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VIE DE GEMMA GALGANI



CHAPITRE XXVIII.



EXTRAORDINAIRE DÉVOTION DES FIDÈLES À LA VIERGE GEMMA.

GRÂCES SPIRITUELLES.



Suivant le cours ordinaire des choses, le souvenir de la servante de Dieu devait disparaître avec elle dans le silence de la tombe, tant son existence s'était écoulée obscure et ignorée on peut le dire, en effet, à peine fut-elle connue en dehors du cercle étroit de sa famille d'adoption.

Mais le Seigneur a promis d'exalter les humbles, et sa parole ne saurait faillir. Quand l'indifférence et l'oubli pèsent si vite sur la mémoire des êtres disparus de la scène du monde, la réputation de sainteté de Gemma commença de s'étendre ; et bientôt, de toutes parts, retentirent les louanges d'une jeune fille qui, de son vivant, n'avait jamais attiré l'attention de la foule.

Sa mort date de quelques années seulement, et déjà nombre de fidèles l'ont choisie pour leur avocate particulière près de Dieu ; ils accourent, même de Rome et de lointaines provinces, au canpo-santo de Lucques pour prier sur sa modeste tombe, et les grâces qu'ils en obtiennent accroissent de plus en plus leur confiance (1).

Le bruit des faits merveilleux attribués à son intercession gagne chaque jour des contrées nouvelles ; de partout on demande avec insistance quelque objet lui ayant appartenu, dans le ferme espoir d'y trouver, comme dans les reliques des saints, un remède aux infirmités physiques et morales. Je ne puis fermer cette biographie sans donner un aperçu de cette dévotion des fidèles à la séraphique Gemma, et des faveurs prodigieuses que Dieu se plaît à accorder par sa médiation.

Peu de saints canonisés ont acquis, aussitôt après leur mort, parmi les peuples proches ou éloignés, une aussi grande vénération que l'humble vierge de Lucques. Sa Vie, publiée en 1907, bien qu'écrite en un style simple et inculte par une plume inhabile, fut si avidement recherchée qu'en deux mois et demi la première édition se trouvait épuisée ; la seconde, trois fois plus forte, s'enlevait dans l'espace de trois mois ; et la troisième, tirée à cinq mille cinq cents exemplaires, partageait bientôt la même faveur. C'est qu'on ne peut lire ces humbles pages sans se sentir épris de l'admirable enfant qui en est l'héroïne. Le Seigneur communique manifestement à cette simple ébauche une vertu surnaturelle, qui, en mettant en relief le portrait si aimable de sa fidèle servante, explique sa diffusion inespérée. Pareille remarque, je le comprends, ne devrait point sortir de ma plume, mais telle est la pure vérité, dont Dieu seul d'ailleurs recueille toute la gloire.

En Italie, la vie de Gemma a été lue publiquement dans un très grand nombre d'institutions, de séminaires, de collèges et surtout de pensionnats de jeunes filles ; c'est le livre préféré pour les retraites de première communion des enfants des deux sexes. Tous avouent en retirer un rare profit spirituel ; on veut le relire, on se l'arrache des mains, pour ainsi dire, et on bénit le Seigneur, qui dans nos temps malheureux avait orné la terre d'une perle si précieuse. De l'étranger, où la renommée de la servante de Dieu s'est déjà répandue, d'incessantes commandes affluent et l'éditeur, et l'autorisation de traduire l'édifiante biographie, sollicitée de toutes parts, a été accordée pour l'Allemagne, l'Angleterre et l'Irlande, la Hollande, les Flandres, la Pologne, la Russie, l'Espagne, le Portugal, les deux Amériques et même la Chine et le Japon.

Que cette dévotion des fidèles, qui s'annonce universelle, soit fondée, les appréciations des juges les plus autorisés le proclament clairement ; et d'abord celle du souverain pontife Pie X, au nom duquel l'éminentissime cardinal Secrétaire d'État écrivait à l'auteur la lettre imprimée en tête de cet ouvrage.

De Rome, où l'on a coutume de juger si sainement de la réelle valeur des choses, de Florence, de Gênes, de Turin, de Milan, de toutes les provinces de la Péninsule, plusieurs Cardinaux, des Évêques, d'autres grands dignitaires de l'un et de l'autre clergé, et même des laïques de marque, manifestent en termes chaleureux leur admiration pour la vierge de Lucques ; et leurs lettres, jaillies spontanément du besoin d'exprimer leurs sentiments intimes, s'accordent toutes comme les voix d'un chœur harmonieux.

Le regretté monseigneur Camilli, évêque de Fiesole, écrivait : « Je finis de lire la biographie de la servante de Dieu, Gemma Galgani, et je ne sais exprimer (ne saurais-je que je ne le pourrais) les sentiments éprouvés par mon pauvre cœur à cette lecture. Cette figure angélique m'est apparue dans toute sa splendeur. Sa profonde humilité, sa rare et parfaite obéissance, sa simplicité de colombe candide et pure, son ardent amour de Dieu, du prochain en général et tout spécialement des pécheurs, ses extases, ses ravissements, ses peines ineffables, son martyre héroïque, moral et physique tout, en un mot, a brillé mon esprit et s'est gravé dans mon cœur ; et, au milieu des larmes qui souvent baignaient mon visage, j'ai remercié le Seigneur, d'avoir fait germer dans la bonne population de Camigliano un lis si beau et si parfumé, qui, transplanté à Lucques, s'est élevé plein de vigueur, attirant par son arôme céleste tant d'âmes autrement vouées à la perte éternelle, en acheminant tant d'autres dans des voies plus régulières et plus parfaites, à la suite de son Jésus souffrant. Oh ! veuille Jésus crucifié glorifier promptement, même ici-bas, son angélique épouse qui a voulu comme lui mourir crucifiée. J'ai commencé à l'invoquer ; aidez-moi, mon père, à obtenir sa protection, et envoyez-moi, s'il est possible, pour ma dévotion personnelle, quelque objet lui ayant appartenu. Enfin, je vous remercie de tout cœur de m'avoir fait goûter un don si précieux, digne de plaire à tout palais et d'être accepté même des hypercritiques de nos jours. »

