sommes rempli, quand nous vous savons bien portante. Puisqu'il en est ainsi, noble et généreuse dame, toutes les fois que vous le pourrez, n'hésitez pas à nous écrire, et dites-nous dans quel état de santé vous vous trouvez. Vos lettres, croyez-le bien, nous feront toujours le plus sensible plaisir.
404 ou 405.
Notre plus vif désir serait de vous voir, vous qui nous aimez si tendrement. Mais nous ne le
Pouvons point; la distance, l'hiver, la crainte des brigands sont autant d'obstacles qui s'y opposent. Nous voudrions au moins trouver de fréquentes occasions de vous écrire, pour satisfaire pleinement le besoin que nous avons de nous entretenir avec vous. Mais nous habitons un désert, éloigné de toute grande route, et nous sommes privé même de la consolation de vous écrire souvent. Vous nous pardonnerez donc. Mais soit que nous vous écrivions, soit que nous gardions le silence, soyez persuadés de notre bienveillance envers vous. Imputez notre silence prolongé au désert que nous habitons, et nullement à notre indifférence à votre égard.
Cucuse, 404.
Je connais votre affection sincère, ardente et franche pour notre personne ; je sais que rien ne peut l'affaiblir, ni les préoccupations, ni le temps, ni la distance; je sais combien vous souhaitez de nous voir et de nous entretenir. Mais puisque la longueur du chemin, la rigueur de la saison, les Isauriens ne le permettent pas, réjouissez notre coeur par vos lettres, donnez-nous de vos nouvelles et des nouvelles de votre maison. Si vous nous écrivez souvent, nous en éprouverons beaucoup de joie et notre âme sera heureuse, même dans ce désert où nous vivons. Vous n'ignorez pas en effet, illustre et (450) vénéré seigneur, les voeux que nous formons pour votre santé.
Peut-être 405.
Heureux, trois fois heureux, mille fois heureux, vous qui, vous appliquez à des travaux, à des affaires, qui vous mériteront une grande récompense, un riche trésor dans les cieux. Oui, vous nous avez comblé de joie, en nous apprenant que vous avez fait tous vos efforts pour déterminer le prêtre Jean à se rendre en Phénicie. Vous ne nous dites pas que vous lui avez donné de lor ; votre piété vous imposait silence; mais cet acte de générosité, et tant d'autres encore n'ont pas nous rester inconnus. C'est pourquoi nous ne cessons de vous admirer :et nous vous, félicitons, d'amasser ces richesses qui: sont les seules véritables richesses, et nous vous conjurons, de nous écrire fréquemment. Nous achèterions bien, cher le plaisir de vous voir, si cela, était. possible. Aloïs puisque nous sommes privé de ce bonheur , écrivez-nous de temps en temps, pour nous donner des nouvelles de votre santé et de la santé de toute votre famille. Nous aurons toujours beaucoup de plaisir à apprendre que vous vous portez bien. Vous en êtes persuadé, et c'est pourquoi vous ne voudrez pas nous priver de cette joie.
Cucuse. 405.
Je ne suis pas surpris que vous appeliez brève une lettre pourtant si longue. C'est en effet le propre de ceux qui aiment de ne pouvoir être rassasiés. Plus ils reçoivent de ceux qu'ils aiment, plus leur désir s'accroît. Nous vous aurions adressé une lettre dix fors plus longues que vous l'auriez encore appelée courte; non-seulement vous l'auriez ainsi appelée, mais en réalité , vous l'eussiez trouvée trop courte. Nous aussi, quel que soit le degré de votre affection, nous ne le trouverons jamais assez élevé, nous souhaiterons toujours qu'elle augmente encore : l'amour est une dette que l'on paye sans cesse, et que l'on doit toujours. Ne vous devez jamais rien les uns aux autres, sinon un amour mutuel. (Rom. XIII, 8.) Cette dette, nous ne cessons d'en réclamer le paiement : vous vous acquittez abondamment, il est vrai, et cependant nous ne croyons jamais être complètement payé. Ah ! je vous en conjure, cette dette précieuse, qui produit tant de charmes, ne vous lassez point de l'acquitter. De part et d'autre on goûte un égal bonheur, soit en acquittant cette dette, soit en recevant le paiement : car de part et d'autre on s'enrichit.
