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LIVRE TREISIÈME, Le passé figure de lavenir.
Gloire et louange, amour et reconnaissance soient à jamais rendus à Jésus au saint sacrement de lautel, au Père et au Saint-Esprit dans tous les siècles des siècles, Amen.
Le Sauveur Jésus ma tout appris. C'est lui qui a fait connaître à mon intelligence ces vérités admirables de lordre surnaturel qu'elle connaissait si peu; c'est lui qui, par des images, des figures des comparaisons, les a gravées ineffaçables dans mon esprit.
Il ma dit un jour : « Ma fille, quand jétais sur la terre, jaimais à parler en paraboles; je veux aussi vous parler comme cela. »
Or, dans les instructions diverses que ma données le Sauveur, il ma souvent montré combien lAncien Testament était limage du Nouveau; comment laction de Dieu sur le peuple juif était la figure de son action sur les âmes.
Je vais rapporter tout ce qu'il ma dit de cette manière, autant que je pourrai me le rappeler et selon que je saurai mexprimer.
LIVRE TREISIÈME, chapitre 1
Le Sauveur Jésus m'a dit un jour : « Ma fille, il est rapporté dans les saints Livres que Noé envoya une colombe de larche où il sétait enfermé pour ne point mourir dans le déluge, afin de connaître si les eaux avaient baissé, et que la colombe rentra dans larche portant dans son bec une branche dolivier.
« Cette colombe est limage de lâme solitaire. Il n'est point nécessaire, pour trouver la solitude, de se retirer dans les couvents ou dans les cloîtres; on la trouve dans les villages, les cités, et même à la cour des rois; et, de toutes les solitudes, la meilleure et la plus utile est la solitude intérieure. Il est des âmes qui ont besoin de la solitude extérieure pour parvenir à lintérieure; mais il en est dautres qui se trouvent aussi solitaires au milieu du plus grand tumulte, du plus grand mouvement, que dans la profondeur dun désert. Lâme solitaire fait ses délices de la solitude, car elle y trouve Dieu, et Dieu lui suffit; elle sy unit à Dieu, et cette union lui suffit, rien ne ly sépare de Dieu, et cette tranquillité est le seul objet qu'elle désire. Vivre pour Dieu, souffrir pour Dieu, mourir pour Dieu et se reposer en lui, voilà toute lambition de cette âme.
« Elle est simple et innocente comme une colombe, elle laisse son cur tout ouvert à Dieu, elle le lui donne tout entier. Elle est timide et craintive comme une colombe, et cette crainte la rend sage, lui donne la victoire sur ses ennemis, parce qu'elle ne sexpose pas aux dangers. Elle craint le monde; elle nose y poser ses pieds; elle entre dans sa solitude, portant lolivier de sa victoire sur le monde, sur ses ennemis, sur elle-même, et goûte à longs traits les douceurs suaves de lamour de Dieu.
« Les mondains ne comprennent point les délices de la solitude et ressemblent au corbeau envoyé de larche et qui ne revient pas. La solitude est plus qu'un mystère pour eux; elle est un objet dennui, et ils dépensent dans le tumulte et les agitations de la terre leurs années et leur vie.
« Il y en a qui ont des yeux et ne voient point, des oreilles et nentendent point, des mains et ne touchent point, des pieds et ne marchent point, des narines et ne sentent point, une bouche et ne parlent point. Mais lâme solitaire, comme la maison dIsraël, a espéré dans le Seigneur; il est son appui et sa protection. L'âme solitaire, comme la maison dAaron, a espéré dans le Seigneur; il est son appui et sa protection. L'âme solitaire, comme ceux qui craignent le Seigneur, a espéré dans le Seigneur; il est son appui et sa protection.
« Aussi Dieu bénit l'âme solitaire, l'âme retirée en elle-même, comme il a béni la maison dIsraël, la maison dAaron et tous ceux qui craignent le Seigneur, grands et petits.
« Que le nombre des âmes solitaires et des âmes saintes croisse et se multiplie, afin que le nom du Très-Haut soit glorifié dans Sion et exalté dans Jérusalem. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 2
Le Sauveur Jésus me dit un jour : « La fille de Pharaon étant venue se baigner dans le Nil, aperçut, exposé sur leau, un enfant si beau, qu'elle le prit et le fit élever à la cour de son père. Cet enfant grandit, devint un homme fort et vigoureux et délivra les enfants de Jacob, ses frères, de la servitude des Pharaons. Pour quitter lÉgypte, il dut traverser la mer avec le peuple qu'il conduisait. Il étendit sa baguette sur les eaux, et elles sarrêtèrent pour laisser un passage aux Israélites. Quand tous eurent atteint le bord, il étendit de nouveau sa baquette et les eaux reprirent leur cours, ensevelissant toute larmée des Égyptiens qui sétaient mis à la poursuite des Israélites.
