Vie de Anne Catherine Emmerich - Volume 1 -

 

XXVIII

 TEMOIGNAGES D’OVERBERG, DE RENSING ET DE WESENER TOUCHANT LES STIGMATES

 

1. Dès sa première visite à Dulmen, Clément Auguste avait acquis la conviction qu'il n'y avait pas possibilité d’imposture quant aux stigmates ; il chargea alors Overberg de soumettre Anne Catherine à des interrogatoires détaillés sur leur origine et leur nature. Celui-ci commença le 13 avril 1813 et continua, jusqu'à sa quatrième visite qui eut lieu le 12 mai ; sa manière de procéder consistait à demander à Anne Catherine de nouvelles explications plus détaillées sur des questions auxquelles elle avait déjà répondu, tandis que, d'un autre côté, les investigations faites plus tard et les rapports journaliers rédigés par Rensing et Krauthausen lui indiquaient de nouvelles questions auxquelles il demandait à la malade de répondre. Quand Overberg avait mis au net le procès-verbal d'un de ces interrogatoires, il le transmettait à Clément Auguste, lequel avait coutume de demander encore des explications là-dessus à Anne Catherine et ne se tenait pour satisfait que quand, par d'autres voies, il était arrivé aux mêmes résultats qu'Overberg. C'est pourquoi on trouve sur les procès-verbaux des additions et des remarques de sa main, lesquelles toutefois ne se montrent jamais en contradiction avec les conclusions d'Overberg, mais plutôt les confirment en les présentant d'une manière plus claire et plus précise. Ce qui suit est extrait fidèlement des interrogatoires d'Overberg, des rapports de Rensing et des notes non officielles de Wesener.

 

           « J'étais chargé, dit Overberg, à la date du 8 avril, de m'enquérir auprès d'Anne Catherine si elle s'était fait elle-même les plaies, ou si elle les avait laissé faire par d'autres. Je lui représentai aussi fortement qu'il me fut possible qu'elle devait obéissance à l'autorité ecclésiastique et que par conséquent elle était obligée de dire la vérité, quand même elle aurait promis le secret avec serment à celui qui lui aurait fait la marque des stigmates ; qu'un serment contraire à son devoir d'obéissance envers l'Église n'avait aucune valeur, et qu'elle ne pourrait se présenter avec confiance devant le tribunal de Dieu si elle cachait la vérité, contrairement à l'obéissance. Elle m'assura que tout cela était indubitable pour elle ; et alors je lui fis les questions suivantes :

           1.» Auriez-vous (ce qui aurait pu se faire avec une bonne intention) donné quelquefois des coups de canif dans vos mains, ou bien y auriez-vous enfoncé un clou ou quelque chose de semblable, afin de ressentir plus vivement les douleurs de Notre Seigneur Jésus-Christ ?

           Réponse. -» Non ! jamais !»

           2.» N'auriez-vous pas appliqué à ces endroits de l'eau forte ou la pierre infernale ?»

           R. - Je ne sais pas ce que sont ces choses dont vous parlez.

           3, « Quelque personne portant intérêt au progrès de votre âme dans la vertu et connaissant votre culte pour la Passion de Jésus-Christ, vous aurait-elle fait ces blessures au moyen d'une forte pression ou de piqûres, ou de toute autre manière ?»

           R. -» Non certainement !

           Lorsque j'entrai ainsi en matière et que je lui posai ces questions, son visage resta d'une sérénité inaltérable. Puis elle me raconta ce qui suit :

           « Quand les plaies sont survenues, je n’en ai rien su c'est une autre personne qui les a d'abord remarquées (je crois qu'elle nomma l'abbé Lambert) et qui m'y fit faire attention, tout en me disant : « N’allez pas vous croire maintenant une sainte Catherine de Sienne ; vous êtes encore bien loin de là.»

« Comme je lui objectais qu'il ne me paraissait pas possible qu'une autre personne eut remarqué les plaies avant elle, car, quand on reçoit une blessure, ordinairement on s'en aperçoit, elle répondit ; « Cela est vrai ; mais la douleur existait trois ou quatre ans avant les plaies, et c'est pourquoi je ne soupçonnais pas qu'il se fût opéré quelque changement.»