Il n'en est pas ainsi des dettes pécuniaires celui qui les acquitte devient plus pauvre; celui qui reçoit le paiement devient plus riche. Bien de semblable dans ce contrat de l'affection mutuelle. Quand il s'agit d'argent, le débiteur n'a plus rien en sortant de chez son créancier. Mais l'âme n'est jamais vide, quand elle a soldé la dette de l'affection : au contraire elle s'est enrichie. Puisqu'il en est ainsi, pieux et vénérés seigneurs, ne cessez de montrer ces dispositions à mon égard. Sans doute vous n'avez pas besoin de cette exhortation ; mais nous vous aimons trop pour ne pas attirer sur ce point votre attention et pour ne pas vous recommander de nous écrire souvent et de nous donner de vos nouvelles. Oui, votre santé nous est trop chère pour que nous cessions de vous faire cette demande, qui , je l'avoue, n'est lias absolument nécessaire. Il ne vous est pas facile, il est vrai, de nous écrire la rigueur de la saison, la difficulté des chemins, la pénurie des messagers .s'y opposent. Vu tant d'obstacles, écrivez-nous du moins le plus souvent que vous le pourrez : nous pros. sons votre charité de nous accorder cette grâce. Sur votre demande, nous avons écrit à notre pieux seigneur, le prêtre Romain; et nous vous savons beaucoup de gré de nous y avoir invité. C'est la vivacité de votre affection pour nous qui vous a portés à nous donner, avec tant d'empressement, ce conseil de nous unir plus étroitement avec ces hommes si distingués. Quand vous aurez reçu la lettre que nous lui avons écrite, nous vous prions de la lui remettre. Avant même de l'avoir reçue, saluez-le de notre part. Il y a longtemps que nous ressentons pour lui beaucoup d'affection. Je souhaite que vous lui disiez vous-mêmes que cette affection ne s'est pas affaiblie, et que c'est pour nous un vrai bonheur de l'entretenir dans notre âme. Dites-lui que, si nous ne lui avons pas écrit, ce n'est pas négligence de notre part; c'est que nous attendions une lettre de lui. Il nous a prié de lui écrire le premier; nous le faisons, et nous le prions à notre tour de nous écrire souvent.
Curse, 405.
Très-pieux et très-vénéré seigneur, vous savez quels sont. nos sentiments à votre égard , et quel lieu étroit la charité a formé entre nous. Nous admirons la douceur de vos moeurs, nous sommes ravi de l'éclat de cette vertu, qui vous gagne les coeurs de tous ceux qui vous approchent. C'est pourquoi; malgré la distance qui nous sépare; vous occupez sans cesse notre pensée ; et dans quelque désert qu'on nous entraîne, nous ne pourrons oublier votre charité. Mais nous vous voyons , comme si vous étiez ici ; nous nous représentons vos traits par les yeux de la charité ; ou plutôt nous vous contemplons vous-même et nous faisons partout l'éloge de votre piété. Nous vous demandons â notre tour de vous souvenir de nous , d'entretenir dans votre coeur cette vive affection que vous nous avez toujours témoigne ; de prier avec ardeur pour notre humilité, enfin de nous écrire et de nous donner des nouvelles de votre santé. Ce sera pour nous une grande consolation dans la solitude où nous sommes, que de jouir, même à une si grande distance, du secours de vos prières.
Cucuse, 404.
