LA GENÈSE UNIVERSELLE

IV. - LA LUMIÈRE






     La connaissance des astres a été à l'origine de toutes les religions, non point à la façon dont Dupuis et ses imitateurs l'entendent,mais à un point de vue beaucoup plus élevé et synthétique.

     Ceux qui ont scruté les mystères astraux ont fouillé, pour ainsi dire, les entrailles du gouffre d'où jaillirent les terres et la lumière astrale les éclaira. Sans pouvoir parvenir jusqu'aux régions de l'Amour où flamboie la seule Lumière de Gloire, ils ont entrevu quelques rayons de cette seule vraie Lumière filtrant à travers le symbolique Voile du Temple, cette Lumière qui n'est pas celle du chandelier à sept branches, mais à laquelle ce lumineux septénaire emprunte ses reflets.

     Leurs connaissances étaient cependant assez hautes pour que les Mages (les vrais), pussent s'élever jusqu'à la perception de la venue du Rédempteur en ce monde.

     C'est que la base de l'astrologie est réelle et que l'influence des astres s'exerce constamment sur la création. Considérée dans les infiniment grands ou dans les infiniment petits, cette création est toujours identique en essence, toujours diverse en apparences.

     Dans le principe, à l'instant où la Lumière jaillit de l'Esprit, la création apparaît comme la brillante enveloppe que revêt la nature éternelle. Mais cette Lumière divine n'est pas notre lumière physique, elle n'est pas davantage notre lumière astrale. Pour qu'elle devienne lumière « astrale », il faut que naisse un univers soumisà la fatalité, à la limitation, à la décrépitude.

     Certes, la lumière astrale est bien l'agent universel des transformations qui affectent notre monde, mais c'est la seule Lumière de Gloire qui est l'agent universel des transformations par lesquelles s'effectue notre rédemption. Les soleils physiques sont en contact (imperceptible mais réel) par leur lumière physique, les soleils astraux se relient par leur lumière astrale et, par elle, communiquent d'un bout du monde à l'autre, les soleils spirituels communient par leur lumière spirituelle dont la source est dans le monde divin.

     La connaissance de la lumière physique est la base de toute science physique. La connaissance de la lumière astrale est la base de toute science occulte, mais c'est par la réception de la lumière spirituelle qu'il nous est donné gratuitement d'acquérir la science spirituelle.

     Les occultistes ont magnifiquement décrit la lumière astrale, ce médiateur entre les idées et les formes ; ils nous l'ont décrite comme l'instrument docile, obéissant aux impulsions de l'âme en quête de l'inconnu ; ils nous ont montré comment elle est le véhicule des vices et des vertus, du bonheur et du malheur, et comment elle donne aux trois règnes de la nature leurs caractéristiques et leurs propriétés particulières.

     En ce monde vicié par la chute d'Adam, elle déclenche plutôt le mal que le bien et ceux qui y lisent les destins individuels ou collectifs sont hélas des prophètes de malheur...

     Ce n'est pas que les astres soient à considérer comme la cause première des maux qui nous assaillaient, ils ne sont que des agents, des causes secondes et ce n'est pas pour rien que l'on a assimilé à Satan, l'impitoyable justicier, les forces astrales.

     La puissance astrale appartient au domaine de la Colère et, comme les peuples, elle est toujours à la disposition de la stricte justice.

     Instrument de la vie, ou plutôt de l'existence, elle s'attache à tous les centres vivants qu'elle transforme et qui la transforment à leur tour, avant de la faire rayonner sur leurs semblables. Servant de véhicule au bien comme au mal, suivant notre désir interne, elle peut être prise tout à tour comme l'émanation ignée de Satan ou comme le rayonnement lumineux du Saint-Esprit. N'oublions pas, cependant, qu'elle est « de ce monde », alors que le disciple « n'est pas du monde, quoique vivant dans le monde ».

     Il n'existe qu'une seule Lumière, qu'un seul Esprit et qu'un seul Dieu, mais cette Lumière prend pour l'être l'aspect qu'il en sollicite.

     Lorsque l'être vit dans l'Amour, elle lui est vêtement de Gloire, Lorsqu'il vit dans la Colère, elle est un voile ténébreux, un feu dévorant.

     Dans notre système temporel, tout dépend nécessairement de la source de l'Esprit qui nous anime. Ici-bas, l'homme ne peut faire appel qu'à l'Esprit saint ou à l'Esprit impur. La seule chose qui lui soit refusée, c'est de s'alimenter à ces deux sources, de faire un sourire à Dieu et une révérence à Satan, en un mot de concilier. C'est pour choisir que nous sommes ici-bas et toute notre activité volontaire oscille entre ces deux pôles : dire oui ou dire non, accepter ou refuser. Comme nous ne pouvons à la fois dire oui et non, accepter et refuser, notre paresse nous incite à répondre par peut-être aux sollicitations d'En-haut comme à celles d'En-Bas. La lumière astrale, cette lumière « mitoyenne » qui ne nous demande pas de dire oui ou non, sera donc le champ d'action de ceux qui ne savent ni dire non à la vraie Lumière, ni dire oui à la flamme dévorante de l'Abîme. Mais parce qu'elle est mitoyenne, les forces du Bien et celles du mal s'y entrechoquent sans cesse, créant de terribles remous et forçant à l'action les tièdes que nous sommes. Bonne ou mauvaise, elle est l'action et comme telle porte en elle le sceau de la Vie. Car agir bien ou mal c'est toujours agir. Nous appelons « coups du Destin. » les conséquences de l'action mauvaise, comme la brebis rebelle appelle peut-être « coups du Destin » les morsures du chien qui l'empêche de s'égarer.

     La lumière astrale, âme de la terre, pervertie dans son principe par la révolte d'Adam, était en fait sursaturée de reflets impurs au début de notre ère. Pendant trop de siècles les civilisations, matérialistes de l'Assyrie et les cultes sanguinaires qui avaient dominé sur notre monde l'avaient corrompue. Lors de la venue du Verbe, les reflets impurs de la débauche romaine l'avaient peuplée de vampires. Que fit le Christ ? Pour préserver ses disciples de la mortelle attirance de l'abîme, il les détourna de cette lumière impure, appelant leur attention sur la seule Lumière intérieure par laquelle - au moyen de la Grâce et de la Foi - ils pouvaient communier ensemble et résister aux courants de putréfaction.

     Alors que notre vie animale s'alimente des émanations de la lumière astrale, notre vie spirituelle doit s'alimenter de la pure Lumière spirituelle. Enveloppés de toutes parts par la lumière astrale, nous n'avons pour puiser hors de cette sphère délétère que le chemin étroit frayé par le Verbe, lors de son incarnation. C'est seulement lorsque nous avons retrouvé le divin contact, lorsque la Lumière spirituelle se déverse dans notre cœur que nous pouvons régénérer notre propre lumière astrale, notre fantôme sidéral, et purifier ainsi, peu à peu notre ambiance et celle de nos frères, cette âme de la terre, qui doit être, elle aussi, transformée par nous - ayant été corrompue par nous.

     Telle est notre participation au plan de rédemption universelle.

     Cette régénération achevée, la Lumière de Gloire, celle qui brilla jadis sur le Thabor, inondera librement le libre univers et les astres seront les portes lumineuses par lesquelles elle circulera à flots, portant en tous lieux la béatitude et la paix.

     Jusqu'à cette heure bénie, veillons et prions, afin que la fausse lumière ne nous séduise point.

Madame D...