Les fondations

 

 

Pour avoir une idée complète de l'œuvre de Don Bosco, il faudrait parler de toutes les Maisons qu'il a fondées. Des détails sur leur origine et leur fonctionnement seraient, à coup sûr, fort intéressants ; mais cela nous entraînerait trop loin, et nous nous bornerons à une simple énumération.

Mentionnons, tout d'abord, que Don Bosco a édifié trois églises, d'une importance et d'une magnificence telles, que cet acte suffirait presque, à lui seul, pour glorifier la vie d'un homme.

La première est l'église de Notre-Dame Auxiliatrice, à l'Oratoire Saint-François de Sales (1868). Nous lui consacrerons un chapitre spécial

La deuxième est celle de Saint-Jean l'Évangéliste, également à Turin. Elle est située sur le Cours Victor-Emmanuel II, et elle s'élève sur l'emplacement où fut, primitivement, l'Oratoire de Saint-Louis de Gonzague. Ce quartier n'était, il n'y a pas très longtemps encore, qu'une réunion de fabriques et de maisonnettes, habitées par le bas peuple. De la Place d'Armes au Pô, sur une étendue de trois kilomètres, il n'existait pas une seule église. C'était d'autant plus regrettable que les Vaudois avaient ouvert, tout au milieu de cette population ouvrière, un temple, un asile et une école ; et la nécessité forçait les familles, même catholiques, à y envoyer leurs enfants.

Ce fut ce point que Don Bosco avait choisi pour y établir l'Oratoire de Saint-Louis, en 1847. On recevait là cinq cents enfants, mais le dimanche seulement ; et l'étroite chapelle ne pouvait admettre que fort peu de personnes du quartier.

Cet Oratoire ayant été coupé en deux tronçons par le percement d'une rue, Don Bosco profita de cette circonstance pour réaliser un projet qu'il méditait depuis longtemps : l'érection d'une vaste église.

S. S. Pie IX encouragea l'entreprise et la bénit ; et les dons charitables ne tardèrent pas à affluer.

La pierre angulaire fut placée le 14 août 1878, et l'église ouverte au culte en 1882.

Cette superbe église, de style roman-lombard, d'après les dessins du comte Mella, est dédiée à Saint-Jean l'Évangéliste, nom de baptême de S. S. Pie IX. Elle est comme un hommage de reconnaissance et d'honneur au Saint Pontife de l'Immaculée Conception, insigne protecteur de l'Œuvre Salésienne, qui aimait la chère famille de D. Bosco comme la prunelle de ses yeux.

C'est un monument d'une véritable valeur artistique, de grandes proportions et d'une remarquable majesté.

À l'église sont annexés de vastes bâtiments qui peuvent recevoir cent soixante internes. C'est là qu’est installée, en partie, l'Œuvre de Marie Auxiliatrice pour les vocations ecclésiastiques. Il y a, en outre, des classes et un externat.

Ce quartier s'est transformé, et il est devenu un des plus beaux de Turin.

La troisième église est celle du Sacré-Cœur de Jésus, sur le mont Esquilin, à Rome.

S. S. Pie IX avait acheté le terrain.

S. S. Léon XIII, après avoir posé la première pierre en août 1879, confia à Don Bosco le soin de continuer cette œuvre gigantesque ; et, certes, la charge fut lourde pour ce pauvre prêtre, qui dut multiplier les quêtes, organiser des loteries, et déployer toute son industrie pour faire face à des dépenses énormes.

Enfin ce monument si grandiose a pu être consacré et ouvert au culte au mois de mai 1887.

Don Bosco a voulu compléter cette œuvre, en y adjoignant un Oratoire destiné à recevoir les enfants de toute nationalité, si nombreux à Rome. On travaille activement à terminer cet utile établissement.

Outre ces trois monuments hors ligne, Don Bosco a élevé beaucoup d'autres temples au Seigneur. Toutes les Maisons Salésiennes sont pourvues de chapelles, mais plusieurs d'entre elles possèdent de véritables églises, dont seraient fières bien des paroisses.

Les Maisons Salésiennes sont nombreuses en Italie. Outre celles de Turin, il en existe à : Valsalice, S. Benigno, Borgo S. Martino, Lanzo-Torinese, Mathi, Nizza Monferrato, Penango, Mogliano-Veneto, Varazze, S. Pier d'Arena, Bordighera, Spezia, Lucca, Firenze, Faenza, Magliano-Sabino, Randazzo, Catania.

 

En France, des fondations importantes ont eu lieu. Ce sont : à Nice, le Patronage Saint-Pierre ; à Marseille, l'Oratoire Saint-Léon et la Providence ; à la Crau-d'Hyères, l'Orphelinat agricole de la Navarre ; à Saint-Cyr (Var), l'Orphelinat agricole de Saint-Isidore, pour les jeunes filles ; à Lille, l'Orphelinat Saint-Gabriel ; à Paris (Ménilmontant), l'Oratoire Saint-Pierre-Saint-Paul ; à Gevigney (Haute-Saône), un Oratoire agricole ; à Guines (Pas-de-Calais), une Maison pour les jeunes filles.