« La fille de Pharaon qui va se baigner dans le Nil est limage des pécheurs convertis, qui, venant se baigner dans les eaux salutaires de la pénitence, y trouvent la charité qui est plus belle de beaucoup que lenfant exposé.
« Le pécheur converti prend la charité, la place dans son cur, au milieu de ses passions; il lélève, il la fait croître et grandir, il la défend contre elles, comme la fille de Pharaon défendait son protégé contre les Égyptiens qui se trouvaient à la cour de son père. La charité croît, se fortifie, et délivrant l'âme de ses passions, elle la tire de lÉgypte, figure du monde, pour lui faire embrasser la vie religieuse; ou bien de la vie de dissipation et de péchés, pour la mener au désert, c'est-à-dire pour la faire vivre d'une vie tout intérieure et retirée en Dieu. Mais, pour arriver au désert, il faut traverser la mer Rouge, image de la mortification. L'homme alors sarme de la croix, et le passage de cette mer devient facile et aisé.
« Quand l'âme se trouve ainsi délivrée; quand elle a atteint le sol de la terre de sûreté, elle étend de nouveau la croix avec reconnaissance pour rapporter tout à Dieu; et les passions, les tentations, et Satan lui-même se trouvent désormais sans force ni puissance contre cette âme qui poursuit son chemin vers la terre promise, le ciel. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 3
Un autre jour le Sauveur Jésus m'a ainsi parlé : « Ma fille, les Israélites se trouvant dans le désert, sans nourriture, commencèrent à murmurer contre Dieu et contre Moïse, qui les avaient retirés de la servitude dÉgypte. Moïse essaya de calmer le peuple et pria le Seigneur, et Dieu envoya aux Israélites, malgré leur indignité, la manne pour les nourrir.
« Ne reconnaissez-vous point là, ma fille, la dégradation et lingratitude de l'homme? Ne voyez-vous point là limage dune âme convertie, qui a embrassée la vie intérieure? Dieu, pour léprouver, la prive de ses douceurs et de ses consolations, et cette âme simpatiente, murmure et regrette les consolations du monde auxquelles elle a renoncé, comme les Israélites regrettaient les oignons dÉgypte.
« Que ceux qui sont dans laffliction ou dans les épreuves imitent plutôt la conduite de Moïse. Quils mettent en Dieu leur confiance; qu'ils espèrent tout de lui et il leur enverra toutes sortes de biens; il les comblera de tous ses bienfaits, et la grâce coulera sur eux comme une manne céleste qui leur donnera force, courage et vigueur pour traverser le désert de la vie. »
En une autre circonstance, le Sauveur Jésus me dit : « Ma fille, pendant que Moïse recevait de Dieu les lois qui devaient régir son peuple, les Israélites firent un veau dor et ladorèrent. Moise, descendant de la montagne, brisa ce veau dor avec indignation.
« Quelle folie, quelle ingratitude et quel aveuglement dans les Israélites en agissant ainsi! Ainsi agissent les orgueilleux vis-à-vis de Dieu. Ils aiment à être élevés, à être honorés et glorifiés; ils se complaisent en eux-mêmes, et loin de rapporter à Dieu le bien qui est en eux ils se lattribuent comme sils en étaient les auteurs véritables. Agir comme cela, c'est dérober à Dieu lhonneur qui lui est dû.
« Je viendrai comme Moïse briser ces ingrats, ces aveugles et ces orgueilleux, et ils ne se relèveront point.
« Ma fille, fuyez lorgueil, les honneurs et lestime des hommes; ne cherchez que lhumilité et loubli, et vous ne perdrez point la gloire seule véritable, qui consiste dans la vue, la possession et lamour de Dieu.
LIVRE TREISIÈME, chapitre 4
« Ma fille, me dit un jour le Sauveur Jésus, Josué succéda à Moïse, et fut placé par Jéhovah à la tête du peuple juif, qu'il introduisit dans la terre promise. Or, Moïse et Josué peuvent servir de modèles à tous ceux qui sont chargés de la conduite temporelle ou spirituelle des peuples.
