CHAPITRE II

 

De la matière de la méditation

 

Nous venons de voir le fruit immense que l'on retire de l'oraison et de la méditation ; voyons maintenant quels sont les sujets que nous devons méditer. Ce saint exercice ayant pour fin de créer et de développer dans nos cœurs l'amour et la crainte de Dieu, ainsi que la fidélité à observer ses commandements, le sujet le plus convenable de méditation sera celui qui nous fera le plus directement atteindre ce but. Or, quoiqu'il soit vrai que toutes les créatures tirées du néant, que toutes les choses spirituelles et sacrées, nous portent à l'amour et à la crainte de Dieu, néanmoins, généralement parlant, ce sont les mystères de notre foi contenus dans le Symbole, c'est-à-dire le Credo, qui nous y excitent avec le plus d'efficacité et le plus de fruit. La raison en est que le Symbole traite des bienfaits divins, du jugement dernier, des peines de l'enfer, de la gloire du paradis, vérités qui sont autant d'aiguillons très puissants pour porter le cœur à l'amour et à la crainte de Dieu. Il traite aussi de la vie et de la passion de Jésus-Christ notre Sauveur, qui sont pour nous la source de tous les biens : voilà les deux sujets dont parle spécialement le Symbole ; ce sont aussi ceux qui nous occupent le plus ordinairement dans la méditation.

 

Voilà pourquoi l'on dit avec beaucoup de raison que le Symbole est la matière la plus propre de ce saint exercice ; ajoutons néanmoins, ce qui est vrai, que le meilleur sujet de méditation pour chacun est celui qui porte le plus efficacement son cœur à l'amour et à la crainte de Dieu. Or, comme mon dessein est d'initier à cette vie d'oraison les nouveaux et les commençants, et qu'il faut leur donner la nourriture bien préparée et comme digérée, j'indiquerai ici brièvement pour tous les jours de la semaine deux sortes de méditations, tirées pour la plupart des mystères de notre foi ; les unes sont pour le matin, les autres pour le soir, afin que, comme nous donnons chaque jour deux réfections à notre corps, nous en donnions également deux à notre âme, dont la nourriture est la méditation et la considération des choses divines. Une partie de ces méditations sera sur la sainte passion et la résurrection du Sauveur ; l'autre, sur les mystères dont nous avons parlé plus haut. Celui qui n'aurait pas le temps de se recueillir deux fois le jour, pourra du moins, pendant une semaine, méditer la première série des mystères, et la semaine suivante, la seconde, ou bien se borner à ceux de la vie et de la passion de Jésus-Christ qui sont les plus importants. Toutefois, au commencement de la conversion, il ne convient point de laisser les autres, parce qu'ils vont mieux à l'âme dans un temps où elle doit s'attacher principalement à la crainte de Dieu, à la douleur et à la détestation des péchés.