TROISIEME CHAPITRE. Jean Baptiste. Son séjour dans le désert, il creuse une fontaine baptismale après une Vision.
(De la fin de mai au 26 septembre 1821.) (24 juin 1820.) Je vis Jean qui grandissait ; il habitait très avant dans le désert, et il se mortifiait de toutes les manières. Il dormait en plein air sur le rocher nu, il courait de toutes ses forces sur des pierres ou à travers les chardons et les ronces ; il se flagellait avec des épines ; il travaillait jusqu'à l'épuisement à façonner des arbres et des pierres, et restait de longues heures en prière et en contemplation. Je vis souvent des figures lumineuses près de lui dans la solitude ; à l'âge de dix sept ans environ. je le vis visiter secrètement et sans être vu la maison de ses parents. Zacharie était mort, mais Elisabeth vivait encore. Après cette visite, il s'enfonça beaucoup plus avant dans le désert qu'il ne l'avait fait jusqu'alors : il s'avançait toujours dans la direction du nord est et se rapprochait de la contrée où je vois dans mes visions la merveilleuse montagne des prophètes et les eaux qui en découlent sur la terre. Il alla dans une contrée où longtemps après je vis saint Jean l'Evangéliste se reposer et écrire sous de grands arbres. Il y avait là des arbres très élevés, et au dessous de ceux ci des arbrisseaux avec des baies dont il mangeait. Je le vis aussi manger d'une herbe qui a cinq feuilles rondes comme celles du trèfle et une fleur blanche. Il y avait des herbes semblables, quoique plus petites, près de chez nous, sous des haies (c'est la plante appelée pied de lièvre, OXALIS) : les feuilles avaient un goût acide. J'en mangeais souvent étant enfant quand je gardais mon troupeau, parce que dès ce temps, j'avais vu Jean en manger. Je le vis aussi retirer du creux des arbres et de dessous la mousse qui couvrait la terre quelque chose de brun qu'il mangeait et qui me semblait être du miel sauvage : on en trouvait là fréquemment. Je le vis, lorsqu'il fut devenu plus grand, porter autour des reins la peau de mouton qu'il avait apportée avec lui : il n'eut pas d'autre vêtement jusqu'à ce qu'il se fût tressé lui même une couverture brune à longs poils, qu'il portait attachée sur ses épaules. Il y avait dans cette solitude des animaux avec une toison laineuse qui l'approchaient familièrement ; et aussi des chameaux qui se laissaient arracher par lui les longs poils qu'ils avaient autour du cou. Je le vis en faire des tresses avec lesquelles il confectionna une couverture qu'il avait encore sur lui lorsqu'il parut de nouveau au milieu des hommes pour baptiser. Je le vis dans ce désert s'imposer des pénitences et des mortifications de plus en plus rudes et s'adonner à la prière avec une assiduité et une ferveur toujours croissantes. Jean, dans tout le cours de sa vie, n'a vu le Sauveur que trois fois. La première fois, ce fut dans le désert quand la sainte Famille passa dans son voisinage lors de la fuite en l'Egypte. Je vis à plusieurs reprises, le spectacle incroyablement touchant de Jean conduit par l'esprit et accourant pour saluer son maître qu'il avait déjà salué dans le sein de sa mère. (1) Il portait sa peau de mouton jetée sur l'épaule et rattachée autour du corps. Il sentit que son Sauveur était près de lui et souffrait de la soif. Alors l'enfant pria et de son petit bâton il frappa la terre d'où jaillit une source abondante. Jean courut en avant dans la direction que l'eau allait prendre. il s'arrêta pour voir passer Jésus avec Marie et Joseph, puis il sauta joyeusement et fit un signe avec son petit drapeau. La seconde fois qu'il vit Jésus fut lors de son baptême, la troisième fois, lorsqu'il le vit passer le long du Jourdain et rendit témoignage de lui. J'entendis une fois le Sauveur parler à ses apôtres du grand empire que Jean avait sur lui même : il dit que, même du baptême, il s'était borné à la contempler pendant la cérémonie, quoique son coeur fut prêt à se briser a force d'amour. Plus tard il avait mieux aimé se retirer humblement d'auprès de lui que de céder à son amour et de chercher à se rapprocher de lui. Jean voyait toujours le Seigneur en esprit, car il était constamment dans l'état prophétique. Il voyait Jésus comme l'accomplissement de sa mission, comme la raison d'être de sa vocation prophétique. Note 1 : Cet incident est raconté en détail dans la vie de la sainte Vierge. Jésus n'était pas pour lui un contemporain, un homme vivant de la même vie ; c'était le Rédempteur du monde, le Fils de Dieu fait homme, l'Eternel se manifestant dans le temps C'est pourquoi la pensée de chercher à frayer avec lui ne pouvait pas entrer dans son esprit. En outre, Jean ne se sentait pas lui même vivant dans le temps et dans le monde, ni mêlé aux choses de la terre, comme les autres hommes. Dès le sein de sa mère, il s'était trouvé en contact avec les choses éternelles et le Saint Esprit avait établi entre son Rédempteur et lui des rapports qui existaient hors du temps. Encore enfant, il avait été enlevé au monde, et son éducation, livrée à des influences d'un ordre supérieur, s'était faite au sein de la nature toute imprégnée de Dieu. il vécut séparé des hommes, au fond des solitudes les plus reculées, ne sachant rien, si ce n'est son Rédempteur, jusqu'à ce qu'il sortit du désert, comme ayant reçu une nouvelle naissance et commençât sa carrière publique, toujours austère, enthousiaste, ardent, ne craignant rien et ne s'inquiétant de rien. La Judée est maintenant pour lui le désert ; dans la solitude, il frayait avec les sources, les rochers, les arbres et les bêtes sauvages, vivait et conversait avec eux ; c'est de même qu'il parle et qu'il agit maintenant parmi les hommes et les pécheurs, sans penser à lui même. Il ne voit, ne connaît que Jésus ; il ne parle que de lui. Ses discours se bornent à dire : " il vient préparer les voies : faites pénitence, recevez le baptême. Voici l'agneau de Dieu qui porte les péchés du monde ! "Dans le désert, il était pur et innocent comme un enfant dans le ventre de sa mère, il est sorti du désert pur et candide comme un enfant suspendu au sein de sa mère. J'entendis le Seigneur dire aux apôtres : "Il est pur comme un ange, rien d'impur n'est entré dans sa bouche, pas plus qu'un péché ou un mensonge n'est sorti de sa bouche. " (Mai 1821.) Je vis que Jean eut une révélation sur le baptême, et que par suite de cette révélation, un peu avant de sortir du désert, il construisit une fontaine à peu de distance des lieux habités. Avant que Jean eut commencé à creuser cette fontaine, je le vis devant sa grotte, au côté occidental d'un rocher escarpé. à sa gauche était un ruisseau, peut être une des sources du Jourdain, qui prend naissance dans une grotte au pied du Liban, entre deux montagnes ; on voit ce ruisseau quand on est tout auprès ; à sa droite était une place unie, ayant le désert de tous les côtés : c'était là que devait être la fontaine. Jean avait un genou en terre : sur l'autre, il tenait un long rouleau d'écorce, sur lequel il écrivait avec un roseau. un soleil ardent brillait sur sa tête. Il regardait le Liban, qui était au couchant par rapport à lui. Pendant qu'il écrivait ainsi, il fut comme frappé d'immobilité : je le vis tout absorbé et comme ravi en extase. Je vis debout devant lui un homme qui, pendant son extase, écrivait et dessinait beaucoup de choses sur le rouleau. Lorsque Jean revint à lui, il lut ce qui était sur le rouleau et commença à travailler à la fontaine avec beaucoup d'ardeur. Pendant qu'il travaillait, le rouleau était par terre, maintenu avec deux pierres qui le tenaient étendu, et il y regardait souvent, car tout ce qu'il avait à faire semblait y être indiqué. à l'occasion de la fontaine et de sa situation, je vis ce qui suit de la vie du prophète Elle. Le prophète s'était assis tout chagrin, à cause d'une faute commise dans le désert, et il s'endormit. Alors il vit en songe un enfant qui le poussait avec un petit bâton, et près de lui une fontaine dans laquelle il craignait de tomber ; car je le vis, à la suite du coup, rouler à quelque distance. Je vis ensuite un ange le réveiller et lui donner à boire. Cela se passa au lieu même où maintenant Jean creusait la fontaine. Je connus la signification des diverses couches de terre à travers lesquelles Jean creusait la fontaine et de tous les travaux qu'il fit pour l'achever. Tout se rapportait à la dureté et à d'autres mauvaises qualités du coeur qu'il devait vaincre chez les hommes, afin que la grâce du Seigneur pût agir sur eux. Je fus informée alors que ce travail qu'il faisait, ainsi que toute sa vie et toutes ses actions, était un symbole et une figure ; en tout cela, non seulement il était instruit par l'Esprit Saint de ce qu'il avait à faire, mais encore il faisait réellement ce que signifiaient ces travaux, parce que Dieu exauçait la bonne intention qu'il y joignait. C'était