           « Lorsque je reçus les signes extérieurs, je n'avais pour me servir qu'une petite fille qui ne pensait pas à laver le sang desséché. Moi-même je ne l'ai pas remarqué et je ne l'ai pas lavé non plus. Voilà comment il est arrivé que l'abbé Lambert a remarqué avant moi-même les plaies des mains. La douleur ne pouvait pas m'y faire regarder, car elle existait déjà longtemps auparavant et les signes extérieurs n'y apportèrent aucun changement. (C'est pourquoi Anne Catherine avait coutume d'appeler marques la douleur ressentie depuis plusieurs années déjà aux endroits où se formèrent plus tard les plaies ; quant aux plaies visibles, elle les appelait les signes extérieurs. ) En ce qui touche les douleurs à la tête, je les avais déjà environ quatre ans avant d'entrer au couvent. C'est comme si ma tête était tout entourée d'épines, ou plutôt comme si tous mes cheveux étaient des épines, en sorte que je ne pose jamais sans une vive souffrance la tête sur l'oreiller. Les souffrances causées par les autres plaies ne sont pas comme d'autres souffrances ; elles pénètrent jusqu'au cœur. Un attouchement ou une légère pression sur les croix de la poitrine ne me fait pas très-grand mal à l'extérieur, mais bien à l'intérieur. C'est comme si toute la poitrine était enflammée. Quant au signe qui est au-dessus de l'estomac, j'y ai éprouvé la même douleur que si du feu était tombé dessus.»

4.» Quand les signes se sont-ils montrés sur votre corps ?

           R. -» Celui qui est sur l'estomac s'est montré le jour de saint Augustin ; la croix inférieure de la poitrine, environ six semaines après ; la croix supérieure de la poitrine, le jour de la fête de sainte Catherine ; les plaies des mains et des pieds à la dernière fête de Noël ; la plaie du coté, entre Noël et la nouvelle année.»

           5.» Lorsque vous avez d'abord ressenti les douleurs, et plus tard quand sont survenues les plaies à la tête, aux mains et aux pieds, avez-vous vu quelque chose qui vous ait semblé être une apparition, ou avez-vous reçu des lumières spéciales sur quelque chose.

           R. -» Non ; j'étais alors en proie à des souffrances d'un genre particulier.»

           6.» Ne savez-vous pas ce que signifient les croix sur la poitrine ? >,

           R. -» Non ; mais lorsque le premier signe sur l’estomac s'est montré, j'ai eu, en méditant, l'impression que je devais y faire attention comme à une marque que j'aurais encore beaucoup à souffrir pour l'amour de Jésus-Christ. Lorsque le second signe survint à la fête de sainte Catherine, je reconnus que ma croix serait doublée, et il en fut de mène à Noël, lorsque le troisième signe se montra.

           « Elle me répéta encore, dit Overberg, qu'elle avait bien prié pour souffrir les douleurs de Jésus, mais jamais pour avoir les stigmates.»

           Déjà, lors de la première visite d'Overberg, le 28 et le 29 mars, comme il lui demandait si elle avait prié Dieu pour avoir les marques des plaies du Sauveur, elle avait répondu : « J'ai prié Dieu à la vérité de me faire participer à ses souffrances, mais jamais je ne lui en ai demandé les marques extérieures. Je me suis bien souvent plainte à Dieu de ce qu'il me les avait données, mais je n'ai reçu aucune consolation.» Overberg ayant répondu : « Dieu, a voulu que sa grâce vous suffit, « elle répliqua aussitôt

« C'est ce qu'il m'a dit aussi.»

           7.» Comment faut-il entendre votre première déclaration (insérée dans le premier procès verbal du 25 mars) ?

« Mes plaies n'ont pas été faites par les hommes, mais je crois et j'espère qu'elles viennent de Dieu.»

           R.» J'ai dit : « Je crois» et non pas : « Je suis sure, « parce que les paroles du doyen et des médecins, ainsi que la sévérité de l'examen, ont fait naître en moi la crainte que ces plaies ne vinssent peut-être de l'esprit malin. Mais les marques de croix sur ma poitrine m'ont tranquillisée, parce que je me suis dit que celles-là certainement ne peuvent pas avoir été faites par le diable. C'est par la même raison que j'ai dit aussi : « J'espère, « parce que je souhaiterais que ces signes fussent l’œuvre de Dieu et non pas un prestige du démon.»

           8.» Et si vos plaies guérissaient, comme M. de Druffel le croit possible ?»

           R. -» Il m'a été permis de prier pour que les plaies me fussent retirées ; il ne m'a été rien dit quant à la guérison. Aucune pensée ne m'est venue à ce sujet. J'ai compris la chose dans ce sens que Dieu ne prendrait pas en mauvaise part ma prière pour la disparition des signes, mais que les souffrances ne diminueraient point pour cela, qu'elles augmenteraient plutôt. Elles ont déjà beaucoup augmenté.»

           Overberg lui ayant dit là-dessus : « Je ne puis pas croire que vous ayez de telles révélations, si vous ne nie donnez pas la preuve que vous pouvez distinguer une révélation d'un simple souvenir, « elle répondit : « Mais comment puis-je donner cette preuve ? : « A quoi Overberg répliqua :

« Je n'en sais rien.» Anne Catherine reprit alors :

« Il se peut que j'aie entendu, ou vu, ou éprouvé quelque chose, et que, quand j'en ai parlé, cela ait été pris à tort par d'autres personnes pour une révélation. (Elle cita, remarque Overberg, un exemple de ce genre. ) Ce qu'on a entendu, d'ordinaire, doit être dans la pensée avant qu'on l'énonce. Mais si l'on reçoit tout à coup la connaissance de quelque chose dont on n'a rien entendu dire, ni rien vu antérieurement, ce ne peut pas être une réminiscence.

