Vous êtes sur le site de : livres-mystiques.com © |
PRÉLIMINAIRES
------------
OCCASION DE CET ÉCRIT
I. Phénomène nouveau au sein du Judaïsme: un entrainement vers Jérusalem. Les trois causes qui l'ont successivement provoqué. - II. Que penser de ce réveil et, en particulier, du projet des Sionistes? Solution de deux questions préalables pour en déterminer soit l'importance, soit l'inanité.
I
Un phénomène, qui mérite de provoquer l'attention de l'Église et de la société civile, se produit et se développe depuis la dernière moitié du siècle qui vient de finir : c'est une poussée juive vers la Palestine, cette terre appelée par le livre de la Sagesse la plus chère à Dieu (1).
Trois causes ont provoqué cet entraînement des Juifs vers l'ancienne terre de leurs aïeux :
D'abord les mesures de coercition et de précaution prises contre eux par les gouvernements de Russie et de Roumanie, pour arrêter ou limiter leurs excès usuraires et envahisseurs. Exilées de ces deux pays, un grand nombre de familles hébraïques ont tourné alors leurs regards vers la Palestine, relativement voisine du leur, et sont venues lui demander un abri.
La seconde cause a été toute fraternelle et pacifique c'est la fondation des colonies agricoles pour relever le caractère des Juifs palestiniens et les faire sortir de la misère. Un Français, né à Strasbourg, Charles Netter, a été depuis 1870 l'infatigable ouvrier de cette colonisation progressive. « Charles Netter, qui s'occupait avec passion de ces écoles de travail, a voulu démontrer que si les Juifs ne cultivaient plus la terre comme aux temps bibliques, ce dont on leur faisait un grief séculaire, c'est que cette culture leur avait été interdite, et pour en fournir la démonstration la plus évidente il créa cette école agricole en Palestine, c'est-à-dire dans la contrée où ses coreligionnaires étaient les plus malheureux, les plus ignorants et les plus fanatiques (2) . » Ce que Charles Netter avait fait en petit, la famille des Rothschild l'a accompli en grand. Sir Moses Montefiore, un Anglais, a déployé aussi un zèle incessant pour ces colonisations juives. À ces efforts de particuliers n'a pas tardé à se joindre le concours plus puissant de sociétés juives, celui des Amis de Sion, de l'Alliance israélite universelle, des Comités anglais, de la Compagnie d'Odessa, de la Société Ezra de Berlin, etc. Bref, à l'heure qu'il est, Israel, par ses divers établissements, possède en Palestine environ cinquante mille hectares. On peut consulter sur ce sujet un travail fort intéressant publié par le R. P. Lammens dans les Études des Pères de la Compagnie de Jésus (20 novembre 1897), sous ce titre le Sionisme et les colonies juives en Palestine. L'auteur distribue les colonies juives actuelles en Palestine en cinq groupes environs de Jaffa, environs de Jérusalem, Safed et haute-Galilée, district de Caïffa, Hauran et Transjordanie.
Par suite des immigrations volontaires ou forcées, favorisée aussi par l'établissement de toutes ces colonies, la population juive de Palestine atteint aujourd'hui le chiffre d'au moins 75 000 âmes, dont 40 000 à Jérusalem, et 14 000 à Safed (3) .
La troisième cause qui semble devoir accélérer la poussée juive du côté de la Palestine, c'est l'entreprise récente qui, sous le nom de Sionisme, avec le concours de deux cents délégués juifs réunis à Bâle et l'adhésion de plus de cinquante mille coreligionnaires, a projeté de travailler au rachat de la Palestine, pour y créer un État israélite sous la suzeraineté de la Porte. Dans les pages qui vont suivre, il sera parlé avec détails de ces congrès juifs et de l'appréciation qu'il y a lieu de s'en faire.
Actuellement on peut conclure, des diverses causes énumérées, qu'il existe en certains milieux israélites un réveil en faveur d'un recouvrement de la Terre Sainte et de Jérusalem. Il semble qu'à la dispersion dix-neuf fois séculaire veuille succéder un mouvement de retour et de concentration à l'ombre des collines de Sion.
II
Que penser de ce réveil et, en particulier, du projet des Sionistes?
Pour en déterminer soit l'importance, soit l'inanité, deux questions demandent à être résolues :
1°) A-t-il été dans les idées des Juifs, depuis la destruction de leur nationalité par les Romains, de rétablir un État juif en Palestine avec Jérusalem pour capitale?
2°) Ce projet exista-t-il, aurait-il chance de réussir, eu égard au plan divin?
De ces deux questions, la première est uniquement historique. C'est à des sources sûres qu'ont été puisés les faits qui seront rapportés ici, ils sont indéniables. Ces faits feront connaître ce qu'a été, à travers les siècles jusqu'à nos jours, la vraie pensée d'Israël par rapport à la Terre promise à Abraham et à ses descendants.
La seconde question est du domaine de Dieu. On peut lui appliquer le raisonnement de Gamaliel par rapport à l'Église, alors que le Sanhédrin de Jérusalem voulait en anéantir les développements : Si ce dessein ou cette œuvre vient des hommes, elle se détruira. Si elle vient de Dieu, vous ne pourrez l'entraver, et vous seriez en danger de combattre contre Dieu même (4) .
En face de la solution que nous donnons d'après la Bible et d'après la Tradition, deux opinions ont surgi dans le cours des âges chrétiens et continuent à s'y maintenir: la première annonce que Jérusalem redeviendra la possession des Juifs et qu'un État juif y sera reconstitué à l'époque et avec l'aide de l'Antéchrist; la seconde croit également qu'un État juif reparaîtra à Jérusalem, mais seulement après la conversion de ce peuple et par une entremise providentielle et divine.
L'une et l'autre opinion ayant été soutenues par des exégètes de valeur, nous les soumettrons, pour être complet dans la question, à un examen approfondi et consciencieux.
(1) « Quæ tibi omnium carior est terra. (Sages., XII, 7.)
(2) Archives israélites, 8 septembre 1898.
(3) Études religieuses, novembre 1897, p. 440, 445, 452.- « On compte officiellement 41 000 fils d'Israël dans la Ville sainte, mais il y a tout lieu de croire que leur nombre dépasse même 60000. (Annales de la Mission de Notre-Dame de Sion en Terre Sainte, décembre 1899.)
(4) Act, des Apôt., V, 38, 39.