le Saint Esprit qui le poussait à tout cela, comme les prophètes. Il enleva le gazon circulairement et creusa avec beaucoup de soin et d'adresse dans le sol dur et marneux un bassin spacieux, de forme ronde, qu'il garnit de différentes pierres, excepté au milieu, à l'endroit le plus profond, où il avait creusé jusqu'à une petite veine d'eau. De la terre qu'il avait rejetée il fit autour du bassin un rebord où il y avait cinq coupures. En face de quatre de ces brèches il planta, à égale distance autour du bassin, quatre tiges minces, dont le haut était couvert de feuilles vertes. Elles étaient de quatre espèces différentes et chacune signifiait quelque chose. Au milieu du bassin, il planta un arbre d'une espèce particulière avec des feuilles effilées et dés bouquets de fleurs en forme pyramidale avec un fruit à pointe épineuse déjà noué. Cet arbre, un peu flétri, avait été longtemps devant sa grotte. Les quatre tiges qui étaient alentour me semblaient être celles d'arbustes élancés qui portaient des baies. Il en entoura le pied de terre un peu exhaussée. Lorsqu'en creusant le bassin il fut arrivé à l'eau, à l'endroit où ensuite l'arbre du milieu fut planté, il creusa une rigole allant du ruisseau qui était près de sa grotte jusqu'au bassin ; après quoi je le vis cueillir des roseaux dans le désert, les ajuster les uns au bout des autres, conduire ainsi l'eau du ruisseau dans le bassin et recouvrir de terre ce conduit qui pouvait être fermé. Il avait pratiqué un sentier à travers les broussailles jusqu'à la brèche qui se trouvait en face, dans le rebord du bassin. Ce sentier faisait le tour du bassin entre le rebord et les quatre arbres qu'il avait plantés en face des quatre coupures du rebord. à la coupure qui formait l'entrée, il n'y avait pas d'arbre, De ce côté seulement la fontaine était dégagée, des autres côtés elle n'était séparée des broussailles et des rochers que par le sentier qui en faisait le tour. Il planta sur les petits tertres de gazon qui étaient au pied des quatre arbres une plante qui ne m'est pas inconnue(2). Je l'aimais beaucoup quand j'étais enfant, et lorsque je la trouvais, je la plantais dans le voisinage de notre maison. Elle a une tige grosse, assez élevée, porte des globules d'un rouge brun et elle est très efficace contre les abcès et les maux de gorge, comme je l'ai éprouvé aujourd'hui i. Il plaça encore à l'entour des plantes de toute espèce et de petits arbustes. Note 2 : Sur un dessin qu'on lui montre, elle reconnaît cette plante pour le telephium purpureum ou sedum Linnoei, (Vulg : Orpin, ou herbe à la coupure). Elle en parla comme d'un remède contre les ulcères scrofuleux, intérieurs et extérieurs, spécialement au cou. Bouillie avec de la marjolaine dans de l'eau et du vin, et appliquée comme cataplasme, elle résout les ulcères invétérés : on en fait aussi des gargarismes pour le mal de gorge. Pendant tous ces travaux, il regardait de temps en temps sur le rouleau d'écorce étendu devant lui et prenait ses mesures avec un bâton : car il me semblait que tout y était indiqué, même les arbres qu'il plantait. Je me souviens d'y avoir vu figuré l'arbre du milieu ; j'ai eu aussi la signification de tout cela, mais je l'ai oubliée. Il travailla ainsi plusieurs semaines et ce ne fut que quand il eut fini, qu'une petite veine d'eau commença à sourdre au fond du bassin. L'arbre du milieu, dont les feuilles étaient flétries et noirâtres, reverdit ; Jean prit dans un vase fait d'un grand morceau d'écorce d'arbre et enduit de poix aux côtés, de l'eau d'une autre source qu'il versa dans le bassin. Cette eau venait d'une source (3) qui avait jailli du rocher près d'un de ses séjours antérieurs, lorsqu'il avait frappé le rocher avec son petit bâton. J'ai oublié ce qui avait pu se passer d'important à cette occasion. J'appris aussi qu'en ce lieu où il avait séjourné antérieurement, il n'avait pas pu creuser de fontaine, parce que là il n'y avait que le roc pur ; et cela aussi avait sa signification. Il fit ensuite arriver du ruisseau dans le bassin autant d'eau qu'il était nécessaire : quand il y en avait surabondance, elle coulait par les ouvertures sur le sol environnant et rafraîchissait les plantes. Je vis ensuite que Jean descendit dans l'eau jusqu'à la ceinture, saisit d'une main l'arbre du milieu et avec son bâton, qu'il avait surmonté d'une croix et d'une banderole, frappa dans l'eau de manière à la faire rejaillir au dessus de sa tête. Je vis que dans ce moment il vint sur lui d'en haut une nuée lumineuse et comme une effusion du Saint Esprit, et que deux anges parurent au bord du bassin et lui dirent quelque chose. Je vis cela comme la dernière chose qu'il fit dans le désert. Note 3 : Ne serait ce pas cette source qu'étant enfant, il avait fait jaillir avec son bâton, lorsqu'il avait vu dans une vision Jésus souffrir de la soif pendant la fuite en Egypte ? En juin 1820, entre autres fragments de la vie de Jean Baptiste, elle raconta la vision suivante : J'ai vu la fontaine dont j'ai parle servir encore après la mort de Jésus. Lorsque les chrétiens étaient en fuite, on baptisait là des voyageurs et des malades ; on venait aussi y prier. à cette époque, au temps de Pierre, la fontaine était entourée d'un mur. (juin 1820 et juillet l821.) Bientôt après l'achèvement de la fontaine baptismale, je vis Jean sortir du désert en montant vers la source du Jourdain et revenir parmi les hommes. Il produisait une impression merveilleuse. Il est de grande taille, amaigri parle jeûne et les mortifications corporelles, mais fort et nerveux ; il y a en lui une dignité, une pureté, une simplicité incroyable ; il va toujours droit au but et son ton est celui du commandement. Il a le teint brun ; son visage est maigre et tire, grave et austère ; ses cheveux sont frisés et d'un brun rougeâtre ; sa barbe est courte. Il a au milieu du corps un drap qui l'enveloppe et qui tombe jusqu'aux genoux. Il porte un manteau grossier de couleur brune qui parait fait de trois morceaux. il le couvre entièrement par derrière et il est assujetti par une courroie autour de la taille. Les bras et la poitrine sont libres et découverts. La poitrine est toute couverte de poils, qui sont à peu près de la couleur du manteau. Il porte un bâton recourbé comme une houlette. Lorsqu'il sortit du désert, je le vis d'abord établir un petit pont sur un ruisseau. Il ne pensait pas à aller chercher un passage qui se trouvait un peu plus bas : mais il travaillait droit devant lui, dans la direction du chemin qu'il avait à suivre. Il y avait là une ancienne route de grande communication. Je l'ai vu près de Cydessa enseigner les gens qui étaient autour de lui : ce furent les premiers pa'ens qui vinrent à son baptême. Ils vivaient là dans l'abandon et habitaient des cabanes en terre. C'étaient les descendants de gens de toute espèce qui s'étaient établis là à ;'époque de t la dernière destruction du temple avant Jésus. J'ai vu quelque chose touchant un des derniers prophètes, qui leur avait dit qu'ils devaient demeurer là, jusqu'à la venue d'un homme semblable à Jean, qui leur dirait ce qu'ils auraient à faire. J'ai aussi vu que dans la suite ils sont allés à Nazareth. Jean allait droit aux hommes, sans que rien le détournât, et il ne parlait que d'une chose : de la pénitence et de l'approche du Seigneur. Tous s'étonnaient et devenaient sérieux quand il paraissait. Sa voix était perçante comme une épée, claire, forte, et cependant agréable. Il traitait tous les hommes, quels qu'ils fussent. comme des enfants. Partout il allait droit son chemin : rien ne pouvait le détourner de sa voie, il ne regardait à rien, il n'avait besoin de rien. Je le vis ainsi parcourir les bois et les déserts, creuser ça et là, rouler des pierres, enlever des arbres, préparer des lieux de repos, rassembler autour de lui les hommes qui le regardaient avec surprise, et même aller les chercher dans leurs cabanes pour les faire travailler avec lui. Je vis que tous le regardaient avec étonnement et admiration, qu'il ne s'arrêtait longtemps nulle part et allait sans cesse d'un endroit à l'autre. Je le vis suivre le bord de la mer de Galilée, descendre la vallée du Jourdain au dessous de Tarichée ; puis, près de Salem, aller vers Bethel par le désert, et passer devant Jérusalem, ou il n'alla jamais, et qu'il regardait avec tristesse et en gémissant. Tout entier à sa mission, grave, austère, simple, inspiré, il criait sans cesse : "Faites pénitence, préparez vous ; le Sauveur vient !" il alla ensuite dans sa patrie par la vallée des bergers. Son père et sa mère étaient morts : quelques jeunes gens, ses parents du côté de Zacharie, furent ses premiers disciples. Lorsque Jean passa par Bethsaide, Capharnaum et Nazareth, la sainte Vierge ne le vit point : elle sortait peu de chez elle depuis la mort de saint Joseph : mais des hommes de sa