 

En Espagne : une Maison à Utrera, deux autres près de Barcelone.

En Autriche-Hongrie : un Orphelinat à Trente.

En Angleterre : la Maison du Sacré-Cœur de Jésus, à Londres, quartier de Battersea. Elle a été établie au milieu d'une population ouvrière composée, presque aux trois-quarts, d'Irlandais, et occupe l'emplacement précis où existait autrefois le jardin de Thomas Morus.

En Belgique : une Maison va s'ouvrir, à Liège.

Dans l'Amérique du Sud, nous pouvons citer :

1. Vicariat de la Patagonie : Paroisse de Carmen (Patagones), Paroisse de Viedma, Pringles, Mission du Rio-Negro, Chubut, Colorado, Malbarco o Chos-Malal.

2. Maisons annexes du Vicariat de la Patagonie : Concepcion del Chili, Talca, Quito, (République de l'Equateur.)

3. Préfecture de la Patagonie méridionale : Missions de Santa Cruz, Missions de Punta Arenas, Missions des Iles Malouïnes et de la Terre de Feu.

4. Inspection Argentine. À Buenos-Ayres : église de la Miséricorde, Collège de St.-Nicolas, Maison et Paroisse d'Almagro, Paroisse et Collège de Saint-Jean l'Évangéliste a la Bocca, Maison de Sainte-Catherine.

Collège de la Plata.

5. Inspection de l'Urugay et du Brésil. Collège de Colon (Montevideo), collège et paroisse de las Piedras, collège et paroisse de Paysandù, chapelle de N. S. de la Paz.

Au Brésil. Hospice de Sainte-Rose à Nichteroy, Hospice du Sacré-Cœur à St.-Paul.

 

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L'Oratoire de Saint-François de Sales, à Turin, est resté le point central, et comme le cœur d'où la vie circule dans toute la Pieuse Société Salésienne. Notons que cet Oratoire réalise, dans son intégralité, ce fameux plan dont le seul énoncé avait autrefois fait taxer Don Bosco de folie.

Outre ses deux églises, celle de Notre-Dame Auxiliatrice, et celle de Saint-François de Sales, il possède de vastes ateliers où les enfants apprennent diverses professions ; et de belles classes pour les étudiants.

Certes les bâtiments, construits en plusieurs fois et selon les nécessités du moment, ne brillent pas par une régularité parfaite ; mais ils peuvent facilement recevoir, à titre d'internes, un millier de personnes.

Avec la sûreté de son coup d'œil, Don Bosco avait bien vite reconnu quel rôle immense joue la presse dans la société moderne, et quelle est sa puissance. Aussi, dès qu'il le put, il organisa une imprimerie.

Celle de l'Oratoire est fort importante : elle est pourvue de dix machines, et d'un outillage établi d'après les perfectionnements les plus modernes. Elle est complétée par une fonderie de caractères, et une fabrique de papier, celle-ci installée à Mathi (1).

 

Un nombre considérable d'ouvrages sont sortis de ses presses : les uns sont destinés à la propagande populaire et aux classes élémentaires, les autres fournissent de précieux matériaux aux étudiants des classes supérieures, aux prêtres et aux théologiens.

On s'occupe aussi de gravure et de chromotypie, sans oublier la reliure. De véritables œuvres d'art ont été produites par ces divers ateliers.

Trois machines à gaz, d'une puissance totale de 25 chevaux environ, distribuent, dans toute la Maison, une force motrice habilement utilisée.

La boulangerie à vapeur et à pétrin mécanique produit, avec rapidité et économie, l'énorme quantité de pain consommée chaque jour (750 kg).

 

Mais ce qui frappe le plus ceux qui visitent l'Oratoire, c'est certainement la sagesse, la docilité de tous les enfants.

Dans les ateliers, la tenue et la conduite sont irréprochables, et rien n'est édifiant comme l'aspect des classes et des études.

Il n'est guère possible de donner une idée de ce que sont les enfants à l'église. Il faut avoir assisté à ces ferventes prières, à ces innombrables communions, à ces élans de piété qui vous ravissent !

C'est à cet Oratoire de Saint-François de Sales, sa première Maison, que le bon Père Don Bosco a toujours résidé. Son appartement, situé au deuxième étage, avait vue sur une des cours, et, de ses fenêtres, il pouvait assister aux jeux des enfants pendant les récréations.

Il avait là deux chambres étroites, à peine meublées, précédées d'une salle d'attente. Il affectionnait particulièrement une petite galerie, exposée au midi, et sur laquelle s'ouvrait son cabinet de travail. C'est là qu'il faisait quelques pas, au bras d'un de ses prêtres, alors que ses pauvres jambes lui refusaient leur service. Il se plaisait surtout à s'arrêter devant des cartes, appendues à la muraille, et qui lui permettaient de suivre, aux confins de la terre, ses infatigables missionnaires. C'était sa dernière œuvre, celle pour laquelle il avait peut-être le plus de prédilection !

 

 

(1) D'autres imprimeries existent à San Pier d'Arena, à San Bénigno-Canavese, à Nice, à Lille, à Barcelone, à Buenos-Ayres, à Nicteroy (Brésil), à Quito (Equateur).