           9.» Savez-vous au juste en quel temps vous avez ressenti ces douleurs aux mains et aux pieds ?»

           R.» Quatre ans avant la suppression du couvent, je fis un voyage à Coesfeld, pour rendre visite à mes parents. Il m'est arrivé alors de prier une fois pendant environ deux heures derrière l'autel, au pied de la croix qui est dans l'église de Saint-Lambert. J'étais très-attristée de l'état de notre couvent, et j'avais prié pour que mes soeurs et moi, nous puissions reconnaître nos fautes afin que la paix s'établit. J'avais aussi prié pour que Jésus daignât me faire ressentir avec lui toutes ses souffrances. Depuis ce temps j'ai toujours eu les douleurs et l'inflammation. J'avais cru avoir une fièvre continue et que la douleur venait de là. La pensée me vint souvent aussi d'y voir un signe que ma prière avait été exaucée, mais je repoussais toujours cette pensée, parce que je me regardais comme étant indigne d'une semblable grâce. Souvent je ne pouvais pas marcher à cause des douleurs aux pieds. Les mains me faisaient aussi tellement mal que je ne pouvais plus faire certains travaux, par exemple bêcher la terre. Je ne pouvais pas plier le doigt du milieu et quelquefois il était comme mort.

           « Ayant déjà ces douleurs, un jour, au couvent, je priai instamment pour que mes soeurs et moi nous reconnussions nos fautes, pour que la paix s'établit et pour que mes souffrances cessassent. Alors je reçus pour réponse : « Tes souffrances ne diminueront pas. Que la grâce de Dieu te suffise. Aucune de tes soeurs ne mourra sans avoir reconnu ses fautes.» D'après cette réponse, lorsque les signes vinrent, je m'étais figuré qu'ils étaient seulement pour mes soeurs, et je pouvais m'y résigner : mais je fus saisie d'effroi quand je m'aperçus que ces signes devaient aussi être pour le monde.

10.» Quand je l'interrogeai touchant les croix de la poitrine, elle me dit : « Dés ma jeunesse j'ai prié Dieu de vouloir bien imprimer la croix dans mon cœur, afin que je n'oublie jamais ses souffrances : mais je n'ai jamais pensé à un signe extérieur.»

« Elle me fit connaître en outre que l'enquête minutieuse qu'on faisait sur sa vie antérieure n'était pas la moindre cause de ses souffrances, parce qu'on pouvait s'imaginer après cela qu'elle était quelque chose, tandis qu'elle-même savait bien mieux que personne qu'il n'y avait rien en elle.

 

11. Le jeudi 13 mai, vers quatre heures de l'après-midi, le sang jaillit de sa tête. Je vis le sang couler du front, non goutte à goutte, mais comme un jet. En moins d'une minute, le mouchoir qu'elle avait autour du cou fut tout ensanglanté. Pendant ce temps, elle était très-pâle et très-faible. Les mains aussi commencèrent à saigner. Avant l'hémorragie, elle eut de violentes douleurs au front et aux tempes par suite des piqûres d'épines qui se faisaient sentir jusque dans les yeux. Quand elle parla de ces piqûres, je lui dis que, si je le pouvais, je retirerais les épines de sa tête et pourtant que j'en laisserais une. Elle me répondit : « Je ne demande pas que vous m'ôtiez les épines ; je souffre volontiers ces douleurs.»

           « Je lui demandai quelle avait été sa pensée lorsqu'elle avait dit devant le doyen Rensing que ceux qui ne croyaient pas sentiraient ? Croyait-elle que ceux qui ne voulaient pas croire à la réalité de ses stigmates seraient punis pour cela ? Elle répondit en souriant : « Non certainement ; mes plaies ne sont pas un article de foi. Je voulais dire seulement que ceux qui ne veulent pas croire ce qu'enseigne la doctrine catholique ne trouveront pas, même sur la terre, un véritable repos, mais se sentiront misérables.»

 

12. Overberg rend ainsi compte d'une visite postérieure faite le 15 septembre 1864 : « Le matin, entre neuf et dix heures, je vis les signes des mains rougir et s'enfler, ce qui indiquait qu'ils allaient saigner. J'observai alors l'intérieur des mains pour voir si l'enflure s'y montrait aussi, mais je ne pus rien remarquer. Comme cela m'étonnait, Anne Catherine m'expliqua que les marques empreintes dans la paume des mains n'enflaient jamais avant de saigner, mais qu'au contraire elles s'enfonçaient en quelque sorte plus profondément pour devenir plus saillantes à la surface supérieure.