famille entendirent ses exhortations et l'accompagnèrent quelque temps sur le chemin. Pendant les trois mois qui précédèrent le baptême, Jean parcourut API]y fois le pays. annonçant celui qui devait venir après lui. il y avait dans toutes ses allures une autorité, incroyable : il s'avançait d'un pas ferme et rapide, mais sans précipitation. Ce n'était pas une démarche calme, comme celle du Sauveur. Là où il n'avait rien à faire, je l'ai vu courir d'un champ à un autre. Il entre dans les maisons, il va enseigner dans les écoles et rassemble aussi le peuple autour de lui dans les rues et sur les places. Je vis quelquefois des prêtres et des magistrats l'arrêter et lui demander des explications, mais bientôt, saisis d'étonnement et d'admiration, ils le laissaient aller librement. Je vis que l'expression "préparer les voies du Seigneur " n'était pas une simple figure, car je le vis commencer ses fonctions en préparant des chemins, et parcourir tous les lieux et tous les chemins où passèrent plus tard Jésus et ses disciples. Il enlevait ça et là des broussailles et des pierres, et pratiquait des sentiers. Il établissait des passages sur les ruisseaux. nettoyait leur lit. creusait des réservoirs et des fontaines, préparait des sièges, des lieux de repos, et faisait des toits de feuillage. Je l'ai vu faire divers arrangements dans des endroits où, par la suite, le Seigneur s'est reposé, a enseigné, a agi. En se livrant à ces travaux. cet homme grave, simple et solitaire, avec son vêtement grossier et son aspect austère, attirait sur lui l'attention des gens de la campagne : il excitait l'étonnement dans les cabanes ou il entrait, afin d'y emprunter les outils nécessaires pour son travail, et où il prenait aussi des gens pour l'aider. Partout où il allait, on l'entourait aussitôt, et il exhortait gravement et hardiment à la pénitence, annonçant que le Messie venait après lui et qu'il lui préparait les voies. Souvent je le vis montrer du doigt la contrée où Jésus se trouvait alors. Cependant je ne les vis jamais ensemble, quoique souvent il y eût à peine entre eux une heure de chemin. une fois je le vis à une petite lieue de Jésus tout au plus : alors il cria aux auditeurs qu'il n'était pas le Sauveur attendu, mais un pauvre pionnier ; et, montrant un point de l'horizon : "C est là, dit il, que se trouve le Sauveur. " (4 juillet l821) Jean baptisa en divers endroits : d'abord près d'Ainon, dans la contrée de Salem, puis à On, vis à vis Bethabara, sur la rive occidentale du Jourdain, à peu de distance de Jéricho : c'est là que dans quelques semaines il baptisera Jésus. Le troisième endroit était au levant du Jourdain, deux lieues plus au nord que le premier. Enfin, en dernier lieu, il baptisa encore à Ainon, et c'est là qu'il fut arrêté. Le cours d'eau (4) où Jean baptise est comme un bras du Jourdain qui fait un détour d'environ une lieue au levant du fleuve. Ce bras est quelquefois si étroit, qu'on peut le franchir d'un saut ; d'autres fois il est plus large. Il peut avoir changé de lit en quelques endroits, car alors déjà je voyais bien des places sans eau. La courbe que fait ce bras du Jourdain renferme de petits étangs et des fontaines qui en tirent leur eau. un de ces étangs, séparé du bras par une chaussée, est le lieu où Jean baptise à Ainon. Il y avait sous la chaussée des conduits par lesquels on pouvait faire arriver l'eau ou la faire écouler. Jean avait fait divers arrangements dans cet endroit. On avait creusé dans le rivage une petite baie dans laquelle s'avançaient des langues de terre. Note 4 : On lira plus bas une autre description plus détaillée de cet endroit. L'homme qui allait être baptisé se tenait entre deux d'entre elles, plongé dans l'eau jusqu'à la ceinture, et s'appuyait sur une barrière qui courait en avant de tous ces prolongements. Jean se tenait sur l'un d'eux et versait de l'eau avec une écuelle sur la tête du néophyte ; de l'autre côté était un homme déjà baptisé qui mettait la main sur la tête de celui ci. Jean avait lui même imposé les mains au premier. Les néophytes n'avaient pas le haut du corps entièrement nu : ils étaient enveloppés dans une espèce de drap blanc, les épaules seules paraissaient. Il y avait aussi là une cabane ou ils se déshabillaient et se rhabillaient. Je n'ai pas vu baptiser de femmes ici. Jean, lorsqu'il baptise, met une longue robe blanche. Il y a une contrée très agréable et très abondante en eau, où l'on donne le baptême : elle s'appelle Salem. Le bourg même de Salem lui même est situé sur les deux rives d'un bras du fleuve, tandis qu'Ainon, au contraire, est au delà du Jourdain, plus au nord que Salem, plus prés du fleuve et plus considérable. Des troupeaux paissent dans les environs : beaucoup d'ânes broutent dans les prairies verdoyantes au bord des eaux. Il y a eu ici, près d'Ainon et de Salem, une espèce de terre libre, où il existait une sorte de privilège traditionnel, à raison duquel on ne pouvait en chasser personne. Jean avait sa cabane à Ainon sur de vieilles substructions, sur lesquelles s'élevait autrefois un grand édifice. Ce n'étaient plus que des ruines où l'herbe poussait : on y avait bâti quelques cabanes. C'étaient les fondations d'un château formé de tentes que Melchisédech avait ici. J'ai vu différentes scènes qui se sont passées là à une époque plus reculée : la seule chose dont je me souvienne est Abraham eut ici une vision et érigea deux pierres : l'une où il s'agenouillait l'autre qui était comme une espèce d'autel. Je vis ce qui lui avait été montré : c'était une cité de Dieu comme la Jérusalem céleste, et il en descendit des courants d'eau sous forme de rayons. Il lui fut aussi ordonné de prier pour l'avènement de la cité de Dieu. L'eau qui sortait de la ville se répandait de tous les côtés. Abraham eut cette vision environ cinq ans avant que Melchisédech bâtît ici son château de tentes. J'ai aussi vu que Melchisédech bâtit un château près de Salem. C'était plutôt une grande tente avec des galeries et des escaliers, comme le château de Mensor en Arabie : seulement les fondements étaient en pierre et très solides. Je crois avoir vu encore, à l'époque de Jean, les quatre angles où étaient plantés les principaux pieux. Il en restait seulement des fondations en pierre très solidement bâties, lesquelles ressemblaient alors à un rempart sur lequel l'herbe a poussé et sur lesquelles Jean avait une petite cabane de roseaux. Ce château de tentes était un lieu où logeaient beaucoup d'étrangers et de passants, une sorte d'hôtellerie gratuite et magnifique au bord de ces belles eaux. Peut être Melchisédech, que j'ai toujours vu servir de conseiller et de guide aux peuples et aux races qui allaient d'un lieu à l'autre, avait il bâti ce château pour y donner l'hospitalité ou pour y enseigner ; mais il y avait dès lors quelque chose qui se rapportait au baptême. Cet endroit était pour Melchisédech comme un point central d'où il se rendait soit à Jérusalem où il bâtissait, soit auprès d'Abraham, soit ailleurs : il y réunissait des familles et des individus auxquels il assignait des résidences et qui s'établissaient dans un endroit ou dans un autre. Ceci se passait avant l'oblation du pain et du vin qui eut lieu, je crois, dans une vallée au midi de Jérusalem. il bâtit cet édifice avant de bâtir à Jérusalem. J'ai vu aussi sur la montagne du Calvaire quelque chose touchant le baptême d'eau et le baptême de sang : mais je l'ai oublié ainsi que les diverses significations qui s'y rattachaient. Melchisédech avait l'apparence d'un jeune homme d'environ vingt cinq ans. Je le vis à différentes époques, mais jamais plus vieux. Son extérieur tenait moins de l'homme que celui de Jésus. Il n'avait jamais la tête couverte : sa chevelure blonde était passée derrière ses oreilles. Je le vis souvent absent, et alors il me semblait être ailleurs que sur la terre, par exemple dans le paradis ou en quelque autre endroit habité par de purs esprits. Souvent je le vis aller seul, souvent avec des gens et des bêtes de somme. Je ne vis jamais près de lui des personnages de sa sorte, parents ou prêtres. Là où il agissait et bâtissait, il semblait poser la pierre fondamentale d'une grâce future, attirer l'attention sur un lieu, commencer quelque chose qui était destiné à un grand avenir. Je n'ai jamais beaucoup réfléchi là dessus : je prends les choses comme elles se présentent Une autre fois, Anne Catherine dit de Melchisédech : Il était comme préposé à un grand nombre d'anges. Je l'ai déjà vu antérieurement paraître en divers endroits de la Terre Promise, lorsqu'elle était encore tout à fait déserte, longtemps avant le temps de Sémiramis et d'Abraham ; il semblait disposer le pays d'avance, désigner et préparer certains lieux : ainsi je crois qu'il a ouvert la source du Jourdain. J'ai ne souvent une vision où je voyais un homme absolument seul