Vous me demandez pardon de n'être pas venu me trouver, et vous me dites que la maladie vous en a empêché. Je vous loue de votre bonne volonté, et je vous en félicite. Vous êtes venu autant qu'il dépendait de vous, et vous n'occupez point dans notre coeur moins de place que ceux qui nous ont visité de leur personne. Dieu vous délivrera, je l'espère, de votre maladie, rétablira votre santé, et nous aurons le bonheur de vous voir et de jouir de votre présence. Nous désirons vivement vous voir, vous embrasser et baiser votre tête chérie. Tant que votre maladie et le mauvais temps nous priveront de ce bonheur, nous ne cesserons de vous écrire et de puiser dans cette expression de nos sentiments une joie véritable.
Cucuse , 404.
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Nous voudrions vous écrire bien souvent, et vous n'en doutez pas, très-vénéré seigneur. Mais nous sommes privés de ce bonheur, parce que rarement on vient jusqu'ici; c'est un pays désert que nous habitons; ce qui le rend plus désert encore, c'est la crainte des voleurs, et la mauvaise saison; Cucuse est pour ainsi dire inaccessible. Toutes les fois que nous rencontrons un voyageur, nous satisfaisons notre désir, et c'est pour nous une bien grande joie. Cette lettre, nous vous l'envoyons par des prêtres, nos vénérés seigneurs, pour offrir à votre piété nos salutations empressées, et vous prier de nous écrire et de nous donner des nouvelles de votre santé aussi souvent. que vous le pourrez. Vous n'ignorez pas, en effet, trèspieux et très-vénéré seigneur, combien nous serons heureux d'en recevoir. Bien que retiré aux extrémités du monde, nous ne pouvons cependant oublier votre sincère etardente charité. Mais quelque part que nous allions, elle nous y suivra pour répandre la consolation dans notre coeur.
Cucuse, 404.
Vous ne nous avez pas envoyé de lettres par les prêtres qui sont venus ici. Toutefois, en (452)
souvenir de notre ancienne amitié, plein d'admiration pour la douceur de vos moeurs et la fermeté de votre âme, profondément touché de votre amour pour nous, nous nous empressons de vous écrire le premier, pour vous remercier de votre bienveillance à notre égard; car, malgré la distance qui nous sépare, cette bienveillance nous est connue. Nous vous prions de nous écrire aussi souvent que vous le pourrez et de nous donner des nouvelles de votre santé. C'est pour nous une grande consolation de savoir en bonne santé ceux qui nous aiment et qui s'occupent des Eg
Cucuse, 404.
Nous remercions votre piété , très-vénéré seigneur, de nous avoir envoyé ce digne prêtre et de nous avoir écrit. C'est une double preuve de votre charité sincère et de votre ardente affection pour nous. Aussi, au fond de cette solitude, avons-nous éprouvé la plus vive consolation. Se sentir aimé par des hommes tels que vous, ce n'est pas une faible jouissance. Je souhaiterais beaucoup de vous voir, et de me rassasier de votre bienveillante tendresse. Mais cela n'est point possible; nous, cela ne nous est point permis; pour vous, il vous est difficile de venir ici, à raison des soins que réclame votre Eg
Cucuse, environ 404.
Nous n'avons pas eu le bonheur de vous voir, mais nous avons entendu parler de vos vertus, du zèle que vous mettez à renverser les erreurs des gentils, à les convertir à la vraie religion, et c'est pourquoi nous vous estimons, nous vous vénérons comme si nous vous avions vu, comme si nous avions longtemps vécu dans votre familiarité. Nous nous empressons donc de vous écrire, pour vous féliciter des succès que vous obtenez, pour vous témoigner toute notre admiration et vous prier de nous écrire, dès que vous le pourrez. Nous sommes loin de vous par le corps, mais nous sommes unis ensemble par les liens de la charité, quand nous songeons à votre piété. Bien persuadé de nos dispositions, écrivez-nous de temps en temps, faites-nous connaître vos succès, et apportez ainsi quelque soulagement aux maux que nous endurons dans ce désert.
Cucuse, 405.
