LA CHARITÉ, VERTU DES VERTUS

 

 

Joie sereine et tranquille, bonheur égal et sûr, on trouve tout dans la charité et l'on ne trouve tout réuni que dans la charité. Si, à l'invitation du Seigneur, vous prenez son joug, vous trouverez le repos de l'âme, car son joug est doux et son fardeau léger. « La charité est patiente ; la charité est serviable, elle n'est pas envieuse ; elle n'est pas vaniteuse ni ambitieuse » (I Cor. 13). Les autres vertus sont un véhicule pour qui est fatigué, une provision de route pour un voyageur, une lumière dans l'obscurité ou une arme pour le combat. Mais la charité doit se trouver au cœur de toutes les vertus. Elle est, en effet, le repos lui-même, le but du voyageur, la pleine lumière et la couronne de la victoire. Qu'est-ce que la foi, sinon un véhicule qui nous mène à la patrie ? Qu'est-ce que l'espérance, sinon une provision de route qui nous soutient au milieu des misères de la vie ? Que sont les vertus de tempérance, de prudence, de force et de justice, sinon des armes avec lesquelles nous combattons ? Mais quand, dans la vision de Dieu, la mort sera absorbée par la charité parfaite et par tout ce qui ne fait que commencer ici-bas dans la foi, alors la foi disparaîtra, parce que ce que l'on voit et ce que l'on aime, il n'y a plus lieu d'y croire ; l'espérance aussi finira quand nous serons dans les bras de la charité de Dieu, car il n'y aura plus rien à espérer.

 

La tempérance combat les passions, la prudence les erreurs, la force nous aide dans les adversités et la justice lutte contre les inégalités. Mais dans la charité, il n'y a plus de passions à tempérer, la chasteté est donc parfaite ; la science aussi est parfaite, il n'y a donc plus d'erreur à éviter par la prudence. Dans la charité, le bonheur est parfait et par conséquent, la force n'a plus à nous soutenir contre l'adversité. Dans la charité tout est en paix, il n'y a plus d'inégalités dont la justice ait à se soucier.

 

Et même la foi n'est une vertu que si elle agit dans la charité, et l'espérance n'est une vertu que si on aime ce qu'on espère. Et pour serrer les choses de plus près encore, qu'est-ce que la tempérance ? Un amour qu'aucune volupté n'ébranle. Et la prudence ? Un amour qu'aucune erreur n'égare. La force ? Un amour courageux dans les difficultés. La justice ? Un amour impartial qui cherche à diminuer les inégalités de cette vie.

 

La charité naît dans la foi, grandit dans les autres vertus et ne trouve son achèvement qu'en elle-même.