           « La croix de la poitrine n'avait pas saigné aujourd'hui, mais elle était d'un rouge très-vif. Cette rougeur se produit constamment aux jours marqués quand il n'y a pas effusion de sang.

 

13. Depuis le temps où Anne Catherine avait reçu les signes extérieurs des plaies, elle s'était appliquée soigneusement à dérober ses mains aux regards de tous les visiteurs. C'est pourquoi elle les tenait cachées sous la couverture du lit ou bien, quand l'inflammation des plaies ne le permettait pas, elle posait dessus un linge blanc : elle en était si préoccupée que, même dans l'extase, elle s'apercevait quand quelqu'un voulait ôter ce linge. Voici ce que raconte le docteur Wesener : « J'ai conduit un jour ma soeur aînée près d'Anne Catherine. Elle était couchée sans connaissance, comme cela lui arrivait fréquemment. Le père Limberg voulut soulever le linge placé sur ses mains ; elle en marqua du mécontentement, et il lui demanda : « Qu'avez-vous ?» Elle répondit à voix basse et sans ouvrir les yeux : « On veut de moi quelque chose que je ne dois pas faire.» Or, je désirais vivement dans mon cœur, ajoute Wesener, que ma soeur pût être fortifiée dans sa foi par la vue de ces merveilleux phénomènes. Anne Catherine répéta : « On veut de moi des signes que je ne dois pas donner.» Alors le père Limberg lui donna sa bénédiction. Aussitôt, sans sortir du sommeil extatique, elle se signa d'une main tremblante, mais en faisant des efforts pour que le linge ne tombât pas de dessus sa main.»

 

14. Quelque chose de semblable arriva à Overberg, le 10 septembre 1813, quand il accompagna à Dulmen la princesse Galitzin.» Je trouvai Anne Catherine très faible, rapporte-t-il. Comme j'étais près d'elle à six heures du soir, elle tomba dans une de ces profondes défaillances (extases) qui lui étaient ordinaires. J'approchai de son visage les deux premiers doigts de ma main droite ; aussitôt elle pencha la tête et les baisa avec respect. Alors je me penchai à mon tour vers sa main gauche qui était étendue devant moi, raide et immobile, afin de la baiser mais Anne Catherine, effrayée, la retira. Je me penchai ensuite vers la main droite : mais je ne pus pas non plus y atteindre, tant elle fut retirée vite, quoique dans cette défaillance tout le corps de la malade fût aussi raide qu'un morceau de bois.» Overberg avait fait ces tentatives par suite d'un mouvement involontaire de respect pour les stigmates ; mais l'humilité de la patiente, devenue pour elle une seconde nature, se dérobait à un semblable hommage, même quand elle n'avait pas l’usage de ses sens ; bien plus, elle ne pouvait supporter même un regard dirigé par un sentiment de ce genre, ainsi que le Pèlerin en fit l’épreuve plus tard.» J'étais assis près de son lit, raconte celui-ci, et je priais, pendant qu'elle était en extase et en proie à de grandes souffrances. Dans ma prière, j'offrais à Dieu les souffrances de tous les martyrs et les douleurs de tous les saints stigmatisés en union avec les très-saintes plaies de notre Sauveur : comme en même temps je regardai avec émotion les mains d'Anne Catherine, elle les retira avec une rapidité incroyable. Cela me surprit à tel point que je lui demandai ce qu'elle avait.» Une grande peine, « me répondit-elle sans sortir de sa profonde défaillance.»

 

15. Le doyen Rensing se trouvant auprès d'elle, un peu avant le moment où son sang allait couler, elle se plaignit des douleurs cuisantes qui précédaient toujours l’effusion du sang. Il lui demanda alors pourquoi elle n'avait pas découvert ses mains devant lui, ajoutant qu'elle ne devait se faire aucun scrupule de le faire en sa présence.» Ah ! répondit-elle, je ne puis pas moi-même souffrir de voir mes signes à découvert parce qu'en faisant croire à des grâces particulières, ils m'ont fait un renom dont je ne suis pas digne.» « Là-dessus elle me remercia, raconte Rensing, de ce que je n'avais pas laissé pénétrer auprès d'elle toute une société de curieux en voyage : puis elle se mit à pleurer de ce que ces bonnes gens se donnaient tant de peine pour elle et l’estimaient tant quoiqu'ils valussent bien mieux qu'elle devant Dieu.» Je dois aussi rendre grâce à Dieu, ajouta-t-elle, de ce qu'il ne me cache pas mes fautes et me confirme ainsi dans l'humilité.»

