CHAPITRE XI.
POURQUOI LES ESPRITS ANGÉLIQUES SONT NOMMÉS
GÉNÉRALEMENT VERTUS CÉLESTES.
Argument. - On rappelle,
1, que les purs esprits ne sont pas nommés Vertus céléstes par la même raison qu'ils sont appelés Anges;
2, que ce nom de Vertus, qui leur est appliqué à tous indistinctement, n'établit pas la confusion des ordres divers et des facultés particulières; niais que tous étant essence, vertu et activité, peuvent être appelés Essences, Vertus et Puissances.
I. Maintenant il importe de considérer pour quelle raison nous avons coutume de donner indistinctement à toutes les natures angéliques le nom de vertus célestes (1). Or, on ne saurait faire ici le raisonnement qu'on a fait plus haut (2); on ne saurait dire que le rang des vertus soit le dernier parmi les hiérarchies invisibles, et que, comme les puissances supérieures possèdent tous les dons communiqués aux puissances inférieures, et non pas réciproquement, il en résulte que toutes les divines intelligences doivent être appelées vertus, et non pas séraphins, trônes et dominations. Ce raisonnement ne vaut pas, disons-nous; car les anges , et au-dessus d'eux les archanges, les principautés et les puissances ne sont placéspar la théologie qu'après les vertus, et, par suite ne participent pas à toutes leurs propriétés; et toutefois nous les nommons vertus célestes aussi bien que les autres sublimes esprits.
II. Néanmoins, en généralisant ainsi cette dénomination noirs n'entendons pas confondre les propriétés des différents ordres; seulement, comme par la loi sublime de leur être on distingue dans tous les purs espris l' essence la vertu et l' acte, si tous ou quelques- uns d'entre eux sont dits indifféremment essences ou vertus célestes, à but estimer que cette locution désigne ceux dont nous voulons parler précisément par l' essence ou la verni qui les constitue. Certainement, après les distinctions si nettes que nous avons établies, nous n'irons pas attribuer aux natures moins parfaites des prérogatives suréminentes, et troubler de la sorte l' harmonieux accord qui règne parmi les rangs des anges; car, ainsi qu'on là déjà remarqué plus d'une fois, les ordres supérieurs possèdent excellemment les propriétés des ordres inférieurs; mais ceux-ci ne sont point armés de toute la perfection des autres, qui, recevant sans intermédiaire les splendeurs divines, ne les transmettent aux natures moins élevées qu'en partie et au degré où elles en sont capables.