Ambroise
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Traité

DES MYSTÈRES


Par

Saint Ambroise de Milan

DES MYSTÈRES
 

Nous vous avons donné chaque jour des instructions morales, tandis qu'on lisait soit l'histoire des patriarches, soit les maximes des Proverbes, afin que formés et instruits par là, vous vous accoutumiez à entrer dans la voie de nos ancêtres, à suivre leur chemin et à obéir aux oracles de Dieu et qu'ainsi, une fois renouvelés par le baptême, vous meniez le genre de vie qui convient à ceux qui ont été purifiés.

 A présent les circonstances nous invitent à parler des mystères et à vous donner l'explication même des sacrements. Si nous avions pensé y faire allusion avant le baptême, alors que vous n'étiez pas encore initiés, on aurait estimé que c'était de notre part commettre une trahison plutôt qu'enseigner une tradition. D'ailleurs la lumière des mystères pénètre mieux chez ceux qui ne s'y attendent pas que si une explication quelconque les avait précédés.

 Ouvrez donc les oreilles et aspirez la bonne odeur de vie éternelle répandue sur vous par le don des sacrements. C'est ce que nous avons marqué quand nous disions, en célébrant les mystères de l'ouverture : « Efféta, c'est-à-dire, ouvre-toi », pour que tous ceux qui allaient venir à la grâce sachent ce qu'on leur demanderait et se souviennent de ce qu'ils auraient à répondre.
 C'est ce mystère qu'a célébré le Christ dans l'évangile, comme nous le lisons, quand il guérit le sourd et muet. Mais il lui toucha la bouche parce qu'il guérissait un muet et un homme : d'une part, il voulait lui ouvrir la bouche au son de la parole qu'il y mettait, et, d'autre part, cet attouchement convenait pour un homme, il ne convenait pas pour une femme.
Après cela on t'a ouvert le Saint des saints, tu es entré dans le sanctuaire de la régénération. Rappelle-toi ce qu'on t'a demandé, souviens-toi de ce que tu as répondu : tu as renoncé au diable et à ses oeuvres, au monde, à son faste et à ses plaisirs. Ta parole est gardée non dans un tombeau de morts, mais dans le livre des vivants.
Tu as vu là le lévite, tu as vu le prêtre, tu as vu le grand-prêtre. Ne considère pas leur aspect extérieur, mais la grâce de leur ministère. C'est en présence d'anges que tu as parlé, comme il est écrit : « Les lèvres du prêtre sont gardiennes de la science et c'est de sa bouche qu'on réclame la Loi, car il est l'ange du Seigneur tout-puis-sant. » Il n'y a pas d'erreur, il n'y a pas à le nier, c'est l'ange qui annonce le règne du Christ et la vie éternelle. Tu ne dois pas l'estimer d'après son apparence, mais d'après sa fonction. Considère ce qu'il t'a transmis, apprécie sa fonction, reconnais sa dignité.

 Entré donc pour rencontrer ton ennemi à qui tu as pensé qu'il fallait résister en face, tu te tournes vers l'Orient, car qui renonce au diable se tourne vers le Christ, il le regarde bien en face.
 Qu'as-tu vu ? De l'eau, oui, mais pas seulement cela : les lévites qui faisaient là leur service, le grand-prêtre qui interrogeait et qui consacrait. Tout d'abord l'apôtre t'a appris qu'il ne faut pas regarder ce qu'on voit, mais ce qu'on ne voit pas, car ce qu'on voit est temporel, tandis que ce qu'on ne voit pas est éternel. Tu trouves encore ailleurs : « Les choses invi-sibles de Dieu, depuis la création du monde, sont comprises au moyen de ce qui a été fait. Sa puissance éternelle aussi et sa divinité sont estimées d'après ses oeuvres. » Aussi le Seigneur lui-même dit-il : « Si vous ne me croyez pas, croyez du moins mes oeuvres. » Crois donc qu'il y a là la présence de la divinité. Tu crois à son action, tu ne crois pas à sa présence ? D'où viendrait alors l'action, si la présence ne la précédait ?

Considère cependant comme il est vieux ce mystère figuré d'avance à l'origine même du monde. Au commencement, quand Dieu fit le ciel et la terre, l'Esprit, dit-on, planait sur les eaux . Lui qui planait sur les eaux, n'agissait-il pas sur les eaux ? Que dirai-je ? Il agissait. Quant à la présence, il planait. N'agissait-il pas celui qui planait ? Sache qu'il agissait lors de cette création du monde, puisque le prophète te dit : « Par la parole du Seigneur les cieux ont été établis et toute leur puissance par le souffle de sa bouche. » Les deux choses s'appuient sur un témoignage prophétique : il planait et il agissait. Qu'il planait, Moïse le dit, qu'il agissait, David en est témoin.