 

16. Dans une autre occasion, elle parla de nouveau de ces visites qui lui causaient tant de peines et de soucis et pria instamment Rensing de ne plus la laisser voir, surtout aux médecins étrangers qui, la plupart du temps, blessaient sans ménagement ses sentiments les plus délicats.» Il m'est bien dur, dit-elle, d'être obligée si souvent de montrer mes signes : mais cela m'est encore plus pénible quand je suis forcée de voir que ces gens ne s'occupent pas de ce qui peut intéresser la gloire de Dieu et n'ont d'autre but que d'avoir quelque chose à raconter à ce sujet.

« Je ne désire pas être délivrée des souffrances corporelles. Dieu me les laissera. Mais à quoi bon cette inspection et ces enquêtes ? Notre Sauveur lui-même n'a pas pu contenter tout le monde de façon à ce qu'on crut et à ce qu'on se convertit. D'autres ont trop de compassion pour moi. Que ne prient-ils pour moi afin que je me soumette humblement à tout ce que Dieu ordonne de moi par les supérieurs ecclésiastiques et que je ne perde pas sa grâce ?

Dieu conduit chaque homme par un chemin particulier. Mais qu'importe par quel chemin nous allions au ciel ? Puissions-nous seulement faire tout ce que Dieu demande de nous suivant notre état !»

 

17. Rensing lui ayant raconté dans une autre occasion comment sainte Véronique Giuliani avait eu longtemps autour de la tête les marques de la couronne d'épines et comment, lorsque la chose fut connue, on voulut les faire effacer par des médecins, ce qui lui fit souffrir de terribles douleurs, elle répondit en soupirant : « Je n'ai pas encore eu tant à supporter ; cependant lorsque l'autorité ecclésiastique a décidé que mes plaies devaient être guéries, cela m'a fait une bien pénible impression à cause des cruelles souffrances que j'éprouvais. J'ai ressenti les douleurs de la couronne d'épines autour de ma tête avant mon entrée au couvent ; cela m'est arrivé pour la première fois dans l'église des Jésuites à Coesfeld.»

 

18. A l'heure des premières vêpres de la fête de sainte Catherine de Sienne, Rensing la trouva rendant du sang par ses plaies ; mais elle saignèrent beaucoup plus fortement le jour même de la fête, 30 avril. Voici ce que Rensing rapporte à ce sujet : « Lorsque je la visitai à trois heures, je fus tellement surpris, en entrant dans sa chambre, à la vue du sang qui coulait incessamment de la tête et des mains que j'en fus tout bouleversé. Il m'échappa une expression d'admiration pour les grâces extraordinaires que le Seigneur lui fait. Elle le remarqua et dit : « Oui, Dieu me fait plus de grâces que je ne le mérite et je l'en remercie ; mais j'aurais voulu qu'il cachât ces grâces aux yeux des hommes, car je crains qu'à cause de cela, on ne y me prenne pour meilleure que je ne suis.» Nous eûmes alors un entretien qui me fit voir au fond de son âme si pleine de pureté et d'humilité, et me fit connaître quelques particularités de l'histoire de sa jeunesse où je vois la preuve la plus convaincante que, dès son enfance, la main de Dieu l'a conduite, protégée et préservée des périls les plus imminents. Je fus touché et étonné de voir une personne qui a reçu si peu d'éducation avoir des idées, si claires, si justes et si élevées sur Dieu et sur les choses de Dieu. Elle m'a raconté aussi que Dieu lui avait demandé la nuit précédente : « Qu'aimes-tu mieux ? être bientôt près de moi ou souffrir longtemps encore pour moi ?» A quoi elle répondit : « Si c'est votre volonté, je souffrirai de bon cœur encore davantage, pourvu que vous m’accordez la grâce de souffrir comme vous le voulez.» Dieu m'a promis cette grâce et cela m'a rendue très joyeuse. Dieu m'a aussi rappelé que, pendant ma vie au couvent, j'avais commis beaucoup de fautes contre la perfection à laquelle je suis appelée par mes voeux. Je me suis repentie de nouveau de ces fautes et j'ai reçu de Dieu l'assurance qu'elles ne m'avaient pas fait perdre sa grâce, parce que je m'étais humiliée devant lui et devant les hommes. Il m'a aussi fait souvenir qu'au couvent, quand j'étais méconnue de mes compagnes, j'ai souvent prié Dieu avec instance de vouloir bien leur faire reconnaître les fautes dont j'avais été l'occasion pour elles. Souvent, quand j'ai prié ainsi, et en particulier l'été de l'avant-dernière année, j'ai reçu la promesse consolante que toutes reconnaîtraient leurs fautes avant ma mort. Et maintenant toutes sont rentrées en elles-mêmes depuis que Dieu a mis sur moi des signes si extraordinaires. C'est là une grande joie et j'en rends de vives actions de grâces au milieu des grandes douleurs que me causent mes signes.»