Un autre docte et saint prélat de la province de Florence s'exprime en ces tenues : « Vous ne sauriez croire avec quelle joie spiriladle je lis la biographie de la vierge de Lucques, Gemma Galgani je veux faire connaître ici celte chère sainte, et je vous prie de me faire adresser trente exemplaires de sa biographie. Depuis que je lis sa Vie, j'ai conçu une vive espérance d'obtenir de Jésus, par son intercession, une plus grande abondance de grâces pour la sanctification de mon âme et l’exact accomplissement de mes devoirs. »

Un très digne prêtre, qui eut la consolation de connaître Gemma de très près, m'écrivait à son tour : « La biographie de Gemma Galgani est pour moi un trésor. Vous pouvez deviner avec quel intérêt et quelle dévotion j'en fais la lecture, voyant revivre sous mes yeux cette admirable jeune fille dont le bon Dieu, dans son infinie miséricorde, a voulu faire présent aux habitants de Lucques, gage certain pour eux lotis de grâces et de faveurs spirituelles. Oh ! si le Seigneur m'accordait d'unir ma pauvre voix à celle des prêtres fortunés qui auront l'enviable sort de prononcer le panégyrique de Gemma, au jour de son élévation aux honneurs des autels ! Mais je suis indigne d'une telle grâce, pour n'avoir pas su me comporter comme je l'aurais voulu avec cet ange de sainteté. »

En lisant la précieuse Vie de Gemma, m'écrivait un autre prêtre de Lucques, quel doux air de paradis on respire, au milieu de l'atmosphère empestée de ce monde pervers ! Quels doux et chers souvenirs a réveillés dans mon esprit l'évocation d'un passé où Gemma demeurait avec sa famille dans ma paroisse ! Je dirigeai alors pendant quelque temps son âme et celle de sa sainte mère... je crois que cette Vie, si consciencieuse ment écrite, produira de grands fruits surtout dans les âmes pieuses.

Une longue lettre, très enthousiaste, du Supérieur d'un Grand Séminaire de Toscane, signée après lui, de tous ses élèves, se termine par ces mots : « De ce brûlant séraphin que fut Gemma a-t-on introduit la Cause ? Ô Père, faites tous vos efforts pour que le catalogue des saints s'embellisse d'une gemme si resplendissante. (2) »

Un des plus illustres orateurs italiens a voulu, comme tant d'autres, me confier les vifs sentiments de son cœur à l'égard de notre jeune vierge ; sa lettre est trop belle pour en priver le lecteur : « Des personnes très versées dans la spiritualité, dit-il, me parlèrent avec ravissement de Gemma Galgani, dont elles lisaient la Vie, très étonnées que je n'en eusse pas encore entendu parler. Distrait alors par d'autres pensées, je prêtai peu d'attention à leurs paroles et me souciai peu de prendre connaissance de cette biographie. Trois mois après, je vis le volume entre les mains d'un prêtre qui me parla également avec enthousiasme de l'héroïne de Lucques. Par curiosité ou tout autre motif, je me mis à le parcourir. »

« Dès les premières pages, moi qui n'avais jamais trouvé de goût à la lecture des vies des saints, je commençai à sentir au cœur quelque chose d'insolite. Devant cette figure morale de Gemma, que je voyais se dessiner dans un cadre simple et attrayant, j'éprouvai, contre ma naturelle habitude en n'importe quelle lecture, le besoin de courir, de dévorer ce que je tenais en main ; et ainsi, courant et dévorant les feuilles, j'arrivai à la fin ; mais pour ressentir plus vivement le besoin de reprendre la lecture. »

« Tout de la terre avait disparu de mon esprit ; je ne voyais plus que l'âme candide de cet ange revêtu d'une chair humaine, couverte des plaies de Jésus crucifié, ornée d'un ensemble de dons surnaturels et célestes que l'on admire épars dans les autres saints. J'entendais la voix d'une enfant qui parlait à l'ange gardien, à la très sainte Madone, à Jésus avec l'abandon d'une petite fille qui parle à son propre frère, à sa mère, à son tendre père. »

« Dans les vies des saints, les citations répétées, les longs extraits de leurs lettres m'avaient toujours paru ennuyeux et lassants. Dans celle de Gemma, j'aurais voulu que l'auteur la laissât toujours parler, et qu'au lieu de nous faire des excuses, il eût transcrit intégralement toutes ses paroles. Et n'en trouvant point dans ce livre autant que j'en eusse désiré, j'allais, importunant l'un, importunant l'autre de ceux qui avaient eu le bonheur de traiter avec la chère servante de Dieu, dans l'espoir d'en apprendre quelque chose de nouveau... »

Un vénéré Cardinal, non content d'avoir lu et relu plusieurs fois cette biographie, et de s'en être procuré de nombreux exemplaires pour les distribuer à ses connaissances, disait à un de mes amis, après lui avoir parlé longuement et avec enthousiasme des vertus de Gemma : « Vous direz à l'auteur de s'arrêter chez moi, lors de son premier voyage à Rome, pour me parler de cette chère servante de Dieu ; et insistez, parce que je veux entendre parler de Gemma de sa propre bouche ; j'y tiens beaucoup. »

Je redevais récemment d'un professeur éminent, directeur d'un lycée de Rome, la lettre suivante que j'abrège : « Me voici de retour de Lucques, où je viens d'accomplir un saint pèlerinage en compagnie du prêtre de Varsovie que vous connaissez et d'une autre personne pieuse. Nous avons longtemps prié sur la tombe de la vierge Gemma, la suppliant de nous obtenir un peu de cet amour divin dont brûlait son cœur... Puis, à la vue de tant de souvenirs de sa vie, nous avons éprouvé quelque chose d'extraordinaire, et senti nos âmes inondées d'un sentiment ineffable de paix et de consolation. Comme Dieu, pensions-nous, est toujours admirable dans ses saints ! »

« Auparavant, nous avions visité l'Alvernia (3) ; mais à Lucques nous avons ressenti des impressions encore plus vives que sur le mont sacré dans la chapelle des saints stigmates. Cent fois nous avons répété : Béni soit le Seigneur d'avoir inspiré d'écrire la vie si belle de cette chère et sainte jeune fille, qui nous ravit d'admiration par ses héroïques vertus ! Que de bien un tel livre n'a-t-il pas déjà opéré dans les âmes ! Comme il aide merveilleusement au recueillement et à la méditation ! Qu'on y apprend bien les voies admirables de la perfection ! »