 Voici un autre témoignage. Toute chair avait été corrompue à cause de ses iniquités. « Mon Esprit, dit Dieu, ne restera pas dans les hommes, parce qu'ils sont chair. » Dieu montre par là que l'impureté de la chair et la souillure d'une faute assez grave détournent la grâce spirituelle. Aussi Dieu, voulant remplacer ce qui manquait, fit le déluge et ordonna au juste Noé de monter, dans l'arche. Celui-ci, quand le déluge se retirait, lâcha tout d'abord un corbeau qui ne revint pas. Puis il lâcha une colombe qui, lit-on, revint avec un rameau d'olivier. Tu vois l'eau, tu vois le bois, tu aperçois la colombe, et tu doutes du mystère ?
 C'est donc l'eau où la chair est plongée pour effacer tout péché de la chair. Tout forfait y est enseveli. C'est le bois auquel fut attaché le Seigneur Jésus quand il souffrit pour nous. C'est la colombe sous l'aspect de laquelle descendit l'Esprit-Saint, comme tu l'as appris dans le Nouveau Testament, c'est lui qui t'ins-pire la paix de l'âme, la tranquillité de l'esprit. Le cor-beau est l'image du péché qui s'en va et ne revient pas, pourvu qu'en toi aussi persévèrent l'observance et l'exemple du juste.
Il y a encore un troisième témoignage, suivant l'enseignement de l'apôtre : « Nos pères furent tous sous la nuée, tous ont traversé la mer et tous ont été baptisés en Moïse dans la nuée et dans la mer. » Puis Moïse lui-même dit dans son cantique : « Tu as envoyé ton Esprit et la mer les engloutit. » Tu remarques qu'alors déjà se trouve figuré d'avance le Saint baptême dans ce passage des Hébreux où l'Egyptien périt, tandis que l'Hébreu échappa. Quel autre enseignement rece-vons-nous par là chaque jour, sinon que la faute est engloutie et l'erreur abolie, tandis que la piété et l'innocence demeurent intactes ?
 Tu entends que nos pères furent sous la nuée, et sous une bonne nuée qui refroidit l'incendie des passions charnelles. Une bonne nuée protège ceux que l'Esprit-Saint a visités. Puis il survint sur la Vierge Marie et la puissance du Très-Haut la couvrit de son ombre quand elle enfanta la rédemption pour le genre humain. Et ce miracle a été fait en figure par Moïse.
Si donc l'Esprit-Saint fut présent en figure, ne l'est-il pas en vérité quand l'Écriture te dit : « La Loi a été donnée par Moïse, mais la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ. »
Mara était une source très amère. Moïse y mit du bois et elle devint douce. L'eau en effet sans la mention de la croix du Seigneur ne sert à rien pour le salut à venir ; mais quand elle a été consacrée par le mystère de la croix salutaire, alors elle est préparée pour servir de bain spirituel et de coupe salutaire. De même donc que Moïse, c'est-à-dire le prophète, mit du bois dans cette source-là, ainsi le prêtre met dans celle-ci la mention de la croix du Seigneur, et l'eau devient douce pour la grâce.
 Ne crois donc pas seulement les yeux de ton corps. On voit mieux ce qui est invisible, parce que ceci est temporel, tandis qu'on voit là ce qui est éternel, qui ne tombe pas sous les yeux, mais est vu par l'esprit et l'âme.

 Reçois ensuite l'enseignement de la lecture des Rois qui vient d'être faite. Naaman était Syrien, il avait la lèpre et ne pouvait être purifié par personne. Alors une jeune captive dit qu'il y avait un prophète en Israël qui pourrait le purifier du fléau de la lèpre. Ayant pris, dit-on, de l'or et de l'argent, il s'en alla trouver le roi d'Israël. Celui-ci, apprenant la cause de sa venue, déchira ses vêtements, disant que c'était bien plutôt une épreuve, puisqu'on exigeait de lui ce qui ne dépendait pas de son pouvoir royal. Mais Elisée fit savoir au roi qu'il lui envoyât le Syrien pour qu'il sût qu'il y avait un Dieu en Israël. Et quand il fut arrivé, il lui ordonna de se plonger sept fois dans le Jourdain.
Alors celui-ci se mit à réfléchir : il avait dans son pays des eaux meilleures dans lesquelles il s'était souvent baigné sans être jamais purifié de sa lèpre. Cela le retint et il n'obéissait pas aux ordres du prophète. Cependant, sur le conseil et à l'instigation de ses serviteurs, il accepta et se baigna. Et purifié à l'instant, il comprit que la purification de chacun n'était pas le fait de l'eau, mais de la grâce.
 Apprends maintenant qui est cette jeune fille d'entre les captifs : la jeune assemblée d'entre les nations, c'est-à-dire l'Église du Seigneur, humiliée auparavant par la captivité du péché, alors qu'elle ne possédait pas encore la liberté de la grâce. C'est à son conseil que ce vain peuple des nations écouta la parole pro-phétique dont il avait douté longtemps. Ensuite cependant, dès qu'il crut qu'il fallait obéir, il fut lavé de toute contagion des vices. Il douta, lui, avant d'être guéri. Toi, tu es déjà guéri, aussi ne dois-tu pas douter.