dans un pays et je ne pouvais m'empêcher de me dire : `` Que fait donc cet homme ici à une époque si reculée, quand il ne s'y trouve encore personne ? C'est ainsi que le je vis percer une montagne pour en faire sortir une fontaine : c'était la source du Jourdain. Il avait pour percer un long et bel instrument qui entra comme un rayon dans la montagne. Je le `vis ainsi ouvrir des sources en divers lieux de la terre. Dans les premiers temps du monde, avant le déluge, je ne voyais pas les rivières jaillir et couler comme aujourd'hui ; mais je voyais une très grande quantité d'eau descendre d'une montagne située à l'orient. J'ai toujours vu Melchisédech seul, excepté lorsqu'il était occupe à réconcilier à séparer ou à ruiner des familles et des races de peuples. Jacob aussi avait résidé longtemps près d'Ainon avec ses troupeaux. La citerne de la fontaine baptismale existait déjà alors et je vis Jacob la réparer. Les restes du château de Melchisédech étaient au bord de l'eau, près du lieu où l'on baptisait ; dans les premiers temps du Christianisme, je vis une église s'élever à l'endroit où Jean avait baptisé. J'ai vu cette église subsister encore lorsque sainte Marie Egyptienne passa par là pour aller dans le désert. Salem était une belle ville, mais elle avait été dévastée pendant une guerre, lors de la destruction du temple antérieure à Jésus, si je ne me trompe. Le dernier des prophètes avait aussi séjourné ici. (26 28 juin.) Il y avait environ deux semaines que Jean était devenu célèbre par sa prédication et son baptême, lorsque je vis des messagers d'Hérode venir à lui de Callirrhoé. Hérode habitait là un château au levant de la mer Morte dans un lieu où il y a beaucoup de bains et de sources d'eaux chaudes. Hérode voulait que Jean vînt le visiter : mais Jean répondit à ses envoyés qu'il avait beaucoup à faire et que si Hérode voulait lui parler, il n'avait qu'à venir lui même le trouver. Après cela, je vis Hérode sur un chariot à roues basses, surmonté d'un siège élevé d'où il pouvait tout voir de loin comme du haut d'un trône ; il était entouré de soldats et il allait à une petite ville, située à environ cinq lieues au midi d'Ainon, d'où il fit inviter Jean à venir. Jean se rendit devant cet endroit et il entra dans une cabane qui servait aux étrangers, où Hérode vint le trouver sans être accompagné de personne. Ils eurent un court entretien, dont je me rappelle seulement qu'Hérode lui demanda pourquoi il logeait à Ainon dans une si misérable cabane, ajoutant qu'il voulait lui faire bâtir une maison ; à quoi Jean répondit qu'il n'avait pas besoin de maison, qu'il avait ce qu'il lui fallait et qu'il faisait la volonté d'un plus grand que lui Il parla avec gravité et sévérité et s'en retourna. Il se tint toujours à une certaine distance d'Hérode et lui parla peu sans le regarder. (30 juin.) J'ai vu que les fils d'Alphée et de Marie de Cléophas, Simon, Jacques le Mineur et Thaddée, et le fils de son second mariage avec Sabas, José Barsabas, se sont fait baptiser par Jean à Ainon. André et Philippe aussi sont déjà venus le voir. André a été baptisé par lui, Philippe aussi, à ce que je crois. Ils sont ensuite retournés à leurs affaires. Jean Baptiste a déjà une vingtaine de disciples. (4 juillet.) La plupart des apôtres et plusieurs disciples ont déjà reçu le baptême : Nathanaël pas encore, non plus qu'un autre dont le nom ne me revient pas. Ici, on demanda si elle ne se rappelait rien du baptême de Marie : elle répondit que non, qu'elle n'en avait pas de souvenir distinct ; qu'elle avait une idée confuse que Marie avait été baptisée seule à la piscine de Bethesda (5) par l'apôtre saint Jean après l'Ascension du Sauveur' : que toutefois elle n'en était pas sûre. Quant aux autres femmes, elles furent toutes baptisées alors dans la piscine de Bethesda : elle s'en souvenait parfaitement. (4 juillet) Aujourd'hui, je vis plusieurs magistrats et prêtres venir vers Jean des endroits environnants et de Jérusalem : ils lui demandèrent qui il était, qui l'avait envoyé, ce qu'il enseignait et ainsi de suite : je le vis répondre avec une sévérité et une hardiesse extraordinaires, annoncer la venue prochaine du Messie, et les accuser d'endurcissement et d'hypocrisie. Ce ne fut portant pas encore cette fois qu'il employa l'expression de " race de vipères ". (7 11 juillet.) Je vis de trois endroits, Nazareth, Jérusalem et Hébron, envoyer vers Jean des troupes entières de magistrats et de pharisiens, chargés de l'interroger au sujet de sa mission il y avait en outre un grief contre lui, c'était d'avoir occupé de sa propre autorité le lieu où il baptisait. Beaucoup de publicains aussi étaient allés le trouver : il les avait baptisés et il avait fortement remue leur conscience. De ce nombre était le publicain Lévi, appelé plus tard Matthieu, fils d'un premier mariage d'Alphée, l'époux de Marie de Cléophas. Note 5: Marie, la Vierge très pure, conçue sans péché, n'avait pas besoin du sacrement de la régénération, mais elle le voulut afin de recevoir comme mère de tous les régénérés les sacrements de la nouvelle alliance, ainsi qu'elle avait fait auparavant ceux de l'ancienne, et afin d'avoir dans sa gloire suprême le caractère indélébile du sacrement de baptême. Il fut très touché et changea de vie. On le méprisait dans sa famille. Je vis Jean adresser à ces gens des avertissements sévères, en renvoyer beaucoup et en baptiser aussi beaucoup. Je vis aussi ces jours là les fils de trois veuves qui étaient apparentées entre elles et avec la sainte Famille par naissance et par mariage, venir au baptême de Jean Par la suite, après le temps de Jésus, on reprocha a leurs descendants de se vanter à tort de cette parenté ; elle était pourtant réelle. Ces trois veuves étaient des cousines germaines de la mère d'Elisabeth. Elles étaient parentes de la première femme d'Alphée : je ne sais pas si c'était par elles mêmes ou par leurs maris Deux de ces veuves étaient soeurs. L'une d'elles était la mère du fiancé de Cana, Nathanaël. lequel, devenu disciple, porta un nom qui ressemble à Amandor et auquel Jésus enfant, revenu de Jérusalem où il avait enseigné dans le Temple, prédit quelque chose, lors d'une fête qui eut lieu chez sainte Anne il lui dit aussi qu'il assisterait à son mariage (une de ces veuves est ailleurs appelée Séba et son fils Colaya, l'un des disciples : une seconde Léa ; une fois elle donna au fils de l'une d'elles le nom d'Eustache. Toutefois, les noms sont fréquemment changés). Elles avaient plusieurs fils : trois, je crois, qui furent les compagnons d'enfance de Jésus et se firent pêcheurs : ils devinrent aussi disciples. (4 19 juillet.) A Dothaim, où Jésus avait calmé les possédés furieux, des pa'ens et des juifs vivaient mêlés ensemble depuis le temps de la captivité de Babylone. Les pa'ens avaient leurs idoles et un autel pour les sacrifices su : une colline dans le voisinage. Maintenant les juifs, excités par tout ce qui se disait de la venue prochaine du Messie, lequel devait venir de Galilée, ne voulaient plus tolérer les pa'ens dans leur voisinage. Ce bruit avait été répandu là à la suite d'un voyage de Jean dans ce pays, et il avait été propagé par ceux qu'il avait baptisés. un prince voisin, résidant à Sidon, avait envoyé des soldats pour protéger les idolâtres et Hérode en envoya aussi pour contenir le peuple. Ces soldats étaient des gens de toute espèce. Je vis qu'étant à Callirrhoé, près d'Hérode, ils lui dirent qu'ils voulaient d'abord se faire baptiser par Jean. Ce n'était guère qu'un calcul de leur part, ils voulaient par là obtenir plus de considération parmi le peuple. Hérode leur répondit qu'il n'était pas précisément nécessaire de se faire baptiser par Jean, et que comme il ne faisait pas de miracles, il n'y avait pas lieu de lui reconnaître une mission. Il ajouta que du reste ils pouvaient prendre des informations à Jérusalem. Je les vis ensuite à Jérusalem. Ils s'adressèrent à trois autorités différentes pour se renseigner, et je vis par là qu'il y avait trois sectes différentes. Cela se passa dans la cour du tribunal où Pierre renia le Seigneur. Plusieurs personnages siégeaient là pour juger, et il s'y trouvait beaucoup de monde. Les prêtres leur dirent d'un ton moqueur qu'ils pouvaient faire comme ils l'entendraient, que cela était tout à fait indifférent. Je vis ensuite une trentaine de ces soldats près de Jean : il les réprimanda sévèrement, comme s'ils eussent été incorrigibles. C'est pourquoi Jean après leur avoir vivement reproché leur hypocrisie, n'en baptisa qu'un petit nombre dans lesquels il vit quelques bonnes dispositions. Il y a une grande affluence de peuple à Ainon. Pendant plusieurs jours, Jean ne baptisa pas, mais il prêcha avec beaucoup de force et de vivacité. De nombreuses troupes de juifs, de samaritains et de pa'ens se tenaient séparées les unes des