 

19. « Je lui demandai une fois, écrit encore Rensing, si elle n'avait pas aussi une plaie sur l'épaule : car je crois que le Sauveur aura certainement eu sa sainte épaule blessée par sa pesante croix.» Oui, sans doute, répondit-elle. Notre divin Sauveur a eu à l'épaule une blessure très douloureuse mais je n'ai pas cette blessure, quoique j’en ai depuis longtemps ressenti la douleur à mon épaule. Déjà, dans ma jeunesse, je vénérais la sainte plaie de l'épaule, parce que cette vénération plaît particulièrement au Sauveur. Lorsque j'étais encore au couvent, il m'a révélé un jour que cette blessure, à laquelle on pense si peu, lui a causé des douleurs excessives, et que la vénération qu'on a pour elle lui plaît autant que lui aurait plu l'acte de celui qui, touché de compassion, lui aurait pris sa croix pendant qu'il en était chargé et l'aurait portée à sa place jusqu'au Calvaire. A l'âge de six ou sept ans, il m'est arrivé, lorsque j'étais seule et que je pensais à la Passion du Seigneur, de charger sur mes épaules une lourde pièce de bois ou quelque autre fardeau que je pouvais à peine traîner.

Pendant tout le mois de mai 1813, Rensing eut à noter presque journellement l'effusion du sang par les plaies et la violence croissante des douleurs qu'elles causaient. En outre, jusqu'au 8 mai, elle était restée toujours couchée sur le dos, de telle façon qu'elle y avait de profondes blessures en plusieurs endroits. Quoiqu'il en résultat pour elle des douleurs très-cuisantes, elle disait pourtant : « Je n'en tiens pas compte en comparaison de celles que me font souffrir continuellement les autres plaies. Cependant je supporterais volontiers toute espèce de souffrances corporelles, pourvu que le bon Dieu ne me retirât pas les consolations intérieures. Au lieu de consolations, maintenant, je ressens souvent une grande amertume intérieure. Cela est dur ; mais que la volonté de Dieu soit faite !»

 

20. Pendant l'octave de l'Invention de la sainte Croix, toutes ses plaies rendirent journellement du sang avec des douleurs toujours croissantes. Rensing la visitant le 3 mai au matin, trouva toutes les plaies saignantes ; ne devinant pas le rapport de cette manifestation avec la fête du jour, il exprima son étonnement, et Anne Catherine lui répondit : « Cela doit venir de ce qu'on célèbre aujourd'hui la fête de l'Invention de la sainte Croix.» Elle avait reçu ce jour-là la sainte communion, mais elle se plaignait d'avoir ressenti ensuite une sécheresse spirituelle inaccoutumée, ce qui lui avait été beaucoup plus pénible que les souffrances physiques les plus vives. Les douleurs de la couronne d'épines étaient extrêmement violentes autour du front, des yeux et des tempes, et elles descendaient jusqu'à l'intérieur de la bouche et au gosier. Elles persistèrent sans interruption pendant plusieurs jours et sans que la patiente est été fortifiée par des visions consolantes. Rensing n'avait pas la force de supporter cette vue ; ordinairement il restait près de la malade le moins de temps qu'il pouvait.

 

21. Elle lui dit le 6 mai : « Je sens les douleurs des plaies des pieds monter dans la poitrine ; c'est comme si toutes mes plaies se trouvaient en communication, de manière à ce que les douleurs passent de l'une à l'autre.» En outre son dos sur lequel elle était couchée s'était écorché par endroits, en sorte que la chemise et le drap du lit restaient collés à la peau ; toutefois, elle déclarait que la souffrance qu'elle en ressentait n'était pas comparable aux douleurs que lui causait chacune des autres plaies prise à part. Rensing lui ayant dit qu'étant dans un pareil état, elle devait avoir eu une bien mauvaise nuit, elle répondit : « Non ! ma souffrance elle-même m'a causé de la joie. Car, quand j'ai quelque chose à souffrir, je me réjouis et je remercie Dieu de ce que, par là, je ne suis pas oisive dans mon lit.» Elle s'exprima un jour de la même manière en présence d'0verberg, disant» que ce qu'il y avait de plus fâcheux pour elle était de n'avoir rien de particulier à souffrir, parce qu'elle ne se trouvait contente que quand Dieu daignait lui faire endurer quelque chose pour lui.»