Ne vous laissez pas abattre par les afflictions qui vous surviennent; que les flots si multipliés des affaires ne jettent point le trouble dans vos âmes. Telle est en effet cette voie étroite et resserrée dont parle l'Evangile; elle n'offre que difficultés, sueurs et fatigues. Mais tout cela passe et s'écoule avec la vie présente. Sans doute c'est une voie étroite, mais cependant c'est une voie. Supporter ces maux avec résignation et générosité, c'est mériter des palmes immortelles, digne récompense des fatigues passées. Envisagez d'une part le peu de consistance , la brièveté de l'affliction , d'autre part la perpétuité, la durée infinie des récompenses, et supportez avec courage la tribulation, sans vous laisser troubler par aucun (453) événement fâcheux. Il n'y a vraiment rien de fâcheux que le péché. Tout le reste, exil, confiscation des biens, prisons, embûches, c'est une ombre, une fumée, une toile d'araignée, moins encore. Par le passé vous vous êtes habituées à supporter de nombreuses épreuves, montrez encore aujourd'hui la même patience. Elle aura pour effet de vous établir dans une grande sécurité, dans un calme parfait, et de vous combler de gloire. Ecrivez-nous par l'entremise de ceux que leurs affaires amènent jusqu'ici, et informez-nous de l'état de votre santé. Vous savez tout l'intérêt que nous y prenons, et combien nous souhaitons d'en avoir des nouvelles.
Cucuse, 404.
J'aurais voulu recevoir une lettre me donnant des nouvelles de votre santé. Vous savez en effet, très-vénéré seigneur, quelles ont toujours été mes dispositions à votre égard. Vous n'avez sans doute pas trouvé de messagers que vous pussiez charger de vos lettres. Pour nous, plus heureux en cela, nous pouvons vous écrire, et vous prier de nous écrire à votre tour et de nous donner de -,os nouvelles. Dans ce pays, le plus désert qu'il y ait, nous avons sans cesse à redouter les voleurs, et à souffrir mille douleurs , inévitables en pays étranger, dans un désert comme celui-ci. Cependant si vous nous écrivez souvent, vous qui nous êtes si cher, pour nous informer de votre santé, malgré tant d'ennuis, nous nous sentirons consolé. Vous savez en effet quelle est la puissance de l'amour; vous savez que ce n'est pas seulement la vue des amis, mais aussi leurs lettres qui sont remplies de consolations. Puisqu'il en est ainsi, donnez-nous bien souvent ce plaisir, et faites-nous parvenir de vos nouvelles. Rien de plus agréable pour nous que de savoir que vous vous portez bien.
Cucuse, 405.
Nous avons tous deux, il est vrai, gardé longtemps le silence. Toutefois nous n'avons point perdu le souvenir de cette vieille et sincère amitié qui nous unit. Votre amour est toujours vivant et plein de force dans notre coeur, et, quelque part que nous allions, il nous suit et nous console dans nos maux. Aussi, comme nous avons rencontré des voyageurs qui se rendent dans votre pays, nous en avons profité pour vous adresser nos salutations. Fussions-nous emmené aux extrémités du monde, votre souvenir demeurera profondément gravé dans notre âme. Avec de pareils sentiments, on est heureux non-seulement d'écrire à ceux que l'on aime, mais aussi de recevoir de leurs nouvelles. Accordez-nous donc cette seconde joie, vénéré seigneur. Toutes les fois que vous le pourrez , écrivez-nous et informez-nous de l'état de votre santé. Vous savez quel intérêt nous y prenons, et quelle joie c'est pour nous, dans le désert où nous sommes, d'apprendre que vous vous portez bien.
Cucuse, 404.
