LA GENÈSE UNIVERSELLE IX. - LA LOI ET LA FOI
Les anges, chargés des bénédictions d'En-Haut, descendent sans cesse vers ceux qui doivent recevoir l'héritage du salut, les protégeant, les inspirant et les consolant. Mais cet héritage, ces bénédictions, c'est Jésus qui les donne. Les anges ne sont que les ministres et les ambassadeurs de Dieu. Ils ne sont que cela, qu'on les envisage dans leur descente vers les créatures ou dans leur remontée éblouissante vers le Royaume du Père, apportant devant son Trône,, en un unique et formidable hommage, l'hymne d'amour des constellations impolluées et les prières maladroites et touchantes des humanités déchues et repentantes. Ils demeurent distincts et distants du Verbe divin, quelle que soit leur splendeur à nos yeux, comme le fini est distinct et distant de l'infini. Lorsque le Verbe est montré à Saint Jean, des millions d'anges se prosternent devant le Sauveur du Monde en criant : « L'Agneau qui est immolé dès la fondation des siècles est digne de recevoir louanges, honneur, gloire et force aux siècles des siècles ». Après cette différence établie entre Jésus et les anges, on peut comprendre l'infinie différence existait entre la Loi, qui simplement défend le péché et le fait connaître, et la Foi en Christ, qui ôte le péché et arrache la créature à la mort, en lui donnant la vie éternelle. La loi ne pouvait faire cette uvre, aussi ce ne sont que les anges qui ont ordonné la loi ; et comme cette loi était promulguée, le péché était imputé et par conséquent puni, en celui qui enfreignait le commandement. L'homme devait concevoir quelle était la dureté de la chaîne du péché ; et par cette idée, il devait le haïr avec l'espérance qu'il serait détruit ; puisque les Écritures révélées, qui débutaient avec la loi, confirmaient les promesses faites à Abraham en raison de sa foi, tabernacle où rayonne l'amour. Ces vérités révélées annonçaient le Libérateur de la mort, à ceux qui ne s'endormaient pas dans la foi de ce Libérateur. L'Écriture confirme que ce sont les anges qui ont donné la loi : « Vous qui avez reçu la loi des anges et ne l'avez pas gardée ». Et ailleurs : « Moïse est celui qui fut au désert avec l'ange qui parlait sur la montagne de Sinaï », et reçut les paroles de vie pour nous les donner. Mais les paroles de vie ne sont pas la vie, il faut que cette vie germe par la Foi. Jésus-Christ a apporté non seulement des paroles de vie, mais des paroles éternelles, vivantes et opérantes, parce qu'il est lui-même le Livre écrit par dehors et par dedans ; par dehors comme modèle à imiter ; par dedans comme Fils unique de Dieu et par conséquent infini comme le Père. L'Évangile est aussi supérieur à la loi, que le principe est au-dessus de l'effet. Jésus est lui-même l'Évangile qu'il a prêché, il est les paroles qu'il a dites, puisqu'il est la Parole du Père. Jésus réside, en esprit, dans le livre qui contient ses paroles et ses actions. Ces paroles vivantes germent et se développent en nous par la foi. Elles s'y transforment en Amour et en Lumière selon le degré de cette foi. Quiconque lit le livre et en met les préceptes en pratique, c'est-à-dire les fait passer dans sa propre vie temporelle, apprend peu à peu ce qu'est la naissance du Verbe intérieur et comment la Vie divine se révèle progressivement à celui qui cherche en toutes choses à faire la Volonté du Père. Les paroles de la loi sont des paroles médiates de vérité ; les paroles de l'Évangile sont immédiates ; c'est la vérité qui les sème dans le cur de l'homme, sans jamais gêner sa liberté. Saint Paul nous dit « que nous devons nous attacher avec plus de soin à la doctrine de Jésus-Christ, afin que nous ne soyons pas comme l'eau qui s'écoule et se perd » ; et pour prouver cette perte, l'apôtre met en parallèle la loi et l'Évangile : « si la loi qui a été annoncée par les anges est demeurée ferme, si toutes les violations, toutes les désobéissances ont reçu la juste punition qui leur était due, si tous les transgresseurs ont essuyé cette terrible malédiction, prononcée dans la loi de Dieu ; « maudit soit