C'est pour cela qu'on t'a déjà dit de ne pas croire seulement ce que tu voyais, de peur que tu ne dises toi aussi : « C'est là le grand mystère que l'oeil n'a pas vu ni l'oreille entendu et qui n'est pas monté au coeur de l'homme ? Je vois de l'eau que je voyais tous les jours : elles peuvent me purifier, ces eaux dans lesquelles je suis souvent descendu sans être jamais purifié ? » Apprends par là que l'eau ne purifie pas sans l'Esprit.

 C'est pour cela aussi que tu as lu que trois témoins au baptême ne font qu'un : l'eau, le sang et l'Esprit. Car si tu en retires un, il n'y a plus de sacrement du baptême. Qu'est, en effet, l'eau sans la croix du Christ ? Un élément ordinaire sans aucun effet sacramentel. Et de même, sans eau il n'y a pas de mystère de la régé-nération. A moins en effet d'être né de nouveau de l'eau et de l'Esprit, on ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Le catéchumène croit, lui aussi, en la croix du Seigneur Jésus dont il est marqué ; mais s'il n'a pas été baptisé au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, il ne peut recevoir la rémission de ses péchés ni puiser le don de la grâce spirituelle.
Donc ce Syrien se plongea sept fois dans la Loi ; toi, tu as été baptisé au nom de la Trinité. Tu as confessé le Père, — souviens-toi de ce que tu as fait, — tu as confessé le Fils, tu as confessé l'Esprit-Saint. Retiens la suite des faits à cette profession de foi. Tu es mort au monde et ressuscité pour Dieu et, en quelque sorte, enseveli en même temps dans cet élément du monde, mort au péché, tu es ressuscité pour la vie éternelle. Crois donc que ce n'est pas de l'eau sans force.
C'est pour cela qu'on t'a dit : « L'ange du Seigneur descendait à certain moment dans la piscine, l'eau s'agitait, et le premier qui descendait dans la piscine après l'agitation de l'eau était guéri de n'importe quelle maladie qui le tenait. » C'est à Jérusalem que se trouvait cette piscine dans laquelle un seul était guéri chaque année, mais personne n'était guéri avant que l'ange fût descendu. Pour indiquer que l'ange était descendu, l'eau s'agitait, à cause des incroyants. Pour ceux-ci il y avait un signe, pour toi la foi. Pour ceux-là un ange descendait, pour toi c'est l'Esprit-Saint. Pour eux une créature s'agitait, pour toi le Christ, maître de la création, agit lui-même.
Alors un seul était guéri, maintenant tous sont guéris, ou plutôt un seul qui est le peuple chrétien. Car il y a aussi chez certains une eau trompeuse. Il ne guérit pas, le baptême des incroyants, il ne purifie pas, mais il souille. Le Juif baptise des vases et des coupes, comme si des êtres insensibles pouvaient recevoir la faute ou la grâce. Toi, baptise cette coupe sensible qui est la tienne : que tes bonnes oeuvres y brillent, que la splendeur de ta grâce y étincelle. Ainsi donc cette piscine était aussi une figure, pour que tu croies que la puissance divine descend dans cette fontaine-ci.
 Puis ce paralytique attendait un homme. Lequel sinon le Seigneur Jésus né de la Vierge ? Lors de sa venue, ce n'était plus l'ombre qui guérirait chacun à son tour, mais la vérité qui guérirait tous ensemble. C'était donc lui dont on attendait qu'il descendît, lui de qui Dieu le Père a dit à Jean-Baptiste : « Celui sur qui tu verras l'Esprit descendre du ciel et demeurer, c'est lui qui baptise dans l'Esprit-Saint. » C'est de lui que Jean a rendu témoignage en disant : « J'ai vu l'Esprit descendre du ciel comme une colombe et demeurer sur lui. » Et ici, pourquoi l'Esprit descendit-il comme une colombe, sinon pour que tu voies, pour que tu reconnaisses que cette colombe, que le juste Noé fit sortir de l'arche, avait été l'image de celle-ci, afin que tu reconnaisses l'image du sacrement ?

 Peut-être pourrais-tu dire : « Ce fut une vraie colombe qui fut envoyée, ici c'est comme une colombe qui descendit. Comment disons-nous que là ce fût une image et ici la vérité, alors que, d'après les Grecs, il est écrit que l'Esprit descendit sous l'apparence d'une colombe ?» Mais qu'y a-t-il d'aussi vrai que la divinité qui demeure à jamais ? La créature, elle, ne peut être vérité, mais apparence qui s'évanouit facilement et change. En même temps, la simplicité de ceux qu'on baptise ne doit pas être en apparence, mais vraie. Aussi le Seigneur dit-il : « Soyez prudents comme des serpents et simples comme des colombes . » C'est donc à bon droit qu'il descendit comme une colombe, pour nous avertir que nous devions avoir la simplicité de la colombe. Mais nous lisons aussi qu'il faut prendre apparence dans le sens de vérité, à propos du Christ : « Et en apparence il fut trouvé comme un homme », et à propos du Père : « Vous n'avez même pas vu son apparence. »