autres sur les collines et sur les chaussées, les uns à l'ombre, les autres en plein air, autour de l'endroit où Jean enseignait, et ils l'écoutaient. Ils étaient autour de lui par centaines ; ils venaient pour l'entendre prêcher et recevoir le baptême, après quoi ils se retiraient. une fois entre autres je vis plusieurs pa'ens et d'autres personnes qui étaient venues de l'Arabie et de pays encore plus à l'orient. Ils conduisent avec eux des ânes et des moutons de grande taille. Ils ont des parents dans le pays. Ils sont venus ici nu passent par ici, et ils sont allés voir Jean. Il y eut une longue délibération au sujet de Jean, dans le grand conseil de Jérusalem. Neuf hommes furent députés près de lui par trois autorités différentes. Anne envoya Joseph d'Arimathie, le fils aîné de Siméon et un prêtre qui était chargé de l'inspection des victimes offertes en sacrifice. On envoya aussi trois membres du conseil et trois simples particuliers. Ils devaient demander à Jean qui il était et l'inviter à se rendre à Jérusalem. Si sa mission était légitime, disait on, il aurait dû d'abord se présenter au temple. Ils trouvaient à redire à l'étrangeté de son costume, et aussi à ce qu'il baptisait des Juifs, tandis qu'ordinairement on ne baptisait que les pa'ens. Quelques uns croyaient que c'était Elle revenu de l'autre monde. André et Jean l'évangéliste sont près de Jean Baptiste. La plupart des futurs apôtres et beaucoup de disciples ont été maintenant le trouver, excepté Pierre, qui a été baptisé précédemment, et le traître Judas, qui toutefois est allé déjà chez les pêcheurs des environs de Bethsa'de, et s'est enquis de Jésus et de Jean. Lorsque les envoyés de Jérusalem arrivèrent près de Jean, il avait cessé de baptiser pendant trois jours, mais il venait de s'y remettre de nouveau. Les envoyés voulaient qu'il leur donnât audience : mais il leur dit d'attendre qu'il eût fini. Il leur répondit vertement et en peu de mots. ils lui représentèrent qu'il agissait de son autorité privée ; qu'il devait se présenter à Jérusalem et s'habiller d'une manière plus convenable. Lorsqu'ils se furent retirés, Joseph d'Arimathie et le fils de Simon restèrent près de Jean et se firent baptiser par lui. Il se trouvait là bien des gens qu'il ne voulait pas baptiser ; ceux là allèrent trouver les envoyés et l'accusèrent de partialité. Les futurs apôtres reviennent dans leur pays, parlent beaucoup de Jean et font plus d'attention à Jésus. Ils soupçonnent que c'est à lui que la prédication de Jean fait allusion. Joseph d'Arimathie, revenant à Jérusalem, rencontra Obed, cousin de Véronique, qui était attaché au service du temple. Il répondit à ses questions en lui racontant beaucoup de choses touchant Jean. Obed alla aussi se faire baptiser par Jean. Comme il était employé au temple, il resta parmi les disciples cachés de Jésus, lorsque plus tard, il vint à lui. Le 19 juillet, par une grande chaleur qui la fatiguait beaucoup, la narratrice se mit à rire d'une façon qui ne lui était pas ordinaire, et, comme on la questionnait, elle répondit : "J'ai vu Jean passer le Jourdain pour aller baptiser des malades. Je pensais qu'il devait avoir aussi chaud que moi. Il n'avait que son drap jeté autour du corps et son manteau sur les épaules. Il portait, suspendue d'un côté, une outre pleine d'eau pour le baptême, et, de l'autre, l'écuelle avec laquelle il y puisait. Beaucoup de malades ont été portés au bord du Jourdain, en face du lieu où Jean baptise, sur des litières et sur des espèces de brouettes. Ils n'étaient pas en état de passer l'eau sur le radeau, et ils l'ont fait prier de venir. il vint avec deux disciples. Il prépara une belle fosse séparée du Jourdain par une chaussée en terre. Il fit ce travail lui même, car il avait toujours une bêche avec lui. Il fit entrer l'eau par une rigole qu'il pouvait fermer, et il y ajouta l'eau baptismale qui était dans son outre. Il instruisit les malades et les baptisa ensuite : on les plaçait au bord de la fontaine, et il versait de l'eau sur eux Je le vois, après avoir baptisé les malades, revenir à Ainon sur la rive orientale du Jourdain. Une fois, pendant qu'il dormait couché dans sa cabane, je vis un ange venir à lui et lui dire qu'il devait aller de l'autre côté du Jourdain, près de Jéricho, parce que celui qui devait venir était proche, et qu'il devait le faire connaître. Je vis ensuite Jean et ses disciples, à l'endroit où il baptisait, près d'Ainon, défaire les cabanes de toile et descendre à quelques lieues plus bas sur la rive orientale du Jourdain, après avoir traversé une bourgade, ils passèrent le Jourdain et remontèrent un peu le long de la rive occidentale. Il y avait là des endroits où l'on se baignait, des fosses dont les parois étaient blanches et comme recouvertes de maçonnerie, avec un canal qu'on ouvrait et qu'on fermait à volonté, communiquant avec le Jourdain qui, en cet endroit n'avait pas d'îles. Il m'a été montré qu'à cette époque les hommes étaient disposés comme ils le sont à présent. ( Du 25 juillet au 14 août. ) Le 25 juillet dans l'après midi, la narratrice, tout en sommeillant, dit d'une façon toute na've, dans son patois : " Maintenant, je vais trouver Jean, l'homme qui est près du Jourdain : il fait meilleur là qu'ici. " Plus tard, elle dit ce qui suit : " L'endroit où l'on baptise est près du Jourdain, entre Jéricho et Bethagla. Jean annonce l'approche du Messie. Il y a là une centaine d'hommes, des disciples et plusieurs pa'ens. Les uns travaillent à disposer le lieu et les cabanes, les autres écoutent ce que dit Jean de la venue prochaine du Messie. " " On comprend mal les choses quand on croit qu'il baptisa près de Bethabara (6) qui est de l'autre côté du Jourdain ; ce qui est dit, "qu'il baptisa près de Bethabara au delà du Jourdain, équivaut à ceci : en face de Bethabara, en remontant le fleuve, à deux lieues environs de Jéricho et de Bethagla. "Cette seconde place consacrée au baptême est sur la rive occidentale du Jourdain et Bethabara est un peu plus bas, sur la rive orientale. Note 6 : Ce Bethabara est le même lieu qui est appelé Bethanie au delà du Jourdain, dans Saint Jean, 1,28. Il y a environ cinq milles d'Allemagne (dix lieues) d'ici à Jérusalem. Le chemin direct y conduit par Bethanie, à travers un désert. On passe devant une hôtellerie qui se trouve un peu en dehors de la route. Il y a ici un très joli pays entre Jéricho et Bethagla. L'eau du Jourdain est belle ; elle est si claire quand on la laisse reposer. Dans plusieurs endroits, elle a même une odeur agréable, parce qu'il y a une quantité de boissons fleuris sur le bord et que les lieurs tombent dans l'eau. Parfois le fleuve est si bas et si exigu qu'il est à peine visible. Je vois près des bords des trous profonds creusés dans les rochers J'aime tant à être dans la Terre Promise, mais je ne sais jamais dans quelle saison on est. Quand nous sommes ici en hiver. Là tout est déjà en fleurs ; et, quand nous sommes en été, la seconde moisson fleurit déjà. il y a aussi une saison où le ciel est très nébuleux et où il pleut beaucoup. Il y a dans le pays des montagnes au haut desquelles il fait très froid, et, quand on se tourne d'un autre côte, tout est vert et plein de soleil La montagne où Jésus jeûna n'est qu'à quatre lieues de la première grotte de Jean. Cette montagne est très sauvage et très élevée, et il y a dans les rochers des trous si profonds, que j'ai toujours peur d'y regarder. Le second désert où Jean séjourna, a huit lieues de tour. Lorsqu'il creusa la fontaine, il embellit aussi sa grotte ; elle était très spacieuse. (Elle faisait souvent de ces observations naives). J'ai vu encore apporter toute sorte de choses ne l'endroit où l'on baptisait, près d'Ainon ; on arrange tout pour le mieux. On portait aussi des malades sur des lits. Plusieurs événements de l'Ancien Testament ont eu lieu dans cet endroit. C'est ici qu'elle a divisé les eaux du fleuve avec son manteau, et qu'il l'a traversé avec Elisée, lequel a fait la même chose à son retour. Elisée s'est aussi reposé ici. C'est encore ici que les enfants d'Israël ont passé le fleuve. On envoie à Jean, de Jérusalem, des gens du temple, des pharisiens et des sadducéens ; car il est maintenant en deçà du Jourdain et quelques lieues plus près de Jérusalem qu'auparavant. Il a appris leur arrivée par l'ange et il rendra témoignage de Jésus. Vers le soir, déjà, six députés de Jérusalem sont venus au Jourdain. Ils avaient envoyé un courrier devant eux, et fait dire à Jean de se rendre auprès d'eux à un endroit du voisinage. Jean ne s'inquiéta pas d'eux, et continua à baptiser et à enseigner. Il leur fit répondre par leur courrier que s'ils voulaient lui parler, ils pouvaient venir le trouver. Ils vinrent donc eux mêmes, mais Jean ne s'aboucha pas avec eux ; il continua à baptiser et a prêcher : ils entendirent sa