qui ne persévère pas dans les paroles de la loi, pour les faire. » (Deut. XXVII, 26) ; alors « comment pourrions-nous l'éviter, cette malédiction, si nous négligeons l'Évangile du véritable salut qui, ayant été premièrement annoncé par le seigneur, a été confirmé parmi nous, par ceux qui l'ont entendu. » Dans tous les siècles, Jésus a eu une Église intérieure, dont les membres saluèrent de loin Celui qui devait réaliser la promesse de vaincre la mort et de lui arracher son aiguillon, qui est le péché. Dans tous les temps, le Christ a eu ses adorateurs en esprit et en vérité, et ces adorateurs sont les pierres vivantes de la Jérusalem céleste. Les disciples de Jésus sont toujours défendus contre les puissances invisibles, car sur son signe la milice céleste vient et environne ses amis ; elle campe autour d'eux et les couvre de son bouclier. Il y a toujours eu sept mille hommes qui n'ont jamais fléchi le genou devant Baal. À ses véritables disciples le Christ dit : « Croyez-moi que je suis en mon Père et mon Père en moi » ; or, cette doctrine sublime, c'est la consommation de la foi, c'est l'amour même, cet amour qui unit tout : Le Fils sortant éternellement de son Père et y rentrant, c'est là la génération éternelle, à laquelle l'homme régénéré participe par Jésus. Croire que le divin Sauveur est en son Père et son Père en lui, c'est la victoire de l'amour. Ailleurs Jésus nous montre le connu pour nous élever à l'inconnu : « Croyez en moi à cause des uvres que je fais, qui rendent témoignage de Moi » ; le Christ est l'uvre éternelle de Dieu. « Nul ne vient à mon Père que par moi » ; pour la raison que Jésus est la seule vie qui s'écoule du Père. La foi réelle appartient à Jésus, C'est lui Seul qui peut nous en faire don, et ce don est le grain de sénevé de la parabole. C'est l'homme ainsi régénéré qui a seul le droit le droit de dire que ce n'est plus lui qui vit, mais Jésus qui vit en lui ; et de même que le Père qui vit en son Fils unique réalise ses uvres, de même Jésus opère les uvres du nouvel homme : « Quoi que vous demandez en mon nom, je le ferai. » Nous ne pouvons être amis de Dieu que dans son Fils qui nous recrée à son image. La Foi c'est justement cette mystérieuse attraction qui jette notre moi, enfin purifié, vers son Maître, comme le fer épuré est attiré par l'aimant. Ceux qui restent attachés à la loi ne peuvent recevoir la vie que donne l'amour ; ils ne connaîtront que la justice. Or, qui se sent assez pur pour oser négliger la Miséricorde ? Dans l'homme spirituel qui ouvre son cur à Celui qui frappe sans cesse, la mort doit être vaincue par l'Agneau sans tache. Alors, délivré de son emprise, l'homme n'a plus qu'à se confier avec amour à Celui qui a détruit sa chaîne d'esclave. Jésus se laisse voir par l'esprit de la foi, comme il fait sentir à l'âme sa divine présence ; mais si la foi témoigne tout, cependant elle ne voit rien, selon l'idée que nous nous faisons de la vue. La foi est bien au-dessus de la vision, qui n'embrasse que quelques objets ; et par la vision, on peut se laisser séduire à l'apparence, « l'ange des ténèbres peut se transformer en ange de lumière ». On peut chasser les démons, faire des miracles au nom de Jésus-Christ et ne pas être dans la foi de Jésus, et même être rejeté de lui ; mais quand on croit en Jésus-Christ, il fait ses uvres en nous. Ce ne sont pas les miracles extérieurs qui surprennent et étonnent l'esprit, qui le ramènent et le changent. Les miracles sont l'amorce de la Miséricorde ; mais l'uvre intérieure et secrète, l'uvre qui détruit le mal en nous, celle qui brise les obstacles, qui assouplit la volonté et prépare la transformation, et qui en l'opérant relie l'homme à Dieu ; cette uvre-là, c'est Jésus-Christ vivant dans l'homme qui la fait. Le Christ est l'esprit que Dieu nous a donné, pour nous délivrer de la chair et pour remplir notre destination, qui est de devenir un avec l'Être suprême, éternellement distinct de Lui, éternellement un avec lui, par la vertu de l'amour.
Madame D...
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