Est-il encore possible que tu doives douter, quand le Père le proclame bien clairement dans l'évangile en disant : « C'est mon Fils en qui je me complais », quand le Fils le proclame, lui sur qui l'Esprit-Saint se montra comme une colombe, alors que l'Esprit-Saint lui aussi le proclame, lui qui descendit comme une colombe, quand David le proclame : « La voix du Seigneur sur les eaux, le Seigneur de gloire a tonné, le Seigneur sur les grandes eaux », quand l'Écriture te rend témoi-gnage qu'à la prière de Jérobaal le feu descendit du ciel et que de nouveau, à la prière d'Elie, le feu fut envoyé et consacra le sacrifice.
Ne considère pas les mérites des personnes, mais les fonctions des prêtres. Et si tu tiens compte des mérites, de même que tu estimes Élie, tiens compte aussi des mérites de Pierre ou de Paul, qui nous ont transmis ce mystère qu'ils ont reçu du Seigneur Jésus. C'est un feu visible qui était envoyé à ceux-là pour qu'ils croient ; pour nous qui croyons, c'est un feu invisible qui agit. A ceux-là c'était pour servir de figure, à nous pour servir d'avertissement. Crois donc qu'il est présent, invoqué par la prière des prêtres, le Seigneur Jésus qui a dit : « Là où deux ou trois se trouveront, là je suis moi aussi. » A combien plus forte raison là où est l'Eglise, là où sont ses mystères, daigne-t-il accorder sa présence.
Tu es donc descendu. Rappelle-toi ce que tu as répondu : que tu crois au Père, que tu crois au Fils, que tu crois au Saint-Esprit. Tu n'as pas là : « Je crois en un plus grand, en un moins grand et en un dernier. » Mais par la même garantie de ta parole, tu es obligé à croire au Fils de la même manière que tu crois au Père, de croire au Saint-Esprit de la même manière que tu crois au Fils, avec cette seule exception que tu professes qu'il faut croire en la croix du seul Seigneur Jésus.

Après cela, n'est-ce pas, tu es monté près du prêtre. Pense à ce qui a suivi. N'est-ce pas ce que dit David : « Comme de l'onguent sur la tête, qui descend sur la barbe, sur la barbe d'Aaron. » C'est l'onguent dont parle aussi Salomon : « Ton nom est un onguent répandu, aussi les jeunes filles t'ont-elles aimé et t'ont-elles entraîné. » Combien d'âmes renouvelées aujourd'hui t'ont-elles aimé, Seigneur Jésus, en disant : « Entraîne-nous après toi, nous courons après l'odeur de tes vête-ments », afin de sentir l'odeur de la résurrection ?
Comprends pourquoi cela se fait : les yeux du sage sont dans sa tête. Voici pourquoi cela coule dans sa barbe : c'est dans la grâce de la jeunesse. Pourquoi dans la barbe d'Aaron : pour que tu deviennes une race élue, sacerdotale, précieuse. Car nous sommes tous oints de la grâce spirituelle pour former le royaume de Dieu et un collège de prêtres.
Tu es remonté de la fontaine. Souviens-toi de la lecture de l'évangile. En effet Nôtre-Seigneur Jésus, dans l'évangile, lava les pieds à ses disciples. Quand il arriva à Simon-Pierre, Pierre lui dit : « Jamais tu ne me laveras les pieds. » Il ne comprit pas le mystère et, à cause de cela, refusa le service, parce qu'il croyait que l'humiliation du serviteur serait plus grande s'il tolérait sans résistance l'hommage du maître. Le Seigneur lui répondit : « Si je ne te lave les pieds, tu n'auras pas de part avec moi. » Entendant cela, Pierre : « Seigneur, dit-il, non seulement les pieds, mais encore les mains et la tête. » Le Seigneur lui répondit : « Celui qui est lavé n'a besoin que de se laver les pieds, mais il est pur tout entier. »
 Pierre était pur, mais il avait à se laver les pieds, car il avait le péché qui vient de la succession du premier homme, quand le serpent le fit trébucher et l'induisit en erreur. C'est pour cela qu'on lui lave les pieds, pour enlever les péchés héréditaires. Nos propres péchés sont remis, en effet, par le baptême.
Apprends en même temps que le mystère se trouve dans le ministère même de l'humilité. Il dit en effet : « Si je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et Maître, combien plus devez-vous, à votre tour vous laver les pieds l'un à l'autre. » En effet, puisque l'auteur du salut nous a rachetés par l'obéissance, combien plus devons-nous, nous ses serviteurs, offrir l'hommage de l'humilité et de l'obéissance.