prédication et se retirèrent. Quand il eut fini, il leur donna rendez vous sous un hangar ou sous une tente que les disciples avaient dressée. Jean s'y rendit accompagne de ses disciples et de plusieurs autres personnes, et ils lui adressèrent différentes questions, lui demandant s'il était ceci ou cela. Je le vis toujours faire des réponses négatives. Ils demandèrent aussi qui était cet homme dont on parlait. Il existait, disaient ils, d'anciennes prophéties, et maintenant le bruit courait parmi le peuple que le Messie était venu. Jean répondit qu'il s'était levé parmi eux quelqu'un qu'ils ne connaissaient pas ; que pour lui, il ne l'avait jamais vu, mais qu'avant sa naissance, il lui avait commandé de préparer ses voies et de le baptiser. Ils n'avaient qu'à venir à un moment qu'il indiqua (dans trois semaines, je crois) : alors celui dont il parlait serait ici pour recevoir le baptême. Il parla encore avec beaucoup de sévérité, et leur dit qu'ils n'étaient pas venus pour se faire baptiser, mais pour espionner. Ils lui répondirent qu'ils savaient maintenant qui il était, qu'il baptisait sans mission, qu'il n'était qu'un hypocrite en habits grossiers, etc., etc. Après quoi ils se retirèrent. Bientôt après il vint encore des envoyés du grand conseil de Jérusalem, cette fois au nombre de vingt. Ils étaient de toute profession ; il y avait parmi eux des prêtres avec des bonnets, de larges ceintures et de longues bandes suspendues au bras, à l'extrémité desquelles il y avait comme de la fourrure. Ils lui dirent avec beaucoup d'insistance qu'ils étaient députés par le grand conseil tout entier ; qu'il devait comparaître devant lui pour s'expliquer sur sa vocation et sa mission. s'il n'obéissait pas au grand conseil, disaient ils, c'était une marque qu'il n'avait pas de mission... J'entendis Jean leur dire nettement qu'ils n'avaient qu'à attendre, que celui qui l'avait envoyé viendrait bientôt à lui. Il désigna Jésus clairement, disant qu'il était né à Bethléem, qu'il avait été élevé à Nazareth, qu'il s'était enfui en Egypte, etc. Il ne l'avait jamais vu, ajoutait il. Ils lui reprochèrent d'être d'intelligence avec lui, de communiquer avec lui par des messagers. Jean répondit qu'il ne pouvait pas montrer à leurs yeux aveuglés les messagers qu'ils s'envoyaient réciproquement ; que ces messagers n'étaient pas visibles pour eux. Je vis les envoyés le quitter très mécontents. Il vient de tous les côtés de nombreuses troupes d'hommes, pa'ens et juifs. Hérode aussi envoie souvent des émissaires pour écouter Jean et lui rapporter ensuite ce qu'il a dit. Maintenant tout est beaucoup mieux arrangé à l'endroit où se donne le baptême. Jean et ses disciples ont dressé une grande tente où les malades et les gens fatigués sont réconfortés, et où l'on fait aussi des instructions. Ils chantent des cantiques : je les ai entendus chanter un psaume sur le passage des enfants d'Israël à travers la mer Rouge. Il se forme là successivement comme une petite ville de cabanes et de tentes. Elles sont couvertes en partie avec des peaux, en partie avec des joncs. Il y a là un grand passage d'étrangers venant de l'extrémité du pays où habitent les trois rois. Ils ont beaucoup de chameaux et d'ânes, et de beaux chevaux fringants. C'est toujours dans cet équipage qu'ils vont en Egypte. Ils ont tous établi leur camp autour du lieu où Jean baptise, ils écoutent ses prédications et reçoivent le baptême. D'ici ils se rendent en troupes à Bethléem. Non loin de la grotte de la crèche, en face de la plaine des Bergers, se trouvait un puits portant le nom d'Abraham. Ce patriarche avait demeuré avec Sara dans cette contrée. Etant malade, il avait éprouvé un violent désir d'avoir de l'eau de ce puits, et quand on lui en apporta dans une outre, il surmonta son désir pour honorer Dieu, s'abstint de boire, et fut récompensé par une guérison instantanée. Ce puits dut sa naissance à un miracle, mais je l'ai oublié. Il était difficile d'y puiser de l'eau, à cause de sa grande profondeur. Il y a un grand arbre à côté, et près de là est la grotte où est enterrée Maraha, nourrice d'Abraham, qui était très âgée, et qu'il conduisait avec lui sur un chameau. C'est un lieu de pèlerinage pour les juifs pieux, de même que le mont Carmel et le mont Moreb. Les trois rois aussi sont venus prier là. Il n'y avait pas encore beaucoup de Galiléens près de Jean, excepté ceux qui devinrent plus tard disciples de Jésus. Il vient plus de monde du pays d'Hébron : il y a aussi beaucoup de pa'ens. C'est pour cela que Jésus, dans ses courses à travers la Galilée, exhorte si vivement ses auditeurs à aller au baptême de Jean. (28 30 août.) à une petite lieue de distance de l'endroit où Jean avait coutume de baptiser, se trouvait celui où il enseignait. C'était un lieu sacré pour les Juifs à cause des souvenirs qui s'y rattachaient. Il était entouré de murs comme un jardin. Dans l'intérieur étaient des cabanes couvertes de jonc, appuyées aux murs ; au milieu se trouvait une pierre de forme oblongue terminée par des pans coupés à l'une de ses extrémités. Elle était à la place où les Israélites, après avoir passé le Jourdain, avaient déposé pour la première fois l'arche d'alliance et avaient célébré une fête d'actions de grâces. Au dessus de cette pierre Jean avait dressé pour sa prédication une grande tente soutenue par du clayonnage et couverte de roseaux. Sa chaire à prêcher était appuyée à la pierre. il enseignait là devant tous ses disciples lorsqu'Hérode arriva, mais il ne se dérangea pas pour lui. Hérode était à Jérusalem avec la femme de son frère qui l'y avait rejoint en compagnie de sa fille Salomé, âgée d'environ seize ans. Il désirait l'épouser et il avait demandé inutilement au sanhédrin de déclarer que ce mariage était illicite : ce qui l'avait mis en lutte avec le sanhédrin. Il craignait la voix publique et voulait apaiser le peuple par une décision de Jean le prophète. Il s'imaginait que Jean, pour gagner ses bonnes grâces, se prononcerait en sa faveur. Je vis Hérode avec Salomé, la fille d'Hérodiade, les femmes de celle ci et une suite d'environ trente personnes se diriger en grand cortège vers le Jourdain. Il était assis sur un char ainsi que les femmes. Il avait envoyé un messager à Jean. Mais celui ci ne voulait pas qu'il vint à l'endroit où il baptisait, jugeant qu'un tel homme avec sa troupe de femmes et ses suivants, profanerait la sainte cérémonie. Il discontinua donc le baptême, se rendit avec ses disciples au lieu où il enseignait et y parla en termes très sévères de l'affaire sur laquelle Hérode voulait avoir son avis. Il dit qu'il lui fallait attendre celui qui devait venir après lui, qu'il ne baptiserait plus longtemps ici, qu'il devait faire place à celui dont il était le précurseur. Il parla contre Hérode de telle façon que celui ci vit bien que ses intentions lui étaient connues. Hérode lui fit remettre un gros rouleau qui contenait l'exposé de son affaire. On le déposa devant Jean, car il ne voulait pas souiller en le touchant sa main consacrée à baptiser. Sur quoi je vis Hérode se retirer fort mécontent avec sa suite. Il résidait encore alors aux bains de Callirrhoé, à quelques lieues de l'endroit où Jean baptisait. Il avait laissé des gens de sa suite avec le rouleau d'écritures, pour engager Jean à en prendre connaissance, mais ce fut inutilement. Jean revint au lieu du baptême. Les femmes étaient magnifiquement habillées, mais assez décemment. Madeleine avait quelque chose de plus original dans ses ajustements. Il y a maintenant une fête de trois jours, près de la pierre de l'arche d'alliance, où est la tente de Jean. Je ne sais plus bien si c'est en mémoire du passage du Jourdain par les Israélites ou si c'est à quelque autre occasion. Les disciples de Jean ornent le lieu de la fête avec des arbres, dès guirlandes de feuillage et des fleurs. Pierre, André, Philippe, Jacques le Mineur, Simon et Thaddée se trouvent là ainsi que plusieurs autres futurs disciples de Jésus. Ce lieu n'avait pas cessé d'être un lieu sanctifié aux yeux des Juifs pieux, toutefois on l'avait un peu oublié et négligé. Jean l'avait remis de nouveau en honneur. Je vis le précurseur et quelques uns de ses disciples revêtus d'habits sacerdotaux. Jean portait sur un habit de dessous de couleur grise, un vêtement blanc, long et large, attaché autour du corps par une espèce d'écharpe, marquetée de jaune et de blanc : il y avait des franges à l'extrémité. Sur les deux épaules étaient fixées comme deux pierres précieuses longues et recourbées sur chacune desquelles étaient les noms de six tribus d'Israël. Sur sa poitrine était un pectoral carré, jaune r et blanc, maintenu aux quatre angles par des chaînettes d'or et où étaient incrustées douze pierres précieuses de différentes couleurs sur lesquelles étaient gravés les noms des douze tribus. Sur ses épaules