« Ils sont les modèles des rois et de tous ceux qui sont établis sur la terre pour maintenir la justice dans la société. Quelle sagesse et quel désintéressement en eux! Leur désintéressement était le fondement inébranlable de leur sagesse. Que de potentats, que de princes, que de puissants, que de juges marqués du sceau de la folie à cause de leur cupidité! Cupidité de lor et de largent, cupidité de leurs aises et de leurs plaisirs, cupidité de leurs passions et de leurs vices. Malheur à ces potentats, à ces rois, malheur à ces princes, malheur à ces puissants, malheur à ces juges! Ils sont établis pour faire régner la justice de Dieu sur la terre, et par eux linjustice règne partout. Ils oppriment la veuve et lorphelin, le faible et linnocent.
« En vérité, je vous le dis, ces hommes sont fous; aussi au lieu de ramener les peuples à Dieu, ils les enchaînent pour les rendre tributaires de Satan. Qu'ils mettent la main sur leur conscience, qu'ils sinterrogent eux-mêmes et qu'ils répondent à celui qui leur demande à chaque instant du jour : Faites-vous régner la justice parmi vos peuples? Si vous voyez linjustice, la détruisez-vous selon votre pouvoir ou bien ne cherchez-vous pas à laugmenter? Un jour leur conscience sélèvera contre eux avec la voix de tous ceux qu'ils ont opprimés.
« Les rois devraient avoir une seule vue, une seule idée, celle de soutenir parmi leurs peuples lordre et la justice; or, cet ordre et cette justice ne peuvent exister, ni être soutenus que par la conformité à lordre souverain, à la justice éternelle, Dieu. Le Seigneur a tracé aux princes et aux rois ses commandements, comme il les a donnés à Moïse et à Josué. Sils les font observer comme eux, ils rendront leurs peuples heureux et feront couler dans tout leur empire le lait et le miel en abondance, c'est-à-dire que Dieu bénira le roi et les sujets, et les comblera de biens, comme les Israélites dans la terre promise. Les bons rois font les bons peuples, et les pervers les pervertissent.
« Moïse et Josué sont encore les modèles de ceux qui sont chargés de la conduite spirituelle des âmes. Ils avaient à gouverner et à maintenir un peuple grossier, difficile et opiniâtre, et tous leurs actes sont empreints néanmoins de sagesse, de douceur et de charité. Quand le zèle et lintérêt de la gloire de Dieu les obligeaient à user de sévérité, ce nétait point par caprice ni par un mouvement de leur volonté propre, mais toujours selon lesprit de Dieu, afin de rappeler les coupables à une sincère pénitence et de faire sur le reste du peuple une salutaire impression. Enfin, ils sinterposaient entre Dieu et le peuple pour fléchir la colère du Tout-Puissant par leurs prières et leurs larmes.
« Ainsi doivent faire les directeurs des âmes, en enseignant, en exhortant, en reprenant, en corrigeant, en punissant toujours avec sagesse, et surtout en priant beaucoup pour eux qu'ils dirigent, afin de fléchir la colère divine.
« Sils font comme cela, Dieu les récompensera, quand même ils auraient obtenu peu de succès : par Dieu récompense toujours la bonne volonté et ne demande point le succès pour couronner ses serviteurs.
LIVRE TREISIÈME, chapitre 5
Voici ce que ma dit un jour le Sauveur Jésus : « Après la mort de Moïse et de Josué Dieu suscita des chefs à son peuple pour le délivrer de loppression de ses ennemis.
« Jabin, roi de Chanaan, voulant opprimer les Israélites, Dieu donna pour chef à son peuple une femme nommée Débora, et cette femme gouverna avec empire ceux que Moïse avait eu tant de peine à contenir. Elle se mit à leur tête et marcha contre les Chananéens quelle mit en déroute. Sisara, commandant des troupes chananéennes, prit la fuite et se retira sous la tente dHaber, ami de Jabin, où il sendormit. Jahel, femme dHaber, profita du sommeil de Sisara pour lui donner la mort en enfonçant un clou dans sa tête. Ainsi, par le ministère de deux femmes, Dieu délivra son peuple des Chananéens.