 Tu as ensuite reçu des vêtements blancs, pour montrer que tu as dépouillé l'enveloppe du péché et que tu as revêtu les vêtements purs de l'innocence. C'est de ceux-ci qu'a parlé le prophète : « Asperge-moi avec de l'hysope et je serai purifié, tu me laveras et je serai plus blanc que neige. » On voit en effet et d'après la Loi et d'après l'évangile, que celui qui est baptisé est purifié. Selon la Loi, car Moïse faisait l'aspersion du sang de l'agneau avec un bouquet d'hysope; selon l'évangile, car les vêtements du Christ étaient blancs comme neige quand il montra, dans l'évangile, la gloire de sa résurrection. Il devient donc plus blanc que neige celui à qui la faute est remise. Aussi le Seigneur fait-il dire par Isaïe : « Si tes péchés sont comme la pourpre, je les rendrai blancs comme neige. »
 Après avoir pris ces vêtements blancs par le bain de la régénération, l'Église dit dans le Cantique : « Je suis noire et belle, filles de Jérusalem. » Noire par la fragilité de la nature humaine, belle par la grâce, noire parce que composée de pécheurs, belle par le sacre-ment de la foi. En voyant ces vêtements, les filles de Jérusalem disent tout étonnées : « Qui est celle-ci qui monte toute blanchie ? Elle était noire, d'où vient que maintenant elle est soudain blanchie ? »
Les anges eux aussi doutèrent quand le Christ ressuscita, les puissances des cieux doutèrent en voyant que la chair montait au ciel. Ils disaient alors : « Qui est ce roi de gloire ? » Tandis que les uns disaient : « Elevez les portes de votre prince, élevez-vous, portes éternelles et le roi de gloire entrera, » d'autres doutaient et disaient : « Qui est ce roi de gloire ? » En Isaïe aussi tu trouves que les puissances du ciel, qui doutaient, ont dit : « Qui est celui-ci qui monte d'Édom ? La rougeur de ses vêtements est de Bosor, il est beau dans sa robe blanche. »

Cependant le Christ, voyant vêtue de blanc son Église pour laquelle, comme on le trouve au livre du prophète Zacharie, il avait pris lui-même des vête-ments sordides, ou bien l'âme pure et lavée par le bain de la régénération, dit : « Que tu es belle, mon amie, que tu es belle. Tes yeux sont comme ceux d'une colombe » sous l'apparence de laquelle l'Esprit-Saint descendit du ciel. Tes yeux sont beaux comme ceux d'une colombe, comme nous l'avons dit plus haut, parce qu'il descendit comme une colombe.
Et plus loin : « Tes dents sont comme un troupeau de chèvres tondues qui remontent du lavoir. Elles ont toutes des jumeaux et aucune d'elle n'est stérile. Tes lèvres sont comme un filet de pourpre. » Ce n'est pas là une maigre louange. Tout d'abord à cause de la gracieuse comparaison des chèvres tondues. Les chèvres en effet paissent sans crainte sur les montagnes, nous le savons, et elles broutent tranquillement en des lieux escarpés. Puis, quand on les tond, on les débarrasse d'un superflu. C'est à leur troupeau que l'Église est comparée, elle qui possède en elle-même les vertus de beaucoup d'âmes qui ont à déposer, par le bain, les péchés superflus, à offrir au Christ la foi au mystère et la grâce de leur conduite, à parler de la croix du Seigneur Jésus.
C'est en elles que l'Église est belle. Aussi le Verbe Dieu lui dit-il : « Tu es toute belle, mon amie, et il n'y a en toi aucun défaut, » parce que la faute a été englou-tie. « Tu arrives du Liban, mon épouse, tu arrives du Liban ; tu passeras, tu parviendras dès le début de ta foi », parce que, renonçant au monde, elle a traversé le siècle, elle est parvenue au Christ. Et de nouveau le Verbe Dieu lui dit : « Que tu es devenue belle et douce, l'amour est parmi tes plaisirs. Ta taille est devenue semblable au palmier, tes seins sont des grappes. »

L'Église lui répond : « Qui fera de toi, mon frère, celui qui suçait les mamelles de ma mère ? Si je te trouve dehors je te baiserai et on ne me méprisera pas. Je te prendrai et te conduirai à la maison de ma mère, dans la chambre de celle qui m'a conçue. Tu m'instruiras. » Tu vois comment, charmée par le don des grâces, elle désire pénétrer jusqu'aux mystères cachés et consacrer au Christ tous ses sentiments ? Elle cherche encore, elle réveille l'amour et demande qu'on le réveille pour elle aux filles de Jérusalem, c'est-à-dire aux âmes fidèles à l'aide desquelles elle désire que l'époux soit poussé à un amour plus grand d'elle-même.

Aussi le Seigneur Jésus, invité par le désir d'un si grand amour, par la beauté de sa parure et de sa grâce, puisqu'il n'y a plus chez ceux qui ont été lavés aucune souillure de fautes, dit-il à l'Église : « Place moi comme un signe sur ton coeur, comme un sceau sur ton bras, » c'est-à-dire : « Tu es belle, mon amie, tu es toute belle, rien ne te manque. Place-moi comme un signe sur ton coeur, » pour que ta foi resplendisse dans la plénitude du sacrement. Que tes oeuvres brillent aussi et qu'elles fassent voir l'image de Dieu, à l'image de qui tu as été faite. Que ton amour ne soit diminué par aucune persécution, lui que les grandes eaux ne peuvent chasser, que les fleuves ne peuvent engloutir.