« La Vie de Gemma plaît extrêmement à tous, écrit un très digne Supérieur de la Compagnie de Jésus. Pour moi, je le confesse, je ne puis m'empêcher de l'invoquer à tout moment, et de l'invoquer toujours sous le nom de sainte Gemma. Les marques de l'esprit de Dieu, telles que les énumèrent les docteurs ascétiques les plus solides et les plus sûrs, apparaissent avec une telle évidence dans cette âme vraiment sainte, que je ne sais comment on pourrait un seul moment les mettre en doute. Oh ! oui vraiment, mon révérend Père, en publiant la biographie de cette sainte, ses Lettres et Extases, vous avez prêché une mission qui fera plus de bien à d'innombrables âmes du présent et de l'avenir, qu'une centaine, qu'un millier de missions ordinaires... J'ai déjà fait le panégyrique de cette sainte vierge dans les exercices spirituels que j'ai donnés aux Religieux. Je parlerai d'elle tout le reste de ma vie ; je mettrai tout mon zèle à la faire connaître et invoquer, et, de plus, j'ai déjà promis, en témoignage de reconnaissance, de contribuer et de faire contribuer de la meilleure manière possible, même pécuniairement, à la cause de sa Béatification. Gemma sera sans doute déclarée sainte, et sans trop tarder, par l'oracle de l'Église ; et on la comptera parmi les saintes les plus insignes vénérées sur les autels. C'est mon sentiment. »

« Ayant entendu parler par hasard, dit un prêtre de paroisse, de la vie merveilleuse de Gemma Galgani, j'écrivis pour me procurer sa biographie, et aussitôt que je l'eus reçue je me mis à la lire, ou plutôt à la dévorer comme d'un trait. Quels prodiges de la grâce divine ! quelles héroïques vertus ! Oh ! il est bien vrai, Dieu choisit les faibles, de ce monde pour confondre les forts. Le Seigneur, par la vie de cette jeune fille, a voulu donner une leçon à ce siècle superbe, sensuel, irréligieux, matérialiste. Certainement la lecture de cette biographie produira beaucoup de bien parmi mon peuple, et je la ferai lire autant que je le pourrai. »

Et l'Archiprêtre d'Ascona : « Du fond de la Suisse je vous envoie la parole de l'admiration et de l'enthousiasme. Quelle sainte, quelle sainte, Gemma Galgani ! et de nos jours !... Ah ! je voudrais visiter tous les lieux sanctifiés par Gemma... je voudrais interroger toutes les personnes qu'elle a connues... que je serais heureux ! Mais je suis heureux également de pouvoir la prier... de méditer sa vie... »

Dernièrement à Rome, un père Jésuite très connu conseillait à un prêtre de ses amis de faire une retraite de dix jours, en n'utilisant qu'un seul livre : la Vie de Gemma ; et il ajoutait : « Au fruit que vous retirerez de cette lecture, vous reconnaîtrez avec combien juste raison je vous ai donné un tel conseil. »

Dans différentes provinces de la Péninsule, d'autres directeurs d'âmes, renommés par leur doctrine et leur piété éclairée, portent de semblables appréciations : « Lisez la vie de Gemma Galgani, vous en retirerez plus de fruit que d'un cours d'exercices spirituels. »

Des centaines de lettres, qui formeraient un gros volume, expriment avec émotion les sentiments célestes dont ce livre si simple et sans aucun mérite littéraire embaume les âmes. La plupart viennent de tous les points de l'Italie, mais beaucoup aussi de l'étranger et jusque des lointaines Amériques et de la Chine (4). On peut donc affirmer que l'univers chrétien a tressailli d'admiration devant la séraphique vierge de Lucques et qu'il chante avec allégresse sa vie admirable.

Dans nos contrées, nombreuses sont les familles qui comptent parmi leurs plus chers trésors, et vénèrent d'un singulier amour le portrait de Gemma ; et beaucoup de fidèles portent sur eux une de ses reliques. C'est ainsi qu'en l'espace de quelques années, plus de cent mille de ces reliques ou images ont été avidament demandées.

Déjà, bien des œuvres catholiques se réclament du patronage de l'angélique jeune fille ; parmi elles il nous est agréable de mentionner la pieuse Union des prêtres romains, qui s'efforce de promouvoir dans la Ville éternelle la gloire de Dieu, l'éclat du culte divin et le bien des âmes. Une des pratiques les plus importantes, dans leurs fréquentes réunions, consiste à lire un passage de la Vie de la servante de Dieu, que l'un d'entre eux fait suivre de commentaires propres à enflammer leur ferveur au spectacle de si rares vertus.

À Turin, une belle œuvre d'apostolat récemment fondée par deux femmes d'élite, les comtesses Astesana, sous le titre : Protection et secours mutuel pour les jeunes ouvrières, s'est placée sous les auspices de Gemma.

En Autriche, la princesse de Metternich, présidente du Cercle des Dames de la haute aristocratie viennoise, a voulu également que la vierge de Lucques fût comme l'âme de cette pieuse société. On parie souvent d'elle dans les réunions, et chacune la prend pour modèle dans le service de Dieu et dans sa sanctification personnelle.

Beaucoup d'autres institutions de l'un et de l'autre sexe, en Italie et à l'étranger, ont suivi ces exemples.

Il est certain, suivant la conviction d'un juge très qualifié, que si l'attraction surnaturelle qui entraîne les fidèles vers notre virginale enfant continue comme elle a commencé, nous verrons des merveilles, pour la plus grande gloire du Seigneur, qui se plaît à déployer ses magnificences en faveur de ses saints.



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De la nature de ces divers témoignages il ressort avec évidence que la grande dévotion des fidèles à la servante de Dieu, propagée avec une merveilleuse rapidité chez toutes les nations, est loin de se borner à de stériles sentiments d'admiration, comme en peuvent concevoir tous les hommes de bien en présence d'une physionomie morale extraordinairement belle. C'est un sentiment salutaire, qui émeut et incite à l'imitation, élément nécessaire de la vraie dévotion ; c'est un sentiment efficace, qui éveille dans les cœurs le désir de se détacher des liens éphémères de ce monde, pour s'embraser du céleste amour, et de devenir saint par la reproduction des traits de ce ravissant modèle.