Je reçois de vous moins de lettres que je ne vous en envoie. Néanmoins je continue à vous écrire. Je me satisfais moi-même en m'adressant à une âme qui me porte une affection si ardente et si sincère. Mais comme je suis très-désireux de connaître l'état de vos affaires, je voudrais recevoir de vos lettres, et apprendre ce que je souhaite de savoir, c'est-à-dire, que votre coeur est calme et sans inquiétude. S'il en est ainsi, je ne doute pas que vous ne donniez tous vos soins à votre âme, et que méprisant les choses temporelles vous ne marchiez dans la route des cieux, car la noblesse de votre âme nous est- connue : elle sait bien s'affranchir du tumulte des affaires et des pensées mondaines. Dites-vous donc que vous nous (454) faites plaisir, chaque fois que vous nous écrivez, et écrivez-nous aussi souvent que vous le pourrez. Donnez-nous cette consolation au milieu de ce désert que nous habitons. Oui, en nous écrivant, en nous informant de votre santé de la santé d'une personne qui nous aime, vous nous causerez beaucoup de joie ; et la vivacité de cette; joie nous empêchera de penser à ce désert où nous passons notre vie.
Cucuse, 404 ou 405.
Nous avons une preuve de votre sincère et vive affection dans ces nombreuses lettres que vous nous adressez, malgré le mauvais état de votre santé. Nous souhaitons ardemment de vous voir rétablie et de jouir ici de votre présence, dès que cela sera possible. Vous-en êtes bien persuadée, pieuse et vertueuse Adolia, comme je vous l'écrivais, noirs sommes plein d'inquiétude à votre sujet, car par vos. lettres nous conjecturons assez la granité de votre maladie. Aussi dès que vous vous trouverez mieux, hâtez-vous de nous en faire part et (le nous rassurer. Vous n'ignorez pas combien votre maladie nous préoccupe. Ne négligez donc pas de satisfaire à notre demande. A quoi bon d'ailleurs tant vous exhorter ? Je suis sûr que vous nous écrirez toutes les fois que vous en trouverez l'occasion.
Cucuse, 404.
C'est une preuve de votre affection, de votre sollicitude, de votre bienveillance pour nous, que ce baume que vous nous avez envoyé en y joignant l'huile de nard et d'olive pour l'adoucir et nous en faciliter l'usage, car un trajet si long ne pouvait manquer de le dessécher. Vous l'avez préparé vous-même, saris vous décharger de ce soin sur d'autres; vous avez tenu moins à me le faire rapidement parvenir, qu'à m'en assurer les avantages; et en cela j'admire votre-bienveillance à mon égard. Nous vous en remercions, et nous ne vous reprochons qu'une chose, c'est de ne nous avoir pas dit que vous vous portiez bien; ce que nous désirions tant apprendre. Nous sommes donc vivement inquiet de ne pas savoir où en est votre maladie ; et nous éprouverons une grande joie, si vous nous mandez promptement que vous êtes tout à fait guérie. Informée ainsi de notre désir, procurez-nous, je vous en prie, cette joie qui nous consolera dans notre exil et notre infortune.
(Cucuse, 405.)
Puisse le Seigneur vous récompenser et maintenant et après cette vie de cette affection si franche, si ardente, si pure, si constante que vous nous portez! Vous nous en avez donné de nombreux, d'éclatants témoignages, malgré la distance qui nous sépare, très-noble et très-vénéré seigneur. Nous vous en remercions, et nous voudrions vous écrire bien souvent. Nous ne pouvons-vous écrire aussi fréquemment que nous le souhaiterions; nous vous écrivons du moins aussi souvent que possible. Vous savez combien lhiver et tes brigands rendent les chemins difficiles. C'est pourquoi, si nous gardons longtemps le silence, ne l'imputez pas à la négligence , mais uniquement au manque d'occasions. S'il nous eût été possible de vous écrire plus souvent, nous n'aurions pas omis de le faire. C'est un granit bon lieur pour nous que de pouvoir vous adresser nos salutations. Ecrivez-nous clone souvent vous-même, et informez-nous de l'état de votre santé. Personne ne nous a remis ce que vous dites m'avoir envoyé : celui qui nous l'apportait, a eu peur des brigands, et n'est pas venu jusqu'ici. Au reste si vous m'aimez, ne m'envoyez rien; ne vous créez point tant de peines et d'embarras. Le plus beau présent que vous puissiez nous faire, c'est une affection sincère et ardente. Nous la possédons, et cette pensée suffit pour nous rendre heureux.