« Que de leçons admirables vous pouvez tirer naturellement de ce fait rapporté par les saints Livres! Ne voyez-vous point comment Dieu se sert des instruments les plus vils et les plus faibles en apparence pour opérer des prodiges? C'est une femme qu'il envoie à la tête de quelques hommes pour combattre un peuple puissant. C'est une femme qu'il donne aux Israélites pour leur assurer la liberté. C'est une femme aussi qui met à mort le chef de leurs ennemis.
« Ma fille, Dieu, par cet exemple, nôte-t-il point aux faibles tout faux prétexte pour excuser leur faiblesse, et ne condamne-t-il point les plus forts qui osent copter sur eux-mêmes quand il suffit de si peu de chose pour les renverser à jamais?
« Que les faibles espèrent en Dieu, ils pourront tout par Celui qui est et qui veut être leur force.
« Que les puissants cessent despérer en leur puissance, et sils se reposent sur elle, qu'ils s'y reposent non comme possédant cette puissance par ex-mêmes, mais comme layant reçue de Dieu.
« Si vous êtes faible, ma fille, venez à moi, je serai votre force. Si vos sentez la force en vous, confiez-la moi, elle sera en bonnes mains et nul ne pourra vous la ravir.
LIVRE TREISIÈME, chapitre 6
Voici encore ce que ma dit le Sauveur Jésus :
« Dieu ayant choisi Gédéon pour délivrer son peuple, lui envoya un ange pour lui intimer ses ordres. Gédéon se défiant de lui-même dit à lange : Donnez-moi un signe auquel je reconnaîtrai la mission que vous me donnez au nom du Dieu dIsraël. Laissez-moi offrir un sacrifice à Dieu, je retourne vers vous. Gédéon rentra dans sa maison et apporta près de l'ange la chair dun chevreau et des pains azymes. Lange lui dit alors : Mettez sur cette pierre ce que vous venez dapporter. Gédéon ayant obéi, l'ange toucha avec lextrémité de sa baguette le sacrifice de Gédéon et le feu sortit de la pierre qui portant loffrande; tout fut consumé et l'ange disparut.
« La crainte de Gédéon, ma fille, figure ces âmes pusillanimes qui sont tout étonnées des grâces que Dieu leur accorde, et qui semblent ne savoir que devenir après un tel bienfait.
« Mais il y avait encore plus de prudence et de sagesse que de crainte dans la conduite de Gédéon, qui voulait sassurer de la volonté bien expresse de Dieu. Grande et admirable leçon pour ceux qui Dieu appelle à diriger et à commander autrui! Il ne faut point ambitionner le commandement ni lautorité. Il ne faut le prendre et laccepter quautant qu'on se voit appelé véritablement de Dieu.
« Ce n'est pas à dire pour cela qu'il faille demander à Dieu un miracle pour connaître sa volonté; ce serait de la présomption.
« Il suffit davoir une certitude morale de cet appel de Dieu par les circonstances qui se présentent, et par la vue claire et nette qu'on na rien fait soi-même pour obtenir lautorité et le commandement.
« Alors on sera béni par le Très-Haut, pourvu quon imite la conduite de Gédéon, en immolant à Dieu toutes les passions de lâme, toutes les attaches coupables et criminelles, en les consumant par le feu brûlant de la croix, et répandant sur elles les larmes de la pénitence et du repentir. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 7
Le Sauveur Jésus mavait parlé un jour de la communion indigne. Il ajouta : « Ma fille, ceux qui me reçoivent indignement imitent les Philistins, qui sétant emparés de larche dalliance la placèrent dans leur temple près de lidole de Dagon. Oui, ma fille, on me place non seulement près dune idole, mais encore près de Satan.
« Qui pourra comprendre lénormité de ce crime et les châtiments qu'il attire sur celui qui le commet?
« Vous savez, ma fille, que je suis réellement présent dans la sainte hostie ave ma divinité et mon humanité, avec toutes mes grâces et tous mes mérite. Or, je vous le dis en vérité, le crime de celui qui prendrait une hostie consacrée pour la fouler aux pieds ou la couvrir dinjures serait inférieur au crime de celui qui me reçoit dans un cur impur et souillé. Quelle témérité, quelle insolence, quelle audace!
« Oui, ma fille, la communion indigne est le plus grand de tous les crimes; tous les autres ne sont qu'une attaque à la loi de Dieu; celui-ci est une attaque contre Dieu lui-même.
