CINQ FAUTES GRAVES CONTRE L'AMITIÉ

 

 

« Si un ami a tiré l'épée contre un ami, ne désespère pas : l'ami peut revenir. Si tu as ouvert la bouche contre un ami, ne crains pas » (Eccli. 22, 21-22). Voici ce que signifient ces paroles de l'Ecriture : si dans l'emportement de sa colère, un ami a tiré l'épée ou s'il a dit quelque parole amère, s'il s'est éloigné de toi un certain temps comme s'il t'abandonnait, si dans une discussion, il a préféré son opinion à la tienne, ne crois pas que l'amitié doive en être rompue pour autant. « L'ami peut revenir, sauf, continue l'Ecclésiaste, dans le cas d'insulte, de mépris, d'arrogance, de divulgation d'un secret ou d'un coup perfide ; car alors ton ami s'en ira » (Eccli. 22, 22). Examinons attentivement ces cinq cas, pour éviter de prendre pour ami ceux que la colère ou d'autres passions ne manqueront pas d'entraîner à de telles fautes. Ecoutons encore l'Ecriture : «Celui qui insulte son ami, rompt l'amitié » (Eccli. 22, 20).

 

L'insulte, en effet, porte atteinte à la réputation et éteint la charité. Pour toute accusation portée par un ami en colère, la malice des hommes est telle, que, si on n'y croit pas, on fera appel au privilège de l'amitié : « c'est vrai puisqu'il connaît les secrets de son ami ». Beaucoup sont aussi friands des critiques portées contre autrui que des louanges qui leur sont adressées.

Et qu'y a-t-il de plus méchant que le mépris ? Même s'il s'adresse à quelqu'un qui ne le mérite pas, l'innocent en rougit de honte.

Est-il rien de plus insupportable que l'arrogance ? Elle repousse le seul remède qui restaure une amitié froissée : l'humilité d'un aveu. Elle rend l'homme effronté dans l'insulte et incorrigible.

 

Quant à la divulgation des secrets, rien n'est plus exécrable, car une telle faute ne laisse plus subsister ni amour, ni sympathie. Tout n'est plus qu'amertume, le fiel de l'indignation, de la haine et de la tristesse se répand partout. D'où il est écrit : « Qui dévoile les secrets d'un ami, perd sa confiance » (Eccli. 27, 17). Et un peu plus loin : « Dévoiler les secrets d'un ami fait le désespoir d'une âme malheureuse » (27, 24).

Or, est-il pire malheur que de perdre la confiance et de languir dans le désespoir ?

La dernière faute qui rompt l'amitié, c'est le coup perfide, qui n'est autre que de médire dans l'ombre. Blessure empoisonnée, c'est la morsure mortelle du serpent ou de l'aspic. « Comme un serpent qui mord en silence, tel est celui qui médit en secret » (Eccl. 10, 11).

Garde-toi donc de ceux que tu trouveras enracinés dans ces vices ou attend qu'ils en soient guéris avant de leur offrir ton amitié.