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Cucuse, de 404 à 407.
Nous nous sommes unis par les liens de la charité et de la bienveillance, et nous vous contemplons, comme si vous étiez en notre présence. Tels sont en effet les yeux de la charité; leurs regards franchissent toutes les distances, et le temps ne saurait les affaiblir. Nous souhaiterions de vous écrire plus souvent ; mais cela nous est difficile, soit à cause des chemins, soit à cause de la rareté des voyageurs. Nous vous adressons donc nos salutations, toutes les fois que cela nous est possible ; et nous vous assurons que sans cesse vous êtes présent à notre mémoire; et que nous portons votre souvenir dans notre âme partent où nous nous trouvons. Empressez-vous à votre tour de flous informer souvent de l'état de votre santé. Séparé de vous parie corps, nous nous réjouirons de recevoir de temps en temps de vos nouvelles, et au fond de ce désert nous ressentirons beaucoup de consolation. C'est un véritable bonheur pour nous que de vous savoir en bonne santé. Mais surtout ne négligez point de prier Dieu pour nous.
Cucuse, 401 ou 405.
Notre vénéré seigneur, l'évêque Séleucus, désireux de nous revoir, a quitté sa ville épiscopale et s'est rend jusqu'ici. C'est par amour pour vous qu'il nous a laissé pour retourner chez lui. L'affection qu'il vous porte lui a fait mépriser l'hiver, la difficulté des chemins, les infirmités même les plus graves. Louez-le donc de tant d'amour et de tant de zèle, vénéré seigneur, et en récompense de tant de fatigues, témoignez-lui, comme de coutume, la plies vive affection. Nous l'avons envoyé dans vos bras, comme dans nu port tranquille : car nous connaissons votre douceur, votre charité sincère, ardente, et toujours ferme. Si vous trouvez une occasion, donnez-nous de vos nouvelles. Eupsychius n'est pas encore venu nous trouver: nous ne savons donc rien de ce qu'il devait nous dire de votre part. Nous ne l'avons rencontré nulle spart. Instruit que vous êtes, faites-nous savoir d'une autre manière ce qu'il devait nous apprendre, ajoutez-y ce que vous croirez utile que nous sachions, et donnez-nous des nouvelles de votre. santé, qui nous est si chère, qui mous préoccupe si vivement et dont nous désirons être informé.
Cucuse, probablement 405.
Bien que nous vous écrivions rarement, vous êtes sans cesse présent à notre mémoire. N'avons-nous :pas eu ces jours derniers un grand témoignage de votre vive, ardente et sincère amitié ? C'est pourquoi nous envoyons entre vos bras, comme dans un port excellent, notre vénéré seigneur, l'évêque Séleucus. Il est atteint d'une toux fort grave, que la mauvaise saison ne fait qu'augmenter encore et rendre plus pénible. Maintenant que vous savez la nature du mal, vénéré seigneur, efforcez-vous de calmer ses douleurs, opposez à son infirmité la puissance de votre art, qui a si souvent sauvé du naufrage tant d'hommes exposés à la violence des mêmes flots.
Cususe, 404 ou 405.