On a vu dans le chapitre vingt-deuxième, comment Gemma fut suscitée de Dieu pour exercer dans l'Église, d'une manière spéciale bien que cachée, la sublime mission de l'apostolat. Or, il était dans les desseins divins qu'après avoir quitté cette terre de larmes, où son passage fut si court, au sein des délices éternelles méritées par ses éclatantes vertus, elle continuât son œuvre avec infiniment plus de puissance et d'efficacité. En conséquence, Il la dévoile au monde, lui gagne les cœurs et les pénètre pour elle d'une tendre dévotion.

La sainte enfant, s'interposant un jour auprès de son directeur spirituel en faveur d'une âme dévoyée, dont la conversion ne donnait plus d'espoir, disait en définitive : « Parlez-lui de moi et pressez-la de venir me voir. Si elle était venue, tout cela ne serait pas arrivé. » Ces paroles, qui trahissent chez leur auteur l'intime persuasion d'être un instrument choisi des miséricordes divines, le Seigneur les réalise aujourd'hui dans l'intérêt d'un grand nombre. Il leur fait connaître et aimer son angélique servante, les presse d'aller à elle, touche leur cœur à son souvenir, et les rend meilleurs, comme l'attestent unanimement les innombrables lettres qui me sont parvenues.

« Si l'on veut savoir, dit l'orateur en renom, précédemment cité, d'où provient dans mon âme une si ardente dévotion pour Gemma, je répondrai ingénument des effets salutaires qu'elle a opérés dans mon âme. C'est de son intermédiaire qu'a voulu se servir le Seigneur pour mettre le comble à ses miséricordes sur moi, en secouant ma torpeur spirituelle, en me détachant de tout et de tous, et en me mettant à même de n'agir que pour Lui et en Lui. En un mot, dès l'apparition de cette vierge à mes regards, une véritable transformation s'est produite dans tout mon être ; je serais ingrat de n'en point faire ouvertement l'aveu. »

« À toute heure du jour et dans n'importe quelle occupation, je me vois en présence de cette enfant du ciel, qui encourage, conseille ou blâme l'indigne prêtre que je suis. Et lorsque mes actes sont moins vertueux, comme je rougis devant elle ! Merci, merci, ô Gemma ah ! rendez-moi digne de correspondre à la mission que Dieu vous a confiée de sauver ma pauvre âme. »

« Ma propre expérience et les faits que d'autres m'ont rapportés me donnent la conviction que le souvenir de l'heureuse vierge de Lucques est appelé à mettre en une sainte émulation tout le monde des surtout la jeunesse, en rallumant en elles l'amour d'une vie vraiment chrétienne et parfaite. »

« La biographie de Gemma, écrit-on d'autre part, produit vraiment dans l'âme de suaves et pieuses impressions, On se sent pris d'admiration à mesure que se déroule une si extraordinaire existence. Vous ne sauriez croire quel bien cette angélique créature opère dans un très grand nombre d'âmes. Pour moi, je l'aime beaucoup ; elle m'inspire une si grande confiance, et son souvenir m'apporte un tel réconfort moral, que je n'ai jamais éprouvé rien de semblable pour aucun autre saint. »

Et un jeune séminariste : « Pendant que je lisais cette vie, je me sentais de plus en plus excité au détachement des choses de ce monde, et à l'amour d'une vie vraiment chrétienne. Maintenant je n'éprouve d'autre désir, d'autre aspiration que de me donner tout à Jésus et de devenir un saint à tout de bon. »

« Pour la seconde fois, écrit un autre, je lis la vie de la très aimable, de la très candide Gemma, et non sans verser encore des larmes. Je ne sais comment dire il y a dans cette vie quelque chose de mystérieux qui attire, gagne, entraîne l'esprit, le cœur ... ce qui n'arrive pas, du moins pour moi, dans la lecture de la vie des autres saints... Dans nos temps si tristes, si mauvais, oh ! quel bienfait pour les bons, qui en sont émus et réconfortés ; pour les tièdes, qui se sentent poussés et comme forcés de s'embrasser aux flammes du divin amour ; pour les pauvres et aveugles pécheurs. qui seront salutairement remués. »

Voici la lettre d'un vénérable chanoine de Fano : « J'ai lu la vie de la jeune sainte, Gemma Galgani, et vous dire que j'en suis resté stupéfait n'est pas tout, ni suffisant pour exprimer l'impression profonde que j'ai éprouvée. On se sent vraiment en présence d’un prodige de l'infinie bonté de Dieu, et de la plus angélique corrrespondance à la grâce. Il n'est pas possible d'oublier la sainte figure de Gemma, ni de rester indifférent devant elle. L'histoire de sa vie est un continuel miracle, et ses paroles, largement citées. jamais assez cependant pour satisfaire le désir du lecteur, frappent avec une suavité et une force surprenantes l'esprit et le cœur. Moi, qui ne crois avoir jamais pleuré à la lecture d'aucune vie de saint, tant je suis froid et dur, je me suis senti plusieurs fois attendri et ému, et les larmes ont jailli de mes yeux. À en juger par ma propre experience, la Vie de cette céleste créature est destinée à produire en tous une très profonde impression. »

« Toutes les fois, dit un docte et pieux religieux, que me vient à l'esprit le nom de Gemma (et cela m'arrive très souvent), comme toutes les fois que je regarde son image (c'est-à-dire bien souvent aussi), je me sens stimulé à mieux correspondre à ma vocation, à me confier en Dieu, à l'aimer et à procurer sa gloire au prix des plus grands sacrifices. Je retire de la Vie de cette sainte plus de secours que de beaucoup d'autres livres spirituels. Béni soit le Seigneur, toujours admirable dans ses saints ! »

« J'ai distribué, écrit un curé milanais et je distribue des exemplaires de la belle Biographie de Gemma, et je trouve en tous, après cette lecture, un ardent désir de se sanctifier, et une réelle amélioration spirituelle. »

