VI

 

Emile Combes

 

Il est certain que, dans le temps de sa fervente jeunesse, alors qu'il devait avoir de vingt à vingt et un ans, celui qui, devenu président du Conseil, préparerait avec tant d'acharnement et réaliserait en France la séparation de l'État d'avec l'Église, fit le pèlerinage d'Ars. Émile Combes, né en 1835, à Roquecourbe, près de Castres, avait pris la soutane au grand séminaire d'Albi. Avec trois confrères il partit, pendant les vacances de 1855 ou de 1856, pour consulter saint Jean-Marie Vianney...

A l'époque où Combes manifesta un sectarisme suraigu, il fut question plus d'une fois de son entrevue avec le Curé d'Ars ; mais on ne savait trop ce qu'il en fallait croire à cause des déformations possibles de la légende. En 1924, une lettre adressée à Mgr Convert semble donner sur le fait des précisions authentiques. La lettre est de Mme Gasc-Loup, nièce de M. Fabre, l'un des compagnons de pèlerinage d'Émile Combes.

Avec le futur président du Conseil se rendirent donc à Ars M. l'abbé Fabre, M. l'abbé Pillac qui devint curé de la cathédrale de Castres et M. l'abbé Donnet qui fut, dans cette ville, aumônier du Carmel. Les quatre voyageurs étaient alors tonsurés seulement ou clercs minorés tout au plus.

 

M. Vianney les reçut avec sa bonté habituelle et leur adressa quelques paroles d'encouragement. Ces jeunes ecclésiastiques insistèrent pour connaître leur avenir. Alors, après s'être recueilli, le saint dit aux abbés Pillac et Donnet : « Vous ferez deux bons prêtres ».

A l'abbé Fabre il dit : « Vous ne serez pas prêtre, car vos parents s'y opposeront ». Ce qui arriva, en effet.

Enfin, ayant relevé la tête et regardé l'abbé Combes dans les yeux, il lui dit : « Vous, vous ferez beaucoup de mal à l'Église ».