« Communier indignement, c'est me recevoir pour me couvrir dignominie, dinjures et daffronts; c'est mappeler pour être témoin dune apostasie contre ma divinité; c'est prendre mon sang et signer avec ce sang lacte de renoncement à ma loi, à ma croyance, à mes mérites, à ma passion, à ma mort.
« La communion indigne est, par sa nature, un acte plus coupable que celui des Juifs qui me crucifièrent; les Juifs, en effet, ne me devaient point autant damour que celui qui communie indignement; car je suis pour lui constamment dans le tabernacle; je suis là à lattendre pour être sa nourriture, sa vie, sa force et sa vigueur; je suis là comme son Dieu, son frère et son ami, et il vient abuser de mon amour, abuser de mon humiliation, abuser de ma bonté. Malheur à lui!
« Oui, malheur à lui! Quelles peines ne mérite pas, en effet, un crime si abominable? Ma fille, autant une communion bonne, fervente et sainte donne à l'âme de grâces et de bénédiction, autant une communion indigne et sacrilège attire sur elle la malédiction et la colère de Dieu.
LIVRE TREISIÈME, chapitre 8
Je faisais un jour une prière, jentendis le Sauveur Jésus me dire en mon cur : « Saül mérita par sa désobéissance la malédiction de Dieu, qui donna le trône dIsraël à un petit berger nommé David. Saül se voyant abandonné de Dieu et de son peuple, plein de fureur contre David, cherche à le faire mourir, mais il ne peut y parvenir; le Seigneur Dieu veillait sur David. Celui-ci connaissait les desseins de son ennemi; néanmoins, au lieu de se venger de ses persécutions, comme il en aurait trouvé mille occasions, il ne lui fit jamais que du bien.
« Saül, ma fille, est limage du pécheur, et David, du juste persécuté par le pécheur.
« Le pécheur est un roi déchu de son trône, qui a perdu sa couronne, sa puissance et son autorité sur lui-même. Il est possédé par le démon qui le torture sans fin, et, pour avoir un moment de repos, il est obligé de regarder malgré lui les actions du juste qui arrêtent son impulsion vers le mal, comme les sons de la harpe de David arrêtaient le trouble du roi Saül.
« Néanmoins le pécheur, jaloux de la tranquillité, du bonheur et du calme du juste, le persécute par ses calomnies, ses médisances, ses injures, son mépris, cherchant à labaisser, à lopprimer, à lanéantir sil le pouvait. Que fait le juste? Il imite David; il noppose point la force à la force, la calomnie à la calomnie, la médisance à la médisance, linjure à linjure, le mépris au mépris. Il souffre avec patience les persécutions, il cède et ne se venge point.
« C'est ainsi que doivent agir les pauvres, les ignorants, ceux qui sont faibles. Dieu les retirera un jour de leur faiblesse, de leur petitesse, de leur pauvreté; il les prendra comme le berger, fils dIsaï, pour les établir sur le trône magnifique de la sainteté que la grâce recouvrira du plus bel éclat, et les asseoir plus tard sur un trône dans le ciel.
« Cest ainsi que doivent agir tous eux qui souffrent persécution pour la justice. Ils recevront la bénédiction de Dieu dans le temps et dans léternité. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 9
Le Sauveur Jésus me dit un autre jour : « David, transporté de joie, dansa devant larche du Seigneur, et fut traité dinsensé par son épouse elle-même.
« Cest comme cela que les âmes justes, pures et saintes sont transportées de joie et marchent pleines dallégresse devant le Seigneur. Elles ne cherchent point la joie ni dans les festins, ni dans les spectacles, ni dans les réjouissances, ni dans les plaisirs du monde; elles la trouvent dans la retraite au pied des autels.
« Le monde sétonne de les voir si joyeuses et ne comprend point comment loin de ses fêtes elles peuvent ainsi se réjouir. Le monde les traite dinsensées; et cependant, ma fille, je vous le déclare, la joie véritable nest pas parmi les mondains, elle se trouve parmi les justes et les saints. Les peines, les tribulations, la souffrance, rien nest capable de leur enlever la paix du coeur; et leur joie demeure, parce qu'elle repose sur un fondement solide, la vertu. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 10
Le Sauveur Jésus me dit un jour : « Ma fille, le roi Salomon ayant fait bâtir à Dieu un temple magnifique, y plaça larche dalliance, et Dieu témoigna dune manière sensible qu'il y habitait. C'est pourquoi on y offrit de nombreuses victimes.
