Conclusion:




 Voici terminée notre étude de la première partie des Évangiles.  On s'étonnera peut-être que je me sois montré aussi avare de détails sur la période de l'Enfance du Christ proprement dite.  Il faut que certaines choses restent mystérieuses; tout doit être expliqué, certainement, mais nous ne sommes pas encore à la fin du monde.  Il faut surtout éviter les lumières prématurées; il faut ensuite prendre garde que les lumières ne soient saisies par les espions de l'Adversaire, et perverties.  Le massacre des Innocents, la fuite en Egypte, l'entretien avec les docteurs, toute la jeunesse de Jésus sont les formes matérielles d'actes spirituels de toute première importance, mais insaisissables encore à notre intellect.  Gardons-nous de trop nourrir la pure curiosité.  Ce serait une gourmandise intérieure bien plus grave que la gourmandise de la bouche.  Notre cerveau est suralimenté; et cela nous déséquilibre.  Pour avoir le droit d'apprendre des arcanes nouveaux, il nous faudrait avoir accompli la majeure partie des devoirs qu'entraînent nos connaissances présentes.  C'est surtout dans la voie étroite que la maxime antique : Hâte-toi lentement, doit s'observer.  Comme le disait saint Vincent de Paul, chez qui le bon sens atteint la force du génie, Dieu ne nous demande pas de faire beaucoup de choses, mais de faire à fond le peu dont nous sommes capables.

 Ce n'est pas, remarquez-le bien, contre l'usage, même intensif, des facultés intellectuelles que je m'élève; c'est contre leur abus, ou plutôt contre leur dilapidation.  Cultivons-nous en profondeur, non pas en surface.  La Vérité se tient au fond d'un puits : puits du Raguel, cryptes du Dakshinamourthi, abîmes du mysticisme, voilà ses palais; le Dante même a connu ce mystère.
 
 Et c'est aussi ce que le Christ recommande par la « chambre secrète », où Il nous invite à nous renfermer pour Le joindre, Lui, la Vérité active et vivante, Lui de qui je vous conjure de ne jamais distraire vos regards, Lui qui, un jour lointain, mais un jour certain, nous fera toucher le fond de toutes les idées et la cime de tous les sentiments.