 

22. Le 9 mai, Rensing la trouva dans un état qui montrait bien que ses souffrances n'avaient pas encore diminué le moins du monde ; mais Dieu lui avait rendu ses consolations, ce qui avait beaucoup relevé son courage. Elle raconta à Rensing que les douleurs étaient toujours aussi intenses autour de la tête : c'était comme si une corde de crin serrée tout autour y eût pénétré profondément ; elle craignait souvent d'en perdre la raison. Cependant elle se montra consolée et ajouta : « Ma souffrance ne m'est plus difficile à porter, parce que Dieu me l'a adoucie par des consolations que je ne mérite pas. Je me suis rendue indigne de semblables consolations, surtout au couvent, où je me suis souvent chagrinée des procédés de mes compagnes et où je me préoccupais beaucoup de la manière dont elles auraient dû se comporter et trop peu de ce que j'aurais dû être moi-même. C'était de l'ingratitude et de l'imperfection : c'est pourquoi je suis contente maintenant que Dieu me fasse souffrir ainsi. Et si je savais que par mes souffrances je pusse contribuer tant soit peu à sa glorification et à la conversion des pécheurs, je voudrais de grand cœur souffrir plus longtemps et davantage. Seulement, que Dieu me donne la patience !» Le soir de ce jour, les douleurs diminuèrent enfin quelque peu, et Rensing trouva la malade d'une sérénité inaccoutumée.

 

23. Outre les effusions de sang, elle avait journellement par tout le corps des sueurs tellement abondantes que tous les draps de son lit en étaient mouillés et traversés comme si on les eût trempés dans l'eau. Il en résultait des blessures dans le dos, et elle ne pouvait que rarement le mettre en contact avec le lit. Il lui était impossible de se coucher, soit sur le côté droit, à cause des douleurs intolérables de la plaie qui s'y trouvait, soit sur le côté gauche, parce que l'os de la hanche était complètement dégarni de chair. Il fallait donc qu’elle restât péniblement sur son séant, soutenue par des appuis, sans pouvoir poser sur un oreiller sa tête cruellement endolorie. Après sa mort, Clément Brentano rendit ce témoignage : « J'ai été pendant quatre ans en relations journalières avec Anne Catherine ; j'ai vu très souvent sa tête saigner avec de grandes douleurs, quoique jamais elle ne se soit montrée à moi la tête découverte et que je n'aie jamais vu les gouttes de sang jaillir immédiatement du front. Mais je voyais le sang couler de dessous sa coiffe sur son visage en telle quantité qu’on aurait pu le recueillir dans les plis de son fichu avant qu'il fût absorbé par la toile. Elle sentait sa tête entourée d'une large et pesante couronne d'épines et ne pouvait pas la poser sur un oreiller. Assise sur son séant elle balançait pendant des heures entières au-dessus de son cou, comme un fardeau de douleurs intolérables, sa tête courbée sous la pression d'un supplice inouï ; souvent je l'ai soutenue plus ou moins longtemps en tenant l'os du nez entre mes deux doigts, parce que je ne pouvais supporter la vue de ces horribles souffrances pendant lesquelles la sueur de l'agonie coulait sur son pâle visage. ; elle passait souvent toute la nuit dans cet état, délaissée, sans secours, sans marques de sympathie.»

 

24. Quant à l'impossibilité absolue de prendre aucune espèce de nourriture qui avait coïncidé avec l'apparition des stigmates, Overberg s'exprime en ces termes à la date du 12 mai 1813 :

« Depuis environ cinq mois, Anne Catherine n'a pris aucun aliment solide, pas même une quantité équivalente à un petit pois. Il ne lui a plus été possible de rien retenir, ni chocolat, ni café, ni vin, ni soupe ; tout au plus a-t-elle pu prendre quelquefois sans la rejeter une petite cuillerée de bouillon. Elle a cherché à cacher cela, en faisant mettre devant elle, pour qu'on les voie, une pomme cuite ou des prunes bouillies dont elle peut seulement sucer le jus.

« Pendant son séjour au couvent, un peu de café très léger était ce qu'elle pouvait le mieux supporter ; mais, au commencement de l'hiver dernier, elle en vint à ne plus pouvoir garder le café lui-même. Elle essaya ensuite de prendre du chocolat très délayé, mais cela ne lui réussit que peu de jours. Elle ne pouvait supporter le vin ; ni pur, ni mélangé d'eau. Ainsi l'eau resta l'unique chose qu'elle pût garder.»

 

25. On a déjà raconté comment Anne Catherine, qui aurait tant désiré cacher à tous les hommes son abstinence de toute nourriture, fut soupçonnée, dès le commencement, de manger en secret : or cette suspicion se reproduisit plus tard à diverses reprises. Ainsi Overberg rapporte, à la date du 17 septembre 1814 : « Selon ce que m'a raconté Rensing, la maîtresse de la maison où loge la sœur Emmerich resta jour et nuit, pendant tout le mois qui précédé ; sa mort, dans la chambre d'Anne Catherine, persuadée qu'étant là elle pourrait supporter plus facilement ses souffrances et se mieux préparer à la mort. Deux jours avant sa mort, cette femme a avoué à Rensing qu'auparavant la pensée lui était quelquefois venue qu'il ne fallait pas trop prendre à la lettre ce qu'on disait de l'abstinence absolue de nourriture chez la sœur Emmerich, mais que maintenant elle s'était convaincue qu'en réalité Anne Catherine ne prenait absolument rien.»