« Ce temple est limage de l'âme que tout homme tâche dorner et dembellir selon ses moyens, en la purifiant de toute attache et de toute affection au péché, pour y placer la véritable arche dalliance qui est le Fils de Dieu fait homme, dans lEucharistie. Je préfère un cur pur à des tabernacles de pierre ou de bois doré, jy établis ma demeure avec plaisir; et Dieu, mon Père, manifeste dans ce cur sa présence et la mienne, car il est partout où je suis, par les pensées, les désirs et les uvres de celui en qui nous habitons. Aussi, que de sacrifices offerts à mon Père par celui qui nous reçoit et en qui nous habitons; sacrifices du cur, sacrifices de la volonté, sacrifices des passions, sacrifices de lamour-propre. C'est une victime qui simmole sans cesse.
« Quelle beauté dans cette âme! Elle surpasse de beaucoup celle du temple de Salomon, et il doit en être ainsi. De quelle honte ne seront pas couverts un jour ceux qui verront la différence de leurs sentiments davec ceux des Juifs? Ceux-ci les couvriront de confusion et se révolteront contre eux au dernier jour.
« Recevez-moi souvent et daprès le conseil de votre directeur. Je serai en vous larche de lalliance véritable entre vous et mon Père, et rien ne brisera cette alliance qui durera à jamais.
LIVRE TREISIÈME, chapitre 11
Il ma dit encore : « Les Madianites étaient les ennemis du peuple de Dieu; ils ravageaient et désolaient leur terres. Ils sont limage des passions qui sont comme lennemi de l'homme. Quand Dieu par le baptême fait entrer l'âme dans la véritable terre promise, en éloignant le péché et lui donnant la grâce, il néloigne pas à ce point les passions et linclination au mal que l'homme nait plus rien à opérer. Non, l'homme doit toujours demeurer uni à Dieu.
« Sil se révolte, Dieu le livre encore aux Madianites, c'est-à-dire aux passions, aux mouvements déréglés, à lentraînement au mal, à ses péchés. Ce nest quà lheure du repentir et de la contrition que Dieu le délivre, comme il délivrait les Juifs alors qu'ils revenaient à lui. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 12
Une autre fois il me parla ainsi : « Ma fille, les Juifs captifs à Babylone soupiraient sans cesse vers Jérusalem, leur patrie, désirant se voir encore réunis dans le temple du Seigneur. C'est ainsi qu'ils se préservèrent de lidolâtrie des Babyloniens.
« Il en est de même de lâme chrétienne. L'homme dès le commencement était chez lui, parce qu'il navait point péché; mais sa révolte léloigna de létat de grâce pour le reléguer dans la Babylone du péché, dans la disgrâce de Dieu, léloignement du ciel. Je suis venu le délivrer, et à la vue des effets et des malheurs du péché, à la vue de ce qu'il possède par la grâce et de ce qui lattend au ciel, il sécrie : Assis sur les bords du fleuve de Babylone, je versais des pleurs au souvenir de Sion. O sainte Jérusalem, si jamais je toublie, que ma main droite se sèche, que ma langue sattache à mon palais! Puis, considérant le monde et ses abominations, elle lui dit en personnifiant tous ses crimes : Heureux celui qui prendra tes enfants et les brisera contre la pierre!
« Ma fille, la grâce, la vie de la garce est la vie de la liberté; le péché est lesclavage de lâme. Soyez libre, et vous jouirez un jour de la vie dans le ciel, votre patrie. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 13
Voici ce que me dit un jour le Sauveur Jésus : « La gloire et la grandeur éblouirent tellement Nabuchodonosor qu'il simagina que sa puissance était au dessus de toute puissance. Dieu, pour le punir, le réduisit non seulement au dernier rang parmi ses sujets, mais encore au rang des animaux sans raison, lui donnant le même toit, les mêmes vêtements et la même nourriture.
« Il est des hommes qui ne poussent point lorgueil et la fatuité comme ce prince jusquà se faire offrir de lencens, mais ils recueillent précieusement tous les honneurs, toutes les louanges qui leur sont adressées, et au lieu de tout rapporter à Dieu, ils rapportent tout à eux-mêmes. Tout est orgueil en eux, dans leur démarche, dans leurs regards, dans leurs paroles, dans leurs pensées et leurs actions. Dieu sélèvera contre eux et les réduira, non plus au rang des animaux dénués dintelligence, mais au rang des démons.
