LE CHRIST ET L'ÉGLISE I.
Il y a d'abord la lumière éternelle et substantielle, rayonnement de la gloire divine, émanation du Feu primordial et consumant, dans laquelle vivent, se meuvent et connaissent, ces Intelligences séparées que nous appelons les Anges. Il y a ensuite la lumière essentielle que Dieu, à l'origine des Temps, fit jaillir de l'espace vide par un acte de sa toute puissance : « Fiat lux », pour illuminer les natures spirituelles qu'il devait enfermer dans la forme d'Adam avant de les admettre les unes après les autres au don de la grâce sanctifiante (2). Il y a enfin la lumière astrale qui, née, à la suite de la faute d'Adam d'une dissociation de la lumière essentielle, devint le principe de la matérialité et, par une chute progressive et constante, s'est agrégée en des formes toujours plus denses et matérialisées jusqu'à ce qu'elle soit descendue au nadir même de la matérialité par la génération de mondes purement physiques que n'éclaire plus qu'une lumière également physique et matérielle. Au delà, il n'y a plus, aux confins de l'Univers, in inferis que la lumière noire qui, pleinement obscurcie et cessant d'éclairer, est un feu qui brûle pour l'éternité, sans les consumer, tous les êtres qui y sont plongés. Il convient de noter ici que la lumière essentielle ne s'est pas tout entière dissociée en lumière astrale ; car, pour sauver une partie de son oeuvre créatrice, Dieu plaça à la porte du Paradis, après qu'il en eût chassé Adam et sa compagne, un Ange à l'épée flamboyante, séparant ainsi par une barrière de feu la lumière essentielle de la lumière astrale, les Jardins.de vie des mondes de chute. Et le fait que l'Ange porte une épée de feu est symbolique : il signifie que les paradis seront désormais séparés des mondes de chute par un feu consumant, mais purificateur. C'est à travers ce feu purificateur. (purgatoire) que devront désormais passer, pour rentrer dans les jardins de vie, les esprits qui auront fait leur salut dans les mondes physiques, c'est-à-dire qui auront été lavés dans le sang du Christ des souillures de la chute (3). A la diversité et à la hiérarchie des lumières qui constituent la substance du réel correspondent la diversité et la hiérarchie des plans qui composent le Cosmos. C'est en dehors de ces mondes d'émanation, qui forment le Royaume de Dieu ou plan divin, qu'à l'origine des Temps YAHVÉ créa la lumière essentielle et, dans la splendeur de cette lumière, organisa et développa la richesse et la magnificence des jardins de vie ou Paradis où il installa le premier Homme pour y être le Roi de la création et le Père d'une multitude d'esprits, appelés comme lui à jouir de la vision béatifique dans l'immortalité. Tel devait être le Royaume de l'Homme ou plan spirituel. La faute de l'homme. pervertit l'uvre de Dieu et, dans la lumière essentielle dissociée en lumière astrale, l'Homme, désormais soumis à la loi de la pesanteur, descendit de chute en chute et de monde en monde la pente douloureuse de ses existences successives, jusqu'à ce qu'il ait atteint dans les mondes physiques le terme de sa déchéance. Ainsi se sont formés l'un après l'autre, à travers les millénaires, les mondes de chute qui composent dans leur ensemble le plan astral et dont le monde physique n'est que l'aspect le plus bas et le plus matérialisé (4). Au delà de ce plan physique s'étend le monde des ténèbres extérieures où toute lumière s'est éteinte et où il n'y a plus d'espérance pour ceux qui y sont descendus : car ce n'est pas un monde de purification, comme le Purgatoire, ni un monde d'épreuves, comme le plan physique, mais Lin lieu de châtiment (5). Gabriel HUAN. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- (1) cf. Marcel COURTINES, La lumière principe du monde, Paris. (2) Sur la formation de cette lumière essentielle, cf. les aperçus profonds de 0. V. de MILOSZ, Les Arcanes, Paris, 1927 P. 87 et suiv. (3) « Tous seront salés par le feu » ( Marc. IX, 48). (4) Que le monde physique soit un monde de chute, c'est-à-dire corrompu par la faute originelle et satanisé, cela résulte clairement du fait qu'avant de les employer à ses sacrements l'Église prend soin d'exorciser tous les éléments qu'elle emprunte à la nature : eau, huile, sel, etc.... L'Église ne va-t-elle pas jusqu'à exorciser le catéchumène avant de le baptiser ? (5) Cet article, (ainsi que ceux qui suivront dans nos prochains numéros), est extrait d'un ouvrage en préparation . «LES VOIES QUI MÈNENT A ROME », et qui complétera les remarquables aperçus de l'auteur sur « LE CHRIST DE L'ÉGLISE INTÉRIEURE ». |