 

26. Wesener, de son côté, rapporte ainsi, à la date du 29 octobre 1814, comment il fut forcé de prendre la défense d'Anne Catherine contre des soupçons de ce genre : « J'ai reçu la visite du doyen de Notteln qui voulait, me dit-il, savoir par lui-même ce qu'il fallait croire du bruit répandu à Munster qu'on avait vu Anne Catherine hors de son lit et mangeant de la viande. Je le conduisis près de la malade, en le priant de bien observer sa physionomie pendant que je lui communiquerais ce bavardage sans aucun ménagement. Mon récit la fit sourire, et elle fit entendre que ces propos ne lui inspiraient que de la compassion pour ceux qui les auraient inventés et propagés. Je dois moi-même reconnaître, pour rendre hommage à la vérité, que j'ai pris bien de la peine pour trouver quelque chose dont elle prit manger sans le vomir aussitôt mais toujours inutilement. Si j'ai été trompé, je dois refuser croyance au témoignage de mes sens et à toutes mes facultés. En outre, la malade a un entourage qui se fait un plaisir de rendre publique la moindre chose tant soit peu équivoque ou capable de provoquer la suspicion. Sa propre sœur qui devrait la servir est une personne d'un esprit mal fait et d'un mauvais caractère, et, comme elle se met souvent dans le cas d'être reprise par moi et par malade, elle n'a aucune affection pour celle-ci et la laisse parfois des jours entiers sans lui donner une goutte d’eau à boire. Certainement elle ne garderait pas le silence en présence d’une imposture.

 

27. Le père Limberg lui-même, par suite de sa disposition au scrupule, se laissait si facilement aller au soupçon que quinze mois après la fin de l'enquête, ayant aperçu au drap de lit de la malade une tache de couleur foncée qu’il ne pouvait s’expliquer, il fut, pendant plusieurs jours, extrêmement agité par la crainte qu'elle ne provint d’un aliment mangé en cachette. Clara Soentgen et Wesener finirent par le rassurer en lui expliquant que la tache venait d’un emplâtre que la première, sur la demande de la malade lui avait posé sur l'os de la hanche. Anne Catherine ne put s'empêcher de sourire de l'inquiétude si peu raisonnable de son confesseur, et elle dit : « Si je pouvais manger, je ne sais vraiment pas pourquoi j'en ferais un secret.» Cependant elle le pria, de lui communiquer à l'avenir les soupçons qui lui viendraient et de ne pas les garder pour lui pendant des jours. Noue verrons plus tard tout ce qu'elle eut à souffrir des tentatives de Wesener pour lui faire prendre des aliments.

 

28. Voici ce que rapporte Overberg sur sa manière de prier lorsqu'elle faisait la sainte communion :

« La préparation la plus prochaine à la réception de la sainte Eucharistie consiste pour Anne Catherine à prier Dieu, son Sauveur, de lui donner son propre cœur, pour qu'elle puisse le recevoir et l'héberger dignement. Elle lui représente qu'elle ne peut l'aimer et le louer comme il le mérite, sinon par son cœur divin et avec ce cœur. Elle lui offre pour cela son cœur à elle et le prie de le prendre et d'en faire ce qui lui plaira. Quand elle l'a ainsi livré à Dieu, elle passe en revue toutes les puissances de son corps et de son âme, afin de donner à Dieu tout ce qu'elle possède. Elle lui offre ses yeux, ses oreilles et tous ses membres, le suppliant d'en user pleinement pour son service et d'accomplir par eux ce qu'elle ne peut pas elle-même. Elle contracte alors un engagement avec Dieu, s'obligeant à le remercier et à le louer avec tout ce qui est d'elle et en elle ; chaque souffle, chaque sentiment, chaque mouvement des yeux et des mains, chaque instant de ses souffrances doit devenir un acte de gratitude et de louange.

« Ensuite elle s'adresse aux saints, les priant de lui prêter ou de lui donner quelque chose de leur beauté, des ornements dont ils sont parés ou de leurs vertus, pour qu'elle puisse mieux faire sa préparation à la sainte communion et rendre des actions de grâces plus ferventes. Par-dessus tout, elle s'adresse à la Mère de Dieu pour qu'elle lui confère un don tiré du trésor surabondant de sa gloire et de ses vertus. Elle la prie notamment de mettre entre ses bras le divin enfant comme elle l'a fait pour les rois de l'Orient. Puis elle va d'un saint à l'autre, demandant l'aumône et rappelant à chacun ses prérogatives particulières, afin d'obtenir pour elle-même un don à l'aide duquel elle puisse plaire davantage au divin Sauveur. Elle les invoque en ces termes : « Vous êtes si immensément riches et je suis si pauvre ! ayez donc pitié de moi ! je ne demande qu'un peu de votre superflu !» Après la communion, elle entre en extase comme elle le faisait au couvent.