Ainsi donc rappelle-toi que tu as reçu le signe spirituel, l'Esprit de sagesse et d'intelligence, l'Esprit de conseil et de force, l'Esprit de connaissance et de piété, l'Esprit de la sainte crainte, et garde ce que tu as reçu. Dieu le Père t'a marqué de son signe, le Christ Seigneur t'a confirmé et il a mis dans ton coeur le gage de l'Esprit, comme tu l'as appris par la lecture de l'apôtre.
Ainsi lavé et orné d'une riche parure, le peuple s'avance vers les autels du Christ en disant : « J'approcherai de l'autel de Dieu, de Dieu qui réjouit ma jeunesse. » Il a déposé les dépouilles de l'ancienne erreur, sa jeunesse est renouvelée comme celle de l'aigle, il se hâte d'approcher de ce banquet céleste. Il vient donc et, voyant le saint autel tout paré, il s'écrie : « Tu as préparé devant moi une table. » C'est ce peuple que fait parler David quand il dit : « Le Seigneur me rassasie et rien ne me manquera. Il m'a placé dans un pâturage. Il m'a conduit près de l'eau qui me rétablit. » Et plus loin : « Même si je marche dans l'ombre de la mort, je ne craindrai pas le malheur, car tu es avec moi. Ton sceptre et ton bâton eux-mêmes m'ont encou-ragé. Tu as préparé devant moi une table en face de ceux qui m'affligent. Tu as oint ma tête d'huile, et ta coupe enivrante,  qu'elle est  excellente  !  »
Examinons maintenant ceci, de peur que quel-qu'un voyant les choses visibles, ? car on ne voit pas ce qui est invisible et les yeux des hommes ne peuvent le saisir, ? ne dise peut-être : « Dieu a fait pleuvoir la manne pour les Juifs, il a fait pleuvoir des cailles, tandis que pour son Église bien-aimée, voilà ce qu'il a préparé, ce dont il est dit : Ce que l'oeil n'a pas vu, ni l'oreille entendu, ce qui n'est pas monté au coeur de l'homme, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l'aiment. » Afin donc qu'on ne dise pas cela, nous voulons prouver avec grand soin que les sacrements de l'Église sont à la fois plus anciens que ceux de la Synagogue et supérieurs à la manne.

Qu'ils soient plus anciens, la lecture de la Genèse qu'on vient de faire nous l'apprend. La Synagogue, en effet, a pris naissance à la Loi de Moïse. Or Abraham est bien antérieur. Il avait vaincu ses ennemis et retrouvé son neveu et il jouissait de sa victoire. Alors Melchisédech vint au-devant de lui et offrit ce qu'Abraham reçut avec respect. Ce n'est pas Abraham qui offrit, mais Melchisédech, qui est présenté sans père ni mère, sans avoir de commencement ni de fin à ses jours, mais semblable au Fils de Dieu, dont Paul dit aux Hébreux qu'il demeure prêtre à jamais. Il est appelé roi de jus-tice, roi de paix.
Ne reconnais-tu pas qui il est ? Un homme peut-il être roi de justice, alors qu'il est à peine juste ? Peut-il être roi de paix, quand il peut à peine être pacifique ? Il est sans mère selon sa divinité, parce qu'il a été engen-dré par Dieu le Père, d'une même substance avec le Père. Sans père selon son incarnation, parce qu'il est né d'une vierge. Il n'a ni commencement ni fin, parce qu'il est lui-même le commencement et la fin de tout, le premier et le dernier. Le sacrement que tu as reçu n'est donc pas don d'un homme, mais de Dieu, apporté par celui qui a béni Abraham, le père de la foi, celui dont tu admires la grâce et les actes.

 Il est donc prouvé que les sacrements de l'Église sont plus anciens. Apprends maintenant qu'ils sont supérieurs. En vérité il est admirable que Dieu ait fait pleuvoir la manne pour nos pères et qu'ils aient été rassasiés chaque jour du pain du ciel. C'est pourquoi il est dit : « L'homme a mangé le pain des anges. » Pourtant ceux qui ont mangé ce pain au désert sont tous morts. Cette nourriture, au contraire, que tu reçois, ce pain vivant qui est descendu du ciel, fournit le sou-tien de la vie éternelle, et quiconque le mange ne mourra jamais. C'est le corps du Christ.

Examine maintenant ce qui est supérieur, le pain des anges ou la chair du Christ, qui est certes le corps qui donne la vie. Cette manne-là était du ciel, celle-ci au-dessus du ciel ; celle-là appartenait au ciel, celle-ci au maître du ciel ; celle-là était sujette à la corrup-tion si on la gardait jusqu'au lendemain, celle-ci est étran-gère à toute corruption : quiconque en goûte avec res-pect ne peut éprouver la corruption. Pour ceux-là l'eau coula du rocher, pour toi le sang coule du Christ. L'eau les désaltéra pour un moment, toi le sang te lave à jamais. Le Juif boit et a soif. Toi, une fois que tu auras bu, tu ne pourras plus avoir soif. Cela se passait en figure, ceci en vérité.