Un prêtre de la province de Potenza s'exprime en ces termes : « J 'ai lu ces pages avec passion et un intérêt intense, et je ne sais exprimer ce que j'ai éprouvé en les lisant. C'était un mélange de sentiments opposés de joie, de ce que le Seigneur a suscité pour sa gloire une créature si privilégiée de douleur, pour n'avoir pas su correspondre comme elle à la grâce d'amour pour cette sainte qui a su nous laisser des exemples si divers de vertu ; de haine pour notre temps si mauvais qui ne sait point apprécier les dons de Dieu... Mes larmes coulaient à cette lecture, jusqu'à me forcer plusieurs fois de l'interrompre. »

« Père, père, écrit un autre très digne prêtre, si vous saviez l'effet produit par ce livre !... et ce qu'il a opéré en moi Je suis devenu tout autre. Gemma m'a enlevé toute mauvaise inclination ; ce monde ne m'intéresse plus ; tout m'y ennuie. Depuis le jour où j'ai eu ce livre en main, je ne pense à autre chose qu'à notre bon Jésus et à Gemma. Je l'ai choisie pour ma spéciale avocate, et je sens que du haut du ciel elle me regarde et me protège. Je lui demande tout ce dont j'ai besoin, et elle me l'obtient. »

Le très honorable directeur technique d'une grande maison artistique de Rome dit à son tour : « Je ne puis moins faire que rendre grâces à Dieu d'avoir daigné révéler sa très fidèle Servante par la prodigieuse diffusion du livre d'or de sa Vie. Je tiens à vous écrire que j'attribue à cette chère sainte beaucoup de faveurs spirituelles. Non seulement j'ai goûté, au cours de la lecture de sa Vie, de très vives consolations intérieures, mais je me suis senti éclairé de Dieu et fortifie pour une vie meilleure. J'éprouve plus de ferveur dans la sainte communion, plus de courage dans les luttes quotidiennes, et je l'attribue à l'intercession de Gemma, que moi et toute ma famille ne cessons d'invoquer. Puissent toutes les âmes solliciter son secours ; j'ai la certitude qu'aucune ne sera déçue. Un nombre considérable de personnes de ma connaissance, auxquelles j'ai donné à lire la biographie de Gemma, en leur insinuant de se placer sous sa protection, m'ont fait part de grâces et de faveurs obtenues ; toutes, après cette lecture, se sont senties attirées vers elle, et, ce qui est préférable, mieux disposées au bien et soulagées dans leurs nécessités. »

« Par une bonne fortune, écrit un professeur distingué de Mondovi, je fis l'acquisition de la Vie de la jeune sainte Gemma ; mais les paroles me manquent pour dire combien et comment j'ai commencé de l'aimer. Ce fut pour moi une révélation ; je lus cette vie en pleurant. J'ai choisi Gemma pour mon avocate ; son souvenir me suit partout, me rend meilleur et me soutient. Un chanoine me dit qu'il ne peut non plus lire cette biographie sans verser des larmes ; et un Père Oratorien de cette ville me charge de vous écrire que Gemma est pour lui un apôtre ; qu'elle est la sainte suscitée de Dieu en nos jours pour réveiller de leur torpeur tant de pauvres prêtres. »

« Je devrais, déclare un autre, vous raconter des faits émouvants. Je me borne à dire que le nom seul de Gemma renferme je ne sais quoi de doux, d'attrayant, de fascinateur, sans compter que la connaissance de cet ange produit dans les cœurs, et surtout dans la jeunesse, des effets admirables. Étant missionnaire, je puis l'attester pour la plus grande gloire de Dieu. »

De Florence, un vénérable père de l'Ordre séraphique m'adresse ces lignes : « Oh ! quelle est aimable cette créature bénie que le ciel nous a donnée, à nous malheureux enfants d'Ève ! Tandis que je baisais et baignais de chaudes larmes son image vénérée, quelques gouttes de consolation sont tombées dans mon âme. Cette sainte extraordinaire m'inspire courage dans le combat de la vie. Oui, je sens que, grâce à elle, j'accepterai sans hésiter, avec le secours divin, n'importe quel sacrifice. À mon avis, le Dieu de miséricorde a voulu offrir aux hommes en Gemma un très parfait modèle de pureté et d'amour, sur lequel ils puissent et doivent avoir les yeux pour la réforme de leurs mœurs. Veuille donc le bon Dieu que toutes les âmes la connaissent et l'aiment tendrement, imitent selon leur pouvoir ses belles et rares vertus, et la prennent pour guide et maîtresse dans la vie intérieure. »

La presse religieuse la Civilta Cattolica, l'Araldo Cattolica de Rome, l'Ancora d'Acqui, l'Unita Cattolica de Florence, l'Osservatore Cattolico de Milan, le Cittadino de Macerata, La Liberta de Naples, le Monitore Ecclesiastico de Rome et tous les autres périodiques italiens ont payé un tribut d'admiration et d'enthousiasme à la séraphique vierge de Lucques. Un seul, à ma connaissance, mal renseigné sans doute, a cru bon de jeter une note discordante dans ce concert d'éloges, par une critique certainement inspirée de l'esprit moderniste ; mais à la suite d'une solennelle protestation partie d'un représentant autorisé du clergé romain, et des journaux catholiques, il a dû se rétracter.

À défaut d'autre preuve de la solide sainteté de Gemma, l'efficacité de son intercession dans la conversion des pécheurs en constituerait une des plus impressionnantes. La vierge-apôtre (5) n'a cessé, durant sa vie, d'implorer avec larmes le salut des âmes dévoyées, qu'elle eût voulu ramener toutes au bercail du bon Maître. Elle s'offrit pour elles comme victime d'expiation et mourut vraiment telle à la fleur de l'âge. Il est naturel que le Seigneur se plaise aujourd'hui à répandre avec profusion, sur les pécheurs recommandés à l'intercession de sa fidèle Servante, les grâces méritées par son héroïque sacrifice et sa vie crucifiée. Voici quelques unes de ces plus récentes conversions dont la liste connue est déjà longue.

Au mois d'octobre 1907, gisait dans un lit d'hôpital de Lucques un malade bien près de perdre la vie du corps après avoir perdu, depuis longtemps déjà, celle de l'âme.