était jetée une espèce d'étole, marquetée de jaune et de blanc, avec des franges aux extrémités. Au bas de la robe pendaient des boutons de soie jaune et blanche. Sa tête était découverte, mais il avait sous ses vêtements autour du cou une pièce d'étoffe légère qu'il pouvait ramener sur sa tête comme un capuchon et qui alors descendait en pointe sur le front. Devant la pierre de l'arche d'alliance était un petit autel, pas tout à fait carré, creusé au milieu et recouvert d'un grillage. Au dessous était un trou destiné à recevoir les cendres et aux quatre coins des tuyaux creux recourbes en forme de cornes. Plusieurs disciples étaient là avec des vêtements blancs et de larges ceintures, habillés comme les apôtres dans leurs premières réunions pour la célébration du culte divin. Il y avait une espèce de sacrifice auquel ils prenaient part comme servants. On encensait et Jean brûlait sur l'autel de l'encens qui était portatif, des herbes et des aromates de diverses espèces, et, aussi, je crois, des épis de blé. Tout était orné de guirlandes de fleurs et de feuillage. Il y avait là une multitude d'aspirants au baptême. Les habits sacerdotaux et les ornements que portait Jean Baptiste avaient été préparés à l'endroit où il baptisait actuellement. Il y avait là des femmes qui vivaient à part au bord du Jourdain : on ne leur donnait pas le baptême, mais elles confectionnaient toute sorte d'objets et de vêtements de cérémonie pour le précurseur. (La narratrice explique dans deux récits postérieurs d'où venaient les pierres précieuses.) En tout Jean semblait inaugurer une nouvelle Eglise. Il ne faisait plus ici de ces travaux manuels auxquels il se livrait auparavant et pour baptiser il mettait une longue robe blanche. Il n'y eut que le lieu où fut baptisé Jésus, qu'il prépara encore de ses propres mains avec l'aide de ses disciples. Je vis Jean prêcher longtemps et avec beaucoup de feu au lieu où l'on célébrait la fête. Il se tenait au haut de sa tente revêtu de ses ornements sacerdotaux. Cette tente était construite avec des galeries à l'entour comme les tentes des rois en Arabie. Tout autour, au pied des murs dont ce lieu était entouré, on avait disposé des sièges en amphithéâtre pour les auditeurs dont le nombre était immense. Il parla du Sauveur qui l'avait envoyé et qu'il n'avait jamais vu, et du passage à travers le Jourdain. Il y eut encore dans la tente une offrande d'encens et on y brûla des herbes. Je vois qu'on avait annoncé depuis Maspha jusque dans la Galilée, que Jean ferait aujourd'hui une grande instruction et il était venu une grande quantité de monde Les esséniens étaient presque tous présents. La plupart des assistants avaient de longs vêtements blancs. Je vis arriver des hommes et des femmes. Ces femmes étaient assises sur des ânes que les hommes conduisaient, entre des paniers où étaient des colombes. Les hommes présentaient des pains comme offrandes et les femmes des colombes. Jean se tenait derrière une grille et recevait les pains : on enlevait la farine qui s'y était attachée au dessus d'une longue table à claire voie et on les empilait sur des plats : après quoi Jean les bénissait et les élevait comme pour l'oblation. Ces pains étaient en suite coupés en morceaux pour être distribués et les gens qui venaient de plus loin en recevaient davantage comme en ayant plus besoin. La farine enlevée de dessus lés pains et ce qui tombait quand on les coupait allait se rendre dans une boîte placée sous la table à claire voie : tout cela était brûlé sur l'autel. On distribua aussi les colombes que les femmes avaient apportées. Cela dura bien une demi journée. Toute la fête, le sabbat compris, avait duré trois jours. Je vis après cela Jean reprendre ses occupations dans l'endroit où il baptisait. (23 et 24 août.) Je vis aujourd'hui Jean faire près du Jourdain (7) à ses disciples une instruction sur l'approche du moment où le Messie recevrait le baptême. il dit encore qu'il ne l'avait jamais vu, etc. Il ajouta : " En témoignage de ce que je dis, je vais vous faire voir la place où il sera baptisé. Note 7 : La narratrice communiqua l'apparition de l'île du baptême comme ayant eu lieu avant la fête de trois jours : mais l'éditeur l'a placée ici parce qu'elle se lie à ce qui suit immédiatement : Voici que les eaux du Jourdain vont se diviser et qu'il va se former une île. "Au même instant je vis les eaux du fleuve se diviser et une petite île blanche de forme ovale paraître à la surface de l'eau, sans en dépasser le niveau. C'est là la place où les Israélites traversèrent le Jourdain avec l'arche d'alliance : c'est aussi là qu'Elie divisa les eaux du fleuve avec son manteau. Je vis une grande émotion parmi les assistants : ils prièrent et entonnèrent des cantiques de louange. Jean et les disciples placèrent de grosses pierres dans l'eau, et par dessus des arbres et des branches : ils firent ainsi un pont jusqu'à l'île, et jetèrent dessus de petits cailloux blancs. Quand il fut fini, l'eau put passer au dessous en murmurant. Jean et ses disciples plantèrent douze petits arbres autour de l'île : ils étaient vivants, et ils les réunirent par le haut de manière à former un berceau de feuillage. Je les vis en outre placer entre ces arbres des arbrisseaux qui croissaient en abondance sur les bords du Jourdain. Ils avaient des fleurs blanches et rouges, et des fruits jaunes avec une petite couronne comme des nèfles. C'était très agréable à voir : car les uns étaient en fleurs, les autres étaient chargés de fruits. L'île qui s'était élevée sur l'eau à l'endroit où l'arche d'alliance s'était arrêtée lors du passage du Jourdain paraissait rocailleuse ; comme le lit du fleuve était plus découvert et les eaux plus basses qu'au temps de Josué, je ne sais pas si l'eau se retira ou si l'île s'éleva lorsque Jean l'appela pour être le lieu du baptême de Jésus. A gauche, en avant du pont non pas au milieu de l'île, mais plus près du bord, on fit une fosse dans laquelle monta une eau limpide ; quelques marches y conduisaient, et au niveau de la surface de l'eau était une pierre rouge et polie, de forme triangulaire, sur laquelle Jésus devait se tenir pour le baptême. à droite de cette pierre était un beau palmier couvert de fruits, autour duquel Jésus avait le bras passé lorsqu'il fut baptisé. Le bord de la fontaine était orné d'une marqueterie élégante : tout ce travail était très bien exécuté. Je le décrirai une autre fois plus en détail. Lorsque Josué conduisit les Israélites à travers le Jourdain, je vis que les eaux du fleuve étaient très gonflées. L'arche d'alliance fut portée bien en avant du peuple jusqu'au Jourdain. Parmi les douze hommes qui l'accompagnaient et la portaient (j'ai su les noms de tous), se trouvaient Josué, Caleb et un autre dont le nom ressemblait à Eno'. Au bord du Jourdain, l'un d'eux se plaça tout seul à la partie antérieure de l'arche, que deux hommes portaient auparavant : les autres la soutenaient par derrière. Quand il mit les pieds de l'arche dans le fleuve, l'eau qui arrivait s'arrêta aussitôt : elle se gonfla, parut consistante comme de la gelée, et s'accumula en s'élevant comme une montagne, à une telle hauteur, qu'on pouvait la voir d'auprès de la ville de Zarthan, qui est assez éloignée. Les eaux de la partie intérieure s'écoulèrent vers la mer Morte, et l'on put traverser à pied sec le lit du fleuve. Les Israélites qui étaient éloignés de l'arche d'alliance allèrent passer plus bas. L'arche d'alliance fut portée par les lévites dans le lit du fleuve jusqu'à une place où quatre pierres quadrangulaires se trouvaient posées régulièrement. Elles étaient d'un rouge sanguin, et de chaque côté étaient deux rangées de six pierres triangulaires, aussi polies que si on les eût taillées ; il y en avait par conséquent douze de chaque côté. Les douze lévites déposèrent l'arche sur les quatre pierres du milieu, et se placèrent, six à droite, six à gauche, sur les douze pierres triangulaires les plus rapprochées, lesquelles étaient enfoncées en terre par la pointe. Plus loin étaient douze autres pierres, également triangulaires, très grandes et très grosses, avec des veines de différentes couleurs, qui formaient sur quelques unes des figures et des fleurs. Josué choisit dans les douze tribus douze hommes qu'il chargea de porter ces pierres sur le bord et de les déposer sur deux rangs, pour servir de souvenir, à une place assez éloignée, près de laquelle un village se forma plus tard. Les noms des douze tribus et ceux des porteurs y furent gravés. Les pierres sur lesquelles se tenaient les lévites étaient plus grosses, et quand ils quittèrent le lit du fleuve elles furent dressées, la pointe en haut. Les pierres portées à terre n'étaient plus visibles du temps de Jean. Je ne sais pas si elles avaient été enterrées ou détruites pendant la guerre. Jean avait dressé sa tente au milieu d'elles.