Si ce que tu admires n'est que l'ombre, combien grand est ce dont tu admires l'ombre même. Ecoute, c'est l'ombre qui s'est manifestée aux pères : « Ils buvaient, dit-on, du rocher qui suivait ; or le rocher c'était le Christ. Mais en un bon nombre d'entre eux Dieu ne s'est pas complu, car ils furent anéantis au désert. Or cela s'est fait en figure à notre intention. » Tu as compris ce qui vaut mieux, car la lumière est préférable aux ténèbres, la vérité à la figure, le corps du créateur à la manne du ciel.
Peut-être pourrais-tu dire : « Je vois autre chose. Comment affirmes-tu que je reçois le corps du Christ ? » C'est ce qui nous reste encore à prouver. Comme ils sont donc grands les exemples dont nous nous servons ! Prouvons qu'il ne s'agit pas de ce que la nature a produit, mais de ce que la bénédiction a consacré, que la puissance de la bénédiction est plus grande que celle de la nature, puisque la bénédiction change la nature elle-même.

 Moïse tenait son bâton, il le jeta devant lui, et il se changea en serpent. De nouveau il prit la queue du serpent qui revint à la nature du bâton. Tu vois donc qu'en vertu de la grâce prophétique la nature a été changée deux fois, celle du serpent et celle du bâton. Les fleuves d'Egypte faisaient couler des flots d'eau claire. Soudain du cours des sources du sang se mit à jaillir, et il n'y avait plus d'eau potable dans les fleuves. De nouveau, à la prière du prophète, le sang s'arrêta, et la nature de l'eau revint. Le peuple hébreu était encerclé de toute part : d'un côté, il était assiégé par les Egyptiens, de l'autre arrêté par la mer. Moïse leva son bâton : l'eau s'ouvrit et se durcit comme des murailles, et un chemin où l'on pouvait marcher apparut entre les flots. Le Jourdain, contrairement à sa nature, remonta vers la source où il prend naissance. N'est-il pas évident que la nature des flots de la mer ou du cours des fleuves a été changée ? Le peuple des pères avait soif. Moïse toucha le rocher (de son bâton), et l'eau coula du rocher . Est-ce que la grâce n'a pas agi d'une manière supérieure à la nature, pour que le rocher vomît de l'eau que ne possédait pas sa nature ? Mara était un fleuve très amer, si bien que le peuple altéré ne pouvait en boire. Moïse mit du bois dans l'eau, et la nature des eaux perdit son amertume que la grâce répandue calma subitement. Sous le prophète Elisée, il arriva à un fils de prophète que le fer se détacha de sa cognée et coula. Celui qui avait perdu le fer pria Elisée. Elisée mit aussi le bois dans l'eau, et le fer revint à la surface. Oui, cela se fit aussi, nous le savons, d'une manière supérieure à la nature, car le fer est naturellement plus lourd que le liquide qu'est l'eau.

Nous constatons donc que la grâce a une plus grande puissance que la nature, et cependant nous mesurons encore la grâce de la bénédiction prophé-tique. Si la bénédiction d'un homme a eu une puissance assez grande pour changer la nature, que dirons-nous de la consécration faite par Dieu même, alors que ce sont les paroles mêmes du Sauveur qui agissent ? Car ce sacrement que tu reçois est produit par la parole du Christ. Si la parole d'Elie a eu tant de puissance qu'elle a fait descendre le feu du ciel, la parole du Christ n'aura-t-elle pas la puissance de changer la nature des éléments ? Tu as lu, à propos des oeuvres de l'univers entier : « Il a dit et ce fut fait, il a ordonné et cela fut créé. » La parole du Christ, qui a pu faire de rien ce qui n'était pas, ne peut-elle donc pas changer les choses qui sont en ce qu'elles n'étaient pas ? Car il n'est pas moins difficile de donner aux choses une nouvelle nature que de changer cette nature.

Mais pourquoi nous servir d'arguments ? Servons-nous de ses exemples et établissons la vérité du mystère de l'incarnation. Est-ce que le cours ordinaire de la nature précéda la naissance du Seigneur Jésus de Marie ? Si nous cherchons l'ordre de la nature, la femme a l'habitude d'enfanter après des relations avec un homme. Il est donc évident que la Vierge a enfanté hors du cours de la nature. Eh bien, ce que nous produisons, c'est le corps né de la Vierge. Pourquoi chercher ici l'ordre de la nature dans le corps du Christ, alors que le Seigneur Jésus lui-même a été enfanté par une Vierge en dehors du cours de la nature ? C'est la vraie chair du Christ qui a été crucifiée, qui a été ensevelie. C'est donc vraiment le sacrement de sa chair.
Le Seigneur Jésus lui-même le proclame : « Ceci est mon corps. » Avant la bénédiction par les paroles célestes, on l'appelle d'un autre nom ; après la consé-cration, c'est le corps qui est désigné. Lui-même dit que c'est son sang. Avant la consécration, on l'appelle autrement ; après la consécration, on l'appelle le sang. Et tu dis : « Amen », c'est-à-dire : « C'est vrai. » Ce que prononce la bouche, que l'esprit le reconnaisse. Ce qu'exprimé la parole, que notre coeur le ressente.