Nul n'ignorait dans la ville son incrédulité, son inconduite et sa haine de la religion catholique. Les sœurs dc l'hôpital essayèrent de lui inspirer des sentiments chrétiens, ne fût-ce que pour remplir le devoir de tout chrétien à l'égard d'un pécheur infortuné sur le point de comparaître au tribunal du souverain Juge ; mais leurs efforts discrets échouèrent, aussi bien que ceux des révérends Pères capucins attachés à l'établissement ; et il fallut bien vite renoncer à lui suggérer la moindre idée religieuse, de peur de voir éclater un scandale, à la faveur des règlements antichrétiens en vigueur dans les hôpitaux de la pauvre Italie.

Cependant, au spectacle dc cette triste fin d'un baptisé, le cœur saignait aux serviteurs et aux servantes de Dieu, lorsqu'il vint à l'un d'entre eux la pensée de recourir au propre curé de la paroisse du malade, monseigneur Benassini. Celui-ci ne tarde pas d'arriver et s'approche du malheureux, malgré les avis contraires des personnes qui avaient assisté, le jour précèdent, à des scènes brutales contre les Pères capucins et les Filles de la Charité. Il lui parle sans détour, prie, supplie, conjure, mais en vain.

« Je n'ai jamais cru, répond le malade avec agitation et fureur, à tous vos épouvantails, et ce Christ dont j'entends parler, je ne sais qui il est. Qu'est-ce que l'âme ? Qu'est-ce que le Paradis ? Qu'est-ce que l'enfer ? Laissez-moi la paix, et que personne ne vienne plus m'ennuyer par de ridicules propos. » Et ce disant, le misérable fait le geste de cracher sur le ministre dc Dieu. Ce dernier se retire découragé. Rentré chez lui, son regard tombe sur un exemplaire de la Vie de Gemma, dont il avait commencé la lecture. À cette seule vue son cœur s'ouvre soudain à l'espérance, il se met à genoux et invoque avec larmes le secours de la chère servante de Dieu ; puis, appelant son chapelain, il lui donne l'ordre dc se rendre sans retard à l'hôpital, en compagnie d'une certaine dame connue du malade il était environ onze heures de la nuit. On obtint difficilement à cette heure tardive l'entrée dc l'établissement, mais enfin la dame fut admise à pénétrer jusqu'auprès du malade. Le chapelain attendait dehors, plein d'anxiété, tandis que monseigneur Benassini priait toujours la séraphique Gemma pour le succès de la charitable mission. L'incrédule obstiné de tout-à-l'heure n'a pas plus tôt aperçu la dame, qu'il réclame spontanément un prêtre, et il se confesse dans les sentiments d'une vive componction rappelant ceux du bon Larron et du fils prodigue de l'Évangile. Le chapelain, ému jusqu'aux larmes, lève sur cette âme une main tremblante, prononce la formule sacrée de l'absolution, et la rend, purifiée, à l'amour de son Sauveur. Puis il court chercher le saint viatique et l'huile sainte de l'Extrême-Onction. Après avoir reçu ces deux autres sacrements le fortuné pécheur entre en agonie et expire paisiblement vers quatre heures du matin, laissant les témoins de ses derniers moments dans l'admiration d'une conversion si extraordinaire et d'une mort si édifiante.

Lorsque l'éditeur de la biographie de Gemma eut en main le récit de cette conversion, il s'empressa de le porter lui-même à un Cardinal très en vue de la curie romaine, dont il connaissait la grande dévotion à la vierge de Lucques, et le zèle pour tout ce qui regarde sa gloire. « Le vénéré Cardinal, m'écrivit-il ensuite, s'est ému à cette lecture, et m'a dit : Vous avez raison ; c'est là un très grand miracle, et l'on n'en saurait souhaiter de plus grand. Assurez l'auteur de la biographie que j'aime toujours cette chère jeune sainte, et que je la prie d'accroître aussi en moi l'amour eucharistique de Jésus et celui de Marie. »

Quelques jours après, Pie X, apprenant ce fait extraordinaire, déclarait avec non moins d'émotion, qu'il voulait recourir aussi, pour obtenir des grâces semblables, à la protection de la chère servante de Dieu.

Il y avait à Rome une famille sans religion ou peu s'en faut, comme il s'en rencontre tant à notre malheureuse époque. La mère, âgée de cinquante-quatre ans, ne pratiquait plus ; les fils vivaient depuis longtemps en païens. Seules, les filles, trois charmantes demoiselles, gardaient à Dieu leur fidélité, et, pleurant sur les ruines morales de leur maison, suppliaient nuit et jour le Seigneur d'avoir pitié des chères âmes égarées. Vainement des personnes respectables s'étaient entremises auprès dc la mère pour la ramener à de meilleurs sentiments ; tout effort paraissait inutile, lorsqu'une fervente religieuse, vivement émue du malheur de cette famille, eut l'inspiration de solliciter la médiation de Gemma. Après plusieurs neuvaines de supplications, assurée du succès, elle va trouver la dame obstinée, lui parle de la séraphique vierge et attendrit son cœur au récit des conversions prodigieuses qu'opéraient ses prière de son vivant.

Bientôt la chrétienne infidèle fond en larmes de repentir, se rend avec la sœur à l'église, se confesse, communie et goûte dans l'intimité de l'âme la suavité de la grâce divine, qu'elle ne connaissait plus depuis longtemps.

Encouragée par une si belle victoire, la zélée religieuse entreprit la conversion des fils avec les mêmes armes dont elle venait d'expérimenter la puissance. « Gemma, disait-elle, changera également leurs dispositions. » La lutte fut vive avec le premier. Après son dernier échec, elle revint se jeter aux pieds de Gemma « Que faisons-nous maintenant, ma sœur, s'écria-t-elle ; resteriez-vous indifférente pour mon pécheur ? Demain, samedi, je veux que vous me le convertissiez. » Le ciel entendit l'ardente prière, et le soir du jour suivant, le jeune homme demandait à se confesser. Il communia le dimanche avec une telle joie spirituelle qu'il déclare aujourd'hui n'en avoir jamais éprouvée de semblable dans sa vie. À son tour, il se fit apôtre et conduisit bientôt un libertin de ses amis aux pieds du prêtre qui lui avait rendu la délicieuse paix de l'âme.

