IV

 

« Ah ! oui, c'est pour cette petite... »

 

En 1846, le pèlerinage d'Ars battait son plein. M. Vianney avait beau ne pas se reposer une minute et retenir chacun le moins possible, l'affluence ne diminuait pas. Une voiture s'en retournait bondée de pèlerins ; deux autres la croisaient en route, non moins débordantes... Si, pour servir sa clientèle d'âmes, le saint Curé d'Ars eût dû parfois hésiter, réfléchir longuement, c'eût été pour chacun une attente plus longue encore. Mais non, l'inspiration lui venait soudaine, fulgurante.

Ce petit fait en sera une preuve nouvelle.

 

Donc, en 1846, une religieuse, Mère Sainte-Anne, supérieure du couvent de Saint-Antoine, dans l'Isère, arrivait à Ars. Elle n'y venait pas pour se confesser, mais pour interroger le saint au sujet d'une jeune fille, Joséphine Milliet, élevée dans la maison de Saint-Antoine et qui semblait menacée de perdre la vue.

A peine la religieuse avait-elle abordé M. Vianney, qu'elle eut la stupéfaction de l'entendre lui dire, et de l'air le plus naturel du monde :

« Ah ! oui, c'est pour cette petite qui a mal aux yeux... Dites-lui de faire une neuvaine à sainte Philomène, de communier et de venir à Ars quand elle le pourra. »

Joséphine Milliet fit la neuvaine demandée, communia et se trouva mieux ; bientôt, ce fut la guérison.

 

Quant à son pèlerinage, elle le réalisa au moins en 1868 ; car, le 19 août de cette année-là, devenue Mme Perrin par son mariage avec un confiseur de Saint-Marcellin, nous la voyons témoigner du fait la concernant « en présence de M. l'abbé Toccanier, missionnaire, et de Mme Bouvat, née Milliet (1) ».

 

 

(1) Documents Ball, N° 10