« Si vous voulez toujours avoir part aux bienfaits de Dieu, vivez dans lhumilité, et les bienfaits qu'il vous accordera dans le temps ne seront que lavant-goût des biens qu'il vous donnera dans léternité. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 14
Un autre jour le Sauveur Jésus me parla ainsi : « Ma fille, le roi Assuérus ayant résolu de perdre la nation juive, Mardochée conseilla à Esther, sa nièce et lépouse dAssuérus, de demander grâce pour le peuple juif. Elle se présenta devant le roi, et, saisie de frayeur, elle tomba évanouie. Le roi lui fit aussitôt prodiguer des soins; Esther reprit ses sens et retomba de nouveau sans connaissance. Le roi, ému de compassion, lui promit de lui accorder tout ce qu'elle demanderait. C'est ainsi quEsther put sauver son peuple.
« Ma fille, je vous le dis en vérité, il est quelquefois assez dune âme qui se présente devant Dieu dans la crainte et le tremblement, et qui lui adresse ses supplications, pour arrêter son bras vengeur déjà levé contre une nation tout entière.
« Priez, ma fille, priez beaucoup pour la France : le nombre de ses iniquités saccroît de jour en jour; priez pour elle, et désarmez le courroux de mon Père. Joignez-vous aux âmes pieuses et saintes qui lui adressent leurs incessantes supplications. Si Dieu veille sur la France et la protège malgré ses iniquités, ce n'est quen vue des prières et des supplications nombreuses qui lui sont adressées, et qui montent jusquà lui pour le fléchir. »
LIVRE TREISIÈME, chapitre 15
C'est ainsi que le Sauveur Jésus a voulu minstruire, tantôt par des exemples, tantôt par des figures, des images, tantôt enfin par la vue claire et nette de ce qu'il mavait appris ou de ce qu'il voulait lui-même menseigner.
« Jai tâché de tout exprimer selon que je le trouvais gravé dans mon cur et ma mémoire. Il est bien des instructions, probablement, qu'il ma adressées et que je nai point consignées dans ces cahiers. Jai tâché dy supplier par les lettres que jai écrites à mon directeur, qui ne sont autre chose que la suite des instructions renfermées dans mes cahiers, ou bien des instructions que jécrivais le jour même où je les avais reçues.
Jai écrit selon que mon esprit me le rappelait. Ce que je sais, c'est que le Sauveur ma promis dès le commencement de minstruire de la véritable science, de la science du salut. Il devrait donc y avoir, dans ce que jai écrit par obéissance à mon directeur et aussi par obéissance à mon Sauveur, de quoi satisfaire les désirs de toute intelligence appliquée à son salut, de toute âme qui tend vers Dieu. Il sera facile de suppléer à ce qui manque; il sera facile surtout de disposer mes écrits de manière à ce qu'ils puissent être livrées aux fidèles et qu'ils en retirent un grand fruit.
C'est là la promesse que me fit le Sauveur Jésus, alors qu'il mentretint à peu près en ces termes : « Ma fille, c'est moi-même qui ai inspiré à votre directeur de vous faire écrire ce que vous éprouviez et ce que vous entendiez. Je vous ordonne de lui obéir comme vous lavez fait jusquà ce jour. Je désire que les instructions que je vous ai données soient livrées plus tard aux âmes qui auront de la dévotion à mon Cur sacré. Conservez-les toutes précieusement. Je veux me servir de vous comme dun instrument, et je rendrai votre nom illustre parmi les dévots au sacrement de mon amour. Néanmoins, ne vous enorgueillissez point de mes faveurs. Par vous-même vous ne savez rien; vous tenez tout de moi, de quoi vous glorifieriez-vous? Je vous défends de jamais parler de ce que vous avez éprouvé à dautres quà votre directeur et à ceux qui seront préposés à la direction de votre âme. Livrez et abandonnez vos manuscrits à celui qui vos dirige en ce moment. C'est lui qui les conservera jusquà lheure que jai déterminée, et que je lui ferai connaître, pour les livrer aux âmes qui me sont attachées comme à leur seul bien véritable ici-bas. »
Jai fait selon les commandements que jai reçus. Je lai fait, et je nai eu dautre désir en le faisant que de faire la volonté de Dieu. Jai eu aussi un autre désir, celui de rendre, autant que cela pouvait dépendre de moi, gloire, honneur et louange à jamais à Jésus, au saint sacrement de son amour. Amen.