« Reste encore, m'annonce la sour, le dernier frère à convertir. Celui-là ne s'est jamais confessé, ne croit à rien et a une tête de bronze. Je l'ai remis entre les mains de Gemma, qui y Pensera, je n'en doute pas. »

Le jeune Auguste Cassini m'écrit de Zoppolo, province d'Udine : « Au retour du service militaire, qui avait produit en moi des effets désastreux, je m'abandonnai à une vie sans frein et aux pires passions. Les plus horribles péchés s'accumulèrent dans mon âme avec cette effrayante progression dont parle l'Écriture : Abyssus abyssum invocat. Une profonde indifférence religieuse me tenait enchaîné ; mon cœur était de pierre, insensible à tout remords. Malheur à moi, si dans cet état la mort fût venue me surprendre ! Tel j'étais, lorsque le livre de la vie de Gemma tomba entre mes mains. Sa lecture me fit un bien immense. Je retrouvai le goût de la prière avec le don de la foi. Je comprends maintenant l'énorme gravité de mes offenses ; mais je ne perds pas pour cela confiance. Je suis une preuve que si Gemma s'intéressait sur la terre aux malheureux pécheurs, elle ne s'y intéresse pas moins maintenant qu'elle jouit de la félicité des cieux. Nul, - ma propre expérience m'en donne la conviction, - ne sera plus tôt écouté d'elle qu'un pécheur. Mes besoins sont grands, mais ma chère sainte ne m'abandonnera pas. »

Voici un extrait de la lettre d'un jeune prêtre, professeur dans un séminaire d'Autriche. « Lauréat de l'Université, que ne croyais-je pas savoir, tant l'orgueil s'était emparé de moi ! J'avais des idées condamnables même sur la Bonté de Dieu. Je devenais entièrement la proie du modernisme (6). À la simple lecture de la vie de Gemma, qui m'était par hasard tombée entre les mains, je sentis mon esprit renouvelé. Aujourd'hui je me reconnais un ignorant, parce que ce n'est pas la science humaine, mais la science divine qui rend vraiment savant ; et je suis heureux de me sentir dans la disposition de faire le nécessaire pour que le Seigneur me conserve toujours par sa grâce dans mon état actuel. »

Un autre prêtre m'écrit « Enfin, je suis de nouveau à mon Dieu ! Oh ! mon Père, quels ont été les égarements de mon âme depuis l'ordination sacerdotale. Pendant un certain temps, elle subit une grande défaillance qui me fit appréhender une catastrophe. Je ne connaissais plus l'amour de mon Dieu, mais seulement l'attachement aux choses terrestres, aux richesses, aux commodités de la vie. Mais le bon Jésus ne voulut cependant pas m'abandonner. Au bon moment il me fit connaître la vie de Gemma Galgani écrite par votre Révérence. Je ne lus d'abord que la scène - à laquelle vous avez eu la bonne fortune d'assister - de sa lutte avec Jésus pour la conversion d'un pécheur. J'en fus ému, je pleurai sur ces pages et je conçus l'espérance de recevoir aussi par Gemma la grâce du relèvement. Quelques mois après seulement, je lus sa vie entière, et j'éprouvai des sentiments que je ne connaissais plus depuis bien des années. Un mois à peine se passa encore, et dans une fête de la Vierge il m'arriva comme à ce pécheur pour la conversion duquel Gemma avait lutté avec le miséricordieux Jésus. La bonne Mère du ciel avait achevé l'œuvre. Me voici revenu à la vie. Dans l'espace de peu de jours j'ai changé au point de ne plus me reconnaître moi-même. Dans mon ancien état, oh ! comme je craignais la volonté de Dieu, les croix, les tribulations, et par dessus tout l'humiliation, l'obscurité, les privations, la mort. Et maintenant ? que Jésus fasse de moi ce qu'il désire. J'espère et je veux avec son aide accomplir désormais sa très sainte et paternelle volonté.... »

« Ce qu'il m'a le plus coûté de vaincre, c'est l'attachement à l'argent. Oh, mon père, quelle malédiction n'est-ce pas pour l’homme et surtout pour le prêtre ! Si par malheur il vient à se refroidir dans l'amour de Dieu (et avec une telle affection dans le cœur il n'en peut être autrement), sans un miracle de la grâce il ne se relèvera plus. Il vivotera spirituellement, et malheur à lui s'il est d'un tempérament ardent. Il n'évitera pas des chutes fatales qui le conduiront à la perte éternelle, dans laquelle il entraînera un grand nombre d'âmes rachetées par le sang de Jésus. Ah, mon père, comment pourrai-je payer de retour ma céleste bienfaitrice, ma chère Gemma ? C'est mon espérance et comme une certitude qu'avec mon Ange gardien, elle m'assistera toujours, me tiendra toujours uni à mon Jésus, à la très sainte Vierge, et que, grâce à elle, moi aussi je pousserai de mon mieux sur cette terre son cri de reconnaissance et de victoire : Vive Jésus ! »

« Oh ! que la biographie de Gemma se propage surtout parmi les prêtres, et beaucoup d'entre eux iront à Elle, et Elle les conduira à Jésus. Vive Jésus et sa bien-aimée servante Gemma ! »

Encore une lettre, très éloquente et d'une très grande édification : « Dans un élan irrésistible d'amour et de reconnaissance pour le séraphin crucifié, Gemma, je ne sais contenir ma parole ni ma plume. Je voudrais pouvoir vous envoyer mes larmes, le feu qui me gonfle et me brûle ; je voudrais pouvoir vous montrer le prodigieux effet créé en moi par l'émouvante Biographie de Gemma. Je vous remercie, Père, du bien que vous m'avez fait par votre livre. Ma vie était un enfer ; je craignais de m'ètre mépris sur ma vocation, tout, jusqu'aux plus hautes fonctions de mon ministère, engendrait en moi du dégoût : je comprenais qu'avec mon caractère bouillant je ne pouvais plus aller loin.., mon avenir était désespéré ! Oh Père ! Je vous écris avec des larmes ! J'ai lu, et cet Ange de Jésus a brillé à mon esprit, et le paradis est descendu dans mon âme, Ô Jésus de ma Gemma, je vous rends grâces ! »