 C'est donc par ces sacrements que le Christ nourrit son Église, par eux sont affermies les ressources de l'âme, et c'est à bon droit que, voyant ses progrès constants dans la grâce, il lui dit : « Que tes seins sont beaux, ma soeur, mon épouse, qu'ils sont plus beaux que le vin, et comme l'odeur de tes vêtements dépasse celle de tous les parfums. Tes lèvres sont comme un rayon de miel qui coule. Il y a du miel et du lait sous ta langue, et l'odeur de tes vêtements est comme l'odeur du Liban. Tu es un jardin clos, ma soeur, mon épouse, un jardin clos, une fontaine scellée. » II signifie par là que le mystère doit être scellé chez toi, qu'il ne soit pas violé par les oeuvres d'une vie mauvaise, ni par la perte de la chasteté, qu'il ne soit pas divulgué à ceux à qui cela ne convient pas, qu'il ne soit pas répandu parmi les incroyants par un vain bavardage. Tu dois bien garder ta foi, afin que demeurent inviolés ta vie et ton silence.

C'est pour cela aussi que l'Église, respectant la profondeur des mystères célestes, rejette loin d'elle les violentes tempêtes de vents et appelle la douceur de la grâce du printemps et, sachant que son jardin ne peut déplaire au Christ, elle appelle l'époux en disant : « Lève-toi, aquilon, viens, souffle dans mon jardin, vent du sud, et que mes parfums se répandent. Que mon frère descende dans son jardin et qu'il mange le fruit de ses arbres fruitiers. » Car il a de bons arbres qui portent des fruits, qui ont plongé leurs racines dans le cours de la fontaine sacrée, et qui ont bourgeonné avec une fécondité inconnue, pour produire de bons fruits, afin de ne plus être coupés par la cognée prophétique, mais d'être fécondés par l'abondance de l'évangile.
Puis le Seigneur, réjoui lui aussi de leur fertilité, répond : « J'ai pénétré dans mon jardin, ma soeur, mon épouse, j'ai récolté la myrrhe avec mes parfums, j'ai mangé ma nourriture avec mon miel, j'ai bu ma boisson avec mon lait. » Pourquoi parle-t-il de nourriture et de boisson ? Toi qui as la foi, comprends. Il n'est pas douteux que c'est en nous qu'il mange et qu'il boit, de même que tu as lu que c'est en nous qu'il se dit en prison.

Aussi l'Église, à son tour, voyant une telle grâce, exhorte ses fils, exhorte ses proches à accourir ensemble aux sacrements, en disant : « Mangez, mes amis, buvez et enivrez-vous, mes frères. » Ce que nous avons à manger, ce que nous avons à boire, l'Esprit l'a exprimé ailleurs par les prophètes en disant : « Goûtez et voyez que le Seigneur est bon. Bienheureux l'homme qui espère en lui . » Le Christ est dans ce sacrement, parce que c'est le corps du Christ. Ce n'est donc pas une nourriture corporelle, mais spirituelle. Aussi l'apôtre a-t-il dit de son image : « Nos pères ont mangé une nourriture spirituelle, ils ont bu une boisson spirituelle. » Car le corps de Dieu est un corps spirituel, le corps du Christ est le corps de l'Es-prit divin, parce que le Christ est Esprit, comme nous le lisons : « Le Christ Seigneur est Esprit en face de nous. » Et dans l'épître de Pierre nous trouvons : « Le Christ est mort pour nous. » Enfin, cette nourriture affermit notre coeur et cette boisson réjouit le coeur de l'homme, comme l'a rappelé le prophète.

Ainsi donc, après avoir tout reçu, nous savons que nous avons été régénérés. Et ne dirons-nous pas aussi comment nous avons été régénérés ? Est-ce que nous sommes entrés dans le sein de notre mère et nés de nouveau ? Je ne reconnais pas là le cours de la nature. Mais il n'y a pas d'ordre de la nature ici où se trouve l'excellence de la grâce. Puis ce n'est pas tou-jours le cours habituel de la nature qui produit la géné-ration. Nous professons que le Christ Seigneur a été engendré d'une vierge et nous nions l'ordre de la nature. Car Marie n'engendra pas d'un homme, mais elle fut enceinte de l'Esprit-Saint, comme le dit Matthieu : « Elle se trouva enceinte par l'Esprit-Saint. » Si donc l'Esprit-Saint survenant dans une vierge a produit la conception et accompli l'oeuvre de la génération, il ne doit pas y avoir de doute que, survenant dans la fontaine ou sur ceux qui se présentent au baptême, il ne produise vraiment la régénération.


1 Le réservoir de Siloé : «Les noms «Shiloah» et «Siloam» sont respectivement les équivalents hébreu et grec de «Silwan», nom arabe moderne («Aïn Silwan») de l'étang qui se trouve à l'embouchure d'El-Wad. Toutes les références antiques concordent avec cette identification (comparer avec Né 3:15; Josèphe, Guerre des juifs, V, 4:1,2 6:1, 9:4, 12:2, 11, 16:2, VI, 7:2, 8:5). Bien qu'elle ait reçu l'appellation moderne de «aïn» (source), Siloé n'est pas une source mais est alimentée par un tunnel taillé dans le roc à partir du Gihon, ou fontaine de la Vierge. - L. B Paton, dans l'article «Jerusalem», Stand. Bible Dictionary.