Je sais quelle est depuis longtemps votre affection pour nous. Loin de s'affaiblir, elle ne fait que s'accroître la séparation, le temps, au lieu de la diminuer, la fortifient. Je sais aussi quel plaisir vous causent nos lettres. Pour vous, soit que vous vous écriviez, soit que vous gardiez le silence , vous persistez dans vos dispositions envers nous. Combien de fois n'en avons-nous pas fait l'expérience, dans les circonstances les plus variées? Je vous prie donc de nous conserver toujours les mêmes sentiments : nous avons eu tant de gages , (156) tant de témoignages de votre sincère attachement ! Votre image est comme gravée au fond de notre âme; jamais l'oubli ne pourra l'effacer, bien que les occasions nous manquent pour vous écrire souvent. Soyez bien persuadée de tout ce que je viens de vous dire, et donnez-nous de temps en temps des nouvelles de votre santé. Sans doute, à défaut de lettres, nous interrogeons ceux qui viennent de chez vous ; néanmoins nous désirons d'apprendre souvent par vos lettres comment vous vous portez.
Cucuse, 404.
Je sais que vous êtes plongée dans une grande affliction. Mais je sais aussi que vous recevrez en retour de grandes récompenses; aux souffrances succédera la joie et le bonheur. La tristesse procure à l'âme de grands avantages, et lui mérite de nombreuses palmes. Que ces réflexions servent à répandre dans votre âme d'abondantes consolations. Ne voyez pas seulement les douleurs causées par l'adversité, voyez aussi l'utilité qui en résulte; et ne cessez pas de nous informer de votre santé. C'est pour nous un grand chagrin de vous savoir malade. Aussi désirons-nous apprendre bientôt que la gravité du mal a diminué, pour que nous soyons délivré de toute inquiétude.
Cucuse, 404.
C'est la troisième fois que je vous écris, sans que vous m'ayez écrit vous-même. Mais vous avez reçu mes lettres avec bonheur, vous avez honorablement accueilli celui qui vous les a remises; vous avez fait ce qui dépendait de vous pour mener à bonne fin une couvre où votre puissance était nécessaire. Nous savons tout cela. Toutefois vous ne nous écrivez pas. S'il s'agissait d'une âme moins généreuse que la vôtre, nous croirions, après un silence si prolongé, que cette multitude d'affaires peut l'excuser. Mais votre grandeur d'âme et votre charité si ardente, si sincère, si pure, si constante, nous est trop bien connue pour que nous nous contentions d'une pareille excuse. Ne dites pas non plus que vous n'habitez plus le même pays. Nous ne l'ignorons pas. Une seule chose peut nous consoler de votre long silence, c'est qu'il vous plaise de nous en dédommager, en nous écrivant souvent de longues lettres dans ce style aussi doux que le miel. Informez-nous d'une manière précise de votre état de santé. Même au milieu de ce désert, et assiégé de tant de douleurs, nous ne cessons cependant de nous inquiéter à votre sujet, et chaque jour nous demandons comment vous vous portez. Ecrivez-nous donc; c'est de votre bienveillance que nous voulons apprendre que vous vous portez bien, et non par une autre voie. Nous serons au comble de nos voeux, si nous recevons une lettre qui nous donne cette heureuse nouvelle.
Cucuse, 404.
Une grande distance nous sépare et depuis bien longtemps. Que de causes de souffrances pour moi! Je vis dans un désert affreux, sans cesse assiégé, sans cesse entouré d'embûches, sans cesse inquiété par les incursions des brigands, et de plus, en proie à la maladie. Rien de tout cela pourtant n'affaiblit mon amour pour vous; au contraire, il conserve toute son énergie et toute sa force, et quelque part que nous soyons, nous vous wons présent à l'esprit et à la pensée; nous ne vous oublierons jamais. Oui, la noblesse de votre âme, sa sincérité, la fermeté et la constance de votre charité et de votre bienveillance demeureront gravées dans notre coeur. Telle est ici notre vie; c'est pour nous une très-grande consolation que le souvenir de vos vertus. Ecrivez-nous de temps en temps, admirable et magnanime seigneur, et donnez-nous des nouvelles de votre santé. Vous savez combien elle nous intéresse , et combien nous souhaitons d'en être informé. Vous nous procurerez un double plaisir, celui de recevoir votre lettre, et celui d'apprendre que vous vous portez bien.