« Père, père, pardon ! l'idée du suicide avait même parfois troublé ma tête. Et maintenant ? Ô bonheur ! O Jésus, je voudrais, oui, me tuer, mais pour votre amour ; pour vous offrir mon sang et en laver toute ma vie scélérate, et pour vous l'offrir par les mains saintes de mon nouvel Ange gardien, Gemma. Père vénéré, baisez, baisez avec mes lèvres cette tombe bénie et dites à Gemma que je lui rends grâces de toutes mes forces. J'irai à Lucques, je l'ai promis à Gemma, et je me rassasierai de baisers et de larmes sur sa tombe. Je le déclare, ma conversion est une grâce de Gemma ; sa chère image est toujours fixée dans mon esprit et j'y tiens comme à une relique. La paix de Jésus est descendue dans mon cour, mon âme est sereine, mon ministère est pour moi un plaisir. Je sens que, par l'oeuvre de Gemma, moi aussi j'aime Jésus, et j'espère l'aimer à jamais. Gemma m'a arraché à la mort morale où je me débattais dans le désespoir, et m'a soulevé jusqu'à la Grâce de Jésus ! Après Jésus et ma chère Gemma, c'est à vous, Père, que je dois la vie : je vous en remercie tout en larmes. Priez pour moi. »

D'une lettre du R. P. Luigi Fontana, barnabite, j'extrais les lignes suivantes : « J'ai fait placer une image de Gemma sous l'oreiller d'un franc-maçon mourant, qui refusait le prêtre ; c'était le mardi saint. Or, le mercredi, il réclamait de lui-même les sacrements. »

Un jour, se présente au couvent des saints Jean-et-Paul (7) à Rome, un étranger qui me demande nommément. Je me rends au parloir, et, surpris de me trouver en présence d'un inconnu, je manifeste le désir de savoir comment il peut bien me connaître. L'étranger me prie de l'introduire dans une chambre à part, et me dit : « Gemma m'envoie vers vous ; elle m'a réveillé dans l'abîme de péchés où j'étais plongé, en faisant entendre fortement à mes oreilles et plus fortement à mon cœur ces paroles : Pars pour Rome, cherche dans le couvent des saints Jean-et-Paul un certain père Germain, passioniste, et avec lui mets ordre à ta conscience, si tu ne veux pas que Jésus te foudroie. » Puis il se jette à mes pieds, et me dit en pleurant : « Père, confessez-moi. » Profondément ému moi-même, je contenais mal mes larmes. J'entendis sur-le-champ l'accusation du pénitent, et fis descendre par l'absolution la grâce divine dans son âme. Lorsqu'il se fut relevé, heureux comme qui vient d'échapper à la mort, il se jeta à mon cou, me rendit grâces et reprit le chemin de la gare pour retourner dans son pays (8).

Ces quelques exemples suffiront à redonner courage à tant de pauvres mères, d'épouses affligées, de sœurs affectueuses qui voient leurs fils, leurs maris, leurs frères, engagés dans la voie de l'éternelle perdition. Qu'elles recourent avec confiance à l'intercession de la vierge de Lucques. Elle adressera encore à son céleste Époux la prière pressante qu'elle lui répétait tant de fois ici-bas dans ses extases : « Je veux que tous les pécheurs soient sauvés ; sauvez-les moi tous, ô Jésus. »


 

(1) La dernière fois que le Père Germain de saint Stanislas se rendit près de la tombe de Gemma, il trouva le petit monument qui la surmonte, couvert d'inscriptions au crayon, exprimant d'une façon touchante la vénération et l'amour des pélerins pour la servante de Dieu, en même temps qu'une confiance illimitée en son intercession.

(2) Le Père Germain de Saint Stanislas, directeur spirituel de la servante de Dieu, était le Postulateur des Causes des saints de la Congrégation de la Passion.

(3) Mont des Apennins où saint François d'Assise reçut l'impression des stigmates sacrés.

(4) l'auteur de cette traduction a reçu un très grand nombre de lettres semblables, venant de tous les pays de langue française et de lecteurs de toute condition. Voici extrait de la lettre d'un professeur honoraire à une École de médecine de l’État. Son importance n'échappera pas aux critiques : « J'ai lu avec la plus sérieuse attention et l'admiration la plus vive le livre du bon père Germain. L'auteur, avec beaucoup de raison, s'est appliqué à lui donner un caractère de vérité, de précision qui était d'ailleurs nécessaire pour lui assurer l'autorité légitime à laquelle il a droit.... Ce livre si admirable est destiné sans doute à faire un bien immense. »

(5) La mission d'apostolat de la vierge de Lucques a été pleinement comprise par un pieux et savant jésuite le Père Petazzi, qui, pour en faire ressortir la très grande importance, n'a pas hésite à mettre en parallèle Gemma Galgani et l'apôtre des Indes dans son très bel opuscule. La mistica Sete nel cuore d'un Apostolo e d'una Virgine. - Milano, Premiata Tip. Pont, éd. Arc, S. Giuseppe. - Via S. Calocero, 9.

(6) Après cet aveu du jeune professeur on ne lira pas sans intérêt le passage suivant d'une lettre adressée à l'auteur de cette traduction par un religieux rédemptoriste : « Oh ! que cette vie m'a fait du bien que de douces larmes j’ai versées en la parcourant ! Daigne le bon Maître la répandre à profusion dans notre chère et pauvre France, et partout. Je ne connais pas de plus belle réfutation des stupides erreurs du modernisme. Cette vie est certainement appelée à faire un bien incalculable. »

(7) Maison généralice des Pères Passionistes.

(8) Le Père Germain eût pu raconter un très grand nombre de faits semblables. « Aujourd'hui, dit-il à un religieux quelques jours avant de mourir, aujourd'hui un pécheur, envoyé par Gemma, m’a tenu au confessionnal trois heures de suite » ; et il ajoutait : « Si je ne m’en vais vite de Rome, je ne saurai comment y tenir. Depuis déjà quelque temps Gemma m'envoie souvent de ces pécheurs : et vous ne pourriez croire, Père, les larmes que je verse sous les émotions que j'éprouve ; et comme je me sens mal après avoir entendu de semblables confessions ! »