(8) Plus tard, une église fut bâtie là, par Sainte Hélène, à ce que je crois. Note 8 : Peut être le séjour de Jean en ce lieu fut il cause qu'elles furent remises au jour ou restaurées plus tard : saint Jérôme notamment raconte que sainte Paule étant allée à Galgala, y avait vu ces pierres. Eusèbe aussi en fait mention dans son Onomasticon à l'article Galgala, comme existant encore de son temps. Quelques Pères de l'Eglise croient que lorsque Jean Baptiste dit aux pharisiens : " Dieu peut de ces pierres susciter des enfants à Abraham, " il leur montra ces mêmes pierres. Jean Moschus, dans la vie des anciens Pères, livre II, chapitre XI, dit que l'abbé Agiodule avait obtenu de Dieu la grâce de voir les douze pierres érigées dans le Jourdain. La place où l'arche d'alliance avait reposé dans le Jourdain est précisément le lieu de la fontaine baptismale de Jésus sur l'île qui a paru récemment au dessus des eaux. Lorsque les Israélites et l'arche d'alliance eurent traversé le fleuve, et que les douze pierres eurent été dressées, le Jourdain recommença à couler comme auparavant. (29 août.) Le niveau de l'eau de la fontaine baptismale était à une telle profondeur, que du bord le baptisé ne pouvait être vu plus bas que la poitrine. L'enfoncement n'était pas très marqué, et le bassin octogone, qui avait environ cinq pieds de diamètre, était entouré d'un rebord coupé en cinq endroits, sur lequel il y avait place pour plusieurs personnes. Cette pierre triangulaire où se tenait le Christ n'était pas, autant qu'il m'en souvient, une des douze pierres dont j'ai parlé : je crois que Jean l'avait apportée. Il y avait aussi quelque chose de mystérieux qui s'y rapportait : elle était veinée et fleurie. Les douze autres pierres étaient de couleurs différentes : elles étaient également veinées et fleuries d'une façon variée. Elles étaient plus grosses que celles qui avaient été apportées sur le rivage. J'ai un souvenir qui n'est pas bien précis en ce moment, mais qui me fait croire que ces pierres étaient des pierres précieuses, ayant quelque chose de mystérieux, et que Melchisédech les avait posées là toutes petites à une époque où le Jourdain n'y coulait pas encore. C'est ainsi qu'en divers lieux il avait posé comme des fondements qui longtemps couverts de terre ou cachés sous des marécages, parurent ensuite au jour et devinrent des lieux sanctifiés par quelque événement. Plus tard, dans une autre occasion, Anne Catherine compléta cette communication en ces termes : "Melchisédech prit possession de plusieurs points de la Terre Promise, qu'il désigna d'une certaine façon. il mesura l'emplacement de la piscine de Bethesda. Avant que Jérusalem existât, il posa une pierre à l'endroit où le temple devait s'élever. Je le vis également semer comme des grains de blé les douze pierres qui étaient dans le Jourdain, et où se tinrent les prêtres avec l'arche d'alliance lors du passage des enfants d'Israël : à la longue elles prirent des accroissements. On laissa reposer tranquillement ces précieuses pierres, considérées comme sacrées : plus tard, elles cessèrent d'être visibles et elles furent oubliées. à une époque postérieure elles furent employées à orner des églises. Je crois aussi me rappeler, quoique confusément, que c'était de ces douze pierres ou de celles qui avaient été portées sur le rivage qu'étaient tirées les pierres précieuses qui ornaient le pectoral du précurseur à la fête actuelle. (Du 3 au 17 septembre.) Après la fête, lorsque Jean était revenu de nouveau à l'endroit où il baptisait, je vis encore s'approcher de lui une vingtaine de personnes envoyées par toutes les autorités de Jérusalem, pour lui demander compte de sa façon d'agir. Ils attendirent à l'endroit où la fête avait été célébrée et mandèrent Jean près d'eux ; mais il ne vint pas. Je les vis le jour d'après à une petite demi lieue en avant du lieu du baptême. Jean ne les fit pas même entrer dans l'enceinte formée par les nombreuses habitations qui se trouvaient à l'entour. Cette enceinte était fermée par une barrière. Je vis Jean, après son travail, s'entretenir avec eux en se tenant à une certaine distance. Il leur parla comme à l'ordinaire, ne répondit pas à toutes leurs interrogations et s'en référa à celui qui devait bientôt venir à son baptême, qui lui était supérieur et qu'il n'avait jamais vu. Je vis ensuite Hérode assis sur un mulet dans une espèce de caisse, et aussi la femme de son frère avec laquelle il vivait, assise également sur un mulet : elle était pompeusement et effrontément ajustée et portait un vêtement ample et plissé. Ils vinrent ainsi, accompagnés de quelques serviteurs, jusque dans le voisinage du lieu où Jean baptisait. La femme resta à quelque distance sur son mulet. Hérode descendit e s'approcha davantage ; et Jean se tenant assez loin, entra en pourparler avec lui. Hérode discuta avec Jean : car celui ci avait prononcé récemment une excommunication contre lui après qu'il lui eut présenté l'écrit qui contenait l'apologie de son union illicite. Jean l'avait exclu de toute participation au baptême et au salut apporté par le Messie, à moins qu'il ne renonçât à ces relations scandaleuses. Hérode lui demanda s'il connaissait un certain Jésus de Nazareth dont on parlait dans le pays, s'il recevait des messages de sa part, si c'était là celui dont il annonçait toujours la venue : il le priait de lui dire ce qui en était parce qu'il voulait s'adresser à lui pour son affaire. Jean répondit que celui dont il parlait l'écouterait aussi peu que lui même ; qu'il était et restait un adultère, qu'il pouvait exposer son cas à qui il voudrait, que ce ne serait jamais autre chose qu'un adultère. Alors Hérode lui ayant demandé pourquoi il ne s'approchait pas de lui davantage et pourquoi il lui criait toujours de loin ce qu'il avait à lui dire ; Jean répondit : " vous étiez déjà aveugle et l'adultère vous a rendu plus aveugle encore : plus je m'approcherais de vous, plus votre aveuglement augmenterait : mais quand je serai en votre pouvoir, vous ferez une chose dont vous vous repentirez, etc. C'était une prophétie touchant sa mort. Hérode et la femme quittèrent Jean très irrités. J'ai vu ces derniers jours Jean dans une grande tristesse. Il semble que sa mission touche à sa fin, car il n'agit plus avec la même ardeur autour de lui. J'ai vu qu'il était très tourmenté On est venu successivement tantôt de Jéricho, tantôt de Jérusalem, tantôt de la part d'Hérode pour le chasser du lieu où il baptise. Ses adhérents occupaient un grand espace autour de cet endroit et ils y étaient comme campes. Maintenant on exigeait de Jean qu'il se retirât de là et allât de l'autre côté du Jourdain. Je vis même des soldats d'Hérode enlever sur une certaine étendue les enceintes qu'avaient établies les auditeurs de Jean et les en chasser. Toutefois ils ne sont pas encore venus jusqu'à la tente dressée par Jean, entre les douze pierres. Je vis le précurseur triste et abattu s'entre tenir à ce sujet avec ses disciples. Il désirait ardemment que Jésus vînt au baptême, car, disait il, il devait se retirer devant lui et aller de l'autre côté du Jourdain ; il ajoutait qu'après cela il ne resterait plus longtemps parmi eux. Ses disciples étaient très attristés de ces discours et ne voulaient pas qu'il les abandonnât. (Du 19 au 26 septembre.) Il est venu ces jours ci près de Jean, plusieurs troupes de ceux que Jésus a dernièrement exhortés à aller au baptême : Parménas et ses parents sont arrivés ici de Nazareth ; il y a aussi des publicains. Je vis Jean, lorsqu'il apprit que Jésus allait arriver. se mettre à baptiser avec une nouvelle ardeur. L'île où est la fontaine baptismale de Jésus, est maintenant toute verdoyante : personne n'y va, si ce n'est Jean quelquefois. Il a coupe le pont qui y mène. Après les dernières agressions d'Hérode et des Juifs Jean était tout abattu. Il était touchant de voir combien il perdait de sa véhémence à mesure que Jésus approchait : mais maintenant qu'il a eu de ses nouvelles il a repris un nouveau courage. Je crois que Jésus pourra être ici dans huit à dix jours. Plusieurs troupes de gens qui avaient suivi Jésus et qu'il avait congédiés à Nazareth, sont arrivées près de Jean. Je les ai vus dans sa tente parler de Jésus avec lui. Il y avait une telle ardeur dans son amour pour lui, qu'il s'impatientait presque de ce que Jésus ne disait pas plus clairement qu'il était le Messie. C'était un sentiment tout à fait humain. Pendant qu'il baptisait ces gens de la suite de Jésus, il reçut l'assurance certaine que le Sauveur approchait, car une nuée lumineuse descendit sur lui et il eut une vision où Jésus lui apparut avec tous ses disciples autour de lui. Depuis ce moment Jean est plein d'une joie indicible et enflammé d'un désir ardent : il regarde toujours à l'horizon pour voir si le Seigneur n'arrive pas. |